Après cet arrêt, «les voies de recours internes sont épuisées. Il reste maintenant les voies à l’international», a affirmé à l’AFP un proche de Karim Wade qui s’est exprimé sous le sceau de l’anonymat et n’a pas voulu donner plus de détails.
La Cour suprême «rejette les pourvois de Karim Wade contre l’arrêt du 23 mars» prononcé par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI, juridiction spéciale), a déclaré le président de l’audience, Abdourahmane Diouf, faisant lecture de son arrêt à Dakar.
Karim Wade, fils de l’ancien président sénégalais (2000-2012), Abdoulaye Wade, a été condamné en mars à six ans de prison et à plus de 210 millions d’euros d’amende par la CREI.
Les arguments de la défense de Karim Wade pour casser le verdict du 23 mars, liés notamment à «l’impartialité» de la CREI, sa «composition irrégulière», «le privilège de juridiction» en raison de sa qualité d’ancien ministre de M. Wade, ont été jugés «non fondés» par la Cour suprême.
L’arrêt de jeudi a été rendu en l’absence de Karim Wade, toujours en prison, et de ses avocats qui avaient boycotté l’audience ouverte le 6 août pour l’examen de leurs pourvois en annulation, expliquant ainsi protester contre «la violation de leurs droits».
Quelques dizaines de partisans de M. Wade s’étaient rendues jeudi à la Cour suprême. Ils se sont ensuite dispersés sans incident après la lecture de l’arrêt de la juridiction qui a duré environ une heure et demie, a constaté un journaliste de l’AFP.
Des éléments de la police antiémeutes étaient déployés tout autour du siège de la Cour suprême, en bordure de mer, près du centre-ville de Dakar.
Karim Wade était accusé d’avoir illégalement acquis 178 millions d’euros par le biais de montages complexes lorsqu’il était conseiller puis ministre de son père, ce qu’il nie.
Son patrimoine comprend, selon l’accusation, des sociétés au Sénégal et à l’étranger, des comptes bancaires, des propriétés immobilières et des voitures.
Arrivé au pouvoir en mars 2012 après avoir battu Abdoulaye Wade au second tour de l’élection présidentielle, le président Macky Sall avait réactivé la CREI, une juridiction créée par l’ancien président Abdou Diouf (1981-2000).
Verdict «politique»
Plusieurs responsables de l’ancien régime, dont d’anciens ministres ont été poursuivis ou condamnés dans le cadre de cette traque des biens présumés mal acquis.
Karim Wade est un des responsables du Parti démocratique sénégalais (PDS, opposition), formation créée et toujours dirigée par son père.
«Le président Macky Sall utilise la justice pour éliminer un adversaire politique», a déclaré à la presse à l’issue de l’audience de jeudi le porte-parole du PDS, Babacar Gaye, en allusion à Karim Wade.
Le PDS, «après avoir épuisé toutes les voies (judiciaires), va utiliser des voies politiques pour régler une question éminemment politique», a dit M. Gaye.
À l’ouverture de son procès, le 31 juillet 2014 après près de 16 mois de détention préventive, Karim Wade s’était présenté comme «prisonnier politique».
La défense de Karim Wade avait saisi à son sujet un organe de l’ONU, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, basée à Genève. Dans une décision datée du 7 mai 2015, ce groupe avait estimé que «la privation de liberté de Karim Wade est arbitraire» et avait «demandé au gouvernement du Sénégal de prendre les mesures nécessaires pour remédier au préjudice subi».
D’après un des avocats de Karim Wade, Me Seydou Diagne, cette «privation de liberté» fait référence à «la période allant de l’instruction au procès».
L’État du Sénégal n’était pas représenté lors de l’examen de cette plainte par le groupe de travail et a été «jugé par défaut», il a demandé que l’affaire soit à nouveau examinée, a précisé à l’AFP un responsable du ministère de la Justice.
Deux jours avant l’annonce du verdict du 23 mars, il avait été désigné candidat à la prochaine présidentielle par le PDS. Sa condamnation ne le déchoit pas de ses droits civiques, selon le ministère sénégalais de la Justice.
Son père, Abdoulaye Wade, a toujours dénoncé un «procès politique» visant à l’écarter de la présidentielle qui doit se tenir en 2017 ou en 2019, en fonction d’une réforme visant à réduire à cinq ans le mandat du président actuel Macky Sall.
Malick Rocky Ba