Kouma Biténiwé : Le peuple togolais vous regarde!

0

Depuis le 1er juin 2003, notre pays tend dangereusement vers un état de non-paix, de non-guerre, mais de mort continuel de notre population. Après le syndrome ivoirien c’est maintenant l’exemple malgache qui est à nos portes.

Mes frères d’armes, je voudrais vous poser la question de savoir ce que vous ferez quand demain, le peuple, à travers celui qu’il a désigné au soir du 1er juin et que nous tous nous connaissons va nommer son Premier Ministre pour former un gouvernement ? cet acte à coup sûr sera posé et se ne sera que justice.

Ne restons pas sourds à l’appel du peuple. Pour ma part, le message du 5 octobre 1990 est clair : « la tyrannie, l’injustice et l’arbitraire doivent céder la place à un monde d’amour, de pardon, d’équité et de justice. « 

Chers camarades, qu’avons nous servi à ce peuple qui ne réclamait que la paix et la quiétude, le pain quotidien et la joie de vivre ?

Rien, sinon des coups de gourdins, de cordelettes et des crosses de fusil ; des intimidations et des arrestations arbitraires, semant sur notre passage la mort, la détresse, la ruine et la désolation. C’est vrai, nous sommes des militaires et nous exécutons des ordres reçus souvent, à notre corps défendant. Il est temps de se rendre compte que tous les ordres ne méritent pas d’être obéis. Aujourd’hui, les gendarmérires et certains camps militaires se remplissent de paisibles gens qui n’ont commis pour seul crime que de s’exprimer le 1er juin dernier. Beaucoup sont torturés au camp Landja de Kara et au camp de la FIR de Lomé, loin de tout regard.

Peuple Togolais, tu dois savoir qu’avant d’être militaires, nous sommes sensibles à tes souffrances malgré ce qu’on nous fait faire.

Frères d’armes, j’ai demandé à nos supérieurs que sont le Ministre de la Défense, le Minitre de l’Intérieur et le Ministre de la Sécurité et Chef d’Etat Major Général, de prendre leur responsabilité, chacun en ce qui le concerne.je ne le ferai plus. J’estime qu’on ne doit plus déverser des militaires dans les rues pour frapper les populations. Malheur à ceux qui le font.le peuple a payé un lourd tribut et ça suffit comme ça

A partir de cet instant, j’étends ma demande aux Chefs d’Etats Major de la Gendarmerie, de l’Armée de terre, de l’Armée de l’Air et de la Marine, aux chefs de garnison, aux chefs de bataillon, aux chefs de compagnie et au Directeur Général de la Police Nationale de faire scrupuleusement appliquer ces instructions qui ne sont pas de vains mots.

Chers camarades, depuis 1963, nous n’avons faits que servir un homme et souvent, jusqu’au sacrifice suprême. Qu’avons nous reçu en retour ? ingratitude, conspiration et exécution sommaire.

Le 23 septembre 1986, le 3 décembre 1991 et le 25 mars 1992, bon nombre d’entre nous sont tombés. Aviez – vous jamais vu le fils du père, Ernest, au front ? Jamais. A peine nos valeureux martyrs sont enterrés qu’on jette dehors leur famille.Triste sort que d’être militaire sous Eyadéma.

Officiers, sous officiers, soldats des Forces Armées Togolaises, moi Lieutenant Colonel Kouma BITENIWE, je proclame solennellement que nous ne devons plus servir un homme, fut-ce t-il Eyadéma ou un leader de l’opposition, à moins d’être désigné, et ceci par les urnes, Chef de l’Etat et de facto Chef Suprême des Armées.

Notre armée doit désormais être républicaine. Elle doit se mettre au service du peuple. Je sais que la grande majorité, certes silencieuse, a compris la mission qui nous est dévolue. La minorité qui jette le discrédit sur notre corps, nous l’avons ciblée et je sais que vous la connaissez.

Nous devons aujourd’hui être unis et arrêter de croire que l’armée est une histoire du nord contre le sud, ou de Kabyè contre les autres ethnies. L’armée, notre armée, est une et indivisible. Notre problème, c’est Eyadéma et son fils Ernest.

Mon cas est semblable à celui de tant d’autres parmi vous. Authentique fils de Pya AKEYI, j’ai été humilié et arbitrairement arrêté. Ma demande de réintégration a été rejetée et j’ai été mis à la retraite anticipée. Comme si cela ne suffisait pas, après plusieurs complots éventés, ils ont décidé d’attenter à ma vie le lundi 5 mai 2003 à Pya en ouvrant le feu sur ma voiture.

Cette roue qui m’a emporté et qui a emporté d’autres avant moi, tourne toujours et il convient de poser la question de savoir à qui le tour ? c’est pourquoi il est impérieux d’arrêter définitivement cette roue de tourner.

 Vaillante armée, depuis le 1er juin 2003, Eyadéma c’est fini. C’est pourquoije suis revenu au pays car cette lutte nous concerne tous. Levons nous tous comme un seul homme et boutons le tyran dehors.

Peuple Togolais, tu es valeureux. Ta bravoure est sans limite. Comme le roseau, tu as cent fois plié, mais cent fois, tu n’as jamais rompu. La délivrance est proche car le jour de gloire pour notre pays est arrivé.

Que l’Eternel bénisse le Togo.

 

Le 13 juin 2003
Kouma Biténiwé
bitkouma@yahoo.fr
 

Partager

Laisser une réponse