Mediapart révèle le contenu des auditions de Nicolas Sarkozy face aux policiers lors de sa garde à vue, les 20 et 21 mars. Nous dévoilons aussi l’ensemble de ses déclarations devant les trois juges qui l’ont mis en examen. L’ex-président y apparaît acculé, se défaussant sur ses proches, Claude Guéant et Brice Hortefeux.
Nicolas Sarkozy a eu le temps de se préparer. Contrairement à ce qu’il a laissé entendre, jeudi 22 mars, sur TF1, l’ancien président de la République était informé depuis le 7 février dernier de sa future audition « en qualité de mis en cause » par les enquêteurs de l’Office anticorruption (OCLCIFF), dans l’affaire des financements libyens. Mais malgré le mois et demi de préparation dont il a pu profiter, l’ex-chef de l’État a montré des signes de faiblesse patents face aux policiers lors des six interrogatoires qu’il a subis en garde à vue les 20 et 21 mars, puis face aux juges d’instruction Serge Tournaire, Aude Buresi et Clément Herbo.
Soupçons de financement libyen : “Je n’ai jamais trahi les Français (…) je ferai triompher mon honneur”, assure Nicolas Sarkozy
Mis en examen ce mercredi soir pour “financement illégal de campagne électorale et recel de fonds publics libyens”, Nicolas Sarkozy, soupçonné d’avoir perçu 5 millions d’euros en liquide de la part du régime de M. Kadhafi, est intervenu ce jeudi soir, dans le JT de 20h de TF1 pour se défendre.
“D’abord, je veux dire la profondeur de mon indignation. Je suis venu ici parce que je dois aux Français la vérité : je n’ai jamais trahi leur confiance, a immédiatement annoncé Nicolas Sarkozy. Les faits remontent à 10 ans, l’enquête a commencé il y a cinq ans. Je ne suis pas au-dessus des lois mais je ne suis pas en-dessous non plus. Je n’ai reçu aucun document, j’ai reçu un coup de téléphone et on m’a indiqué que j’étais mis en garde à vue à 8 heures du matin et Mediapart était au courant 10 minutes après”.
“Pas des charges, des indices”
L’ancien chef de l’Etat a contesté les éléments avancés par la justice pour justifier sa mise en examen. “Ce ne sont pas des charges, ce sont des indices et on ne peut pas dire qu’ils soient concordants”, a-t-il déclaré. “J’ai répondu pendant près de 2 jours à des questions qui m’ont été posées sans n’être jamais en difficulté. Aucun élément nouveau n’a été produit. Mais moi j’ai des documents à produire devant les Français. Rappelez-vous, entre 2011 et 2013, j’ai été poursuivi sur ma campagne de 2007, cette fois-ci parce qu’elle aurait été financée par du liquide obtenu par un abus de faiblesse. C’est l’affaire Bettencourt. Plusieurs années après, on revient sur la campagne de 2007 mais cette fois-ci elle n’aurait pas été financée par Mme Bettencourt mais par un dictateur comme Kadhafi.”
Selon lui, les policiers ont formulé un chiffre de 38 000 euros au sujet des sommes perçues. “On est bien loin des allégations folles de M. Kadhafi et de Mediapart parlant de 50 millions d’euros”.
Il conteste l’instruction
Nicolas Sarkozy a ensuite brandi un document présenté comme un procès verbal signé par les officiers de police judiciaire qui ont enquêté dans le cadre de l’enquête pour faux contre Mediapart. “Il existe donc une forte probabilité pour que le document fourni par Mediapart soit un faux, le rendant déontologiquement impropre à une diffusion dans les journaux”, a-t-il dit, citant le document.
Concernant les restrictions de liberté qu’il subit dans le cadre de sa mise en examen, Nicolas Sarkozy en a contesté la logique. “On me demande de ne pas voir MM. Guéant et Hortefeux. Quand vous pensez que l’instruction a débuté il y a cinq ans, si j’avais voulu me mettre d’accord avec eux, j’avais cinq ans pour le faire.”
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L’instrumentalisation Kadhafi
Pour l’ex-président de la République, ces accusations ont été montées de manière mensongère par Mouammar Kadhafi et son entourage. Il conteste d’ailleurs le motif invoqué dans l’enquête selon lequel il aurait fraudé les élections présidentielles pour aider l’Etat libyen. “J’ai été le seul chef de l’Etat qui a reçu les opposants de Kadhafi, qui s’est battu à l’Onu pour que nous ayons un mandat pour que ce dictateur ne puisse plus continuer à imposer la terreur à son peuple.” “Je n’ai jamais rencontré Ziad Takieddine”, a ensuite martelé Nicolas Sarkozy. Cet homme a affirmé aux enquêteurs avoir remis à Claude Guéant cinq millions d’euros en liquide dans des valises afin que celui-ci les remette à Nicolas Sarkozy.
“Quand on rentre au ministère de l’Intérieur, on doit dire avec qui on a rendez-vous”, a-t-il ensuite répété pour contester les affirmations de M. Takieddine qui avait indiqué qu’il pouvait y pénétrer uniquement en présentant son nom. “Ces gens-là, qui sont des assassins, des criminels, des délinquants, ne produisent aucune preuve. Des gens là-bas le disent, il y aurait forcément eu des traces. Kadhafi prenait tout en photo. C’était un fou, un illuminé qui prenait certainement des produits stupéfiants.”
“Je n’ai pas l’intention de plaisanter avec ça. Je prends les choses au sérieux. Cela me prendra un an, deux ans ou dix ans, mais je ferai triompher mon honneur”, a-t-il indiqué en expliquant qu’il poursuivrait les acteurs de ce dossier. “Il faut des preuves, c’est trop grave”, a-t-il conclu.
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