Qui a tué Hugo Chavez ? Les câbles Wikileaks parlent !

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Wikileaks a encore frappé. Je suppose que les Etats-Unis vont monter la pression d’un cran contre Julian Assange et Bradley Manning.

Dans un câble secret du Département d’Etat daté du 9 novembre 2006, et récemment publié par Wikileaks, l’ancien ambassadeur des Etats-Unis au Venezuela, William Brownfield, expose les grandes lignes d’un plan global visant à déstabiliser le gouvernement du feu Président Hugo Chavez. Le câble commence ainsi :

Au cours de ses 8 ans au pouvoir, le Président Chavez a systématiquement démantelé les institutions de la démocratie et de la gouvernance. Les objectifs du programme USAID/OTI au Venezuela visent à renforcer les institutions et espaces démocratiques à travers une coopération non partisane avec de nombreux secteurs de la société vénézuélienne.

USAID/OTI = United States Agency for International Development/Office of Transition Initiatives. Le dernier est l’un des nombreux euphémismes employés par les diplomates américains entre eux et avec le reste du monde. Ils prétendent que cela signifie une transition vers la « démocratie ». Ce que cela signifie en réalité, c’est la transition du pays ciblé qui refuse obstinément de coopérer avec les desseins de l’impérialisme américain vers un pays tout à fait disposé (ou cédant sous la pression) à coopérer avec les desseins de l’impérialisme américain.

OTI soutient le programme « le Droit à Défendre les Droits de l’Homme » de Freedom House (FH) à hauteur de $1,1 million. Dans le même temps, à travers Development Alternatives Inc. (DAI), OTI a aussi effectué 22 donations à des organisations de défense des droits de l’homme.

Freedom House est un des plus anciens outils du gouvernement US pour effectuer des transitions vers la « démocratie » ; on peut dire qu’il assimile la « démocratie » et les « droits de l’homme » à la libre entreprise. Development Alternatives Inc. (DAI) est l’organisation qui a envoyé Alan Gross en mission à Cuba pour participer à l’opération de changement de gouvernement du gouvernement US.

OTI parle d’actions pour améliorer « la situation des droits de l’homme qui se détériore » au Venezuela. Vous ne connaîtriez pas par hasard un gouvernement prêt à claquer quelques millions de dollars pour améliorer la situation sérieusement détériorée des droits de l’homme aux Etats-Unis ? On pourrait commencer par les surveillances 24/24h et les pièges inadmissibles tendus à de nombreux jeunes « terroristes » coupables de délits d’opinion.

Les partenaires d’OTI forment des ONG à devenir plus militants.

Difficile d’énoncer plus clairement que les Etats-Unis s’arrogent le droit de financer et de s’ingérer dans toute activité sociale, économique ou politique qui peut saboter tout programme du gouvernement Chavez ou en donner une image négative. Le câble de l’ambassadeur US souligne :

OTI a touché directement environ 238.000 adultes à travers 3.000 forums, ateliers et sessions de formation qui promeuvent des valeurs alternatives et fournissent l’occasion aux militants de l’opposition d’interagir avec le noyau dur de chavistes, avec l’objectif de les éloigner progressivement du Chavisme. Nous avons soutenu cette initiative avec 50 donations qui se montent à plus de $1,1 million.

« Une autre stratégie clé de Chavez », poursuit le câble, « est sa tentative de diviser et polariser la société vénézuélienne en employant un langage de haine et de violence. OTI soutient des ONG locaux qui travaillent dans les places fortes chavistes et avec des dirigeants chavistes, pour contrer ce langage et promouvoir des alliances en travaillant ensemble sur des sujets importants pour toute la communauté. »

C’est là l’argument classique néo-libéral contre toute tentative de transformer une société capitaliste – ce sont les révolutionnaires qui provoquent la lutte des classes. Bien entendu, la lutte des classes existait déjà, et nulle part plus profonde et plus féroce qu’en Amérique latine.

OTI a financé 54 projets sociaux à travers tout le pays, pour plus de $1,2 million, ce qui permis à l’Ambassadeur de visiter des zones pauvres du Venezuela et de montrer la préoccupation des Etats-Unis pour le peuple vénézuélien. Ce programme provoque des confusions dans les rangs bolivariens et constitue une riposte aux tentatives de Chavez de désigner les Etats-Unis comme l’ « ennemi commun ».

C’est à se demander si cet ambassadeur (actuellement secrétaire adjoint au Département d’Etat) a eu la moindre influence sur les grandes marges de victoire de Chavez à chaque élection et les foules énormes qui ont constamment rempli les places publiques pour les saluer. Quand est-ce que de tels événements se sont-ils produits pour la dernière fois dans le propre pays de cet ambassadeur ? Où était la « préoccupation » de son pays « pour le peuple vénézuélien » pendant les décennies de régimes profondément corrompus et dictatoriaux ? L’ambassade de son pays au Venezuela à l’époque ne complotait rien qui ressemblait de près ou de loin à ce qui est décrit dans le câble.

Le câble récapitule la stratégie de l’ambassade ainsi :

1) Renforcer les institutions démocratiques

2) Infiltrer la base politique de Chavez

3) Diviser le camp chaviste

4) Protéger les intérêts économiques vitaux pour les Etats-Unis.

5) Isoler Chavez sur le plan international (1)

La mission officielle de l’OTI est de « soutenir les objectifs de la politique étrangère des Etats-Unis en aidant les partenaires locaux à promouvoir la paix et la démocratie en priorité dans les pays en crise » (2)

Remarquez le mot « crise ». Aux yeux de qui le Venezuela de Chavez était-il en « crise » ? Aux yeux des Vénézuéliens ou aux yeux de ceux qui possèdent et dirigent Etats-Unis, S.A. ?

Imaginez l’ambassade, une agence ou une ONG d’un pays tiers qui se comporterait comme l’ambassade US, l’OTI et les ONG au Venezuela. C’est pour ces mêmes raisons que le Président Poutine a récemment renforcé le contrôle sur les ONG étrangères. Évidemment, le gouvernement et les médias US ont parlé d’un retour à l’Union Soviétique.

Sous la pression du gouvernement vénézuélien, le bureau de l’OTI au Venezuela a été fermé en 2010.

Et en guise de conclusion, voici quelques mots de sagesse de Charles Shapiro, l’ambassadeur US au Venezuela entre 2002 et 2004, qui s’exprimait récemment sur les dirigeants vénézuéliens : « Je pense qu’ils croient vraiment que nous leur voulons du mal. » (3)

Les dernières menaces contre la vie sur terre.

Le mois dernier de nombreux commentateurs de politique étrangère ont marqué le 10eme anniversaire du bombardement et de l’invasion de l’Irak par les Etats-Unis. Ceux qui ont condamné ces ravages épouvantables infligés au peuple et à la société irakiens ont souligné que ce fut une grave erreur, puisque le dirigeant irakien Saddam Hussein en réalité ne possédait pas d’armes de destruction massive (ADM). C’est le même argument que l’on a entendu sans cesse au cours des dix dernières années dans la bouche de la plupart des opposants à la guerre.

Mais parmi les nombreux mensonges – explicites ou implicites – proférés autour de la guerre en Irak, le plus gros de tous est celui-ci : si Saddam Hussein avait été en possession de ces ADM, l’invasion aurait été justifiée ; que dans ce cas, l’Irak aurait bel et bien constitué une menace pour les Etats-Unis ou pour Israël ou pour tout autre pays tout aussi irréprochable, innocent et sacré. Néanmoins, je me dois de poser encore une fois la question : pour quelle raison Saddam Hussein aurait-il attaqué les Etats-Unis ou Israël, à part une envie irrésistible de se suicider ? Il n’avait aucune raison, pas plus que n’en ont les Iraniens aujourd’hui. Pas plus que n’avaient les Soviétiques pendant la Guerre Froide. Pas plus que les Nord-Coréens n’en ont eue depuis la dernière fois que les Etats-Unis les ont bombardés au début des années 50. Et pourtant, le mois dernier, le nouveau Secrétaire à la Défense, Chuck Hagel, a annoncé qu’il allait renforcer les défenses US contre une éventuelle attaque de la Corée du Nord (supposément dotée de l’arme nucléaire), par le déploiement de 14 batteries antimissiles supplémentaires en Alaska et en Californie pour un coût estimé de $1 milliard. Au temps pour le nouveau Grand Espoir Blanc. Mais est-il vraiment important de savoir qui occupe les postes les plus importants au sein de l’appareil de la politique étrangère des Etats-Unis ? Ou quel est son son sexe ou la couleur de sa peau ?

« Oui, mais », me rétorque-t-on souvent, « Saddam Hussein était tellement fou qu’il était capable de faire n’importe quoi ». Mais lorsqu’il était devenu évident à la fin de 2002 que les Etats-Unis avaient l’intention d’envahir l’Irak, Saddam a ouvert son pays aux inspecteurs de l’ONU bien plus qu’auparavant, offrant une coopération totale. Ce n’était pas le comportement d’un fou ; c’était le comportement d’un survivaliste. Il n’a même pas employé d’ADM lorsque l’Irak a été envahi une première fois par les Etats-Unis en 1991 (« la première guerre du Golfe »), alors qu’il en possédait très certainement à l’époque. De plus, le vice-président du pays, Tariq Aziz, est passé sur les principales chaines de télévision US pour rassurer le peuple américain et le monde que l’Irak ne possédait plus d’armes chimiques, bactériologiques ou nucléaires ; et nous savons désormais que l’Irak avait envoyé des émissaires de la paix au début de 2003 dans l’espoir d’éviter la guerre. Les dirigeants irakiens n’étaient pas fous du tout. A moins de croire qu’une opposition à la politique étrangère des Etats-Unis constitue une forme de folie. Ou de suicide.

On pourrait tout aussi bien dire que les dirigeants américains étaient fous pour avoir entrepris l’invasion de l’Irak au vu et au su des dizaines de millions de gens aux Etats-Unis et à l’étranger qui ont protesté, en suppliant Bush et son gang de ne pas déchaîner l’horreur. (Combien de manifestations y a-t-il eu pour soutenir l’invasion ?)

[Réponse : au moins une : 3000 personnes à Miami, organisée notamment par l’extrême-droite anticastriste locale – avec le soutien de leur égérie Zoé Valdés, la chouchou du maire « socialiste » de Paris – note « on n’oublie rien, nous » du traducteur]

Quoi qu’il en soit, les Etats-Unis n’ont pas envahi l’Irak à cause d’une menace par des ADM. Les dirigeants à Washington ne croyaient pas eux-mêmes que l’Irak possédait de telles armes en quantité ou puissance significatives. Une preuve parmi d’autres est le fait qu’ils n’auraient pas exposé des centaines de milliers de soldats sur le terrain.

On ne peut pas dire non plus que la simple possession de telles armes – ou la croyance en leur existence – pouvait constituer une raison suffisante pour attaquer, parce qu’à ce compte-là, les Etats-Unis devraient attaquer la Russie, la France, Israël et tous les autres.

Tout ce qui précède, je l’ai en grande partie déjà écrit dans mes articles antérieurs, dés 2003. Mais je crains de devoir le répéter pendant encore quelques années. Les mythes qui confortent la propagande officielle du gouvernement ont la vie dure. Les grands médias font semblant d’y croire, tandis que les officiels de la sécurité nationale prospèrent dessus pour s’attribuer une mission, pour obtenir des rallonges de budgets, et pour faire avancer leurs carrières. Le Washington Post a récemment écrit : « Après un an de pouvoir, le jeune dirigeant du pays, Kim Jong Un, s’est révélé être encore plus belliqueux que son père, qui a longtemps dirigé la Corée du Nord, à la grande déception des officiels US qui espéraient de nouvelles relations avec le régime. » (4)

Ben voyons. On les voit d’ici, les officiels américains, en train de secouer la tête tout en déclarant : « Mais que diable faut-il faire pour obtenir la confiance de ces Nord-coréens ? » Eh bien, ils pourraient commencer par mettre fin aux nombreuses sanctions internationales qu’ils ont imposées à la Corée du Nord. Ils pourraient cesser d’armer et de former les forces militaires de la Corée du Sud. Et ils pourraient cesser de se livrer à des provocations par des survols de leur territoire, en envoyant des navires dans leurs eaux territoriales, par des manœuvres militaires conjointes avec la Corée du Sud, l’Australie, et d’autres pays, dangereusement proches du Nord. Le Wall Street Journal a écrit :

La première démonstration de force a eu lieu le 8 mars, au cours d’un exercice US-Corée du Sud, baptisé Foal Eagle, où des bombardiers B-52 ont effectué des manœuvres à basse altitude. Quelques semaines plus tard, en plein jour, deux bombardiers B-52 qui avaient décollé d’une base aérienne dans le Missouri ont simulé un largage sur une batterie Nord-coréenne.

Les services de renseignement US, comme prévu, ont analysé les réactions du Nord. Après ces vols, le Nord a réagi comme le Pentagone et les services de renseignement l’avaient prévu, avec une rhétorique violente, en menaçant d’attaquer le Sud et les Etats-Unis.

Dimanche, les Etats-Unis ont envoyé deux F-22 en Corée du Sud, ce qui a provoqué une nouvelle réaction de colère de la par de la Corée du Nord. (5)

Les Etats-Unis pourraient arrêter de fantasmer sur un effondrement de la Corée du Nord, qui leur permettrait d’y implanter des bases militaires le long de la frontière chinoise.

Quant aux menaces fréquentes de la Corée du Nord… oui, c’est vrai, ils dépassent les Etats-Unis en termes d’agressivité, de mensonges et de stupidité. Mais leurs menaces ne sont pas à prendre plus au sérieux que l’attachement, sans cesse répété, des Etats-Unis pour la démocratie et la liberté. Lorsqu’il s’agit de faire du mal à d’autres peuples, les Nord-coréens ne jouent pas dans la même ligue que l’empire.

« Tout le monde craint une bavure et le déclenchement d’une guerre. Mais le sentiment partagé au sein du gouvernement américain est que les Nord-coréens ne déclencheront pas une guerre ouverte, » a déclaré un haut-officiel de l’administration Obama. « Ce qui les intéresse avant et par-dessus tout, c’est la survie du régime. » (6)

La souveraineté des Etats-Unis n’a jamais été confrontée à un véritable danger depuis les Britanniques en 1812.

Le Monde Merveilleux de la liberté d’expression

Ainsi donc, les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux ont banni la télévision iranienne de l’Amérique du nord et de plusieurs pays européens. En avez-vous entendu parler ? Probablement pas si vous ne recevez pas le bulletin électronique de PressTV, la chaîne d’information non-stop en anglais de la télévision iranienne. Selon PressTV :

La chaîne de cinéma iranienne, iFilm, ainsi que les stations de radio iraniennes, ont été bannies à leur tour afin d’épargner les yeux et les oreilles sensibles des Occidentaux, après le retrait de tous ces médias depuis le mois de février du satellite Galaxy 9 qui diffuse aux Etats-Unis et au Canada.

En décembre, la compagnie de satellite espagnole, Hispasat, a cessé de transmettre la chaîne iranienne en langue espagnole HispanTV. Hispasat est détenue en partie par Eutelsat, dont le Directeur général franco-israélien est accusé pour les récentes attaques contre les médias iraniens en Europe.

Le American Jewish Committee (AJC) a salué ces événements. Le directeur exécutif d’AJC , David Harris, a reconnu que son organisation était engagée depuis des mois dans des pourparlers avec les Espagnols sur les retransmissions des chaînes iraniennes. (7)

Une recherche poussée dans la base de données Lexis-Nexis (base de données des articles de presse parus dans le monde – NdT) révèle que pas un seul journal, radio ou agence de presse de langue anglaise n’a répercuté cette information depuis le 8 février. Sur Internet, Digital Journal en a parlé le 10 février.

Les Etats-Unis, le Canada, l’Espagne et la France font partie de ces pays qui brandissent fièrement leur attachement au concept consacré de la liberté d’expression. D’autres pays du « Monde Libre » sont probablement en train de leur emboîter le pas tandis que Washington renforce encore un peu plus les sanctions contre l’Iran.

Dans son livre classique 1984, George Orwell a défini la « double-pensée » comme « une capacité d’exprimer simultanément deux points de vue opposés, et d’accepter les deux. » Aux Etats-Unis, l’expression préférée accolée par le Ministère de la Vérité à une telle hypocrisie est « l’exception américaine », qui se manifeste par l’affirmation d’une mission d’inspiration divine ainsi que par l’affirmation d’un droit des Etats-Unis d’appliquer le deux-poids deux-mesures en sa faveur et de rejeter toute « équivalence morale ».

Le recours à des sanctions pour empêcher les médias étrangers de dire des choses que Washington a décidé ne devaient pas être dites est en fait une forme de progrès par rapport aux anciennes méthodes. Par exemple, le 8 Octobre 2001, au cours de la deuxième journée de bombardements de l’Afghanistan par les Etats-Unis, les émetteurs de la radio gouvernementale des Taliban Radio Shari furent bombardés. Peu après, le Secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, a justifié ces bombardements en déclarant : « Naturellement, on ne peut pas les considérer comme des médias libres. Ils sont les porte-voix des Taliban et de ceux qui hébergent des terroristes.  » (8) Et en Yougoslavie, en 1999, pendant le tristement célèbre bombardement de 78 jours de ce pays des Balkans qui ne représentait aucune menace pour les Etats-Unis, la télévision d’état Radio Television Serbia (RTS) fut visée parce qu’elle diffusait des choses que les Etats-Unis et l’OTAN n’aimaient pas (comme, par exemple, les horreurs provoquées par les bombardements). Les bombes ont tué de nombreux membres du personnel de la chaîne, et un des survivants a du être amputé des deux jambes pour le sortir des décombres. (9)

William Blum

http://williamblum.org/aer/read/115

 

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