Exclusif ! Dr Séraphin Prao : 8000 milliards de francs CFA venant de la BCEAO et la BEAC stockés au Trésor public français

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 « L’an 1 » du Président Alassane Ouattara est marqué par des indicateurs macroéconomiques négatifs »

Lynx.info ? Vous êtes un ardent défenseur d’une souveraineté monétaire.  Qu’est ce qui bloque encore  pour que ce rêve se réalise en Afrique Francophone?

La question du franc CFA dérange la France et fait peur aux pays africains. La zone franc constitue le seul système monétaire colonial au monde à avoir survécu à la décolonisation.
Si la zone franc a une telle longévité, c’est parce que la France n’entend pas dire à ces anciennes colonies qu’elles peuvent et doivent avoir une monnaie libre qui soit au service du développement et les pays africains de la zone franc n’ont pas encore manifesté une réelle volonté au niveau de leur souveraineté monétaire. Les chefs d’Etat africains ont peur de parler du franc CFA puisque eux-mêmes, suppôts de la France, n’ont pas intérêt à aller contre la France au risque de se faire éjecter du pouvoir.
Il revient très souvent dans l’opinion publique, l’idée selon laquelle, la France se dressera contre le pays qui osera sortir de la zone franc. Cette crainte trouve son ancrage dans l’histoire. En effet, le président Sékou Touré avait manifesté une réelle indépendance politique et économique pour la Guinée en créant le franc guinéen en mars 1960.

Le franc guinéen a connu des attaques spéculatives juste pour discréditer la monnaie guinéenne et Sékou Touré. Au Togo, ancienne colonie allemande membre de la zone franc depuis 1949, le président Sylvanus Olympio s’élève également contre le franc CFA. Son désir de sortir de la zone franc est brûlant et la sortie de la zone est prévue pour 1963.  A cet effet, il avait donc préparé avec la banque de France un accord de rupture qui devait être signé le 15 janvier 1963. La menace se fit plus précise, lorsqu’après échec de toutes les tentatives françaises de le dissuader allant des propositions les plus mirobolantes à la menace de mort, Sylvanus Olympio lança un appel d’offre d’émission qui fut remporté par l’Angleterre qui émettrait cette nouvelle monnaie. Mais Sylvanus Olympio est assassiné juste avant que l’indépendance monétaire du pays ne soit acquise.

Les pays africains ont donc peur de la réaction française s’ils sortaient de la zone franc. Mais il faut espérer qu’un jour, les pays africains de la zone franc, travaillent à la création d’une nouvelle zone monétaire où la monnaie commune serait déconnecter de la France et au service du développement. Pour la première fois, en Afrique, lors de l’élection présidentielle au Cameroun, toute la classe politique a reconnu que le franc CFA joue contre le développement des pays africains de la zone franc. C’est une avancée.

Lynx.info : L’économiste Togolais  Kokou Nubuko  dit que  3.000 milliards FCFA de la BCEAO logés au trésor français. C’est ça qui explique que la France se porte mieux et les pays concernés mal ?

Les mécanismes du franc CFA jouent contre le développement économique des pays africains. Rappelons que  la coopération monétaire entre pays membres de la zone franc repose sur quatre principes : un institut d’émission commun à chaque sous-zone, une parité fixe, une garantie de convertibilité  illimitée et la libre transférabilité interne.

Et c’est au niveau de la supposée garantie  de convertibilité illimitée que la France va  imposer à ses anciennes colonies un compte dit d’opérations dont disposent les instituts  dans les comptes du Trésor français. Ce compte est un compte courant des instituts auprès du Trésor  où se fait la compensation des paiements entre les territoires et qui présente la particularité de pouvoir être débiteur.
La contrepartie de cette garantie c’est que les pays membres doivent déposer 50% (BCEAO) et 65% (BEAC) de leurs réserves de changes dans ce compte. Une certaine opacité entoure ces comptes d’opérations à tel point que les pays africains ne savent pas très exactement combien ils ont dans ces comptes. Il y a donc actuellement environ 8000 milliards de francs CFA venant de la BCEAO et la BEAC stockés au Trésor public français, soit plus de 12 milliards d’euros.

Il est hors de doute que le franc CFA profite à la France et ses entreprises opérant en zone franc.  D’ailleurs, la mise en place progressive de ce système est le résultat de choix stratégiques de la France mettant l’entreprise de colonisation au service des intérêts économiques français.

La France a toujours exploité ses anciennes colonies. L’indépendance nominale des années 1960 n’a rien changé. Monsieur Emile Moreau, gouverneur de la Banque de France de 1926 à 1930, disait ceci à monsieur Poincaré (président du conseil) : « j’expose au président du conseil que l’Angleterre ayant été le premier pays européen à retrouver une monnaie stable et sûre après la guerre, a profiter de cet avantage pour jeter sur l’Europe les bases d’une véritable domination financière.[…] les remèdes comportent  toujours l’installation auprès de la banque d’émission d’un contrôleur étranger anglais ou déguisé par la banque d’Angleterre, et le dépôt d’une partie de l’encaisse de la banque d’émission à la banque d’Angleterre, ce qui sert à la fois à soutenir la livre et à fortifier l’influence anglaise… » .
Cet large extrait montre bien que la France utilise nos réserves de changes pour soutenir son économie.  Selon Jacques ADDA,   La France face au sud, 1989, p.70, les réserves représentaient entre 1964 et 1975, autour de 10% des réserves officielles de change totale de la France; en  excluant l’or des réserves officielles, cette part se situait entre 10 à 20% de 1964 à 1967; Plus de 50% entre 1968 et 1969 à la suite des attaques  massives contre le franc. Autour de 5% entre 1971 et 1978.

Lynx.info : Une nouvelle république se créée avec des licenciements tout azimut en Côte d’ivoire. C’est un bon signe pour l’économie ?

Non , les licenciements ne sont jamais un bon signe pour l’économie. Lorsqu’il y a des licenciements massifs, cela a pour effet de déprimer la demande globale qui décourage en dernier ressort la production.  Au lieu  donc du million d’emplois promis lors de sa campagne électorale de 2010, ce sont plutôt des milliers de chômeurs en plus que le Président Alassane OUATTARA a déversé en Côte d’Ivoire depuis son accession à la magistrature suprême. En effet, à peine installé au pouvoir, le nouveau président a procédé à des purges impressionnantes dans l’Administration et les entreprises publiques, sous prétexte d’en réduire les effectifs jugés pléthoriques.

Selon le secrétaire général adjoint de l’Union Générale des Travailleurs de Côte d’Ivoire (UGTCI), ce sont près de 80.000 employés qui avaient, au mois d’août 2011, perdu leurs emplois des suites de la crise postélectorale. La Société de transport abidjanais (Sotra) a effectivement mis en œuvre  sa mesure de dégraissage de son effectif à travers le licenciement de quelque 1.200 agents.  Avant la Sotra, le Port autonome d’Abidjan (PAA) avait libéré , 120 agents peu après la mise en chômage technique de 322 travailleurs de la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI). Dans le secteur de l’hôtellerie, environ 400 travailleurs des établissements parapublics ont été licenciés ou mis en chômage technique. Un peu plus de 400 agents de la défunte compagnie aérienne nationale Air Ivoire sont sur le carreau depuis des mois après la liquidation de leur entreprise.

En plus des conséquences négatives sur l’économie, les licenciements massifs sont ciblés. Ces licenciements ont ceci de particulier : il s’agit de licencier ceux qui ne sont pas du RHDP et les remplacer par les partisans du président de la république. Cela renforce la fracture sociale que les ivoiriens cherchent depuis des années à résoudre.

Lynx.info : Le Pr  Mamadou Koulibaly se plaignait que les entreprises françaises se partagent toute seule  le marché ivoirien. Quelles peuvent être les conséquences pour le pays ?

 Du coup, elles profitent des guerres pour s’octroyer des marchés dans des arrangements politiques avec les gouvernants africains ou les chefs rebelles. D’ailleurs, le franc CFA aide la France dans l’exploitation des ressources naturelles des pays africains de la zone franc. Protégées des risques de change, les entreprises françaises font des profits colossaux, puisqu’elles  sont toujours en situation de monopole.

Il est vrai qu’avec un ami du président français à la tête de la Côte d’Ivoire, c’est le grand retour de la France en Côte d’Ivoire.
Le ballet de responsables français en Côte d’Ivoire s’est ouvert par  la présence de Sarkozy à l’investiture de Ouattara le 23 mai 2011. Ensuite ce sont des gradés de l’armée française, suivis du ministre de la Défense. Enfin, c’est au tour de François Fillon, le Premier ministre français, de faire le déplacement d’Abidjan. Le message est le même, reconquérir la Côte d’Ivoire.  Mais dans les faits la France n’avait  pas tant perdu la Côte d’Ivoire, au regard de tous les contrats que le régime de Laurent Gbagbo a renouvelés ou octroyés aux entreprises françaises. Comme le disent les opérateurs économiques français eux-mêmes, les relations d’affaires avec la Côte d’Ivoire sous Gbagbo étaient bonnes.

La nouveauté sous le régime de OUATTARA, c’est la volonté de refaire de la Côte d’Ivoire un marché captif, une zone exclusive pour les entreprises françaises, libres de toute concurrence indésirable. On dresse déjà les secteurs à partager (énergie, aéroports, ponts, grande distribution, etc.) et les appétits des conviés au festin sont étalés sans vergogne, à la limite de la décence.
Sous Laurent Gbagbo, la France perdait quand même du terrain. Elle ne contribuait plus qu’à environ 20% du PIB ivoirien, 30% des recettes fiscales et peu d’investissements. Les pays «étrangers» conduits par la Chine ont compensé largement le déficit. Depuis 2004, la Côte d’Ivoire enregistrait des taux de croissance réelle positifs (+1,6% en 2004, +1,8% en 2005 et 1,2% en 2006, 1,2% en 2007, 2,3% en 2008, 3,8% en 2009, 3% en 2010. Autrement dit sans la France, l’économie ivoirienne peut survivre.

En 2002, la Côte d’Ivoire restait le troisième partenaire commercial de la France en Afrique sub-saharienne après l’Afrique du sud et le Nigeria et son troisième fournisseur, et se situait au 37è rang des déficits commerciaux de la France.

La crise de novembre 2004  a laissé d’énormes séquelles dans la domination hexagonale. Les renseignements fournis par la Chambre de commerce et d’industrie de Côte d’Ivoire (CCI-CI) indiquent que les actes de vandalisme ont provoqué la destruction totale ou partielle de 120 entreprises dont, notamment, les intérêts français. Sur 147 filiales de grandes entreprises françaises recensées en Côte d’Ivoire, une soixantaine avaient purement et simplement fermé, le reste fonctionnant au ralenti après le départ de 75% des 350 expatriés employés par ces grandes entreprises.

Dans tous les cas, les entreprises françaises font la loi en Côte d’Ivoire. Ainsi Bouygues, à travers la SAUR, est-il l’actionnaire de référence de la Compagnie ivoirienne d’Electricité (CIE), de CIPREL (production d’électricité) et de la Société des eaux de Côte d’Ivoire (SODECI).
De même, les banques françaises sont-elles dominantes sur le marché avec leurs filiales : la SGBCI (pour la Société Générale), la SIB (pour le Crédit Lyonnais), la BICICI (pour la BNP).
Bolloré est très actif dans le secteur des transports à travers SAGA, SDV et sa participation dans SITARAIL, mais est aussi producteur de tabac grâce à SITAB, de caoutchouc via la SOGB, et est depuis peu un des exportateurs majeurs de café-cacao via DAFCI.
Dans le secteur du BTP , les grands groupes sont également présents (SETAO et COLAS, Bouygues, Jean Lefebvre).

Total et Elf possèdent 25 % de la Société ivoirienne de Raffinage. France Télécom, à travers son achat de 51% de Ci-telecom, devenue depuis Côte d’Ivoire Télécom, pour 1,05 milliard FF, et la création de la Société Ivoirienne de Mobiles (SIM), est devenu l’opérateur majeur des télécommunications en RCI .

EDF possède un tiers du consortium qui construit et gère la centrale d’Azito. Il est à noter également la présence très importante de PME fondées et/ou dirigées par des chefs d’entreprise français.
C’est le cas notable des travaux du 3ème pont d’Abidjan par Bouygues, des investissements de Côte d’Ivoire Télécom, etc.

De nombreuses statistiques indiquent que la France se présente de loin comme le premier partenaire commercial de la Côte d’Ivoire. Selon les données de la Chambre de commerce et d’industrie française en Côte d’Ivoire (CCIF-CI), les échanges commerciaux avec la Côte d’Ivoire fin 2009, avoisinaient les 12% loin devant les Pays-Bas (9%), les Etats unis (6%) et l’Allemagne (5%). En 2010, les échanges ont pris un plomb dans l’aile dû à l’attentisme observé par les opérateurs économiques du fait de l’année électorale. La France a totalisé alors 9,8% des échanges commerciaux, juste devant les Pays Bas (9,6%), l’Allemagne (4%) et la Chine (3,75%).

Il n’est pas bon pour le développement harmonieux d’un pays de laisser son économie aux mains des entreprises d’un seul pays. Ce monopole rend l’économie inefficace et joue contre le bien-être des populations. Pour rappel, avant l’avènement des entreprises de téléphonie en Côte d’Ivoire, la téléphonie cellulaire était un luxe que seuls les travailleurs pouvaient avoir accès. Mais aujourd’hui, avec la concurrence dans ce secteur, les prix des téléphones cellulaires et de la communication téléphonique  ont baissé. Ce qui est profitable à la population.
Les bienfaits de la mondialisation ne sont pas compatibles avec  la préservation des monopoles. L’économie ivoirienne pourrait tirer un large profit si elle était ouverte aux entreprises de tous les pays.
Lorsque Patrick Lucas, président Medef international déclare que «  Si la France s’en va, la Côte d’Ivoire n’a plus d’économie, mais Paris risque aussi de perdre 1.200 entreprises»,  cela signifie que les structures économiques de la Côte d’Ivoire sont encore colonisées par la France.

Lynx.info : Alassane Ouattara voulait 13.000 milliards pour reconstruire son pays. Beaucoup d’analystes dise  qu’il est plus orienté « prêts, dons » que « créateur de richesse ». Votre avis ?

Le président Alassane OUATTARA est très porté sur l’endettement comme source de revenu . depuis quelques années, un effort est fait pour ramener le stock de la dette ivoirienne à un niveau soutenable mais depuis un an, le nouveau régime risque de compromettre l’avenir des futures générations par sa propension poussée à l’endettement. 
Dette extérieure (milliards US$)
Pays              2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Côte d’Ivoire 16,8 13,9 13,3 10,3 11,85 11,81 13,43 11,96 13,79 14,48 11,34 11,6
Source : Indexmundi.com
Le service de la dette publique  coûterait à l`Etat ivoirien 500 milliards de francs CFA par an, c’est pourquoi le gouvernement espère l`annulation de tout ou une partie de cette dette qui représenterait un apport important au niveau des ressources dont pourrait disposer le Trésor ivoirien. En 2011, la dette publique en pourcentage du PIB est estimée à 65, 8% alors qu’il était de l’ordre de 63,3% en 2010.
La dette extérieure de la Côte d’Ivoire a atteint un niveau devenu intolérable de 10.000 milliards FCFA (contre 4000 milliards FCFA sous Gbagbo). Le gouvernement espère atteindre le point d’achèvement de l’initiative PPTE au terme duquel la Côte d’Ivoire devra bénéficier de l’annulation d’un peu plus de 3000 milliards de francs CFA, soit près de six milliards de dollars US, de créances.
L’actualité économique sous le président OUATTARA est meublée par les informations sur les aides et les prêts. Si ce n’est pas M. Simon Harkin le chargé d’affaire de l’ambassade du Royaume-Uni en Côte d’Ivoire qui signe avec le ministre de l’Economie et des Finances un accord portant annulation de 39 milliards de la dette ivoirienne en vers le Royaume-Uni, dans le cadre des accords du club de Paris ; c’est la BAD qui vient en aide au  Djuablin, en signant  un accord de don d’un montant 16,6 milliards de FCFA en faveur à la région de l’Indénié-Djuablin. La liste des dons et prêts est longue.  D’avril à décembre 2011, les ressources extérieures du budget 2011 s’élève à 851,3 milliards de franc CFA.
Le président OUATTARA ne cherche pas à créer la richesse pour amorcer un développement autocentré, il préfère la facilité avec un faible pour les dons et prêts. L’économiste doit gérer la rareté mais il doit également créer la richesse.

Lynx.info : Avec les confrères de la  RTI et Fraternité matin, Ouattara dit qu’il va faire l’année prochaine 9% ou 10% de taux de croissance et va le doublé dans 7 ans. Démagogie politique ou réalisme d’un économiste ?

« L’an 1 » du Président Alassane Ouattara est marqué par des indicateurs macroéconomiques négatifs. Le taux de croissance en 2011 est de – 5,1% alors que le taux d’accroissement naturel avoisine les 2,08%. Un des facteurs de cette piètre performance macroéconomique est la baisse du trafic de marchandises au port d’Abidjan. En effet, le trafic de marchandises au port d’Abidjan a chuté de 26% en 2011, en raison de l’embargo sur la destination Abidjan et de l`interdiction de la vente du cacao, premier produit d’exportation de la Côte d`Ivoire décrété par Alassane Ouattara appuyé  par l’Union Européenne et la CEDEAO.

Comment par extraordinaire, le président Alassane OUATTARA s’arrangera pour passer de – 5,1% à 8% voire 9% ? Lui-même reconnaissait qu’il fallait attendre quelques années avant de prétendre des taux de croissance élevés.  Dans son programme, à la page 26, il disait ceci :
« Nous pouvons viser un taux de croissance réel de 6% par an en moyenne, un peu moins en début de mandat, plus vers la fin ».

Pour atteindre cet objectif, le Président promettait des mesures dans divers secteurs de l’économie.
« dans un délai maximum d’un an, nous restructurons la dette intérieure  de l’Etat de manière à ce qu’elle ne pèse en aucune façon sur les opérateurs économiques dont la vocation n’est pas de prêter de l’argent à l’Etat » (page 26).

Or nous venons de dire plus haut qu’en 2011, la dette publique en pourcentage du PIB est estimée à 65, 8% alors qu’elle était de l’ordre de 63,3% en 2010.
Le président OUATTARA  n’est pas réaliste dans ses propos. Rien ne marche dans ce pays, les licenciements partout, la cherté de la vie, l’école, la santé, tous les secteurs de l’économie sont sous tension.

Le riz, aliment de base de la population ivoirienne, est aujourd’hui inaccessible pour la plupart des familles, non parce qu’il y a pénurie, mais plutôt parce qu’il n’est plus à la portée de tous les paniers. Le riz, le moins cher sur le marché appelé communément ‘’dénicachia’’, a presque doublé de prix au kilo. De 225 F, le kilo est passé à ce jour, à 350 FCFA voire 450 FCFA, selon les points de vente.
Ce n’est pas  aussi avec de milliers d’ivoiriens au chômage, la cherté de la vie, les universités fermées, un endettement aussi fort qu’on fabrique des taux de croissance. Le président-économiste le sait.

Lynx.info : Dans un de vos articles avec le confrère Le Grand Soir vous dites que le franc CFA est une monnaie coloniale qui retarde l’Afrique. Comment expliquez-vous que les politiques africains et la France soient si sourds  à vos cris ?

Ce n’est pas à la France de dire aux pays africains de prendre leur responsabilité. Bien au contraire, elle a intérêt à ce que la zone franc perdure, pour toujours dominer politiquement, économiquement et commercialement ses anciennes colonies. Certains pays ont choisi, lors de l’indépendance au après , de quitter la zone franc coloniale : Algérie (1963), Maroc (1959), Tunisie (1958), Mauritanie (1973), Madagascar (1973), Guinée (1960), etc.  A l’exception de la Guinée, de Madagascar et peut-être la Mauritanie, ces  pays se portent économiquement mieux que la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Cameroun ou la Gabon.

La monnaie peut nous asservir comme nous libérer. Les pays africains ont intérêt à se défaire de la tutelle monétaire française pour penser une monnaie qui aidera les pays à se développer. La monnaie est pour l’économie ce que le sang est pour le corps humain. Or, on sait que la quantité de sang dans le corps humain dépend de ce que l’être humain mange et de son âge. Les pays africains ne doivent pas voir peur de créer leur  monnaie. Ce n’est pas la France qui garantit le franc CFA, c’est bien le dynamisme de l’économie de la zone franc qui garantit la valeur de cette monnaie. Demain, comme aujourd’hui, ce sont les africains qui garantiront  la valeur de leur monnaie par leur travail.

Lynx.info : je vous remercie

Interview réalisée par Camus Ali Lynx.info

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