Les fantasmes d’un pouvoir révisionniste et dictatorial

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Dans un article intitulé « FPI, négation des principes démocratiques et pulsions terroristes » publié sur le blog de monsieur Soro Guillaume le 19 aout 2012, un certain Konan Louis charge le Front Populaire Ivoirien de tous les péchés d’Israël.

En d’autres temps nous aurions réservé à cet article le sort qu’il mérite, c’est-à-dire l’indifférence, tant il manque de consistance et de rigueur. Cependant, compte tenu du contexte dans lequel se trouve notre pays qui traverse une crise sociale et politique depuis plus décennie, il nous apparaît nécessaire de ne pas laisser prospérer le mensonge et le révisionnisme dans le cadre d’une tentative d’inversement des rôles dans la tragédie que vit la Côte d’Ivoire.

Le titre du pamphlet de monsieur Konan en dit long sur les intentions de l’auteur qui, alors que le pays est en proie à des violences qui mettent à mal la sécurité et la sérénité des Ivoiriens, n’a pas craint d’aggraver la fracture sociale en portant des accusations aussi légères qu’irresponsables à l’encontre du parti politique créé par le Président Laurent Gbagbo pour contribuer au mieux être des Ivoiriens.

Le premier paragraphe du texte révèle l’état d’esprit de l’auteur : « Des attaques lâches et insensées du FPI aux pratiques terroristes, il n’y a malheureusement qu’un seul pas à franchir ! Le Front Populaire ivoirien (FPI) que nous avons applaudi aveuglement dans les années 90 pour sa soif de liberté et de multipartisme, se mue, malheureusement, de manière vertigineuse en bandes terroristes pour avoir seulement perdu à une élection présidentielle. C’est regrettable ! ». Quel amalgame ! Quelle misère intellectuelle !

L’auteur est certainement partagé entre plusieurs sentiments qui l’agitent et l’empêchent de faire une lecture objective et lucide de la situation qui prévaut dans notre pays. Au fond de lui-même il reconnaît la grandeur du Front Populaire Ivoirien et le rôle historique que ce parti a joué et continue de jouer pour ancrer la démocratie en Côte d’Ivoire. C’est donc à juste titre que les Ivoiriens, dont monsieur Konan Louis, ont applaudi non pas aveuglement mais légitimement à l’avènement de cette formation politique qui a mis fin à trente années de parti unique. Faut-il rappeler à monsieur Konan que le parti unique était la négation des libertés individuelles et collectives et qu’il a créé les conditions d’un mauvais départ de la Côte d’Ivoire qui se retrouve aujourd’hui dans une impasse totale ?

La pensée unique et la mauvaise gouvernance qui caractérisent ce type de régime ont fait perdre à notre pays ses chances d’amorcer un réel développement. C’était pour éviter cela que Laurent Gbagbo et ses camarades se sont battus pour l’instauration de la démocratie dans notre pays. Il est en effet avéré que même si la démocratie n’est pas une panacée, elle réunit les conditions minimales d’une participation de tous aux choix majeurs qui déterminent l’avenir du pays. De fait, la géographie des pays dits développés se confond avec celle des pays qui pratiquent la démocratie.

Le FPI de Laurent Gbagbo a donc fait ce choix qui est son essence même et ne saurait avoir de pratiques contraires.

Oui, vous avez raison, monsieur Konan, le FPI est le père de la démocratie en Côte d’Ivoire. A titre de rappel, il convient de noter que pour cette cause noble, le Président Laurent Gbagbo a sacrifié toute  sa jeunesse et sa vie. Sous le parti unique sa vie était ponctuée d’épisodes douloureux allant de la prison à l’exil avec leur cortège d’humiliations et de privations, à cause de ses opinions divergentes sur la conduite des affaires publiques. Pour les mêmes raisons et alors que le multipartisme était instauré, le FPI a connu les pires moments de sa jeune existence en 1992 pour avoir protesté contre l’expédition punitive nocturne lancée par le pouvoir PDCI sur de pauvres étudiants à la cité universitaire de Yopougon un an plus tôt. Cette répression aveugle et tous les autres actes anti démocratiques dont le PDCI s’est rendu coupable à l’encontre de l’opposition naissante dans le seul but de confisquer le pouvoir n’ont pas distrait le FPI.

Le parti de Laurent Gbagbo a gardé le cap de l’alternance démocratique au pouvoir qui était et demeure son crédo. Malgré le verrouillage du champ politique par le PDCI, le FPI n’a jamais envisagé d’autres alternatives que la voie démocratique pour accéder au pouvoir. Pour votre gouverne, ceux des responsables du FPI qui ont préconisé la force pour créer l’alternance politique ont toujours été mis en minorité au sein des instances dirigeantes du parti. C’est tout naturellement sans surprise que ces politiciens se sont retrouvés dans la rébellion en 2002 avant de créer avec le PDCI et le RDR le Rassemblement des Houphouétistes pour la « Démocratie » et le Progrès (RHDP) pour mettre un terme au mandat du Président Laurent Gbagbo, élu seulement en octobre 2000.

Le FPI a su démontrer sa patience et sa hauteur d’esprit pour ne pas imposer à la Côte d’Ivoire une guerre pour l’instauration de la démocratie. Vous ne pouvez pas en dire autant de certains partis politiques que vous connaissez bien et dont le parcours est émaillé depuis , de violences ayant coûté la vie à des milliers de nos compatriotes et installé notre pays dans une instabilité chronique depuis plus d’une décennie.

Les évènements qui ont précipité la Côte d’Ivoire dans le chaos sont encore récents pour que des esprits retors veuillent écrire une autre histoire. C’est pourquoi il convient de rappeler qu’en octobre 2000, le FPI a accédé au pouvoir à l’issue d’une élection organisée par une junte militaire dont le candidat, le général Guei Robert, affrontait Laurent Gbagbo (FPI) au second tour du scrutin. Sauf à être volontairement amnésique aucun Ivoirien ne peut oublier que pendant le mandat du Président Gbagbo qui a duré de octobre 2000 à avril 2011, les tenants actuels du pouvoir ont rendu le pays ingouvernable pour n’avoir pu participer à la présidentielle de 2000 pour des raisons qu’ils n’ignorent pas et auxquelles le FPI est étranger. Il suffit de faire un bref rappel des faits marquants de cette décennie pour rafraîchir la mémoire à tous ceux qui font montre d’une malhonnêteté intellectuelle notoire.

Au mois de janvier 2011, soit deux mois après la prise de fonction de Laurent Gbagbo, premier Président de la deuxième République, une tentative de coup d’État est mise en échec et la colonne d’assaillants venant du Nord s’est évanouie dans la nature. Pourtant, la Côte d’Ivoire venait de se doter d’une nouvelle Assemblée Nationale et d’un Gouvernement d’ouverture auquel l’opposition parlementaire a pris part. Cette même année 2011, à l’initiative du Président Laurent Gbagbo, un forum pour la réconciliation nationale est organisé sous la présidence de monsieur Seydou Elimane Diarra.

Pour ces assises importantes aux yeux du Président Gbagbo qui voulait créer les conditions d’une vie politique apaisée, le Chef de l’État a convaincu ses prédécesseurs de revenir dans la République en vue de prendre leur part dans la construction du pays. Pour y parvenir le Président Gbagbo a fait annuler les mesures qui contraignaient messieurs Bédié et Ouattara en exil. Il a en outre fait voter par le Parlement une loi qui définit le statut des anciens Présidents de la République et des Présidents des institutions républicaines. Le 5 août 2002, après les élections municipales et départementales auxquelles tous les partis politiques ont pris part, le Président Gbagbo a encore mis en place un Gouvernement de large ouverture avec cette fois des représentants du RDR.

Contre toute attente et alors que le Chef de l’État était en visite officielle en Italie, des soldats tentent de renverser, dans le nuit du 18 au 19 septembre 2002l, les institutions républicaines fraichement mises en place. L’un des signes avant-coureurs étant le holdup historique de la BCEAO d’Abidjan par un certain Sia Popo. Cette barbarie aura coûté la vie à plus de 300 de nos compatriotes dont le Ministre de l’Intérieur, Emile Boga Doudou. Non contents d’avoir été mis en échec les commanditaires de cet acte, dont le moindre qu’on puisse dire est qu’il est anti démocratique, créent la première rébellion armée de la Côte d’Ivoire indépendante avec l’appui bienveillant de la France Chiraquienne.

Il est bon que l’on se souvienne ! Monsieur Konan, savez-vous qui sont les commanditaires et acteurs de cette rébellion qui a endeuillé et qui continue d’endeuiller notre pays ? Savez-vous qu’en dépit de la bonne volonté du Président Gbagbo les rebelles ont maintenu la partition du pays jusqu’à la fin de 2010 avec des bandes armées qui ont régné en seigneurs de guerre avec ce que cela comporte comme atrocités, pillage des ressources agricoles, minières et industrielles, Vous souvenez-vous des dizaines de Gendarmes et leurs enfants assassinés à Bouaké ? Avez-vous entendu parler du braquage des agences de la BCEAO de Bouaké, Korhogo et Man ? Avez-vous oublié les 70 personnes soupçonnées d’être des Pro -IB enfermées jusqu’à étouffement dans un container à Korhogo  par le Com -zone Foffié Kouakou Martin?

Eh bien ! C’est dans cette atmosphère délétère que le FPI a été contraint de gouverner la Côte d’Ivoire avec des ministres rebelles qui non seulement n’avaient pas désarmé mais qui n’avaient pas non plus renoncé à leur projet de renverser le pouvoir. Malgré tout, le Président Gbagbo et le FPI ont fait preuve de retenue et se sont attelés à maintenir l’État débout pour permettre aux Ivoiriens, sans distinction d’aucune sorte, de mener une existence normale. C’est ainsi qu’avec les ressources de la moitié sud du pays sous contrôle gouvernemental, les services sociaux de base dont, la santé, l’école, l’électricité, etc. ont été assurés à tous les citoyens sur l’ensemble du territoire national. Pendant ce temps les ressources des zones Centre, Nord et Ouest (CNO) échouaient dans les poches et les comptes bancaires des rebelles et de leurs soutiens internes et externes. Le diamant et l’or de cette zone ont été pillés pour financer une rébellion absurde qui n’aura servit qu’à préparer les conditions d’accès au pouvoir de qui vous savez.

Faisant une grosse méprise sur le FPI, Monsieur Konan affirme sans sourciller que « …Le Front Populaire ivoirien (FPI) … se mue, malheureusement, de manière vertigineuse en bandes terroristes pour avoir seulement perdu à une élection présidentielle. ». En vous référant à la philosophe et au parcours du FPI il vous est loisible de déduire que les bandes de terroristes qui semblent hanter vos nuits ne se trouvent certainement pas au sein de cette formation politique qui a donné la preuve de son sens de la responsabilité. Il faut être frappé de cécité ou être d’une mauvaise foi pathologique pour indexer le FPI dans le cadre des attaques d’hommes armés non identifiés de cibles militaires ces dernières semaines.

A ce propos nous voudrions vous ramener à l’analyse du professeur Mamadou Koulibaly, ancien Président de l’Assemblée Nationale et Président de LIDER. Cette analyse qui est partagée par le commun des mortels et par tous les  observateurs attentifs de la scène politique de la Côte d’Ivoire des dix dernières années ne peut vous échapper. Avant de pointer d’un doigt accusateur le FPI qui serait devenu une organisation terroriste (je vous laisse l’entière responsabilité de votre terminologie), vous devriez faire votre état de conscience. Alors vous comprendrez que le fait d’être au pouvoir aujourd’hui n’efface pas le passé d’un certain nombre d’acteurs politiques actuels qui portent la responsabilité du délitement de notre pays. Assurément vous êtes passé maître dans l’art d’inverser les rôles.

Malheureusement pour vous, les vrais faux complots de votre régime ne résistent pas à la réalité que vous connaissez. Cette réalité est que le pouvoir installé à coup de bombes sur la tête des Ivoiriens est en quête de légitimité malgré le soutien massif de la communauté internationale. Or la légitimité, au contraire de la légalité, ne se décrète pas, même si elle peut procéder de ladite légalité qui lui donne son fondement. Au regard des conditions de votre accession au pouvoir il apparaît que vous avez foulé au pied l’ordre constitutionnel qui est la source de la légalité et de la légitimité du pouvoir dans les Etats modernes.

L’ayant fait, vous avez inconsciemment fragilisé votre régime qui est comme frappé d’une tare congénitale dont la conséquence est la récurrence des actes de violences observés depuis votre installation. Manquant de légitimité et conséquemment d’adhésion à vos actes de gouvernance votre régime est condamné à faire du terrorisme d’État. Lequel se définit comme l’utilisation par un gouvernement de mesures d’exception et d’actes violents à l’encontre d’une partie de ses administrés, sous couvert de raison d’Etat.

Comme un voleur, vous avez peur que le propriétaire (le peuple souverain) de l’objet volé (son pouvoir) vous découvre et vous reprenne son dû. Vous êtes donc sur le qui-vive. Et pour couvrir votre forfait vous entretenez la terreur en espérant faire taire le peuple. Autrement, comment justifiez vous, d’une part l’emprisonnement sans jugement depuis plus d’an du Président du FPI, de tous ses vice-présidents, de ses secrétaires généraux ainsi que des dizaines autres responsables et d’autre part contraindre à l’exil plus d’une centaine de cadres de ce parti ? Etait-il nécessaire de faire tant d’excès.

Au-delà de ces misères que vous faites à votre opposition qui ne demande qu’à exister, posez-vous simplement la question de savoir si vous avez tenu vos promesses à l’égard des combattants que vous avez engagés contre la Côte d’Ivoire depuis 2002.

Ces dizaines de milliers de combattant à qui vous avez promis monts et merveilles pour déloger Laurent Gbagbo du palais présidentiel sont-ils tous satisfaits ?

Les membres du commando invisible dont le chef, IB a été assassiné lâchement par qui vous savez, sont-ils en odeur de sainteté avec vous ?

Les milliers de gendarmes, policiers et militaires et para militaires que vous avez humiliés et désarmés au profit des soldats de la rébellion non instruits et des chasseurs traditionnels Dozos, sont-ils tous contents du traitement que vous leur réservez ?

Les patriotes que vous martyrisez depuis avril 2011 peuvent-ils vous acclamer ?

Les travailleurs que vous jetez à la rue au nom du rattrapage ethnique sont-ils heureux ?

Les opérateurs économiques qui se voient délestés de leurs marchés au profit des nouveaux « rattrapés » sans obtenir le paiement de leurs factures sont-ils à l’aise ?

Ces interrogations non exhaustives devraient faire partie de votre démarche si vous aspirez à comprendre ce qui arrive à notre pays et si vous avez vocation à y apporter des réponses dans l’intérêt de tous. Toute autre démarche tendant à diaboliser le FPI est contre productive. Sachez par dessus tout que le FPI n’a pas de branche armée, pas plus qu’il n’a d’expérience en matière de déstabilisation des régimes.

Le FPI a pris acte du renversement du Président Gbagbo le 11 avril 2011 sans renoncer à sa volonté de poursuivre le combat en vue de la démocratie et de la souveraineté de la Côte d’Ivoire. C’est dans cette posture que, depuis plus d’un an, la direction intérimaire réclame un dialogue franc avec le pouvoir en vue d’un exercice normal de son droit à l’opposition. Malheureusement, un certain nombre de comportements du Gouvernement révèle sa volonté de museler l’opposition à défaut de dissoudre le FPI qui ne demande qu’à s’opposer légalement.

Au nombre de ces comportements, il y a lieu de dénoncer la campagne de presse dont l’article de monsieur Konan Louis est un élément, mais aussi les accusations fantaisistes de certains membres du gouvernement sur la prétendue implication de pro-Gbagbo (sic) à une entreprise de déstabilisation du régime. L’attaque du siège provisoire du FPI à Cocody, le saccage du siège du groupe de presse « Le Temps », proche du FPI et l’arrestation du Ministre Douati Alphonse, Secrétaire général adjoint du FPI chargé des questions gouvernementales, trahissent la volonté du régime de liquider sa principale opposition.

Pendant combien de temps allez-vous ruser avec la démocratie et la réconciliation nationale indispensable au développement harmonieux de notre pays ?

John K.Silué

Cadre financier

 

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