Les pays occidentaux ont bien mené un double-jeu pendant le renversement du leader libyen Mouammar Kadhafi en 2011.
La correspondance de Hillary Clinton, alors Secrétaire d’État des USA, avec son collègue Sidney Blumenthal a révélé les plans peu glorieux de la Grande Bretagne et de la France concernant la division de la Libye. Dans une interview à Anissa Naouai, présentatrice de l’émission In the Now, Catherine Shakdam, spécialiste du Moyen Orient, estime que les partenaires de la coalition qui ont envahi la Libye poursuivaient leurs propres intérêts.
Qui est Hillary Clinton?
Suite à une fuite d’information, la presse a eu accès à la correspondance de Hillary Clinton, Secrétaire d’État des USA en 2011, avec l’un de ses proches collaborateurs. Les messages jettent la lumière sur la façon dont la Grande Bretagne et la France ont essayé de s’emparer de la « plus grosse part du gâteau libyen ».
« Par le biais de ses services de renseignement, la Grande Bretagne dirige tant les actions des rebelles libyens que celles du régime de Kadhafi », peut-on ainsi lire dans l’un des messages électroniques.
Les diplomates maintenaient des contacts avec le gouvernement Kadhafi pour protéger les positions britanniques dans l’hypothèse où les troubles en Libye n’aboutiraient pas à un changement de pouvoir. En même temps, ils menaient des négociations avec le fils de Kadhafi, Saïf al-Islam, au cas où son père lui transmettrait les rênes du pays.
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Un autre message signale que le Royaume-Uni a uni ses efforts avec la France afin de créer dans l’est de la Libye une zone semi-autonome. L’objectif était de diviser le pays après l’effondrement du régime Kadhafi — une proposition des conseillers de Nicolas Sarkozy après que le nouveau gouvernement libyen n’a pas accordé aux entreprises françaises de contrats avantageux.
L’auteur de ce message est Sidney Blumenthal, ancien assistant du président Bill Clinton, qui serait payé par la Fondation Clinton. Blumenthal conseillait notamment des entreprises américaines qui cherchaient à obtenir des contrats libyens. En 2009, Hillary Clinton avait essayé de lui trouver une place au Département d’État, mais les assistants d’Obama ne le lui avaient pas permis.
Le New York Times rappelle que Blumenthal et ses sources n’étaient pas toujours exacts dans leurs estimations, et certaines étaient même considérées de manière assez sceptique par Mme Clinton. Cependant, il est évident que la France et la Grande Bretagne avaient — et ont gardé — des intérêts géopolitiques en Libye.
« L’affaire n’est pas étonnante en soi. En 2011, par exemple, le Royaume-Uni et la France ont immédiatement rejoint l’opération militaire en Libye. Pourquoi souhaitaient-ils tellement cette intervention? Il me semble que la réponse est évidente« , affirme Catherine Shakdam, spécialiste du Moyen Orient, dans son interview à RT.
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Les messages de Clinton suggèrent que les États-Unis étaient bien conscients des objectifs de leurs partenaires de la coalition.
« Je crois qu’au moment où les USA formaient la coalition, ils comprenaient certainement les objectifs de leurs alliés — qui ne coïncidaient pas nécessairement avec les leurs. Donc, en l’occurrence, les États-Unis devaient accorder une certaine liberté d’action à la France et à la Grande Bretagne », souligne Shakdam.
L’experte relève par ailleurs que l’Europe, surtout aujourd’hui, veut atteindre un certain niveau d’indépendance énergétique envers la Russie. En même temps, elle a besoin de ressources en pétrole et en gaz. La Libye se présentait comme une solution idéale pour l’UE, la France et le Royaume-Uni. Catherine Shakdam est sûre qu’ils essaient d’utiliser les canaux politiques pour promouvoir les intérêts de leurs entreprises.
« Ça a toujours été comme ça. Il me semble qu’aujourd’hui, les mêmes arrangements en coulisses ont lieu au Yémen, affirme l’experte. Il faut garder à l’esprit qu’à présent, le vainqueur n’est pas certain. Il est tout à fait possible que le conflit conduise à une impasse et se termine par un match nul. Certes, les politiciens américains, européens et britanniques essaient de maintenir le contact avec les deux parties. En d’autres termes, ils restent en contact avec les Saoudiens, les Houthis et, bien sûr, avec l’ancien président Ali Abdallah Saleh qui, autant qu’on sache, exerce toujours une influence importante sur la situation dans le pays », souligne Shakdam.
« Bien sûr, on ne peut pas nier la réalité, et elle est telle que le pouvoir appartient aux Houthis et à l’ancien président Ali Abdallah Saleh — pas pleinement, peut-être, mais ils ont beaucoup d’atouts. Voilà pourquoi les politiciens et les entrepreneurs continuent à négocier avec eux: ils n’ont pas de choix. Et quand il s’agit d’argent et des objectifs militaires, ils se comportent de manière très pragmatique. Donc ils continueront à négocier avec Ali Abdallah Saleh, tout comme avec Abd Rabo Mansour Hadi car ils ne savent pas encore lequel d’entre eux gagnera », conclut l’experte.
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