L’Etat togolais grince et demande une main experte pour le réparer. Monsieur le Président,
Permettez-moi de vous dire que votre étoile, si brillante jusqu’à la mort de votre père, est en pleine extinction. A l’allure de votre gouvernance, elle va disparaître du ciel togolais plus tôt que vous ne le prévoyiez secrètement. Ceux qui, nonobstant les flaques de sang sur votre fauteuil en et sur vos costumes en tissus alpaga, vous avaient accordé le bénéfice du doute, sont laissé pantois par vos impairs sans ambiguité : au lieu d’aller à la conquête des coeurs par le travail et l’action, dans la vérité et la justice, au lieu de nouer une relation solide avec votre peuple, vous avez choisi d’être un chef de clan. Vous voilà magicien, les deux pieds dans le même sabot, produisant des illusions par le biais de trucages et de manipulations. Je vous le dit de bout en blanc, vous ne sortirez pas sain et sauf des nombreuses tâches ineffaçables qui se multiplient sur votre nom – plutôt sur votre règne – depuis votre intrigante accession à la tête de l’Etat!
Pour les compatriotes qui le vivent dans ses détails quotidiens, au Togo, pour ceux qui, en terres lointaines, l’observent, votre régime, de par sa brutale incompétence, est une violente souffrance pour la nation, une souillure dans le visage de la République, une catastrophe humanitaire. Contre toute espérance, vous avez affermi la tyrannie à défaut d’affiner la concorde nationale. Vos desseins qui sont très apparentés à ceux de votre père, naguère source d’angoisses pour le peuple, font de vous, non pas le président qu’on attendait mais un seigneur féodal disposant des ressources du pays comme s’il s’agissait d’un patrimoine privé.Toute justice, pleine et entière, régulièrement saisie, vous punirait de la plus sévère des peines. Mon origine togolaise me donne, de jure, l’autorité de vous interpeller, de m’insurger avec force et énergie contre votre gouvernance trop libertaire et de dénoncer la fourmilière de malfaiteurs adjacente à votre pouvoir.
Monsieur,
Lors d’une interview que j’ai organisée avec vous à l’été 2009 pour la radio de la Diaspora, Fmliberte, j’avais cru découvrir, un homme “poli, simple, facile à regarder et aimable”. Au même moment, il m’était apparu derrière votre façade trompeuse une conscience surchargée abritée par un homme double, pliant sous le poids d’abondants esprits de malfaisance. Je pouvais, crûment, vous le dire que je n’en serais nullement inquiété. Parce que vous étiez, à New York, sur le territoire américain, le territoire qui m’a accueilli à bras ouverts, lorsque le cruel régime de votre père avait en 1996, sans motif valable, laché à mes trousses ses faiseurs de basses besognes, le Capitaine Tchassama et l’adjudant Tchoutchou.
J’abrège. Les brûlantes pages de votre histoire seront un jour écrites et ses effroyables péripéties punies avec toute la rigueur de la loi. Au lieu de tempérer ses excès, le RPT, sous votre “savante” impulsion, commet d’inénarrables dérives, de démentielles abominations et des pratiques de basse police, symboles de la tyrannie. Quelques galonnés de votre armée tribale mettent leurs bottes sur la nation, lui rentrant dans la gorge sa soif de vérité et de justice, sous le prétexte menteur et sacrilège de la Sûreté de l’Etat. Votre Ministre de l’Administration Territoriale, Pascal Bodjona, l’esprit le plus vaporeux, à lui seul, décrit de façon intégrale tout votre système. Incendiaire dans tous les sens du terme, cet individu néfaste, négatif, né rebelle contre la morale et l’éducation parentale et issu de nulle école, mène tout. La perversité est dans son coeur et sa tête médite des projets iniques en tout temps. L’ex chef milicien du HACAME sait exciter les querelles et ses pieds se hâtent de courrir vers le mal. Envahissant et infestant, c’est son genre. Ce ministre omnipotent, anormalement riche, s’octroie tous les droits. Il peut, de chez lui, prendre le téléphone et menacer de mort des citoyens inscrits sur sa liste noire. C’est avec ce va-t-en-guerre insoumis aux lois et aux règles normatives de la société humaine que vous gouvernez. Comble de malheur, c’est avec lui que l’Union Européenne discute d’élections au Togo.
Dans l’ordre des responsabilités, vous êtes le premier coupable dans l’effroyable vent de la terreur qui souffle sur notre pays. Et, je suis certain que vous finirez par en pâtir et en payer le prix, seul, nez à nez avec le droit. Pour l’instant ça marche encore, votre autocratie vétuste. Mais pour combien de temps! Utilisant à plein temps son cirque de mensonges, le Parti-Etat-Rpt parvient ainsi à garder sa haute main sur le peuple, à flouer la communauté internationale. Une communauté, l’UE en tête, que vous avez pervertie, jusqu’à la rendre contemplatrice, voire complice du drame togolais. Aussi avez-vous fait du sabre le dieu de votre règne, lorsque vos voisins, eux, font du savoir et de la sacralité de la vie humaine les règles de conduite de leur marche résolue vers l’avenir.
Telle est la vérité, monsieur le président. Elle est saisissante. Car, nul ne pouvait croire que le gouvernement de la baïonnette allait survivre à votre père. Le célèbre martyr du 23 juillet 1992, Tavio Amorin avait dit de lui : “Votre maintien nous est pénible. Nous avons mal au Togo. Mais puisque vous y êtes, jouez au moins le rôle qui vous est dévolu. Ou dans un sursaut d’orgueil, de dignité et dans l’intérêt supérieur de la nation, démissionnez” . Les dégâts de cette main sont encore présents dans les mémoires. Je parle, vous vous en doutez, de cette main qui brisait les côtes, pilait les testicules, tordait les cous, larguait en haute mer, mutilait par gaz asphyxiant, profanait les intimités des femmes d’autrui, inoculait des poisons, tuait tous ceux qui ne ressemblaient pas au “modèle Eyadéma”. Il s’agit de cette main, si puissante qu’elle pouvait, du lever au coucher du soleil, arrêter, juger, condamner, emprisonner,exécuter ou gracier. Tout cela en un seul jour!
Souffrez que je vous le dise, ce “modèle” n’entrera, en bien, dans aucun livre d’histoire. Si ce n’est nous-mêmes, nos enfants y veilleront. Les douleurs des Togolais sont si intenses que dans leur entendement, tous les édifices, rues et places publics portant le nom Eyadéma devront être débaptisés. C’est en ce moment seulement que commencera la réconciliation nationale, une idée qu’étonnamment vous aussi avez entamé de galvauder avec la complicité d’un prélat de bas-fond, Monseigneur Nicodème Barrigah.
Monsieur le président, vous m’aviez invité à me rendre au Togo “pour voir et témoigner aux compatriotes de la Diaspora combien les choses ont évolué sur place en matière des droits de l’homme”. Permettez moi, dans ma gratitude pour votre bienveillante invitation, de constater, à la lumière des derniers événements, que votre appel était plutôt un piège. Rien ne prouve que si j’avais répondu à cette invitation, mon sort aurait été différent de celui réservé à un membre de notre Diaspora, Koffi Folikpo. L’infortuné n’a-t-il pas été kidnappé en pleine rue, en plein jour, devant des passants impuissants, jeté en prison sous de balbutiantes accusations, puis relâché sans la moindre excuse?
Avant Folikpo, d’autres comme Glokpon kokou Augustin et Bénissan Jacob, rentrés de France pour un bref séjour au bercail sont passés dans les chambres de torture (un camp dans le camp) du tristement célèbre gendarme, votre tortionnaire aggréé, Yark Dahémane. Ces quelques exemples suffisent pour éloigner de votre domaine une bonne frange de la Diaspora. Comment, dans ces conditions, pouvez-vous réconcilier votre pays? Comment pouvez-vous développer le Togo lorsque vous et vos hommes, démesurement enflés d’orgueil, traitez avec tant de mépris une si foisonnante Diaspora? Vous avez fait une guerre atroce au peuple pour être à cette place; mais il y a une chose que vous manquez de comprendre: il ne sert à rien de gagner une guerre si on ne peut pas faire la paix avec ses ennemis.
Les Togolais, moi inclus, vous ont vu dans l’oeuvre de destruction de l’UFC, créant une rude animosité entre camarades,parents et amis du parti. Beaucoup de Togolais, moi inclus, ont surpris votre méchanceté derrière la mise sous scellés de l’OBUTS et la liquidation de ses biens, meubles et immeubles. N’est-ce pas avec votre quitus que s’orchestrent les tabassages des membres du FRAC? Exactement comme cela s’était passé au petit matin du 23 octobre 1992, quand les militaires de votre père, à la manière des nazis conquérants, avaient fait pleuvoir gifles, molestages et insultes ordurières sur d’honorables personnalités du Haut Conseil de la République, l’organe législatif de la transition. Que de péripéties douloureuses à travers votre personne et votre règne! Vous êtes dans le mauvais rôle au mauvais moment. Vous êtes un chef de clan, un président sectaire, un homme dangereux. Ne vous y méprenez pas, le prix de cette parjure, pour le premier magistrat que vous prétendez être, ne peut être que la mort.
Il “NOUS” est parvenu que vous avez engagé des procès contre des directeurs de presse pour “diffusion de fausses nouvelles et atteinte à votre honneur”. Je ne sais quel sens revêt pour vous ce précieux mot “honneur” mais, excellence monsieur le président, je puis vous dire avec hargne et précision que vous n’en avez aucun. Votre célibat à 44 ans, synonyme, en Afrique, de débauche outrée, votre flânerie dans l’univers artificiel des paradis féminins, de facto, vous le dénient! C’est votre vie privée. Mais ça vexe, parce que la République en pâtit. Honneur! Pourquoi croyez-vous avoir un honneur à défendre lorsque notre pays que vous avez détruit avec le concours de véreux affairistes étrangers est devenu, par vos soins, une balayure, un Etat tombé en rebut, une nation assistée, bref la risée du monde civilisé?
C’est troublant pour “NOUS”, que les Togolais en soient toujours à chercher, désespérément, le chef qui préside à leur destinée. Non seulement qu’ils ne trouvent pas un, ils sont contraints de subir, en lieu du parapluie protecteur d’un rassembleur, la terreur de votre pléthore de troufions habillés et payés à leurs frais. Que feriez-vous si vous étiez dans le camp des opprimés? Par la faute de votre parti, la République est gravement atteinte dans son âme. Elle grince et demande une main experte pour la réparer.
Je conclus. Gouverner un pays, ce n’est pas agiter à l’infini son droit de vie ou de mort sur les citoyens . Ce n’est pas, loin s’en faut, passer le temps à mettre à jour la liste secrète des opposants à égorger. C’est sûrement quelquechose d’autre que le RPT n’a pas. Vous sachant bien loin du compte, je vous convie à admettre, monsieur Faure Gnassingbé et cher compatriote, qu’il n’y a aucun problème à être un ancien Chef d’Etat. Vous voir accroché au pouvoir comme une sangsue prédatrice “NOUS” est pénible. Vivement que votre règne prenne fin.
Washington DC, 18 septembre 2010
Kodjo Epou
Journaliste