Un magistrat français a découvert une nouvelle preuve qui laisse penser que la campagne présidentielle de 2007 du Président Nicolas Sarkozy a reçu un financement illégal de 800.000 € de la part de l’héritière de la société de cosmétiques L’Oréal, Liliane Bettencourt.
Tandis que [le Premier ministre britannique]David Cameron, en Grande-Bretagne, cherche à désamorcer une controverse sur le financement de [son]parti, M. Sarkozy se retrouve face à un scandale bien plus grave de financement [politique]à quatre semaines du premier tour de la nouvelle élection présidentielle.
Un juge d’instruction indépendant enquêtant sur l’« affaire Bettencourt » tentaculaire a retrouvé deux transferts en liquide de 400.000 € chacun effectués depuis la Suisse en 2007, lesquels, soupçonne-t-il, ont apporté des fonds illégaux à la course présidentielle de M. Sarkozy, qui remporta cette élection.
Dans des documents divulgués dans deux journaux, ce juge, Jean-Michel Gentil, dit enquêter sur la possibilité que le premier versement, en février 2007, fut remis dans un bar parisien au trésorier de campagne de M. Sarkozy, Eric Woerth. M. Gentil dit également enquêter sur des preuves circonstanciées selon lesquelles un deuxième versement aurait pu être remis directement à M. Sarkozy lui-même.
Dans le cadre de ses investigations, le juge a saisi un journal personnel tenu par l’ami de Mme Bettencourt, le photographe et play-boy François-Marie Banier. Le 26 avril 2007 – le même jour que le deuxième transfert de 400.000 € – le journal de M. Banier rapporte que l’héritière de L’Oréal lui a dit : « Sarkozy a une nouvelle fois demandé de l’argent. J’ai dit oui ». D’autres témoins ont dit à M. Gentil que M. Sarkozy avait passé 15 minutes seul avec le mari de Mme Bettencourt, aujourd’hui décédé [19 novembre 2007], André, durant la campagne électorale de ce printemps-là.
Les affirmations de financement illégal de la campagne de M. Sarkozy par la plus riche femme de France sont apparues, il y a deux ans, dans le cadre d’une dispute familiale et judiciaire complexe à propos du prétendu abus de faiblesse commis sur l’héritière par M. Barnier et d’autres membres de l’entourage de celle-ci. A cette époque, M. Sarkozy rejeta avec courroux les accusations de financement politique illégal comment étant non-fondées.
M. Gentil est un juge d’instruction indépendant basé à Bordeaux, qui a été nommé pour examiner les aspects financiers et politiques de la querelle de la famille de l’Oréal. Il a déjà commencé des investigations judiciaires contre, entre autres, M. Woerth, M. Banier et l’ancien gestionnaire de la fortune de Mme Bettencourt, Patrice de Maistre. Jeudi dernier, le juge a arrêté pour la deuxième fois M. de Maistre. Au cours des quatre derniers jours, M. Gentil a interrogé M. de Maistre à propos de sommes excessivement importantes, s’élevant à plus de 5 millions d’euros, que Mme Bettencourt a versées à sa société de holding personnelle.
Le juge a également interrogé M. de Maistre sur une série de sept transferts clandestins de liquidités, faits par coursier, entre 2007 et 2009, à partir de comptes secrets en Suisse de Mme Bettencourt. Ces versements, révélés par des officiels suisses après l’envoi d’un mandat de perquisition international par M. Gentil, incluent deux versements de 400.000 € effectués durant la campagne présidentielle de 2007.
Dans sa requête officielle pour l’arrestation de M. de Maistre, le juge fait remarquer que le premier de ces transferts depuis la suisse a eu lieu le 5 février 2007 – deux jours avant que le gestionnaire de fortune de M. Bettencourt admette qu’il avait rencontré M. Woerth, le trésorier de campagne de M. Sarkozy, dans un bar parisien. Le juge fait également remarquer la coïncidence entre la date du second transfert, le 26 avril 2007, et la note de M. Banier dans son journal dans laquelle Mme Bettencourt aurait mentionné la demande de M. Sarkozy pour obtenir plus d’argent.
Article original : « L’Oréal heiress ‘gave Sarkozy € 800,000 »
The Independant, le 28 mars 2012