Lettre ouverte pour la cause du Togo

0

Excellence M. le Président de la République, Faure Essozimna Gnassingbé,

M. le Premier ministre,

M. le Président de l’Assemblée Nationale,

Honorables Députés,

MM. les Ministres,

Excellences MM. les Ambassadeurs,

Citoyens Togolais de l’intérieur et de la diaspora,

A vous, amis et ennemis de la nation togolaise,

A vous les martyrs qui avez versé votre sang pour que notre patrie soit,

A vous nos ancêtres et aïeux,

A Dieu Tout-Puissant.

L’heure est venue pour un bilan et une critique constructive pour l’avancement, le développement et la modernisation de notre cher pays le Togo. Loin de m’aventurer dans une politique politicienne sans vision aucune, je viens humblement, comme tout citoyen honnête, comme tout Togolais résolument mû par la ferme volonté d’apporter sa petite pierre tangible ou intangible à la construction de notre chère patrie, vous apporter mon point de vue en ce qui concerne l’édification du Togo et l’épanouissement des Togolais et Togolaises.

Notre cher pays le Togo portait, dans un passé pas trop lointain, le pseudonyme de « Suisse de l’Afrique » ; mais les péripéties qui ont jalonné le cycle de vie de notre pays, comme toute civilisation pourrait l’expérimenter, ont affaibli et assailli notre patrie dans bien de domaines, la conduisant à la situation actuelle que nous connaissons.

Cette situation affligeante que connaît notre pays depuis la fin des années 80 a entamé le peu d’enthousiasme et d’espoir qui subsistait encore chez plus d’un. Cependant, loin de se laisser entièrement anéantir par la décadence et la déchéance continue que connaît notre pays, une certaine frange de nos compatriotes a su entretenir et vivifier la petite lueur qui semble encore vaciller au bout de la mèche de notre chandelle. Les événements et mouvements sociopolitiques malheureux qui composent le quotidien des Togolais sont très révélateurs et pousseraient le plus logiquement au désespoir. Pourtant, pour ma part, je fais encore partie de ceux et de celles-là qui, inlassablement, sont porté(e)s à remettre toujours l’ouvrage sur le métier. C’est pourquoi l’on doit se laisser porter par la persévérance pour apprendre à partir de ses erreurs. Cette donnée constitue, en mon sens, une étape de l’apprentissage de la vie pour un futur meilleur. Seulement, ne nous attardons pas dans la médiocrité et la désinvolture et les ériger en règle de mode de vie.

Quelles que soient nos appartenances et orientations religieuses, nous nous fondons sur le fait qu’il a existé un commencement à toutes choses. Pour ma part, j’ai résolument foi qu’au commencement quand Dieu créait les cieux, la terre, puis tout ce qui les compose, Il aurait pu donner une réalisation définitive et inchangeable à Sa création. Cependant, dans sa bonté et dans sa miséricorde infinie, Dieu a bien voulu partager la suite du projet de la création avec Ses enfants. En très bon père, Dieu voulait que l’oeuvre de la création soit un projet de famille. Ainsi, Dieu nous a laissé l’opportunité et l’honneur de participer à cette oeuvre. Par le fait de cette logique de construction, Dieu nous a confié la tâche de bâtir la nation togolaise ; que ce soit sur le plan économique, social, humanitaire, éducationnel, ou politique. Je suis persuadé que Dieu a vu en nous cette potentialité et cette capacité de pouvoir accomplir ce désir qui Lui est si cher, de faire de cette terre de nos aïeux une patrie où il fait bon vivre.

Fort de ce qui précède, j’invite tous les fils et toutes les filles de la nation togolaise à ne pas trahir cette divine confiance que le Tout-Puissant a mise en nous. Je nous invite également à mettre notre âme, notre esprit et notre corps au service de la réalisation d’un Togo complet et harmonieux qui inspirerait tous les autres coins et recoins de l’Afrique.

Une brève rétrospective historique de notre patrie nous oblige à rendre hommage à tous ceux et à toutes celles qui ont oeuvré pour l’indépendance de notre pays en 1960, même si cette indépendance n’est en réalité qu’une perpétuelle construction. Les années 60 ont été témoins d’un Togo en gestation, d’un Togo qui cherchait ses repères, à forger son identité à la fois plurielle et unique dans le concert des nations africaines également en chantier. Les pères et mères de notre indépendance avaient alors impulsé une certaine direction ferme et nationaliste.

Les années 70 et 80 ont connu une croissance et une stabilité économique et sociale dans le prolongement du projet d’unité nationale. Cet embelli a valu au Togo la dénomination de Suisse de l’Afrique pour corroborer avec l’appellation déjà légion de « Munster Kolonie » sous la colonisation allemande. Le peuple togolais honnête et travailleur à cette époque allemande avait réussi à équilibrer sa balance extérieure et sa trésorerie nationale : celle-ci était surliquide.

Les années 90 marquent le début d’un autre tournant de notre histoire. Les aspirations des populations pour une nouvelle direction de notre vie commune ont commencé à s’exprimer çà et là face à l’abus et l’arbitraire. On nous a miroité « le discours de la Baule» comme point de repère. Oui, la démocratie, comme modèle de gouvernance politique incomprise, telle que pratiquée par les acteurs Togolais de cette fin du 20e siècle, a marqué et continue de marquer les tourments et atermoiements de notre peuple. Les multiples pertes en vies humaines, la déliquescence du tissu social, la débauche, les réflexes de repli communautaires, la gabegie et la corruption à visage découvert sont devenus les fléaux de la démocratie.

Comme le disait un observateur avisé, la démocratie des années 90 nous a été imposée sans « mode d’emploi.» Dans le contexte précis de notre démocratie, les péripéties que connaît notre pays l’ont relégué au rang des pays voyous et infréquentables, avec la rupture des multiples accords et de coopérations internationales, puis la fuite des investisseurs économiques. A ce jour, le Togo peine encore à retrouver ses marques de prospérité, quoique les indices macro-économiques officiels prétendent le contraire : sur le terrain, le panier de la ménagère n’est pas garni.

Qui plus est, nos marchés brûlent, nos hôpitaux et dispensaires sont des mouroirs, nos écoles publiques et privées sont à répétition fermées, quand bien même l’éducation serait la base de tout développement social. Une vraie crise de confiance existe entre le peuple et le régime gouvernant d’il y a cinquante ans. Force est de constater que les problèmes socio-économiques du Togo sont éminemment politiques et leur résolutions doivent être essentiellement politiques à la base.

Le 21e siècle est indubitablement le siècle des grands regroupements sous-régionaux et régionaux. Sur le plan international, de grandes conglomérations se font de plus en plus pour constituer des entités géographiques et humaines plus fortes socialement et économiquement. Les relations internationales se manifestent désormais sous le vocable de « mondialisation », de « globalisation » et de « planétarisation.» L’Afrique, dans ce concert de recomposition, n’a pas le droit à l’échec. Le Togo, dans ce même contexte, a son grain de sel à apporter. Les contraintes de l’heure sont encore plus exigeantes et plus rudes que naguère. Mais en même temps des opportunités multiples s’offrent si tant est que nous acceptons de jouer notre partition avec beaucoup plus de fermeté, d’honnêteté, et de vraie conviction.

A l’heure de ce bilan, il n’est point besoin de s’attarder sur qui a été responsable de cet état de déliquescence dans lequel se trouve notre cher pays. Ce n’est peut-être non plus le temps de jeter l’anathème et des pierres à qui que ce soit. Nous sommes individuellement tout aussi coupables les uns que les autres, car le silence et l’inaction face à l’adversité et les difficultés de notre condition actuelle sont tout autant coupables.

En condensé, je puis, à l’instar de tous mes compatriotes, affirmer sans ambages que sur le plan économique, éducatif, sanitaire, social, culturel, cultuel et spirituel nous devons redoubler nos efforts pour réaliser l’acceptable. La pauvreté n’est pas une malédiction en soi. C’est un état d’esprit et de comportement. Pour y parvenir, la décence du niveau de vie et la reconstitution du tissu social togolais requièrent une grande entreprise d’inclusion sincère et non calculée ne prenant pas les populations de la diaspora comme des laissés-pour-compte, une entité entièrement à part. A quand le vote des Togolais de l’étranger ? Le séjour des Togolais et Togolaises sous d’autres cieux est incontestablement un enrichissement et une source d’expérience de fortunes diverses. Une main sincère et tendue du gouvernement comme de l’opposition vers les frères et soeurs de la diaspora est nécessaire.

Les réalités togolaises de l’heure doivent nous amener à cesser de constamment regarder dans le rétroviseur. Les années 60 sont mortes, et nous devons les laisser dans leur tombe ; les années 70 sont passées et nous devons les laisser dans leur passé ; les années 80 sont dans les oubliettes et il ne sert à rien de les ressasser ; les années 90, bien que récentes doivent être dissociées de nos pensées. Le 21e siècle nous interpelle vivement car nous devons vivre le présent tout en planifiant le futur pour les générations présentes et à venir.

Les contraintes de ce 21e siècle m’obligent à me poser la question de savoir s’il existe encore de l’espoir pour le Togo ? Je répondrai par l’affirmatif, même si cela requière de l’endurance et du temps. Mais alors comment redonner l’espoir à nos compatriotes sceptiques ? Comment réaliser l’acceptable ? C’est en changeant la vision de médiocrité pour le Togo, en changeant les pratiques désinvoltes et de tâtonnements, en changeant de l’arbitraire et de l’exclusion, en changeant de l’obscénité érigée en règle d’Etat, en encourageant les initiatives privées, en s’enracinant dans les valeurs de probité morale et de justice sociale, en oeuvrant inlassablement pour la transparence dans les affaires publiques. Ensemble nous pouvons collaborer pour l’avènement d’un tel idéal pour notre chère patrie, car dans l’humanité les plus grandes oeuvres qui ont été accomplies ont toujours été le fruit de rêves concrétisés par des visions. Pour ce faire, nous devons enterrer nos haches de guerre, qu’elles soient politiques, religieuses, tribales ou ethniques. Le génie togolais réside en son amour pour la patrie, son attachement à la liberté, et son ardeur au travail.

Excellence M. le Président, je vous demanderais d’être plus un homme réellement fort. Car si un leader de ce monde a déclaré que le monde n’a pas besoin d’hommes politiques forts mais des institutions fortes, moi je crois fermement qu’il faut des hommes forts pour créer des institutions fortes. Quand je parle d’homme fort je n’insinue pas de verser dans l’arbitraire, mais plutôt je vous exhorte à être un leader exemplaire que le peuple aspire à suivre, non pas parce que le peuple en est forcé, mais que le peuple délibérément veut bien suivre l’idéal d’exemple que vous incarneriez.

Je voudrais voir le Président de la République togolaise à l’oeuvre de la déconstruction et du démantèlement de la gouvernance à parti unique. Je voudrais voir le Président taper sur la table pour que disparaissent la corruption et la gestion opaque des deniers publics et des ressources naturelles. Je voudrais voir le Président ordonner que les arrestations arbitraires et tueries des innocents cessent, car ces arrestations et tueries constituent des motifs premiers qui emprisonnent les cerveaux togolais à l’étranger et les empêchent de rentrer servir leur nation. Chaque Togolais qu’il soit jeune ou âgé, homme ou femme, doit être traité avec respect et dignité; que le droit soit tout simplement dit. Tout comme un leader Africain, mon voeu le plus cher est que : « Jamais, jamais et jamais cette belle terre ne connaîtra à nouveau l’expérience de l’oppression de l’un par l’autre.»

Je voudrais voir le Président aiguillonner les ministres, les législateurs et autres décideurs pour des réformes économiques, éducatives, sanitaires, sociales, et sécuritaires viables. Je voudrais voir le Président tendre une main franche et fraternelle de dialogue aux Togolais et Togolaises des autres tendances politiques.

Monsieur le Président j’ai foi que ceci est possible et réalisable.

A l’endroit du gouvernement je voudrais rappeler l’éthique du travail consciencieux et bien fait, la négation de la nonchalance, du travail en équipe, de la cohésion dans les actions gouvernementales, de l’absence de délation et de convoitise puériles, et surtout et encore d’une vision murie pour un Togo meilleur.

A l’opposition togolaise, j’exhorte à la fermeté et à la persévérance dans l’action participative de construction; j’implore votre sincérité dans l’unité d’action, l’abandon de l’hypocrisie, la défense des vraies aspirations des peuples de toutes les régions du pays. Que l’opposition togolaise soit beaucoup plus imaginative dans ses approches de luttes, car les recettes d’il y a 20 ans ont montré à souhait leurs limites. Il faut tout simplement changer de stratégies. Je sais que vous en êtes capables.

Aux législateurs Togolais, les institutions juridiques et judiciaires devraient retrouver leur lettre de noblesse, une justice impartiale et non corrompue qui ne dit que la loi et rien que la loi, autant pour le fort que pour le faible.

Aux autorités religieuses, je vous convie à la repentance sincère vis- à-vis du peuple togolais. Vous devez aider avec sincérité et dans la crainte du Seigneur les dirigeants et le peuple togolais à sortir de ce gouffre.

A l’armée togolaise, le métier d’arme est un métier de sacerdoce et de don de soi. Il n’y a pas d’Etat fort sans une armée forte. Ce qui explique tout le poids de ta responsabilité dans la protection du territoire national, des biens publics et privés, de même que des vies humaines. Fasse donc que l’environnement sociopolitique togolais soit beaucoup plus viable.

A la diaspora togolaise, je vous convie à une action participative, à tendre la main à celui qui demande le pardon, à s’activer à utiliser les connaissances acquises à l’étranger pour développer notre pays. Le Togo a une place dans ce monde moderne et technologique.

A nos ancêtres et aïeux je prie que votre colère s’apaise et que vous intercédiez et proclamiez rien que du positif et la paix sur le Togo.

Aux ennemis du progrès du Togo, je vous dis que nous vous aimons, sans faiblesse ni soumission aucune, mais de partenariat ; car seules les relations et collaborations dans ce siècle globalisant peuvent nous aider à nous compléter.

A Dieu, je demande la clémence pour notre nation, et je prie que la paix, l’amour , et la miséricorde nous accompagne dans ce projet d’oeuvre pour bâtir le Togo et faire de la création un événement parfait.

Le Togo doit être redonné aux Togolais ;

Le Togo doit revivre ;

Le Togo va sourire encore et davantage pour l’Afrique.

Togolais et Togolaise, merci pour votre attention et écoute et que l’Eternel Dieu Tout-Puissant bénisse notre partie le Togo.

Je vous remercie.

Wenesso Christian Tengandé.

Partager

Laisser une réponse