Parfois, je me dis qu’on ne peut rien faire pour la jeunesse africaine. Elle mérite les dirigeants corrompus qui détruisent son quotidien et son avenir. Elle mérite l’école au rabais, les tortionnaires libyens et les requins de la Méditerranée ainsi que ceux assis dans les palais présidentiels.
La jeunesse africaine, dans sa majorité, n’aspire pas à construire une société meilleure. Elle aspire à profiter d’un système tordu. Elle court après celui qui distribue le poisson, et elle tourne le dos à celui qui veut lui apprendre à pêcher.
Elle ne condamne pas la corruption, elle condamne le fait qu’elle ne soit pas bénéficiaire de la corruption.
Une jeunesse qui a l’argent pour se payer un pass internet ou un smartphone, mais qui n’a pas d’argent pour aller se faire une carte d’identité.
Qui a la data pour regarder pendant des heures des directs sur des sugar daddy, des sorcières et des clash d’artistes, mais qui n’en n’a pas pour suivre des cours gratuits en ligne, des capsules vidéos édifiantes sur la vie du pays/le fonctionnement de l’Etat ou des lives sur l’entrepreneuriat.
Qui passe son temps à insulter et faire de la titrologie sur les réseaux sociaux, mais qui est trop paresseuse pour Googler la vraie information ou la définition d’un mot.
Qui demande aux prétendants au poste de président de la république qui ont des idées, une vision, un programme, du courage et la volonté de rupture mais pas de milliards à distribuer, d’aller se mettre au service de candidats qui auraient prétendument de l’argent, mais aucune idée, aucune vision, aucun programme, aucun courage et aucune volonté de rupture avec un système qui cause leur chômage, leur désœuvrement, leur inculture, leur misère.
Qui préfère vendre sa voix/sa signature sur un procès-verbal pour 5000 fcfa, un garba et un t-shirt, plutôt que de rester surveiller les urnes sans se laisser acheter lors d’une élection.
Qui prétend avoir peur d’aller manifester pour ses droits mais qui ne craint pas de déferler dans les rues pour rendre hommage à un artiste ou pour aller déterrer son cercueil.
Sexe. Musique. Esbroufe. Luxure. Gain facile. C’est tout ce qui l’intéresse. Aucun besoin de la sensibiliser quand il s’agit de ça. Même si tu parles en bengali, elle va trouver le chemin, le temps, l’argent et l’énergie pour y aller.
Les Ouattara, Sall, Sassou, Biya, Condé, Faure, Bongo, IBK et compagnie vous ont ratés.
Nathalie Yamb