Le respect de la Constitution ivoirienne est aussi important que la compassion de l’Église pour les homosexuels [Par Jean-Claude DJEREKE]

0

Evgeny Afineevsky, le réalisateur du documentaire intitulé “Francesco” présenté le 21 octobre 2020 à la Fête du cinéma de Rome, a-t-il bien compris de quelle famille parlait François ? Non car, dans l’entretien original mené en mai 2019 par la vaticaniste mexicaine Valentina Alazraki, le pape disait que les gays avaient le droit, non pas de fonder une famille, mais “d’être dans la famille”, que les parents avaient “le droit de reconnaître ce fils comme homosexuel, cette fille comme homosexuelle” et qu’on ne pouvait pas “expulser quelqu’un de la famille ou lui rendre la vie impossible”.

Le pape s’est-il déclaré favorable à une union civile (“cohabitation civile” est l’expression exacte employée par François) entre des personnes de même sexe ? Oui. La première fois, c’était en 2010, quand il était archevêque de Buenos Aires (Argentine). Avant l’autorisation du mariage homosexuel par le gouvernement Kirchner, il avait soutenu la solution d’une union civile entre gays. La majorité des évêques argentins s’y étant opposée, la position de Mgr Bergoglio fut purement et simplement rejetée (https://fr.aleteia.org/2020/10/22/ce-que-le-pape-francois-a-vraiment-dit-sur-lunion-des-couples-homosexuels/). Le rejet de la position de Bergoglio se basait certainement sur “les Considérations relatives aux propositions de reconnaissance légale des unions entre homosexuels” publiées en 2003 par la Congrégation pour la doctrine de la foi (que dirigeait le cardinal Joseph Ratzinger) et disant “non” à toute union entre personnes de même sexe. La seconde fois, c’était en 2017 dans un livre-entretien avec le sociologue français Dominique Wolton. Dans ce livre, il confirmait son accord pour une “union civile” pour les homosexuels, car “il n’y a pas d’autres voies”, même s’il prenait le soin d’ajouter que “ ce n’est pas un mariage”. Ici, le pape donne l’impression de se contredire en affirmant une chose (“le mariage, c’est un homme et une femme”) et en plaidant l’union civile pour des homosexuels et c’est ce qui déroute certains fidèles catholiques. Pour eux, “accepter le PACS (Pacte civil de solidarité) adopté en 1999 sous le gouvernement Jospin, c’est ouvrir la porte à terme au mariage pour les homosexuels, puis à l’adoption, voire à la création d’une famille”. Ils estiment, en outre, que le rôle de l’Église catholique est de rappeler que “le mariage en tant que tel, c’est une union entre un homme et une femme parce que le but d’une union, c’est de fonder une famille. Or, naturellement, deux femmes ou deux hommes ne peuvent pas procréer”. 

À mon avis, François aurait pu se contenter de dire que l’Église catholique, bien qu’opposée au mariage des personnes de même sexe, ne rejette pas les homosexuels. Pourquoi ? Parce que ces derniers sont, eux aussi, enfants de Dieu, d’une part, et parce que Jésus, en se refusant à condamner la femme adultère (Jn 8, 10), appelle ses disciples à condamner le péché sans condamner le pécheur, d’autre part. Contrairement à ce que pensent certaines personnes, l’Église catholique ne prône donc ni le mépris, ni le rejet, ni la persécution des homosexuels comme le montre bien le no 2358 du ‘Catéchisme de l’Église catholique’ qui demande que les gays “soient accueillis avec respect, compassion et délicatesse”.

Il est ainsi clair que, pour l’Église catholique, les homosexuels font partie de la famille de Dieu et que, pour cette raison, ils méritent respect et considération mais il est non moins clair que Dieu n’accepte pas n’importe quoi car, pour Lui, coucher avec une femme comme on couche avec un homme est une abomination (Lévitique 18, 22).

Mais l’homosexualité est-elle la seule abomination ? Non ! La Bible recense plusieurs choses abominables parmi lesquelles opprimer le peuple, être injuste envers le salarié, absoudre le coupable et condamner le juste, ne pas respecter la loi, répandre le sang innocent. Pour avoir usé de son droit de manifester contre la candidature anticonstitutionnelle de Dramane Ouattara, le peuple ivoirien est aujourd’hui tailladé, agressé, voire massacré par les miliciens de Ouattara. Que dit le pape François à cet individu qui, en plus d’avoir violé la Loi fondamentale du pays, répand le sang des Ivoiriens depuis 2002 ? Quand interpellera-t-il le gouvernement français qui soutient la candidature illégale de Ouattara ? Trouve-t-il normal qu’un seul camp soit jugé après la crise post-électorale de 2010 et qu’un homme acquitté soit empêché de rentrer dans son pays ? Quand montrera-t-il, à travers des actes concrets, que les Ivoiriens et les Africains en général sont, eux aussi, enfants de Dieu et que leurs vies comptent comme celles des Blancs ? Quand sanctionnera-t-il les évêques africains dont la dictature et la cruauté tuent à petit feu certains prêtres et obligent d’autres à s’exiler dans des diocèses où l’air est plus respirable ? Si le prêtre qui couche avec un homme et celui qui couche avec une femme violent tous les deux le vœu de chasteté, pourquoi le Vatican garde-t-il l’un et démet-il l’autre ? Peut-il justifier ce deux poids, deux mesures ? Pour mémoire, Mgr Paulin Pomodimo, archevêque de Bangui, et Mgr François-Xavier Yombadje, évêque de Bossangoa (Centrafrique), avaient été contraints à renoncer à leurs charges en mai 2009. Ils étaient accusés d’infidélité à leurs promesses de chasteté. Deux mois plus tôt, Mgr Robert Sarah (Guinée), alors secrétaire de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, s’était rendu sur place et avait dénoncé les “prêtres qui enretiennent femmes et enfants”, invitant ceux qui étaient dans une telle situation à abandonner leur ministère. Dans ‘La force de la vocation. La vie consacrée aujourd’hui’ (Éditions des Béatitudes, 2017), le pape argentin affirme : “Les homosexuels qui sont déjà prêtres, religieux ou religieuses doivent être incités à vivre intégralement le célibat, et surtout à être parfaitement responsables, en cherchant à ne jamais créer de scandale dans leur communauté ou parmi les fidèles. Il vaut mieux qu’ils abandonnent le ministère ou la vie consacrée plutôt que de vivre une double vie.” Certes, le cardinal Théodore McCarrick, ex-archevêque de Washington, fut réduit à l’état laïc en février 2019 pour avoir agressé sexuellement des séminaristes et des jeunes prêtres mais force est de reconnaître que le Vatican et son chef tardent à prendre des sanctions contre les prêtres et religieux qui pratiquent l’homosexualité tout en donnant des leçons de chasteté aux autres.

Bref, nous voulons dire à François que le droit qu’a le peuple ivoirien de vivre en paix et de s’occuper tout seul de ses affaires est aussi important que la légitime compassion de l’Église catholique pour les gays. De nombreux catholiques ivoiriens ne comprendraient pas aujourd’hui que le Vatican, après s’être fait représenter à l’investiture en 2011 d’un usurpateur et d’un criminel, ferme les yeux sur les violences perpétrées depuis deux mois par Ouattara contre le peuple ivoirien qui ne demande que le respect de sa Constitution.

 Dans l’introduction à ‘Fratelli Tutti’, sa troisième lettre encyclique, le souverain pontife parle à juste titre de “manières diverses et actuelles d’éliminer ou d’ignorer les autres”. Dramane Ouattara, installé au pouvoir en 2011 par le voyou et assassin Nicolas Sarkozy au prix du sang des Ivoiriens et soutenu contre tout bon sens par Macron et les socialistes francais, rêve depuis longtemps d’éliminer ou d’exterminer le peuple ivoirien. Nous espérons que le pape, le nonce apostolique, l’épiscopat et tout le clergé ivoiriens seront capables d’arrêter à temps ce rêve diabolique car l’Église “ne peut ni ne doit rester à l’écart dans la construction d’un monde meilleur, ni cesser de réveiller les forces spirituelles qui fécondent toute la vie sociale” (Benoît XVI, ‘Deus caritas est’, 25 décembre 2005, n. 28).

Jean-Claude DJEREKE

Partager

Laisser une réponse