Côte d’Ivoire : Libertés confisquées

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L’ivoirien est il propriétaire de sa pensée sous Ouattara ? Peut-on, dans notre pays avoir une opinion contraire à celle du régime sans craindre de se faire transporter par les pompes funèbres ? Sommes-nous libres de manifester dans notre pays sans que le pouvoir ne réprime la manifestation ? Voici autant de questions que le développement de notre actualité récente impose à notre esprit ? Il est évident que les tenants du pouvoir répondront qu’il est plus sûr de s’exprimer sous le régime actuel que sous les pouvoirs précédents. Mais le seul élément qui permettra de trancher, demeure incontestablement les faits.

Au regard des faits, il apparait clairement que sous Ouattara aucune manifestation, aucun débat civilisé ne peut avoir lieu. Nous sommes dans une sorte d’unijambisme politique où seuls les vainqueurs militaires ont droit à la liberté de pensée. Pour ne pas paraître évasif sur la question, il semble utile de donner deux exemples révélateurs.

Le premier exemple à trait à l’attaque du siège du principal parti d’opposition ivoirien, c’est-à-dire le Front Populaire Ivoirien (FPI). En effet, dans la journée du Samedi 18 Février 2012, des hommes armés de machettes, gourdins, fusils et de tout ce qui peut ôter la vie à un individu, ont fait irruption dans le siège de ce parti et ont pillé les biens, blessé certains occupants des lieux, vandalisé le siège et ont calciné le véhicule d’un responsable de ce parti.

Le Deuxième exemple est l’attaque, le 19 Août 2012, du siège du quotidien « Le Temps » opérée par des hommes aux mains chargées d’armes. Ils ont aussi pillé, vandalisé et brûlé le siège (une partie). Pour mieux comprendre ces attaques il importe de situer le contexte dans lequel elles interviennent. Elles interviennent dans un contexte de regain de violence. En effet, des hommes en armes ont menées plusieurs attaques dans différentes localités contre des cibles militaires. Le gouvernement par la voix de son Ministre de l’intérieur et de celle du Ministre délégué à la défense, ont ouvertement accusé le FPI et les pro-Gbagbo. Ces attaques apparaissent donc comme le prolongement des accusations. L’idée est de s’attaquer ouvertement à tout ce qui permet à ce parti et à ses partisans de s’exprimer. Les tenants du pouvoir et certains formalistes bassineront certainement nos consciences avec des termes flatteurs tels que « nous n’accusons personne », « Nous demandons une enquête » – qui ne viendront jamais- « nos militants ne sont pas responsables de l’attaque » etc. Peu importe. Pour ce qui nous concerne, nous poseront la question de savoir qui est ce qui a intérêt à s’attaquer au siège du FPI et à celui du quotidien « le Temps » ? Notre réponse est sans ambages. Il s’agit bel et bien du pouvoir de M. Alassane Dramane Ouattara et son appendice le RDR. Notre conviction se fonde sur des raisons qu’il convient d’exposer.

Première raison : Le pouvoir de Dramane Ouattara a une peur bleue de la contradiction et du débat politique. Dans son entendement, après sa victoire militaire, il y a lieu de mener une sorte de dirigisme politique, durcir les méthodes et ranger tout le monde dans un tunnel. Cela suppose une renonciation individuelle à la liberté de pensée pour mettre en définitive en place « le pouvoir d’un seul pour tout le monde, les dividendes pour la minorité au pouvoir» C’est donc un deuxième parti unique qui est en construction. Or cette fois ci, les contextes ainsi que les acteurs ne sont plus les mêmes, D’où la difficulté pour le régime de « discipliner » les pensées. Face à cette difficulté, la violence contre les « indisciplinés » apparait comme la seule arme. Le FPI et la presse pro-Gbagbo sont en l’espèce ceux qui refusent de caresser Ouattara et son régime dans le sens du poil. C’est pourquoi, ils sont les cibles d’attaques de la part du pouvoir. De plus, sa conception de la réconciliation nationale est tellement illisible que le FPI et la presse bleue se refusent de s’adonner au folklore que les réconciliateurs organisent. Cela n’est pas du goût du pouvoir qui aurait voulu que ces organisations rentrent servilement dans les rangs comme des gamins qu’on conduit en classe de maternelle.

Deuxième raison : Il n’est un secret pour personne que le parti de Ouattara, le RDR est un parti qui manie avec une dextérité inimaginable la violence. Ce parti n’a aucune culture démocratique. L’on se souvient que son Secrétaire Général avait affirmé (à Daloa Mars 2012) que quiconque s’oppose à Ouattara se retrouve au cimetière. Il avait même donné ordre à ses militants de mâter le FPI. Donc sur la question, notre conviction est sans frémissements. Alors après que le pouvoir ait montré son incapacité à sécuriser le pays, il n’a cessé de présenter les pro-Gbagbo comme les auteurs de toutes les attaques enregistrées ça et là. Et le matraquage psychologique ayant réussi, il ne restait au RDR et à ses loubards qu’à se défouler sur le FPI, « l’ennemi de Ouattara, l’ennemi de son pouvoir tribal, l’ennemi du progrès ».  Mieux, ce qui ne trompe pas la vigilance c’est que ces loubards-militants empruntent toujours le même moyen de transport : les mini cars appelés communément Gbaka. Ce fut notamment le cas, lors du meeting (autorisé par les autorités puis attaqué par les nervis du pouvoir) du FPI le 22 Janvier à Yopougon (place Ficgayo).

Troisième raison : Ne commettons aucune erreur d’analyse en faisant croire que ces attaques émanent des individus qui s’attaquent au FRCI. En effet, selon la rhétorique, ce sont des pro-Gbagbo. Alors si cela est vrai, comment ces pro-Gbagbo peuvent-ils détruire leurs fondations ? C’est une question de bon sens. On ne peut pas dire que les assaillants aimaient le FPI et la presse bleue au point de les « tuer » pour leur permettre d’agir librement. Seul Shaka Zulu peut tuer son épouse Nolivé par amour ! Et puis, toutes les attaques ont démontré que les assaillants n’ont jamais visé des cibles civiles, toutes leurs cibles sont militaires. Doit-on dire que cette fois-ci ils se sont trompés de chemin comme les chars de la Licorne qui se sont retrouvés par enchantement à la résidence du Président Laurent Gbagbo en Novembre 2004? Nous attendons que notre « Colombo national » Ahmed Bakayoko, vienne nous dire qu’il s’agit de pro-Gbagbo en coordination avec les exilés au Ghana.

Bref, ces attaques contre le siège d’un parti politique et d’un journal de l’opposition, est le summum des prouesses dictatoriales du régime de M. Alassane Dramane Ouattara. Elles nous montrent à quel point Ouattara veut devenir le propriétaire des pensées, des cœurs et des vies ivoiriennes.  En faisant taire l’opposition, ou en la tuant, il compte hisser sur sa tombe, l’étendard de la pensée unique. Se taire, ne rien dire, chuchoter entre quatre murs, succomber à un Accident Vasculaire Cérébral (AVC) face aux errements des gouvernants, tel est le vœu du régime d’Alassane Dramane Ouattara, le régime de la Confiscation des libertés.

Alain Bouikalo

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