Affaire de coup d’Etat au Togo : Six personnes sommairement exécutées dans l’attaque du domicile de Kpatcha Gnassingbé
Le sergent Tchaa Kifaleng désarmé, ligoté avec son ceinturon et froidement abattu
A quelques jours du grand déballage, les langues commencent à se délier. Selon les informations, ils étaient six (6) à être exécutés dans la nuit du 12 au 13 avril 2009 lors de l’attaque du domicile de Kpatcha Gnassingbé. D’abord, c’est le sergent Kifaleng Tchaa en service chez Kpatcha Gnassingbé qui a reconnu le colonel Félix Kadanga, le patron de la FIR, devant le domicile de l’honorable député bien que celui-ci soit cagoulé. « Etes-vous en train de chercher l’honorable ? », a-t-il demandé naïvement. Tout à coup surgirent les hommes de Kadanga qui l’ont désarmé, ligoté ensemble avec cinq autres agents avec des ceinturons (voir photo).
Pour vous permettre de bien comprendre ce que nous disons nous reprenons l’article que nous avons publié dans l’une de nos parutions (Liberté N°976 du jeudi 26 mai 2011).
Affaire Kpatcha Gnassingbé/ Les langues se délient
Des révélations sur les circonstances de la mort du Sergent Tchaa Kossi Kifalang
On parle de tout dans cette affaire. Sauf de ceux qui ont perdu leur vie lors de l’attaque du domicile du député de la Kozah dans la nuit du 12 avril 2009 par un commando lourdement armé et conduit par le Colonel Félix Kadanga. Oui, il y a eu des morts, mais le nombre nous restera inconnu. Les chiffres tournent autour de deux soldats tués. Ne dit-on pas qu’il faut connaître les vraies circonstances de la mort de quelqu’un afin de faire efficacement son deuil? Les familles sont toujours dans l’attente de la vérité des faits. Le cas du soldat Kossi Tchaa Kifalang, neveu du tout-puissant ex-Maire de la ville de Kara, feu Michel Balakinèbawi Toyi Kifalang qui est un oncle à Etienne Eyadéma Gnassingbé.
Les rapports entre les deux familles étaient tels qu’il était difficile de voir un Gnassingbé père ou fils sans un Kifalang. Le vieux Kifalang était le seul haut dignitaire à avoir construit une maison dans l’enceinte du camp de la Garde Présidentielle de Pya. Dès le début du conflit Kpatcha-Faure, plusieurs personnes avaient regretté la mort de Michel, car contrairement aux autres comme le Colonel Assih qui ne sont attirés que par le fric du Prince et la vengeance, lui au moins pouvait dire la vérité aux deux protagonistes.
Et c’est ainsi que le Sergent Chef Kossi Kifalang, militaire de son état, était détaché au service de Kpatcha Gnassingbé comme agent de sécurité. Il était considéré comme son aide de camp. Un homme très dévoué et disponible. D’ après notre source, ce dernier avait été arrêté la nuit de l’attaque du domicile du célèbre prisonnier après qu’ils eurent rendu les armes, car il y avait évidemment des échanges de tirs. Ils étaient au nombre de deux militaires, vivants bien sûr, à être transportés à bord d’un véhicule militaire vers le camp FIR. Mais au finish, les deux sont morts. Une semaine plus tard, le quotidien national Togo-Presse a publié les avis dans sa page nécrologique. Qu’est-ce qui avait fait courir les familles à aller enterrer rapidement leur mort ? Et aussi dans la plus totale discrétion ? Avaient-elles reçu des injonctions pour s’exécuter ? Avait-on pratiqué une autopsie ?
A la mort de ces soldats, des sources fidèles au Colonel avaient tenté de jouer à la désinformation. Il se racontait qu’en cours de route vers le camp FIR, l’un d’entre les prisonniers en la personne du Sergent Zondokpo dit « Z » qui était à quelques jours de sa retraite, se serait saisi d’un pistolet qu’il aurait arraché de la ceinture de leur garde. Il aurait tiré un coup vers le chauffeur et par la suite, se serait tiré une balle dans la tête et c’est cette balle qui aurait fait les autres dégâts.
Mais d’autres sources s’inscrivent en faux contre le scénario de suicide et soutiennent que les soldats constituant la garde rapprochée de Kpatcha Gnassingbé qui ont été arrêtés, étaient bien ligotés depuis le domicile du député de la Kozah avant d’être conduits au camp FIR. Ils y sont arrivés vivants et en parfaite santé. Et c’est à l’arrivée de leur chef corps que tout avait changé. « Tout d’abord, il irait proférer une menace ethnique à l’encontre du cousin de Faure Gnassingbé. Pourtant les deux sont de la Kozah. Seulement l’un est de Tchitchao et l’autre de Pya-Akéï. Alors il aurait ordonné tout simplement de fusiller Kifalang avec une arme de pointe. C’est ainsi que la même balle tirée, aurait traversé deux corps », explique cette source.
« Quelques minutes après ce règlement de compte, la famille a été alertée par un autre frère soldat en service au camp FIR. Elle a continué en disant que dans les heures qui suivaient, la famille avait fait le tour de la morgue et du CHU Campus à la recherche de leur mort mais en vain. Le corps de Kossi Kifalang ne leur sera restitué que trois jours plus tard. Le hic, c’est que « les morguiers (ceux qui travaillent à la morgue, ndlr) en présence des éléments de l’armée togolaise nous ont rendu le corps de Kossi Kifalang, les mains ligotées vers l’arrière. On a aperçu un trou au niveau de son thorax, la balle est sortie par l’arrière, c’est l’impact d’un 12/7 », confie un ami de la famille. Le Togo étant un pays exceptionnel, aucune information judiciaire n’a été ouverte par le Procureur de la République. De même, aucune autopsie n’a été pratiquée.
On s’en souvient, au lendemain de cette attaque, le site officiel de la République togolaise avait écrit que « cet incident n’a fait ni mort ni de blessées ». Même l’ex-Procureur de la République Robert Bakaï qui a habillé juridiquement la fusillade, n’a rien dit. Omerta également chez le chef de l’Etat lors de son message à la nation.
Considérant les propos scandaleux du Procureur Général annonçant la libération des dix co-accusés de Faure Gnassingbé et vu les nombreux vices dans la procédure d’interpellation et d’incarcération, il est évident que du jour au lendemain, le tribunal proclame un non-lieu dans cette affaire d’« atteinte à la sûreté de l’Etat ». Ce qui donnera lieu à la réhabilitation de tous ceux qui ont connu des injustices dans cette fiction de coup d’Etat. Il est important d’inscrire dans le dossier et pour l’histoire, les personnes ayant perdu leur vie afin que les familles, femmes, enfants et parents soient soulagés.
Kadja K. Liberté Hebdo