Togo. La fin du monopole de la puissance brute

0

BIPOLARISATION AU TOGO ET GESTION PARITAIRE DU POUVOIR : La fin du monopole de la puissance brute

Paradoxalement et suite à une succession de mobilisation grandissante du peuple togolais, le Collectif Sauvons le Togo (CST) a réussi le tour de force d’ouvrir la voie à une bipolarisation politique au Togo. Il y a ceux qui soutiennent « mordicus » le système militaro-civil de Faure Gnassingbé avec les partis comme les ex-RPT, UNIR, AGO, avec l’appui de plus en plus visible de  la partie non-républicaine des forces armées togolaises (FAT), et de l’autre, tout un assemblage de partis politiques et d’organisations de la société civile, de plus en plus déterminés à ne plus faire confiance aux élections au Togo pour l’avènement d’une alternance politique capable d’opérer une rupture avec la gouvernance corrompue du régime de Faure Gnassingbé.

Cet assemblage constitue ainsi l’émergence d’une l’alternative politique, qui peut dans les circonstances actuelles envisager objectivement le succès de 45 ans de lutte à l’issue du bas de fer déterminé engagé avec le pouvoir. En effet, Faure Gnassingbé qui aurait pu être au cœur de la solution au problème du Togo devient la pierre angulaire du problème togolais. Aussi son départ négocié n’est plus une hypothèse d’école, surtout si les militaires républicains se décident eux aussi à « sauver le Togo ».

1.      FAURE GNASSINGBE S’ENTÊTE ET CHOISIT LA METHODE PAC

Le CST porte bien sûr des revendications qui auraient pu être considérées comme recevables par le pouvoir. Mais le traitement infligé aux manifestations pacifiques, lors des événements politiques des trois derniers mois au Togo – tant à Lomé mais aussi à Kara et dans l’ensemble du pays – ont clairement démontré que  le pouvoir de Faure Gnassingbé ne contrôle pas une grande partie de son armée non-républicaine. A ce titre, il est obligé de négocier au point que des propositions de négociations formulées par l’ex-premier ministre avec le CST ont été purement et simplement rejetées. Cela a abouti au changement de gouvernement. Mais au lieu d’entamer un processus de négociation, c’est la méthode PAC « Pied au cul » qui a prévalu, c’est-à-dire le choix entre le « faux dialogue », le non-respect de la Constitution par les interdictions de manifester et pire la violence par l’interventionnisme unilatéral des forces du désordre et de l’infiltration.

La réaction a été directe. Le CST, grâce à l’ampleur des manifestations et l’adhésion de la population sur l’ensemble du territoire togolais a compris que Faure Gnassingbé n’est pas prêt à négocier quoi que ce soit. Celui-ci tente de jouer la montre dans l’espoir de se perpétuer au pouvoir pour renouveler son mandat encore au moins deux fois en 2015 et 2020. Alors face à cette perspective, les populations qui souffrent de l’augmentation de la pauvreté et de la confiscation des richesses par les oligarchies rentières autochtones sévissant dans la périphérie de Faure Gnassingbé – sans compter les soutiens des secteurs privés occidentaux -, ont choisi non plus de se contenter de s’indigner, mais par la détermination dans l’action politique citoyenne, de témoigner à Faure Gnassingbé qu’il n’a pas le monopole de la puissance. La Constitution togolaise dans son article 150, permet à tout citoyen togolais d’objecter face à des injustices criardes et au non-respect du droit. Le CST a choisi donc comme stratégie de se faire entendre par la désobéissance civile. Même les femmes sont appelées au secours pour sauver le Togo en optant pendant une semaine au moins pour l’abstinence, une forme originale de la grève du sexe. 1

2.      QUI CREE LA CONFUSION AU TOGO ? CHERCHEZ BIEN !

Le Togo d’aujourd’hui n’a plus besoin de tous les Togolais et Togolaises pour mener le changement. Il existe en effet aussi, parmi la population et plus particulièrement parmi ceux qui poursuivent des objectifs autres que le bien commun du peuple togolais, des individus et entités morales qui travaillent contre l’avènement de la démocratie et donc de la liberté au Togo. Le peuple togolais doit pouvoir les identifier pour déjouer leurs plans et se méfier de leur technique d’autocensure et surtout d’orientation mensongère sous des apparences de «braves gentilles personnes » à l’écoute des citoyens. Certains responsables Togolais se sont spécialisés avec brio, dans l’organisation du retard de l’alternance et l’organisation de la perpétuation au pouvoir de Faure Gnassingbé, pourvu qu’eux-mêmes ou leurs affidés puissent trouver grâce financièrement auprès du système. Ce sont des agents qui travaillent contre l’autodétermination du peuple togolais. Leur seul et unique but est de créer la confusion et faire patienter le peuple en promettant des lendemains moins pénibles pourvu que la continuité soit assurée. Une partie des ecclésiastiques rentre dans cette catégorie et croit que personne ne peut les démasquer…

Aussi, malgré les conditions difficiles, l’ensemble des partis de l’alternance semblent avoir enfin compris que c’est la bipolarisation de la vie politique, la division de l’armée avec l’adhésion de la partie républicaine aux objectifs du CST, du FRAC et des partis et organisations de la société civile amis, qui construiront le Togo de demain. Il importe donc d’avoir d’ores et déjà des pistes de sortie de crise qui reposeront sur des approches paritaires. La bipolarisation sous forme d’un « bloc uni » prenant en compte la diversité et les spécificités de toutes les composantes, faisant face de manière déterminée et sans compromission au pouvoir UNIR/AGO de Faure Gnassingbé, devrait faciliter cette approche.

3.    LA BIPOLARISATION SUPPOSE DES PROPOSITIONS DE SORTIE DE CRISE

Suite aux multiples  propositions du CST, il apparaît irresponsable et peu pragmatique de ne pas faire des propositions de sortie de crise. Il faut que les partis politiques apprennent à devenir plus démocratiques dans leur mode de fonctionnement pour permettre une meilleure lisibilité des objectifs poursuivis par leur chef officiel ou officieux. C’est d’ailleurs le fait de n’avoir jamais imposé la parité dans les décisions avec le gouvernement togolais par le passé qui a fait voler en éclats toutes les tentatives passées de l’Opposition et des « faux dialogues » orchestrés par les régimes Gnassingbé – Eyadéma père et Faure fils….  Ne pas en prendre conscience serait une erreur. Les modalités de prise de décision doivent être transparentes lors des négociations à venir pour éviter que l’armée ne se lève pour un coup d’Etat impromptu que d’aucuns pourraient croire salutaire…. Le spectre – de retour difficile à la démocratie et la réconciliation – du Mali  ou de la Côte d’Ivoire ne doit jamais être perdu de vue. Il importe aussi de ne pas exclure du mouvement de contestation et d’alternance les chefs traditionnels ainsi que les personnalités désignées par les villages et reconnues comme telles, qui sont tout aussi légitimes pour aider le mouvement de l’alternance politique. A ce titre, les partis politiques ne sont pas les seuls représentants des populations, ce d’autant qu’une grande partie de la population ne se reconnait pas toujours dans ces partis politiques. Comme la démocratie et la vérité des urnes n’ont jamais fonctionné au Togo, il est difficile de se faire une idée précise de la représentativité réelle des partis politiques du pouvoir et de l’opposition. Mais certains partis sont incontournables dans leur lutte pour l’avènement de l’alternance politique.

4.      LA DIASPORA INDESIRABLE CAR NE PAYANT PAS D’IMPÔTS AU TOGO…

Le Gouvernement togolais refuse toujours de recenser sa Diaspora alors que celle-ci contribue à réduire le niveau de pauvreté du pays par l’envoi régulier et conséquent d’argent. L’argument fallacieux du gouvernement repose sur le fait que la Diaspora togolaise ne paye pas d’impôts au Togo et donc n’est pas digne d’être recensé. Cet argument fait fi des règles fiscales en vigueur dans le plus grand nombre de pays dans le monde qui ne retirent jamais arbitrairement la citoyenneté. Le Togo de l’après Faure Gnassingbé, sera mieux inspiré de signer des conventions fiscales de réciprocité que des accords de défense. Ceux qui ne veulent pas recenser la Diaspora ne sont pas tous originaires du réseau de Faure Gnassingbé. Certains de nos compatriotes de la Diaspora se contentent de vivre comme des « citoyens immatériels », dès lors que la position d’éternel opposant semble plus confortable. Pourtant, sans recensement, la Diaspora ne sera pas sur les listes électorales, n’aura pas de ministère attitré encore moins les moyens de mieux se défendre à l’étranger. Pire, les Togolais et Togolaises de l’extérieur sont considérés par le régime de Faure Gnassingbé comme des citoyens aux rabais.

Les Diasporas de nombreux pays africains donnent des exemples réussis d’intégration de leur Diaspora. La diaspora togolaise doit pouvoir mettre son expertise à disposition sans qu’il ne s’agisse systématiquement de lui demander de mettre la main à la poche… poche qui est d’ailleurs de plus en plus trouée compte tenu des difficultés dues à la crise économique et au chômage en augmentation sur le marché de l’emploi en Occident.

5. RECOMMANDATIONS :

Le CVU-Togo-Diaspora recommande que :

5.1   suite à la bipolarisation des mouvements politiques au Togo, une plateforme officielle regroupe clairement l’ensemble des forces de l’alternative afin d’obtenir une adhésion massive et déterminante du peuple togolais, du nord au sud, de l’est à l’ouest sans oublier la Diaspora ;

5.2   le CST accepte de discuter le principe des modalités de prise de décision dans le cadre de futures négociations avec un pouvoir sous pression. Les règles relatives à la prise de décision doivent être lisibles et expliquées au peuple togolais afin d’éviter le syndrome des « traitres »  et/ou des « arrivistes de la désobéissance civile » qui ont systématiquement sous-estimé la capacité du peuple togolais à se mobiliser pour défendre son autodétermination ;

5.3   le principe de la Parité de représentation : c’est-à-dire que les mouvements de l’alternance face aux forces de préservation du pouvoir puissent se rencontrer dans le cadre de « concertations nationales » où l’ensemble des forces vives du pays seront graduellement appelées à offrir des solutions de sortie de crise ;

5.4   selon les principes de l’article 150 de la Constitution togolaise, les forces de l’alternance doivent s’employer à toucher la conscience chloroformée des éléments républicains des forces armées togolaises (FAT) afin qu’ils viennent en majorité appuyer, par les moyens appropriés, les légitimes revendications de la majorité des Togolais ;

5.5   suite à la charge des forces de désordre de Faure Gnassingbé, contre les forces de la désobéissance civile sur la place de l’indépendance du Togo, alors que les Chancelleries occidentales en poste au Togo avaient obtenu le transfert du sit-in de la place « Deckon » vers la « place de l’indépendance », la communauté internationale arrête de croire à un régime qui les « roule régulièrement dans la farine de manioc » ;

5.6   le Gouvernement actuel du Togo reconnaisse publiquement ses erreurs et surtout prenne conscience que dès lors que les forces du « désordre » que sont les militaires non-républicains ne sont pas autorisés à charger les manifestants, la paix règne au Togo. Donc, c’est bien Faure Gnassingbé qui est à la source du problème Togolais ;

5.7   pour permettre au Togo de retrouver sa sérénité d’antan, Faure Gnassingbé doit prendre conscience de cet état de fait et offrir en guise de « solution », sa sortie politique pour un Togo apaisé où la vérité des urnes retrouvera ses lettres de noblesse et permettra la construction de la démocratie, la vraie, celle fondée sur la vérité des urnes !

 

Dr Yves Ekoué AMAÏZO                      Coordinateur général


François FABREGAT                                            Directeur de la Communication

 

 

Partager

Laisser une réponse