Universités ivoiriennes : M. Ouattara, nous demandons plus de livres et moins de sang

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Abidjan – Les étudiants demandent des livres, des salles d’étude, des chambres et des laboratoires ; le gouvernement réplique par des coups de matraques, du gaz lacrymogène, une descente de police nocturne et des arrestations arbitraires.

Depuis quelques jours déjà, les étudiants de Côte d’Ivoire manifestent pour simplement obtenir des conditions de travail adéquates. Contrairement à ceux de France, ils ne manifestent même pas pour de l’emploi. Dans un pays penché, où le pouvoir pense avoir droit de vie et de morts sur ses esclaves -pardon, la population-, la répression, la violence et la prison restent la voie privilégiée du gouvernement pour résoudre les conflits sociaux.

Que demandent les étudiants ? Une dizaine de points font l’objet de revendications, tels que le non équipement des universités en bibliothèques, laboratoires et connexion wifi, le déguerpissement des étudiants des cités universitaires au profit des jeux de la francophonie, la succession des années blanches en sciences médicales, la non publication du rapport d’enquête sur les inscriptions litigieuses en 2014 et 2015, le racket relatif aux frais d’inscription, le nombre insuffisant d’enseignants à Daloa et Korhogo, la mauvaise application du système Lmd etc.

Pour avoir osé appeler à une grève pour décrier cela, une trentaine d’entre eux ont été arrêtés, passés à tabac lundi et sont à ce jour toujours en détention à la préfecture de police d’Abidjan. Pis ! La police a opéré un raid sur la cité du campus de Cocody hier à 23 heures et a violemment réveillé et brutalisé les étudiants qui se trouvaient dans leurs chambres, après avoir lancé des gaz lacrymogènes. Certains, effrayés, ont sauté dans le vide par les fenêtres, pendant qu’une pluie de coups de pied, de coups de poing et de coups de matraques arrosaient les moins rapides, filles comme garçons. L’on dénombre de nombreux blessés et également des cas de vol et de destruction des effets personnels.

J’ai rencontré certains étudiants grévistes. Je les ai vus se battre pour leurs droits, marcher sous le soleil, braver les matraques des policiers, risquer leur liberté et même leurs vies.

Leurs revendications ne sont pas politiques. C’est le cri de cœur d’une jeunesse pour qui la lutte reste aujourd’hui la seule alternative. En s’attaquant avec tant de violence aux étudiants, le gouvernement Ouattara veut annihiler notre regard critique, nos exigences de perpétuelle d’amélioration et de remise en cause du système.

«Ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons», disait Victor Hugo. Alassane Dramane Ouattara, qui a étudié aux Etats-Unis et fait carrière dans des institutions internationales, semble avoir développé un concept opposé et s’attelle, depuis bientôt 6 ans, à enfermer les étudiants en prison pendant qu’il détruit l’Ecole ivoirienne. L’on peut s’interroger si c’est à l’université de Philadelphie ou au Fmi qu’il apprit cette façon de faire.

Les universités ne sont pas des lieux autour desquels l’on construit des clôtures, à l’entrée desquels l’on met des jets d’eau ou à l’intérieur desquels l’on fait patrouiller des loubards revêtus d’uniformes de policiers. Les universités sont des endroits où l’on cultive le savoir, l’ouverture d’esprit et aussi la recherche, la pratique et l’innovation. Les universités sont des places où foisonnent les laboratoires, les bibliothèques, les nouvelles technologies, les centres de recherche. Que le gouvernement fasse l’économie des matraques et des gaz lacrymogènes pour investir dans l’équipement des universités car, qu’il le veuille ou non, une jeunesse responsable et consciente des enjeux d’aujourd’hui et de demain est en train d’émerger en Côte d’Ivoire.

Armel Bohui | LIDER News |

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