Les émeutes qui ont cours en ce moment en Côte d’Ivoire et qui visent la Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE) posent, au-delà de l’actualité, la question du modèle de financement des infrastructures en Afrique, notamment de la forme que prennent les fameux partenariats public-privé.
Le modèle que privilégient les marchés et les bailleurs de fonds voudrait que des acteurs privés préfinancent les infrastructures et les exploitent pendant un certain temps, afin de récupérer leur mise et de se faire une marge confortable. Les Etats leur garantissent un prix rémunérateur (souvent outrageusement) sur 25 voire 30 ans. En réalité, il s’agit d’un endettement réglé directement par le consommateur via ses factures. Un endettement à des taux souvent usuraires.
Les bailleurs de fonds encouragent les gouvernements à augmenter les tarifs de l’électricité afin de renforcer l’attractivité de leurs secteurs énergétiques et d’attirer les fameux investissements directs étrangers. Mais voilà. La fameuse classe moyenne africaine capable d’absorber les surcoûts entraînés par ces politiques d’ajustement tarifaire est minuscule. La majorité des consommateurs sont des personnes économiquement fragiles, pauvres ou toujours à la lisière de la pauvreté, et qui ne peuvent pas objectivement suivre ce rythme.
La majorité des Africains sont les victimes de leur fameuse émergence sans transformation économique, de leur croissance appauvrissante.
Et les mouvements de protestation actuels viennent nous ramener tous sur terre. Ils sont une catastrophe notamment pour le groupe Eranove, maison-mère de la CIE, qui avait l’intention, jusqu’en avril dernier, de lever des fonds en Bourse pour financer des infrastructures ayant vocation à être amorties par le consommateur final africain. C’est lui qui se rebiffe actuellement dans les rues de Daloa, Yamoussoukro ou Korhogo.
Théophile Kouamouo
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