EYADEMA, KOFFIGOH ET MOI (Suite et fin) : Pourquoi la transition démocratique a échoué…
…. Dès la formation du 1er gouvernement, au lendemain de la Conférence Nationale Souveraine (CNS), un Ambassadeur accrédité au Togo, nous approcha et nous conseilla vivement de tout faire pour ne pas humilier le Général EYADEMA, qui a perdu une grande partie de ses prérogatives, avec la Loi fondamentale transitoire, et surtout, de tout faire pour que les FAT adhèrent au processus démocratique.
Dès sa prise de fonction, Joseph Kokou KOFFIGOH convoqua une grande réunion de concertation avec les Forces Armées Togolaises, au Palais des Congrès de Lomé. A l’ordre du jour, l’examen de toutes les questions importantes de la grande muette, les questions politiques, sécuritaires et les relations de l’Armée avec leur ministre de la Défense, qui n’est autre que le Premier Ministre KOFFIGOH.
La réunion se déroulera dans la convivialité, avec tous les corps de l’Armée et la question urgente de la réouverture du boulevard des Armées fut réglée.
L’Armée accepta de rouvrir ce boulevard, après avoir effectué des travaux de sécurité nécessaire. Il est vrai que c’est après l’agression du 23 Septembre 1986 que ce boulevard fut fermé, ayant été le théâtre d’intenses combats entre terroristes et militaires togolais….
C’est la Loi Fondamentale Transitoire (La Constitution de la Transition) qui porte en elle le virus de l’échec de la Transition, avec sa fameuse clause qui stipule « qu’en aucun cas, la durée de la transition ne peut excéder douze mois » ! Le pouvoir a joué à fond sur cette clause et EYADEMA a rigolé à Lomé II en disant aux siens :
« Laissez-les, il suffit de tout faire pour qu’ils ne puissent pas finir ce qu’ils veulent faire avant douze mois ! »….
Comme quoi, il ne faut pas sortir de Sciences Po pour savoir certaines choses élémentaires en politique !
Nous étions de ceux qui avaient fait remarquer aux rédacteurs de cette Loi Fondamentale que si, pour une raison ou une autre, dans douze mois « pile », nous n’avons pas fini les principaux chantiers prévus, EYADEMA allait tout reprendre. Mais rien n’y fit ! Les savants juristes de la transition fermèrent les oreilles et les yeux et avalisèrent la Loi en l’état ! On connait la suite. Le pouvoir voulut verrouiller tout, pour reprendre tout le pouvoir ! Plusieurs coups de force jalonnent la transition, à commencer par le coup du 03 décembre 1991.
Le Ministre de l’Intérieur MASSEME ayant fui, j’ai cumulé le poste de Ministre de l’Intérieur et Ministre de la Santé et de la Population, jusqu’à la formation du premier gouvernement dit « d’union nationale ».
Je me rappelle le sourire carnassier du Secrétaire Général du RPT d’alors, M. AMEDEGNATO, venu solliciter l’autorisation pour organiser un meeting du RPT au stade municipal de Lomé. Il s’attendait à ce que je refuse, pour ouvrir la voie à un autre putsch.
Je le surpris en lui autorisant le meeting, avec cependant, la clause que tous les participants devraient être fouillés à l’entrée du stade. Il ravala son sourire et laissa tomber cette phrase, lourde de sous -entendus:
« Ah, la population de Lomé va fêter les fêtes d’année sans problèmes ! »
Le meeting fut tenu, mais ce fut un flop, mes policiers n’ayant communiqué seulement que le chiffre bien compté de 2870 participants à la fouille !
On se rappelle que c’est la dissolution du RPT par le Haut Conseil de la République (HCR) qui déclencha les hostilités ayant aboutit au 03 Décembre 1991. Ici encore, le HCR, qui comptait en son sein, plus de douze juristes, n’a pas écouté le ministre ADJAMAGBO, qui les a suppliés en vain de ne pas dissoudre le RPT, en l’absence du Premier ministre KOFFIGOH, parti au sommet de CHAILLOT, à Paris. Nous avons surtout répercuté la crainte des Ambassadeurs Occidentaux accrédités à Lomé, quant à l’illégalité de la dissolution d’un parti légalement constitué, par un Parlement, alors que le parti n’est pas jugé et condamné pour un délit commis par lui. Dans l’euphonie générale, le RPT fut dissout et le Général EYADEMA, bien conseillé par des juristes de renommée internationale basés à Paris, laissa seulement tomber à ses partisans son fameux :
« Allez-y ! ».
On connaît la suite : encerclement de la Primature, séquestration de la Radio et de la Télévision nationales, messages délirants et menaçants des FAT à la radio, et la prise de la poudre d’escampette par tous les Hauts Conseillers (y compris Mgr KPODZRO, qui s’est refugié à l’Archevêché de Cotonou), nous laissant, seul cerclé restreint, gérer la crise avec le Premier Ministre KOFFIGOH !
La transition a connu plusieurs drames et soubresauts que KOFFIGOH et nous avions gérés dans la douleur.
C’est d’abord l’incident du boulevard des Armées. Alors que l’Etat major des FAT et le Ministre de la Défense KOFFIGOH s’étaient mis d’accord pour l’ouverture de cette voie fermée, ce sont certains Haut Conseillers inconscients et certains leaders de l’opposition qui ont mis le feu aux poudres, en demandant la réouverture immédiate de cette voie. Alors, l’Armée se rebiffa (et à raison d’ailleurs) et KOFFIGOH s’énerva (à raison d’ailleurs), en demandant à ceux qui exigeaient cette réouverture de façon intempestive, de se mettre devant les manifestants qui devraient ouvrir la voie de force. Aucun de ces gueulards ne se pointa. Seuls quelques taximen et quelques jeunes se hasardèrent sur la voie et furent proprement tabassés par les militaires.
Ce fut ensuite la grève de certains Douaniers qui séquestrèrent des Hauts cadres de ce corps dans leur direction, pendant quatre jours. Ils réclamaient des primes qui ne seraient pas à eux payées ! En réalité, c’était un coup fourré du pouvoir pour empêcher le gouvernement de pouvoir payer les salaires de fin du mois des fonctionnaires ! KOFFIGOH m’envoya désamorcer la grève, avec le Ministre des Finances, KPETIGO et le Représentant du Général EYADEMA, en la personne du Colonel EDJEOU. Après avoir pris connaissance du dossier, nous reçûmes les douaniers au CASEF. Plusieurs centaines de jeunes ayant été versés dans les Douanes sans passer par le concours (selon les statuts des douanes), nous exigeâmes donc que tous ces « faux douaniers » soient virés des douanes sur le champ et nous acceptons de payer les prîmes ! Nos mutins douaniers, se trouvant coincés, renoncèrent à leurs exigences et libérèrent les otages.
Presque le même scénario se répéta avec la grève des policiers. Ceux-ci tirèrent dans la ville, à l’aveuglette et exigeaient des primes que le régime EYADEMA avait supprimées depuis…1977 ! Le Premier Ministre m’envoya, le Ministre KOMLANVI de l’Intérieur, KPETIGO des Finances, et moi pour régler la question. Nous réunissâmes tous les policiers grévistes au palais des congrès, avec six commissaires (leurs porte-paroles), dans une atmosphère électrique. En épluchant le dossier, nous découvrîmes que près de sept cent policiers étaient en fait, des militaires qui avaient été versés dans la police. Nous leur avions mis le marché dans les mains : le gouvernement va payer les primes, mais tous les policiers qui n’avaient pas été recrutés par concours régulier devront être virés de la police !
Là, les policiers se regardèrent en chiens de faïence, entre les réguliers et les militaires illégalement versés dans la police. Là encore, nous enlevâmes la victoire…
Puis vint la grève de certains agents de la régie des Eaux, la TDE actuelle. Certains agents de cette régie, en service commandé, bloquèrent le château d’eau desservant le CHU TOKOIN. Six bébés qui étaient sous couveuse perdirent la vie ! Je vis rouge et menaçai ces agents (dont les photos furent publiés dans un journal privé de la place), qu’ils ne seront plus soignés dans aucun hôpital public ou privé du Togo (pour avoir provoqué la mort des bébés des couveuses), s’ils ne reprenaient pas presto illico le service ! Je me demande si les dégâts provoqués au château d’eau ces jours-la n’ont pas rendu jusqu’à présent ce château en partie endommagé !…
Plus la transition arrivait à expiration (les fameux douze mois) et plus les attentats se précipitèrent…
Ce fut d’abord l’attentat de Soudou, contre Gilchrist Olympio .Selon le Colonel DJOUA, que mes services ont réussi à retourner, grâce à l’aide, ô combien importante de sa femme (qui est Akposso comme moi), nous savons que ce n’est pas la haute hiérarchie de l’Armée qui a exécuté cet attentat, ce qui rejoint la déclaration des FAT devant la CVJR récemment. En recoupant les révélations du Colonel DJOUA, et les conclusions de l’Enquête internationale que le gouvernement a diligentée, l’attentat de Soudou a été exécuté par un groupe de 25 à 35 hommes sous les ordres d’un officier maladroit. En effet, Gilchrist Olympio et tous les occupants de son véhicule de commandement seraient tous tués ce jour-là, si l’opération avait été menée sous le commandement d’un officier de terrain expérimenté. Il aurait suffit de faire sauter le ponceau sur lequel devait passer le véhicule, juste avant la traversée du ponceau, pour que le véhicule soit immobilisé. Les assaillants avaient alors tout le temps de canarder tous les occupants du véhicule, dont aucun n’aurait échappé (voir schéma des lieux de l’attentat dans le journal IBANOU Express, paru quelques jours après le drame).
C’est après cet attentat que nous avons vu la couardise et la lâcheté des Togolais ! Une foule de dix mille personnes envahissent la Primature de KOFFIGOH et nous traitèrent de tous les noms !
Tous les leaders de l’opposition étaient là : AGBOYIBOR, GNININVI, Edem KODJO etc. pour ne citer que ceux-là ! C’était comme si c’était KOFFIGOH qui avait tiré sur Gilchrist OLYMPIO, alors que les témoins du drame avaient bien vu des militaires en action. Au lieu de marcher sur Lomé II ou le camp RIT (ou au moins sur la colombe de la Paix), c’est sur KOFFIGOH qu’ils marchent ! Et que dire des adjoints et collaborateurs de Gilchrist OLYMPIO ? Jean Pierre FABRE, Lawson Patrick, Isabelle AMEGANVI et tous les autres qui ne juraient alors que par Gilchrist OLYMPIO ? Ils auraient pu marcher tous les jours de KONDJINDJI à la plage pour protester contre cet attentat ! Mais non, ce n’était pas aussi important que revendiquer un fauteuil présidentiel que vous n’avez même pas vraiment conquis ! Ce comportement de la population de Lomé, avait fait dire à l’un des trois ambassadeurs les plus en vue à Lomé en ce temps-là :
« C’est le visage le plus sombre du Togo que je viens de voir aujourd’hui ! »
C’est cette même lâcheté que les Togolais ont fait montrer le 13 janvier 1963. A l’annonce de l’assassinat de Sylvanus OLYMPIO. Aucune protestation de la population de Lomé ; Si vingt mille Loméens s’étaient soulevés, les 578 soldats que comptait alors l’armée togolaise aurait fait amende honorable et les putschistes auraient fui !
C’est la même lâcheté qu’on a observé lors de l’attentat contre Tavio AMORIN. Flingué par les officiers de police adjoints KEREWE et BOUKPESSI, qui ont laissé tomber sur le lieu du crime leurs armes et leur carte de police, Tavio fut évacué sur l’hôpital Saint Antoine de Paris. Le gouvernement fait venir un avion sanitaire spécial de l’UAP (Union des Assurances de Paris), avec deux médecins français qui ont pris en charge le blessé depuis le CHU Lomé jusqu’à l’hôpital de Paris, sous l’œil vigilant de la parente de Tavio, qui ne l’a pas quitté une seconde. Le seul incident était une panne très brève de l’ambulance du CHU, sur la route de l’aéroport, ambulance promptement remplacée par l’une des deux autres ambulances que le directeur du CHU Tokoin , Mr KOWOUVI avait apprêtées, à cause des menaces d’attentat. Le convoi était accompagné de huit de nos voitures de sécurité, bourrées de militaires et d’agents de sécurité de la Primature. Lorsque le convoi s’arrêta brusquement, nous avions pensé à un attentat et tout le monde a sorti son arme.
Tavio meurt dans l’hôpital parisien et un parent de Tavio téléphona au Premier Ministre KOFFIGOH pour lui dire qu’il a trouvé une trace de blessure suspecte sur le malheureux. Mais ce crétin de parent n’a pas demandé une autopsie sur le corps, pour qu’on lui dise de quoi le malheureux est mort à Paris, dans l’un des meilleurs hôpitaux de la capitale française ! Aujourd’hui, des doubles crétins demandent de poser la question au Dr. IHOU, comme si j’étais dans le corps du malheureux TAVIO, en tant que Ministre de la Santé d’alors. Ces doubles crétins doivent poser la question à la parente de Tavio qui était avec lui dans les ambulances et aux deux médecins français qui l’ont soigné depuis le CHU Tokoin jusqu’à Paris. S’ils ne sont pas toujours satisfaits, ils n’ont qu’à demander et financer l’exhumation du corps de Tavio et une autopsie par des médecins légistes français qu’ils peuvent faire venir à Lomé. Et puis, s’ils ont les « couilles », ils n’ont qu’à interroger les flingueurs de Tavio, qui,aux dernières nouvelles, se pavanent au Togo et ne sont pas morts. Mais, je suis sûr qu’ils n’ont pas les couilles ; ils sont lâches jusqu’aux os ! Si vous voulez mon avis, ce n’est sûrement pas le Général EYADEMA qui a commandé le meurtre de Tavio AMORIN. Il n’aurait jamais choisi des amateurs comme les deux flingueurs. Il aurait choisit des professionnels qui auraient abattu M. AMORIN à un feu rouge, la nuit, ni vu ni connu. De vrais tueurs ne lâchent pas leurs armes sur le lieu du crime, ils s’en servent pour se dégager, le cas échéant, dans leur retraite, même s’il faut qu’ils flinguent cinq ou dix personnes en plus !
Le comble, c’est que le gouvernement de la transition n’était pas obligé d’évacuer Tavio. Nous n’avons pas évacué tous les blessés graves de la transition ! Le ministère des Finances avait d’ailleurs rechigné de payer cash un avion sanitaire et deux médecins français pour venir chercher Tavio , alors que, selon les chirurgiens de Lomé qui ont opéré TAVIO, il avait à peine 1% de chance d’être sauvé ! Ce sont des frères maçons qui ont pesé sur la balance !
Et la famille AMORIN n’a même pas dit un petit merci !
Ah, je vais annoncer une bonne nouvelle aux lecteurs et internautes de tous poils. Mr. Zeus AZIADOUVO (Directeur de Publication de Liberté Hebdo) et le Docteur IHOU ont fait un « gentlemen agreement ». Quand il m’appelle « Dr. Foldingue », moi je l’appellerai « ZEUS AZIADOUVOR le PHACOCHERE ». Comme cela, on est quitte, et sans rancune ! Le pauvre a eu peur et crie partout que je profère des menaces de mort contre lui et ses journalistes.
Il n’a pas compris ce que j’avais écrit. J’ai dit que si j’étais « FOLDINGUE », j’aurais laissé mes copains s’occuper de lui, mais malheureusement que je ne suis pas « FOLDINGUE » , tout comme lui, il n’est pas « PHACOCHERE » . Je suis le Dr. IHOU David, Médecin Dermatologue, ancien agent secret, avec seize ans de renseignement et le grade de « Commandant », acquis dans le Service. Je viens de terminer un livre intitulé CAP TOWN et qu’un éditeur va publier bientôt. C’est un roman, mais avec des faits réels romancés.
Il a fallu que j’aie l’autorisation de mon ancien service, qui a parcouru le manuscrit avant de m’autoriser à le passer à un éditeur. Je suis libre de dire aujourd’hui que j’étais un agent Secret, mais aucun crétin ne peut savoir pour quel service j’ai bossé, sinon, je serais vraiment « Foldingue », n’est-ce pas vrai, mon cher ami Zeus, de Liberté Hebdo ?
La transition démocratique togolaise a échoué à cause de certains membres du Haut Conseil de la République (HCR), de certains leaders politiques, qui ne voulaient pas sentir KOFFIGOH, et bien sûr, à cause de la résistance du Général EYADEMA.
Mais, la transition a réussi à organiser le référendum constitutionnel et à obtenir la liberté de presse. Reste à savoir si les Togolais peuvent bien se servir de la Constitution (même révisée) et de la liberté d’expression !
David IHOU, Ancien Ministre de la Santé et de la Population