Des amis m’appellent pour me demander pourquoi je supportais Ali Bongo dans l’élection gabonaise. Ces amis disent que c’est ce qui transparaît de mes deux post publiés. Par le présent post, je tiens à faire les précisions suivantes : Je ne soutiens personne dans cette élection qui est une affaire domestique du Gabon. Par conséquent elle relève des seuls Gabonais. Je soutiens par contre des principes qui sont non négociables et partout où ces principes sont violés, il convient de les défendre. L’ingérence occidentale, notamment française, dans les élections en Afrique est inacceptable. J’ai été choqué par le communiqué du parti socialiste français, des propos du ministre français des Affaires étrangères, et, au-dessus de tout, des sorties insultantes d’un certain barbouze nommé Robert Bourgi. Pour ce dernier, je pense qu’il est temps qu’un mandat d’arrêt soit lancé contre lui par un pays africain pour ses nombreux crimes qu’il y commet et dont il parle avec une certaine arrogance. Tant que cette ingérence française ne s’estompe pas, les élections en Afrique seront toujours assorties de violence. Les candidats à une élection présidentielle en Afrique francophone ne cherchent plus le vote des électeurs, mais qui, le soutien de la France et qui d’autre, comment contrer la France dans cette élection. Ça ne fait pas sérieux. C’est pourquoi, il convient de s’opposer à cette ingérence française partout où elle se manifeste en Afrique au nom de la liberté des peuples et de la souveraineté des Etats. C’est seulement, lorsque nos élus seront affranchis de cette tutelle étouffante française qu’ils comprendront que leur sort dépend des peuples à qui ils doivent rendre compte et non de leur connexion à des réseaux de mafieux. C’est la seule condition pour donner un sens vrai à notre démocratie.
Le deuxième principe sur lequel je reste fortement attaché reste celui de la responsabilité. Dans son livre « Éclipse sur l’Afrique fallait-il tuer Kadhafi », Jean Ping développe des thèses que je partage entièrement. Seulement, j’y trouve de la malhonnêteté intellectuelle et de l’irresponsabilité de sa part eu égard aux fonctions qu’il a occupées. Jean Ping était Président de la Commission de l’UA au moment de l’assassinat de Kadhafi par Sarkozy, dans le silence complice et étourdissant des Chefs d’Etats et chefs de Gouvernements africains. Qu’a-t-il fait pour s’opposer à cet acte ignoble ou, tout au moins, pour le dénoncer quand sa voix portait encore. Il répondra que c’est parce que le Président de la Commission de l’UA n’a pas de pouvoir propre et qu’il agit sous la dictée des Chefs d’Etat qui sont les vrais patrons de l’UA. Mais je rappelle que, en 2010, bien avant même qu’il y ait eu une réunion des Chefs d’Etats pour prendre une position claire sur la crise ivoirienne, lui Jean Ping, actionné par Nicolas Sarkozy, avait publiquement pris position en déclarant, ès qualité, que le Président Laurent Gbagbo avait perdu les élections. Il s’opposera par la suite au recomptage des voix proposé par ce dernier comme solution de crise parce que cette simple opération arithmétique serait, à ses yeux, une injustice plus que les bombes qui ont tué d’innocentes personnes. Pourquoi alors veut-il reproduire cette injustice dans son propre pays. Cette sortie singulière du Président de la Commission de l’UA avait gêné considérablement, par la suite, certains chefs d’Etats dans la résolution de la crise ivoirienne. Ils en avaient gardé une grosse dent contre lui et ce sont eux qui s’étaient ligués contre lui pour le chasser de la tête de l’UA en janvier 2012.
En outre, pour revenir sur le cas de la mort du Président Kadhafi, pourquoi Jean Ping n’a-t-il pas démissionné pour protester contre cet assassinat et le silence des chefs d’Etats africains. Au contraire, tous les chefs d’Etats qui avaient précipitamment reconnu, sur injonctions de monsieur Sarkozy, la coalition rebelle comme l’unique représentant des populations libyennes seront, paradoxalement, ceux qui vont porter la candidature de Ping à l’élection pour un second mandat à la tête de l’UA en 2012. Il s’agit surtout du Burkinabé Compaoré et de l’Ivoirien Ouattara. Ce dernier assurera même le rôle de directeur de campagne de Ping. Personnellement, je ne peux cautionner cette tentative de se constituer une virginité dans une affaire dans laquelle l’on a été soi-même un acteur important. C’est de l’irresponsabilité et c’est l’une des grosses plaies de la gouvernance en Afrique.
Donc ce n’est ni l’un, ni l’autre que je supporte au Gabon, mais des principes. Dès que la France s’alignera de façon grossière derrière un candidat en Afrique, il sera frappé de suspicion légitime de ma part. C’est ma façon à moi de dire trop c’est trop.
Justin Katinan Koné
Porte-parole du Président Laurent Gbagbo
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