Togo. Trompe – l’oeil et l’arrogance en plus !

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Combien de fois les prétendus grands travaux se sont révélés des mirages qui n’ont jamais changé le sort de nos populations ? Trompe-l’oeil, l’APG, dont Assouma déclare la caducité, parce que le régime n’en a plus besoin.

 

 

Togolais viens, bâtissons la cité“, nous enjoint notre hymne national. Dans ces deux propositions de la chute du premier couplet, très simples, aucune arrogance, aucune agressivité, aucune provocation, mais une invite qui laisse supposer la présence d’un Togolais ou d’un groupe de Togolais qui s’adresse à un autre Togolais, ou à un groupe de Togolais. Et la raison de l’invite, le but est la construction de la cité. Il n’y en a pas d’autre. Et c’est simple. À une époque où les autorités officielles ne voulaient plus entendre cet hymne, avant d’y revenir sous la pression du peuple à la volonté terriblement infrangible, invincible, certains avaient voulu nous faire croire que c’était l’hymne de la haine, voulant donc, pour cette raison, l’écarter au profit de « L’écartons ». Bien sûr, qu’il s’agit là de l’arrogance de gens qui se croient tout permis, y compris l’interprétation qu’ils souhaitent donner aux évènements, aux textes…Ils ne l’ont pas fait seulement concernant le contenu de l’hymne national, mais ils l’ont fait aussi concernant les autres textes de la République, la Constitution en particulier.

Que devons-nous penser aujourd’hui, en chantant Terre de nos aïeux, et surtout ces deux versets ici mentionnés ? Bâtissons-nous la cité ? Ou au contraire, ajoutons-nous les pierres, les germes de la haine aux pierres, aux germes de la haine, comme le prétendaient ceux qui avaient voulu imposer « L’écartons » ? Et ceux qui hier avaient condamné Terre de nos aïeux et s’égosillent aujourd’hui à le faire retentir bien haut, faut-il considérer leur conversion aux valeurs prônées par cet hymne comme étant sincère ? En tout cas, quand un juriste, le plus haut juge professionnel de la République, le président de la Cour Constitutionnelle fait des déclarations, on suppose que c’est après avoir attentivement observé l’état de l’édifice en construction, après s’être assuré qu’il n’émettrait pas un jugement erroné, qui pourrait contribuer à faire s’effondrer l’édifice, risquant d’écraser, de tuer non seulement ceux qui le construisent ou prétendent le construire eux-mêmes, mais aussi tous ceux qu’il est censé abriter.

Or, il y a un certain M. Assouma Aboudou, président de la Cour Constitutionnelle qui vient, il y a quelques jours, de faire une déclaration fracassante ( ce n’est pas ici un jeu de mots ) allant plutôt dans le sens de la destruction de l’édifice, si édifice il y a. Normalement, si édifice il y avait, ou au moins projet d’édifice il y avait, on devrait s’arrêter, non seulement pour s’interroger sur le sens de la déclaration d’Assouma, mais aussi réclamer et obtenir sa démission. Si Assouma ne démissionne pas, comment pouvez-vous continuer à bâtir en toute quiétude? Est-on sûr que cet homme ait encore tous ses sens et soit en mesure d’observer objectivement et rationnellement l’édifice en construction ? A moins que, à la place d’un vrai édifice, l’on soit en train de monter un décor en carton-pâte, un décor en trompe-l’œil, comme on le fait au théâtre. C’est bien ce qui semble être la réalité. Si tout le monde est d’accord là-dessus, tout est trompe-l’œil, à commencer par l’institution que préside Assouma, la Cour Constitutionnelle. Et donc, la CENI, l’Assemblée Nationale…Trompe-l’œil certains idéaux affichés qui ne changent pas la nature du système, parce que la mentalité de ses tenants n’ayant pas changé : combien de fois n’avons-nous pas eu ceux de paix, de réconciliation, de solidarité, de révolution verte, aussi creux dans le fond que le ventre vide de la majorité de nos concitoyens que l’on rassasiait de slogans et de chansons d’animation ? Combien de fois les prétendus grands travaux se sont révélés des mirages qui n’ont jamais changé le sort de nos populations ? Trompe-l’oeil, l’APG, dont Assouma déclare la caducité, parce que le régime n’en a plus besoin. Trompe-l’oeil, tous les dialogues qui n’ont jamais réellement abouti à la résolution de la crise togolaise. Trompe-l’oeil, la Commission Vérité-Justice-Réconciliation dont les séances ont été, d’un côté, pour les vrais criminels, des exercices pour tenter de se dédouaner, de se déculpabiliser en vue d’apparaître comme des innocents, mais toujours prêts à recommencer les mêmes forfaits dès que l’occasion se présenterait, et de l’autre côté, pour les vraies victimes, un supplice supplémentaire, d’autant plus que les récits des faits douloureux qu’elles avaient subis devenaient le couteau qu’on leur retournait dans la plaie. Puisqu’il n’y a eu à ce jour, ni repentir des criminels, ni réparation du mal.
 Nous serions, comme des comédiens, d’accord avec la mise en place des trompe-l’œil, complices même …peut-être conscients de la chose, puisque nous avions tous commencé à réclamer de vraies pierres, c’est-à-dire des réformes pour remplacer le carton-pâte. Conscients, et pourtant…

Des fois j’ai l’impression qu’il nous plaît d’y jouer nos rôles. Croyez-vous que c’est après la désignation des candidats de l’un et de l’autre parti ( de l’opposition surtout ), après le démarrage de la campagne de la présidentielle qui bat son plein déjà ça et là, après même les propos amers échangés entre les partis de l’opposition qui se considèrent comme rivaux…que l’on reviendra pour parler des réformes, des vraies pierres ? Le château en carton-pâte évolue : normal que ceux qui ont toujours résidé dans ce genre de décor et font de cette habitude leurs délices se réjouissent. Qui pourra les en empêcher? À moins que ceux qui veulent un édifice réel et solide frappent un grand coup : qu’ils réclament unanimement la démission d’Assouma et en fassent la condition sine qua non de quelque processus électoral que ce soit. Sur cette lancée, exiger une nouvelle fois les réformes. Au lieu de demander, comme je l’ai lu, avec ahurissement, je l’avoue, que l’on organise d’abord les élections locales avant la présidentielle. À six mois de la date normale de la présidentielle ? Dans le château en carton-pâte, bien sûr que l’opposition aura ses maires, ses conseillers municipaux etc. Si donc c’est cela que veut l’opposition, pourquoi ne l’avait-elle pas dit deux ans, un an plus tôt ? Observant nos mœurs politiques, j’ai envie de rire, mais je ne le fais pas. Je dis simplement ici trois choses:

1) Assouma encore président de la Cour Constitutionnelle en 2015 ne proclamera pas un autre résultat de la présidentielle que celui que nous connaissons déjà. Ne s’est-il pas fait l’écho de la réponse de Gnassingbé à la demande des réformes de l’opposition ? Une telle maladresse que nos leaders de l’opposition ne me semblent pas en mesure d’exploiter à fond.

2) Ce ne sont pas les locales, tenues avant la présidentielle ( diversion ?) qui nous apporteront le changement souhaité par le peuple. D’ailleurs, sans réformes, il est presque sûr que le RPT-UNIR les gagnera.

3) Si le RPT-UNIR est sur la lancée de la présidentielle qu’il est sûr de gagner, aucune force, aucune puissance au monde ne peut le faire revenir en arrière pour organiser d’abord les élections locales. Les anciens disent : « Même si vous sautez si haut que vous pouvez attraper le soleil », vous ne changerez rien à l’obstination des tenants du système RPT-UNIR. C’est bien ce que ces derniers doivent être en train de dire dans le dos des leaders de l’opposition. Alors, restons sur terre.
Sur terre, ce que j’espère, ce qui est à la portée de l’humain, c’est que de plus en plus de Togolais détectent, identifient les trompe-l’œil et les refusent, refusent l’arrogance d’un système qui croit pouvoir nous mener par le bout du nez.

Sénouvo Agbota ZINSOU
 

 

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