Edito : Le Sens et le Non-Sens des marches et des manifestations de rue

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Je n’ai pas été étonné de lire, dans la presse, que le collectif « Sauvons le Togo », que je considère aussi comme un FRAC bis, « propose l’organisation d’une courte transitions de douze (12) mois conduite sur la base d’une feuille de route consensuelle afin de mener à bien les réformes et l’organisation des élections en vue de l’encrage de l’Etat de droit, ouvrant ainsi la voie à une véritable réconciliation »… Je n’ai pas été étonné, mais c’est la plus stupide des propositions que j’ai lues ou entendues depuis des décennies !…

 A cinq mois des législatives, que notre pays est censé organiser, Mr ATA Messan AJAVON Zeus fait une proposition à la SANOGO Cette proposition est stupide pour trois raisons principales :

1- Pourquoi Faure GNASSINGBE et ses partisans, qui ont une majorité confortable à l’Assemblée Nationale, acquise lors des législatives de 2007, jugées transparentes et crédibles, vont-ils accepter l’idée d’une transition de douze mois, alors que nous sommes à cinq mois d’un scrutin qu’ils peuvent remporter à la loyale ?
2- De quelles bases « d’une feuille de route consensuelles » parle Me AJAVON, quand on sait que, même l’opposition seule, en son sein, n’a jamais réussi un consensus politique dans ce pays ?

      3-  Qui va diriger ce gouvernement de transition ? Me Zeus AJAVON ?

Ah ! Qui va contester encore qu’on a une piètre classe politique ? Me AJAVON, le gouvernement actuel du Togo compte en son sein sept ministres UFC et trois ministres CPP. Il aurait pu compter en son sein des ministres du CAR, de la CDPA, de l’ANC, de OBUTS etc. si les leaders de ces partis n’avaient refusé d’entrer dans le dit gouvernement de Faure GNASSINGBE. Alors, ça suffit les stupidités !

Quel est le sens d’une marche populaire? Elle est souhaitable et souhaitée pour montrer au pouvoir qu’une partie de la population n’est pas contente de telle ou telle situation. Le degré de mobilisation attestera de l’adhésion massive ou non à la cause en faveur de la marche. C’est un sens noble si les revendications politiques, sociales, scolaires ou universitaires sont pertinentes. On marche en général pour protester contre telle ou telle injustice, tel ou tel abus ou pour exiger tel ou tel droit. La marche est ponctuelle et la revendication est en général pour un sujet, rarement deux : par exemple, la retraite à 60 ans, qui a fait descendre plusieurs millions de français dans les rues des grandes villes, ou par exemple, une manifestation contre la vie chère.

Le 24 Mai dernier, le collectif « Sauvons le Togo » a appelé la population a une marche avec des « instruments de bruit », pour protester  pêle-mêle, contre la falsification du rapport de la CNDH, contre le Chef d’Etat Major de l’Armée Togolaise et le Chef du Groupement de la gendarmerie de Kara, contre le projet de loi portant sur le Code électoral et le découpage électoral, pour la réintégration des neuf députés virés de l’Assemblée Nationale, et contre la surpopulation carcérale…

Le 25 Mai dernier, au lendemain de la marche, l’Assemblée Nationale a adopté le Code électoral tant décrié par le Collectif, avec le « Oui » des  députés présents du Groupe de la Majorité Présidentielle et des députés du groupe UFC. Les sept députés favorables à l’ANC sont restés ( ?) sur leurs sièges, comme des momies n’ayant pas de groupe parlementaire, donc, ne pouvant pas prendre la parole par leur président de groupe ; les quatre députés du CAR ont manifesté leur désapprobation, par la bouche du Président du groupe CAR, qui a invoqué l’absence de « consensus », et les quatre députés sont sortis de l’Hémicycle. Le Président du groupe parlementaire CAR ne comprend toujours pas, lui aussi, que « le consensus n’est pas la règle, mais l’exception en démocratie ». C’est le vote qui est la règle dans une démocratie, les vrais démocrates ne perdent pas du temps à rechercher un hypothétique consensus pour des questions de code électoral. Quand l’opposition aura la majorité absolue, dans une prochaine Assemblée Nationale, elle peut voter à sa guise la modification du code électoral, du découpage électoral, sans perdre du temps à rechercher un « consensus » avec la prochaine opposition. Mais, pour avoir la majorité absolue au Parlement, l’Opposition doit « remuer le c… », et bien battre campagne. Oui, il faut « battre la campagne », au lieu de « battre le pavé », car, si on ne fait pas attention, ceux qui ne font que battre le pavé risquent de n’obtenir que dix (10) députés en tout et pour tout, et ils resteront encore dans l’opposition jusqu’en 2017… et vont user trois ou quatre paires de chaussures !

En 1994, l’opposition avait remporté les législatives avec 81 députés du Parlement et avec le même découpage électoral défavorable. Je me rappelle, qu’en ces temps-là, le CAR et l’UTD d’alors, avaient misé sur une campagne de proximité et cela avait payé. Et dire que l’UFC avait boycotté le scrutin !
Aujourd’hui, l’opposition, avec le nouveau code électoral et le nouveau découpage, peut aussi gagner les législatives, si elle veut bien se donner la peine de battre intelligemment les campagnes et même si les batteurs impénitents de pavés boycottent le scrutin, comme ils l’annoncent déjà. Ça va être plus difficile, mais rien n’est impossible en politique !
 
Le non-sens s’inscrit en lettres d’or sur les pancartes de certaines marches, quand d’abord on confond les genres. Des Organisations de Défense des Droits de l’Homme (ODDH) doivent prioritairement s’occuper des problèmes de Droits de l’Homme,les formations politiques s’occupent des questions politiques, les syndicats s’occupent du sort des travailleurs et des problèmes politiques, s’il n’y a pas la démocratie, comme dans la Pologne de LECH VALESA et de Solidarnosc. Le non-sens, c’est marcher pendant des années pour réclamer un fauteuil présidentiel qu’on n’a pas conquis lors d’une élection présidentielle jugée transparente. Le non-sens, c’est croire qu’on peut sauver un pays si on initie une marche tous les jeudis. Si on pense qu’on peut sauver le Togo, il faut briguer le poste de Président de la République et si  on est élu, après avoir convaincu le peuple par son programme, on vous verra à l’oeuvre…

On « plonge » plutôt le Togo, quand on mobilise la rue, un jour ouvrable, et qu’on met des jeunes sur le macadam, au lieu de leur chercher du boulot. Le 24 Mai dernier, plusieurs centaines de jeunes candidats au BAC I, ont eu toutes les peines du monde pour trouver le chemin qui mène à leur centre d’examen, parce que le prétendu « Sauveur du Togo » a provoqué un bordel du diable dans les rues de Lomé. Si quelqu’un propose aux autorités actuelles du pays un plan cohérent de réduction du chômage de 25%, moi je le proclamerai « Sauveur du Togo ». Si quelqu’un peut amener de grandes sociétés européennes ou américaines à délocaliser au Togo, avec trois ou quatre mille emplois directs ou indirects assurés, je le proclamerai « Sauveur du Togo ». Mais les sociétés vont plutôt fuir notre pays, si elles voient des jeunes défiler et faire du boucan dans les rues tous les jeudis et les samedis…
 Cela me rappelle cette dramatique histoire du milliardaire japonais SASSAKAWA et sa tournée ouest africaine. Reçu à Lomé en grande pompe à la maison du Parti d’alors, le milliardaire a regardé sans sourciller, trois mille jeunes animatrices et animateurs faire leurs singeries. Puis, il se rend au Ghana, où RAWLINGS l’a reçu, un coupe- coupe à la main, avec des jeunes qui défrichaient un champ. Et bien, le gigantesque projet agro-pastoral que SASSAKAWA destinait au Togo était allé au Ghana ! On connaît la suite…

Messieurs, ne confondons pas SAUVEUR et FOSSOYEUR du Togo. Ne confondons pas « Défenseur des Droits de l’Homme » et « Amuseur de galerie ». Comme on le dit souvent :

« La politique est une chose trop sérieuse pour la confier à des rêveurs ».
                                                    Dr David IHOU

 

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