L’immobilisme des dirigeants africains : Entre inertie et irresponsabilité sans bilans

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Le 30 janvier 2016, Robert Mugabe, le Président de la République du Zimbabwe, vient de terminer un an de présidence-tournante à la tête de l’Union Africaine. Le bilan ? Ni mitigé, ni mauvais, ni bon… Il faut convenir qu’il faut trouver un nouveau qualificatif pour résumer le bilan des Présidents africains pris collectivement, et plus particulièrement, ceux qui se voient confier la responsabilité de faire avancer quelques dossiers en un an à la tête de l’Union africaine. Alors, ce bilan, il est « comment » ? Difficile à résumer car Robert Mugabe a réussi le tour de force de se faire oublier par les pays occidentaux qui font la queue pour profiter des énormes ressources diamantifères de ce pays… en réalité, le bilan est « immobile », au sens africain.

2. DU PARIA AU SAUVEUR CONJONCTUREL : UN RÊVE DE CHEF D’ETAT AFRICAIN ?

Ce qu’il faut nécessairement retenir est que la considération et le traitement des Droits Humains fondamentaux par certains pays occidentaux, sont à géométrie variable. La Preuve ? Celle administrée par le Président iranien, Hassan Rohani, qui a été étonné de constater que dès que la couleur de l’argent iranien est réapparue dans les radars des pays occidentaux – lesquels commencent sérieusement à douter de la politique suivie par leurs banques centrales respectives -, il est soudainement passé du statut de « paria » à celui de « sauveur » conjoncturel d’une croissance atone et superficielle des économies américaine, japonaise et de l’union européenne, pour ne citer que celles-ci.

Finies, envolées, les exigences de ces mêmes pays au regard des droits humains, surtout quand la capacité de nuisance iranienne doublée d’une intelligence stratégique ont mis au pas les diplomaties occidentales du chacun pour soi. Au point de déstabiliser le Moyen-Orient à force de soutenir uniquement les régimes sunnites et le wahhabisme agressif de l’Arabie Saoudite. Paradoxalement, ces terroristes nihilistes se gardent bien de s’attaquer ou même de déranger l’Etat d’Israël, même si ailleurs dans le Monde ceux qui revendiquent et valorisent leur culture juive sont aussi directement ciblés au même titre que ceux qui promeuvent leur culture de l’islam pacifique, sans oublier d’ailleurs les autres religions, les laïcs et les sans-religion…

En réalité, les nombreuses recrues des services secrets occidentaux qui avaient pour mission d’infiltrer les différentes formes de l’islamisme radical et nihiliste ont raté leur mission. Au point que de nombreux détenteurs d’un passeport européen ont été convertis non pas à l’Islam mais à la guerre de vengeance contre une société qui les a humiliés et annihilé toutes chances de s’émanciper par des opportunités d’emplois et de vie décente. Certains étaient simplement en mal d’action. D’autres, peu nombreux se sont convertis mais ont aussi déchanté et sont revenus, soit pour se ranger, soit comme cellule dormante pour finir en apothéose en un ultime acte « héroïque » exécuté par des cerveaux dérangés et ayant confondu et compris l’islam, grâce à des formations accélérées prodiguées soit par des ignorants notoires de ce qu’est l’Islam, soit par d’autres qui le connaissent beaucoup mieux et n’en sont que plus dangereux encore d’un point de vue idéologique, car souvent ils avancent masqués.

Pour s’en convaincre la lecture des intellectuels des extrêmes droites religieuses est édifiante. Elle permet de comprendre que ceux-là passent leur temps à se référer aux textes « sacrés » et leurs prêches démontrent sans ambiguïté qu’ils ont une excellente connaissance de ces textes et savent manier les références érudites. N’importe quel internaute doué de raison et de bon sens peut lire les sept (7) numéros du magazine de Daesh, Dabiq en anglais ou Dar-el-Islam en français, de même que les quatorze (14) numéros d’Inspire publiés par Al Qaïda dans la Péninsule arabique, pour y trouver la démonstration.

Cette erreur de parallaxe a coûté des vies, brisé des familles, a poussé à la migration de peuples entiers, ce qui ne laisse personne indifférent même si certains patrons en Allemagne ou ailleurs en profitent pour s’assurer que cela nivellera le niveau du salaire minimum au plus bas. Si les « autochtones » ne veulent pas d’un boulot, l’immigré le fera. Comme quoi, les migrations massives en Allemagne servent non seulement à compenser les carences de la « natalité » et de la force de travail qui ne pourra pas payer les retraites d’une population vieillissante… Alors le malheur des uns fait-il le bonheur des autres ?

3. DECHÉANCE DE LA NATIONALITÉ PAR UNE NOTE CONFIDENTIELLE, « EX-NOTE BLANCHE »

Il ne faut pas alors s’étonner du zèle de certains en France à vouloir dans l’urgence « déchoir » certains plus que d’autres de la nationalité française pour leur faire endosser d’office « celle d’Apatride », afin d’échapper à tous les déballages qui pourraient survenir post-période terrorisme et permettre à certains de « sauver » leur tête et de s’absoudre de leur responsabilité. Le problème est que le texte ne va principalement concerné que les « bi-nationaux », surtout ceux qui n’ont pas renouvelé leur passeport depuis parfois 30 ou 40 ans… Il faut savoir que les fameuses « notes blanches » fondées sur les certitudes de celui qui les écrit sans signer, ont évolué pour n’être souvent que des « notes verbales « blanches » ». Lesquelles ont-elles-même évolué pour devenir des « notes de renseignement » qui sont alors protégées sous différentes appellations de type « confidentiel défense », « secret défense », « très secret défense », « secret diamant », etc. Heureusement car les « notes des services de sécurité en Afrique francophone » ne font pas dans le détail et ne prennent pas toutes ces précautions pour s’attaquer à toutes personnes considérées comme « opposant » ayant des chances d’assurer une alternance légitime.

Mais en France, avec l’Etat d’urgence prolongé, toute personne dont le nom se retrouverait dans ces notes confidentielles, se voit contraint de se défendre alors qu’elle est présumée innocente et demeure avant toutes preuves tangibles la victime d’une allégation et d’une présomption. C’est ainsi que sous le régime de l’Etat d’urgence prolongé, il y a inversion de la charge de la preuve. Pour être concret, si un Noir est inscrit comme un Blanc dans les notes confidentielles (blanches, de renseignement, classées ou pas secret défense) des services secrets français, il doit apporter la preuve de sa négritude… même s’il s’agit en fait de la Créolitude, ou de la Kamitude, etc. Mais qu’importe, c’est ce qui est inscrit qui « compte » !!! Non ? On comprend que Mme Christiane Taubira ait préféré « s’éclipser » avant le remaniement ministériel annoncé afin de pouvoir dire sa « vérité » avant la vérité de la « mise à jour » des notes « blanches » la concernant… Mais le comble du déshonneur eût été qu’on l’oblige à défendre une telle loi à l’Assemblée nationale. Une ministre noire, Ministre de la justice et Garde des Sceaux, qui défend les notes blanches, qui serviront peut-être à une déchéance de nationalité dans le futur ? « Qui est fou ?» aurait chanté le saxophoniste « Manu Dibango » !!!

En effet, l’hypothèse de voir l’extrême droite française prendre le contrôle des « notes blanches » et de la déchéance de nationalité doit certainement poser un vrai problème pour ceux qui ont choisi, par l’introduction du vote proportionnel, d’introduire l’extrême droite française dans le jeu républicain, persuadé que l’alternance entre les « modérés » de gauche et de droite suffirait. Mais voilà que l’exclusion de Lionel Jospin au premier tour doit certainement résonner haut et fort pour ceux qui espèrent une exclusion de François Hollande, candidat à sa propre succession, dès les « hypothétiques primaires » du parti socialiste français.

Alors, imaginez un instant ce que les acteurs du nihilisme radical se réclamant de l’Islam peuvent penser d’un tel texte sur la déchéance de nationalité ? Ils ont tous des faux passeports et de plusieurs nationalités… !

4. COMBATTRE LE NIHILISME RADICAL SOUS COUVERT D’UN ISLAM INVERSÉ

Tous ces problèmes interdépendants ont conduit à promouvoir dans l’esprit d’illettrés notoires, de grands et vénérables « macho », qui deviennent adeptes d’un faux Islam idéalisé par les idéologues totalitaristes d’Al-Qaïda, ou des dissidences colonialistes et mafieuses dites « DAESH » qui entendent imposer leur « Califat », voire de dissidences en cascades en Afrique et ailleurs. Loin de nous l’idée de justifier des assassins et lâches notoires prétextant se battre au nom de Dieu ou de l’Islam. Ici et là, ces véritables sécessionnistes mafieux servent souvent aussi, à opérer les basses besognes pour le compte de certains responsables occidentaux et africains empêtrés dans leur immobilisme en termes de gouvernance et de respect des droits humains mais d’une agilité sans pareille dès lors qu’il s’agit de donner longue vie à la corruption endémique sur le continent africain 1. Ailleurs, la subtilité des jeux des réseaux d’alliance permet de brouiller les pistes de la corruption sauf en cas de scandale avéré.

Sur un autre plan, le zèle de ces activistes nihilistes est aussi fondé sur l’absence de respect des droits de la femme et de l’enfant. La sédition des uns se mesure à l’aune des morts et blessés occasionnés dans les pays où la démocratie et la laïcité tentent d’offrir des opportunités pour tous de vivre une paix fondée sur la cohésion sociale. Mais le premier mot qui caractérise ces assassins du 21e siècle est la lâcheté car il faut bien le reconnaître, pour parvenir à ses fins, et lorsque les rackets, les enlèvements, les séquestrations, les intimidations diverses et variées ne suffisent plus, alors il faut faire parler de soi en tuant. Mais de quelle engeance sortent-ils ? Même les femmes souvent mineures sont embrigadées, droguées et envoyées pour aller faire sauter ici un marché, là un hôtel, là-bas une école… quand elles ne servent pas d’esclaves sexuelles…

De plus, la médiatisation du nihilisme permet d’amplifier le phénomène. Au point de faire croire aux zélés du nihilisme radical sous couvert d’un Islam inversé, que la lâcheté et les moyens d’action terroristes relèvent de la banalisation. Alors, oui, il faut combattre autant la culture de l’Islam renversé que les cultures de la justification des inégalités et du refus du vivre ensemble.

Aussi, toutes conférences internationales sur le terrorisme doivent cesser d’être confiées à ceux qui croient que la solution passe uniquement par les armes, et qui souvent en profitent pour en vendre ces objets de malheur, non pas uniquement pour déstabiliser et promouvoir la mort et la désolation, mais aussi pour améliorer la balance commerciale de leur pays.

5. MYOPIE STRATÉGIQUE : CRISE DES INÉGALITES ET IMPUNITÉ DES ÉLITES AU POUVOIR

En Afrique, lorsque près de 51 % des revenus sont accaparés par 20 % de la population la plus riche, alors que moins de 5 % des revenus sont redistribués entre 20 % de la population la plus pauvre, l’élite africaine au pouvoir ne peut échapper à sa responsabilité, sa myopie stratégique et surtout sa prévarication gourmande qui se fait au détriment de la majorité des citoyens africains. Les chocs violents entre les nihilistes de tous poils et ces élites africaines irresponsables et inconscientes risquent de s’opérer avec encore plus de violence dans les années à venir. Surtout chez ceux et celles de ces élites qui ont choisi l’alignement sur les forces postcoloniales.

Au plan de la gestion quotidienne notamment pour les populations qui ont évolué de l’appartenance à une certaine Diaspora à celle de l’appartenance à la France et qui restent malgré tout mises à l’index, non plus nécessairement au faciès mais par une forme de racisme décomplexé banalisé, elles ne sont pas exemptes de reproches non plus. Il faut bien noter aussi qu’une grande majorité fait l’expérience de l’endettement à outrance, de l’absence de perspective dans la vie, des humiliations par les élites à leur encontre, du racisme de tous les jours, des échecs structurels des politiques d’intégration et d’assimilation, des conséquences de l’organisation de la hiérarchie des nationalités entre citoyens d’un même pays, bref des inégalités entre les riches et les pauvres. Il s’agit en définitive du refus d’une redistribution plus équitable des fruits de la croissance mondiale. Cet état de fait qui se mue en gouvernance économique « indolore » constitue une bombe à retardement. Au risque de transformer à terme des individus ou groupes d’individus – actifs ou dormants – en véritable détonateurs (pour l’heure en veilleuse), d’une société du spectacle et des inégalités.

A ce petit jeu, la mort est toujours au bout du chemin et la seule gagnante.

Or, c’est ce spectacle de la désolation qui sous-tend les messages culturels où la faute est toujours chez les « autres »… Un tel message de non-vérité ne peut permettre de résoudre une crise non pas de civilisation mais une crise des inégalités et de l’élitisme globalisé.

Le pauvre et l’illettré, comme au demeurant le riche et l’irresponsable, se sont accaparé les outils modernes de la communication et des réseaux sociaux. Ils arrivent, grâce à quelques cerveaux mal-pensants du nihilisme, à se faire endoctriner, au point de croire que tuer un humain – son frère ou sa sœur – est une gloire qui mérite de se retrouver dans leur paradis fictif. Ces cerveaux dérangés et malades étaient connus des dictateurs qui dirigeaient les pays en proie à l’Islam radical aujourd’hui. Mais comment soigner ceux qui choisissent la mort comme solution ultime, comme ultime horizon d’une vie sans « valeur » et aucune « opportunité » de mieux-être ?

Ceux-là mêmes qui criaient que les droits humains n’étaient pas respectés dans les pays comme l’Algérie, l’Irak, la Tunisie, la Libye, l’Egypte ou même la Syrie, etc., pour ne prendre que ces exemples -, sont les mêmes qui optent pour une éradication de ces nihilistes radicaux maladroitement islamisés. Mais pourtant, il suffisait de soutenir les oppositions légitimes dans ces pays. Mais les dirigeants des partis d’opposition dans ces pays étaient pour la plupart clairement déterminés à ne pas laisser le droit d’ingérence des puissances tutélaires continuer. Alors les pays occidentaux ont choisi de soutenir les dictatures et fermer les yeux sur les entorses brutales aux respects des droits humains. Les partis d’opposition étaient logés à la même enseigne que les islamistes radicaux, quand ce n’est pas pire.

Aujourd’hui, chacun voit l’erreur stratégique et incommensurable de la décision de l’ancien Président de la République française Nicolas Sarkozy, aujourd’hui transformé en chef du parti « Les Républicains », qui a consisté à d’abord dérouler le tapis rouge à Mouammar Kadhafi à Paris pour ensuite l’éliminer physiquement, contre l’avis de la Commission de l’Union africaine dirigée à l’époque par Dr Jean Ping. Mais c’est que le « Guide » Mouammar Kadhafi avait compris comment neutraliser le radicalisme dans l’Islam d’où ses envolées lyriques et des diatribes régulières contre les défenseurs du wahhabisme financé et soutenu par l’Arabie saoudite.

Mais pour ce qui est de l’après-bombardement, personne ne pensait aux conséquences de déstabilisation en Afrique sahélienne, ni au Moyen-Orient. La vérité est que l’intervention de la coalition France, Royaume-Uni et Etats-Unis sur la Lybie a fait de ce pays, surtout au sud, une zone de non-droit, fief des nihilistes de tous bords, mais aussi le fief de tous trafics que reflètent aussi parfois l’état de la rubrique armement dans la balance commerciale des pays occidentaux et des pays émergents.

Aujourd’hui, le bilan est simplement catastrophique puisque la seule solution en discussion est d’aller à nouveau bombarder la Libye une deuxième fois…

Le pouvoir, autocratique et militarisé, de Kadhafi, arrivait malgré tout à contenir la montée de l’islam radical. Mais ceux qui savent toujours tout, se mêlent toujours de ce qui ne les regarde pas, s’arrogent le droit d’ingérence chez les autres et s’approprient le bien d’autrui quand il n’y a pas de résistance collective, ont oublié qu’ils ont colonisé les autres par des méthodes qui n’ont rien à envier à celles des nihilistes de l’Islam radical et inversé d’aujourd’hui. Ils ont donc éliminé des dictateurs mais aussi l’organisation étatique qui assurait bon an, mal an, l’ordre dans le pays. La responsabilité des pays qui ont choisi l’ingérence préventive pour déstabiliser ces Etats est grande. La « vengeance » non fictive qui en découle pour les anciens militaires et autres agents de sécurité et de renseignement des dictateurs évincés fondent en fait pour l’essentiel la sédition de type DAESH et surtout la détermination d’en découdre.

Aujourd’hui, chacun y va de sa frappe aérienne sur des cibles qui ressemblent aux jeux-vidéo que l’on retrouve sur tous les portables de qualité… Quelle hypocrisie, surtout lorsque certains achètent le pétrole que certains dissidents d’Al-Qaïda ou de DAESH revendu bien en-dessous du prix international, contribuant ainsi à renforcer la chute du prix du pétrole et globalement des matières premières. Avec en filigrane, une forme de limitation forcée de l’indépendance financière de certains Etats africains exportateurs de pétrole et de matières premières non transformées. Il y a là, malheureusement, une forme de myopie stratégique des pays va-t’en guerre qui oublient d’ailleurs de s’appesantir, et c’est un euphémisme, sur la crise des inégalités, les fautes et l’impunité des élites au pouvoir. Le problème est que ces faiblesses ont été exportées en Afrique qui n’a rien trouvé de mieux que d’en faire une reproduction agrandie à l’échelle d’un larbiniste convaincu.

Alors avec autant de politiques multi-bilatérales du double jeu et du deux poids deux mesures, il ne faut pas s’étonner qu’en face, les nihilistes terroristes aient copié ce modèle de l’impunité, malgré eux par les séditions multiples, les allégeances annoncées, défaites et refaites, quand elles ne sont pas surfaites. C’est ainsi que ces « arrière-gardes » d’un Islam qui refuse de se moderniser ont conduit aux nombreux attentats dans les pays aussi divers que le Kenya, la Tunisie, l’Egypte, la Somalie, le Mali, le Burkina-Faso, le Cameroun, le Nigeria, la France, la Turquie et on ne cite pas l’Afghanistan, le Pakistan, l’Arabie Saoudite, etc. Si le 11 septembre (attentat à New-York) doit servir de référence, alors les Etats-Unis portent aussi la responsabilité de ne pas avoir amené l’Arabie Saoudite à revoir sa copie sur les effets pervers d’un appui inconditionnel au wahhabisme, surtout que les responsables du 11 septembre courent toujours et que rien ne vient démontrer que la mort de Ben Laden ne soit pas due à une simple maladie non traitée… Alors la communication ne peut pas tout résoudre. C’est la vérité qui permet de tourner la page… C’est pourtant cette vérité qui fait cruellement défaut à l’Union africaine.

6. POUR LES DIRIGEANTS AFRICAINS, L’UNION AFRICAINE DOIT RESTER UNE MACHINE À S’AUTONEUTRALISER

Par ailleurs, il suffit que les africains achètent les produits et services des pays occidentaux en faisant tourner l’économie des pays riches tout en oubliant de transformer leurs productions locales, de consommer et créer des emplois décents et du pouvoir d’achat localement en Afrique, pour que la question du respect des droits humains fondamentaux passe en priorité seconde. Ainsi, le paria d’hier, le dictateur d’hier, devient par enchantement, le partenaire du moment, surtout s’il a beaucoup d’argent à dépenser, si possible rapidement.

Pourtant, le jeu est devenu plus compliqué en Afrique. Les dirigeants africains sont majoritairement pour l’industrialisation, la préservation et la protection de l’environnement, le besoin de créer des emplois localement, bref, ils et elles souhaitent l’amélioration des conditions de vie de leurs concitoyens.

Malgré ou à cause des rumeurs persistantes sur la possibilité que Mme Dr Nkosazana Dlamini ZUMA, la présidente de la Commission de l’Union africaine ne se représente pas pour un second mandat, il faut bien reconnaître que cette dame est en train de déclarer « forfait » face à des chefs d’Etat africains organisés comme une curie fonctionnant comme une machine à broyer les avancées vers l’intégration des peuples et l’amélioration du bien-être collectif des Africains.

C’est ainsi qu’au cours du 26e sommet ordinaire de l’Union africaine à Addis-Abeba en Ethiopie, clôturé le 30 janvier 2016, qui était consacré à faire de l’année 2016, « l’année africaine des Droits de l’Homme, avec une attention particulière pour les Droits des femmes. », Mme ZUMA, désabusée, s’est contentée de souhaiter « l’accélération de la transformation de l’Afrique et la mise des Droits fondamentaux de nos peuples au centre de l’Agenda 2063 de notre organisation continentale ». Elle s’est bien gardée de parler du bilan du Président sortant, surtout que ce dernier pourrait peser d’un certain poids, ou plutôt d’un poids certain, au cas où Mme Zuma se verrait confier de hautes fonctions dans son pays, l’Afrique du Sud. Elle n’a pas oublié toutefois de rappeler l’oppression des femmes en Afrique par les hommes africains, majoritairement « machos » et autocrates. Selon Mme Dr Nkosazana Dlamini Zuma, « la libération du potentiel du continent africain dépend de la promotion des droits de l’Homme et de la fin de la culture qui limite les potentialités des femmes dans nos sociétés ». Elle a certainement raison !

Mais elle serait plus crédible et audible si elle indiquait quels moyens concrets et budgets adéquats elle a pu mettre à disposition pour faire avancer cette cause lors de son premier mandat. Là encore, le bilan risque d’être « immobile ».

C’est sous la présidence tournante du Président Robert Mugabe que le Président du Burundi a choisi le passage en force pour rester au pouvoir. Alors comment un Robert Mugabe peut-il légitimement demander à son « collègue », Pierre Nkurunziza du Burundi de faire ce que, ni lui au Zimbabwe, ni Paul Kagamé au Rwanda, ni Yoweri Museveni en Ouganda, ni Joseph Kabila en République démocratique du Congo, ou ceux d’Afrique centrale ne seraient prêts à accepter. Ainsi, le bilan de Robert Mugabe à la tête de l’Union africaine se solde par l’identification d’un bouc-émissaire global à savoir l’ONU. Ceci d’autant plus que le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-Moon était présent et que son mandat expire au 31 décembre 2016.

Aussi, Robert Mugabe a résumé son bilan à ce qu’il n’a cessé d’ailleurs de demander, à savoir la réforme du Conseil de Sécurité de l’ONU pour assurer une meilleure représentativité du continent africain au sein de cet organe. Un vœu pieux dès lors que les modalités pratiques pour y parvenir ne sont pas énoncées et que la première d’entre elles consiste à avoir une capacité de nuisance militaire et un minimum de représentativité sur des bases électorales crédibles. L’Afrique globalement ne possède pas ces attributs pour le moment et pas davantage dans un futur proche, si l’on mesure de très haut degré d’aversion et la propension des dirigeants africains à avoir une abjection pour un système de vote transparent ou à main levée pour prendre une décision. Ils préfèrent les conciliabules, les arrangements, bref la palabre africaine non productive qui tue la vérité des urnes, sclérose toute avancée de la démocratie, empêche la vérité des comptes publics, favorise la corruption et donc appauvrit le citoyen du continent.

Pourtant rien n’interdit à l’Union africaine, même avec des moyens modernes de vote électronique, de désigner par un vote transparent, un des pays africains, pour occuper un siège en qualité de membre permanent au Conseil de Sécurité. Un boycott collectif des Africains de l’ONU sur plusieurs semaines pourrait d’ailleurs accélérer le mouvement. Mais est-ce que les chefs d’Etat africains en sont capables ? Certainement pas ! Leur priorité effective est de conserver le pouvoir coûte que coûte et de refuser la prise de décision sur la base d’un vote à bulletin secret à partir d’une majorité de 55 %. Avec le système de l’unanimité, 1 seul des pays peut bloquer toute initiative de l’Union africaine en se cachant derrière son droit à la souveraineté : « un Etat » égale « une voix »… Sauf que cette voix est bloquante et tournante ! Cette voix permet d’ailleurs à certains de faire « bonne figure » en se cachant derrière le Chef d’Etat qui a eu le « courage » de bloquer les innovations.

Par exemple, il suffit pour l’Union africaine de suivre le modèle de financement innovant de la CEDEAO. Il s’agit pour les chefs d’Etat d’améliorer leur crédibilité collective en votant une taxe minime sur les importations de luxe dans leurs pays respectifs et la transférer à la commission de l’Union africaine pour la gestion d’un dossier spécifique. A ce jour, ce dossier est bloqué pour ne pas perdre en recettes, mais aussi pour neutraliser les marges de manœuvre de la commission de l’Union africaine. Autrement dit, maintenir la Commission de l’Union africaine dans le rôle de simple « secrétariat » ou celui d’une caisse d’enregistrement de vœux pieux. C’est ainsi que les dirigeants africains ont graduellement au cours des années transformé la Commission de l’Union africaine en une machine à s’auto-neutraliser.

7. L’IMMOBILISME, UNE FORME D’INERTIE « À SÉCURISER »

C’est donc peut-être cela que le nouveau Président en exercice de l’Union africaine, Idriss Déby, le Président du Tchad, « choisi ou élu – c’est selon –» pour un an, le 30 janvier 2016 à la présidence tournante de l’Union africaine, a dénoncé les retards récurrents dans l’intégration africaine au plan des infrastructures, de la monnaie, de la circulation des biens et des personnes, etc., comme étant de « l’immobilisme 2 » des Etats africains.

L’immobilisme dont il parle rappelle une forme avancée d’inertie, un principe fondé sur le conservatisme et le statu quo. Mais il n’y a pas d’inertie sans forces centrifuges et centripètes qui se neutralisent mutuellement. Aussi, sans avoir une équipe de chefs d’Etats qui soutiennent sa nouvelle volonté de sortir de ce cercle vicieux, le Président Idriss Déby risque de ne pas être en mesure fin janvier 2017, de faire un bilan constructif de son travail à la tête de l’Union africaine. Il pourrait être alors tenté, lui aussi pour se justifier, de trouver un bouc-émissaire avant de passer le relais à celui qui dispose en fait d’assez de moyens pour contribuer, discrètement à boucher quelques trous budgétaires de l’Union africaine, mais aussi à être en capacité sécuritaire et logistique pour accueillir le prochain sommet ordinaire de juillet 2016 de l’Union africaine.

En réalité, le « manque de volonté » des chefs d’Etat africains a été plusieurs fois mis en évidence. Akinwumi ADESINA, le nouveau Président de la Banque africaine de développement vient d’en faire encore le constat en concluant que finalement la résultante première de toutes les « volatilités » en Afrique provient du « manque de volonté. » 3

Le manque de volonté porte plus sur l’irresponsabilité « calculée » des chefs d’Etats. Celle-ci peut se résumer en l’ignorance crasse des dirigeants africains de la notion même d’Etat de droit, qui « autorise » l’inexécution des obligations – contractuelles ou pas – envers leurs peuples respectifs et le refus de rendre compte de leur actes (politiques, économiques, sociaux et culturels), encore moins d’accepter de les réparer en cas de fautes, préjudices ou abus de tous ordres.

Pour ce faire, ils sont tous systématiquement des « non coupables » et des « non-responsables » notamment pour ce qui est de la culpabilité et la responsabilité individuelle et personnelle. Il faut donc pour eux empêcher à tout prix l’irréversibilité de cette situation en bloquant les alternances politiques non « voulues » ou en s’assurant que leur successeur, par des conciliabules divers, mette une chape de plomb scellée avec du béton armé pour échapper à une responsabilité juridique.

Alors, très souvent, c’est la force brutale, secrète et lâche qui prend le dessus avec les militaires « sécurocrates » qui font aussi de temps à autre dans la dissidence ou dans le chantage, quand il ne s’agit pas de coups d’Etat à répétition. Ainsi va l’Afrique !!!

En réalité, il faut comprendre qu’il y a des dirigeants africains qui ont bien une volonté, mais pour servir des intérêts non-africains afin d’échapper au verdict démocratique du plus grand nombre. Ceux-là constituent la force centrifuge qui tend à éloigner le dirigeant africain concerné de ses obligations africaines, échappant ainsi à la force de rotation du groupe unifié. Mais d’autres par le pouvoir tiré des recettes en provenance de l’exportation des matières premières non transformées, organisent des forces centripètes fondées sur l’autocratie, mais aussi le faux-semblant du soutien à l’Union africaine.

La neutralisation de ces forces profite simplement aux seules forces réelles et non fictives que sont les entreprises (souvent multinationales) et les pays africains détenant le plus de pouvoir d’influence. C’est donc le rapport de force brut, brutal et de court-terme qui l’emporte. Dans ces conditions, en Afrique, les pays les moins influents ne souhaitant pas tomber sous les fourches caudines des pays puissants, se tiennent « à carreau », en jouant le jeu du « ni-oui ni non », tout en disant toujours oui à la puissance tutélaire postcoloniale rebaptisée à plusieurs reprises en séparant et inversant les mots. C’est ainsi que pour les pays francophones au sud du Sahara, la Françafrique est devenue ici, la France-Afrique et ailleurs, l’Africa-France, c’est selon celui qui influence l’autre et cela dépend si l’on est en période pré-électorale ou pas.

Alors, la politique des « non-alignés » en Afrique devient paradoxalement une force d’inertie et d’irresponsabilité, au lieu de promouvoir une gouvernance de la neutralité.

8. L’UNION AFRICAINE DOIT RENOUER AVEC LA 6e RÉGION D’AFRIQUE, SA DIASPORA

Pourtant, le Président Idriss Déby, nouveau Président à la tête de l’Union africaine pour un an, crée la surprise. Il met les pieds dans le plat en faisant un bilan plutôt négatif de l’Union africaine. Il rappelle que « L’Union africaine fonctionne toujours comme il y a 20 ou 30 ans. Nous nous réunissons trop souvent, nous parlons toujours trop, nous écrivons toujours beaucoup, mais nous n’agissons pas assez, parfois pas du tout” (…). Il est inadmissible que le fonctionnement de notre organisation, ainsi que certaines de ses activités, soient financés par l’extérieur (…) Nous attendons tout de l’extérieur. Cela doit impérativement changer (…) Cette Union que nous appelons de tous nos vœux, serait vide de sens, si les Africains n’ont pas le sentiment d’appartenir à un même espace géographique, s’ils ne circulent pas librement, s’ils ne sont pas détenteurs d’un passeport unique… »

Alors Chapeau !, Monsieur le Président… Mais on « fait comment » pour stopper l’immobilisme des chefs d’Etat africains ? Et on « commence quand ? ».

Attention de ne pas marginaliser la Diaspora africaine, la 6e région du continent qui a envoyé plus de 28,6 milliards de dollars des Etats-Unis ($ EU) en Afrique sub-saharienne 4 au cours de l’année 2014 pour soulager la pauvreté en Afrique. Ce montant est pratiquement l’équivalent de l’aide au développement reçu en Afrique subsaharienne en 2013 (soit 31,9 milliards de $ EU). Si les Etats africains n’étaient pas défaillants sur la pauvreté, les inégalités et la gouvernance politique et économique, alors cette épargne forcée de la Diaspora servirait à l’investissement et permettrait de transférer plus de contenus technologiques en Afrique et à créer des entreprises, des emplois décents tout en servant d’effet de levier. Ainsi, pour chaque initiative prise par l’Union Africaine et sur chaque thème, la Diaspora africaine demande à être invitée officiellement pour présenter son point de vue en toute indépendance. Il s’agira d’un avis non lié mais public.

C’est donc cette voie que conseille Afrocentricity Think Tank au nouveau Président en exercice de l’Union africaine, tout en lui souhaitant bonne chance. YEA.

©Afrocentricity Think Tank

1er Février 2016

info@afrocentricity.info

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