Merci pour le grand honneur de pouvoir dire deux mots sur le pourquoi c’est essentiel de libérer le
vite possible Laurent et Simone Gbagbo, Charles Blé Goudé et tous les prisonniers politiques. L’impasse électorale ainsi que ce qui s’est passé par la suite, « la logique de l’absurde » comme l’a appelé le sénégalais Pierre Sané, n’est pas digne d’une civilisation avancée.
C’est Gbagbo même qui dit dans le film Un homme une vision que nous sommes encore dans l’antiquité en ce qui concerne nos institutions, car c’est encore la force brute qui cherche de imposer sa vision du monde, quand la base d’un état moderne ou une institution globale, c’est la soumission de l’armée au pouvoir civil. Dans un monde de l’ultralibéralisme sans repères, la pensée de Laurent Gbagbo et tout ce que le FPI représente a beaucoup à enseigner aux générations futures. Un jeune comme Charles Blé Goudé qui a prôné la non violence ne devrait jamais subir la prison. Le militantisme non-violent a toujours fait peur à ceux qui veulent gouverner le monde. En son temps, Winston Churchill craignant la non-violence de Gandhi combiné avec son pragmatisme, le vit comme un adversaire dangereux : en 1935 il a dit: « Le Gandhisme et tout ce qu’il représente doivent enfin être combattu et écrasé. »
Jean Ziegler m’a dit que si Willy Brandt était encore en vie, Gbagbo n’aurait jamais été déporté à la Haye. Avec le cas Gbagbo, on constate que : les vrais parties politiques socialistes sont morts en Europe ; la communauté international n’existe pas ; les rebelles en Afrique sont souvent (le FPR au Rwanda, les rebelles aux Congo contre Mobutu et Kabila père, les Forces Nouvelles en Cote d Ivoire) un “réajustement de la politique coloniale” comme as dit le Ministre Ivoirien Nyamen Messou ; on comprend aussi qu’une vraie justice, dans un monde où le pouvoir n’est pas démocratique, ne peut pas exister.
En 2008, lorsque je travaille un film documentaire à propos des dessinateurs de presse africains sur la ligne de front dans la défense de la liberté d’expression, Résistants du 9ème Art, j’ai eu aussi quelques images du magazine satirique ivoirien Gbich ! Le rédacteur en chef adjoint Mendozza Y Caramba, m’a raconté une anecdote: un jour, il a reçu un appel téléphonique qui a annoncé l’arrivée du Président Gbagbo. Mendozza, dont la bande dessinée était très critique de Gbagbo, Les Habits neufs du Président, se mit à rire, en pensant d’abord que c’est une blague. Laurent Gbagbo est arrivé 10 minutes après dans son bureau ; il a fait l’éloge de leur travail, les a complimenté, en dépit de leur satire mordante contre lui. J’avais déjà entendu une anecdote similaire d’un autre célèbre président africain, Nelson Mandela, que j’ai décidé d’utiliser dans le film. Mandela avait appelé Jonathan Zapiro, qui a été un dessinateur à l’avant-garde de la lutte anti-apartheid et lui avait dit « grand travail, vous faites votre travail», même si Zapiro, maintenant que le parti de Nelson Mandela, le Congrès national africain (ANC) est au pouvoir, est férocement attaqué pour ses dessins animés. Mais je n’ai pas oublié que Gbagbo a eu le même esprit que Mandela.
Cet esprit du droit à la différence syndicale, de presse, des parties politique est si essentiel dans un monde qui devient de plus en plus homogène. Je continue mon documentaire avec des témoignages dédiés à cette lutte jusqu’à la libération de la Côte d’Ivoire. Ce sont le courage, la détermination et les vraies valeurs que j’ai apprises en lisant plus d’une centaine de témoignages écrits par les Ivoiriens qui font face aux pires adversités dans une lutte qui ne s’est pas arrêtée. I also have a dream, que les fils et filles dignes de l’Afrique puissent réaliser leurs rêves sans devenir des martyrs.
Nicoletta Fagiolo
Réalisatrice de documentaire Italien, Rome 21 Juin 2016
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