Aucune réconciliation n’est possible sans jaillissement de la vérité. Mais au Togo, personne à ce jour ne sait qui a fait quoi et à qui afin d’entrevoir un quelconque pardon ou une réconciliation. La vérité n’a pas été connue et voilà que les autorités en place veulent conduire les Togolais à la réconciliation. Ce qui sera difficile voire impossible. Sinon, c’est trop facile de mettre tout sur le dos de l’Etat et de laisser des coupables dont certains sont identifiés dans leur coin comme si de rien n’était. Certes, l’Etat a failli à un moment donné dans son rôle régalien de protection civile et de sécurité mais cela ne veut signifier que seule la puissance publique doit endosser toute la responsabilité des violences survenues au Togo de 1958 à nos jours. Non, il faut que la vérité soit connue et que les coupables demandent pardon pour leurs forfaits avant d’envisager une éventuelle réconciliation. Si tel n’est pas le cas, le processus en cours à l’heure qu’il est à Lomé et que Mme Awa Nana Daboya et ses collaborateurs appellent réconciliation ne pourra aboutir. Sauf qu’à remuer le couteau dans les plaies. Pendant que l’on y est, qui le pouvoir de Lomé veut-il réconcilier au juste et quelle unité nationale entend-il renforcer à travers son scénario actuel fait de brulure d’étapes nécessaires?
Loin d’être des oiseaux de mauvais augure, nous voulons seulement attirer l’attention des tenants du pouvoir et de l’opinion sur le danger de bruler certaines étapes pour enclencher un véritable processus de réconciliation au Togo. A ce propos, les exemples d’Afrique du sud et du Rwanda sont édifiants, eux qui ont connu pire situation que celle du Togo. Dans ces deux pays, la vérité a été sue de tout le monde. En Afrique du sud particulièrement, les témoignages étaient retransmis en direct à la télévision et l’on a encore en mémoire des passages pleins d’émotion où le célèbre Mgr Desmond Tutu versait des larmes devant des cas d’atrocité et de cruauté révélés à l’époque. Après avoir ainsi vidé le pus de sa gangrène, l’Afrique du sud n’est-elle pas en train de se remettre des pages sombres de son histoire ? Et le Rwanda qui a décidé aussi d’attraper le taureau par les cornes pour aller de l’avant. Certains nous diront que le Togo n’est ni l’Afrique du Sud ni le Rwanda. Et pourtant, ce sont des hommes avec des cœurs qui vivent aussi dans ces deux pays. Pour faire court, les Sud Africains ou les Rwandais auraient pu ne retenir que la seule responsabilité de leurs Etats respectifs.
Dans tout processus de pardon et de réconciliation, il y a des étapes à franchir absolument. Sans cela, ce sera un goût d’inachevé au bout du compte et tôt ou tard, les ressentiments vont ressurgir. Sinon, comment peut-on demander la réconciliation quand n’accepte d’endosser la responsabilité des actes commis même identifié comme coupable?
Pâ Tamba
Lynx.info
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