Chez nous, les prisons sont pleines à craquer. Pourtant, les criminels sont en liberté. Qui sont donc ceux qui y sont enfermés ? Motus et bouche cousue. Le système le veut ainsi. Ce genre de prisonnier n’existe pas ici chez nous. Interdit d’en parler.
Un si beau pays. Avec si peu d’habitants. Quel gâchis ! Pour y remédier, le système a eu une idée de génie. Faire de nos hôtes, des frères de sang. A part entière. Donc des co-propriétaires de nos richesses inexploitées. Et ce, à partir d’un rien. Automatiquement. Sans qu’ils en aient exprimé l’envie. Quelle générosité ! Quelle bonté, ce système !
Ce n’est pas tout. Ici au pays des éléphants, ne passe pas à la télé ou à la radio qui veut. Tout y est filtré. Scrupuleusement. Aucun manquement n’y est toléré. L’image du chef en dépend. Il y est vénéré. Deux directeurs de la chaine de télé débarqués. Conséquence de sa noire colère. Le système veille au grain. Ce que nous devons voir et entendre, c’est lui qui en décide. Selon son bon vouloir.
D’ailleurs les gardiens du système, sont les seuls maîtres à bord. Ils peuvent se rendre chez toi. Quand cela leur chante. T’y mépriser ou, t’y insulter. Copieusement. Ils n’ont de compte à rendre à personne. Le pouvoir, le droit de vie ou de mort, leur appartient. A eux et à leur chef tout-puissant.
Chez nous, ou subis le système, ou tu es hors du système ; ou tu es au pays et tu la fermes pour de bon, ou tu es exilé, ou encore réfugié, dans un pays voisin, voire en Europe si tu en a les moyens. Il n’y a pas d’autres options.
C’est comme ça chez nous. Au pays. Depuis bientôt trois ans. C’est un instinct de survie que de se conformer aux injonctions du système, d’applaudir le chef, répondre « oui » à tout ce qu’il dit et fait, pour avoir la paix, pour avoir la vie sauve ; même s’il n’y a rien à se mettre sous la dent ; même si aucun emploi ne pointe à l’horizon ; même si les prix sont hors de portée ; même si se soigner est devenu un rêve impossible ; même si voir l’argent circuler, relève du miracle… C’est comme ça chez nous.
Certes, personne n’a demandé notre avis quand il s’agissait de nous choisir un chef. Les bombes ont réglé la question. A notre place. Aujourd’hui encore, personne ne demande notre avis. Le chef et son système décident. Seuls. Pour nous. Comme ils l’entendent. Qu’on le veuille ou pas. Chez nous, c’est ainsi que se joue le jeu politique. C’est notre façon à nous de vivre la démocratie. Notre démocratie.
Marc Micaèl La Riposte