Au Togo, la dernière bataille d’Anne-Marie

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Ils se sont mariés en 1969. Pour elle, il s’était installé en France. Aujourd’hui, l’épouse de Kofi Yamgnanefait campagne à Lomé, aux côtés de son mari, candidat à la présidence de la République togolaise.
Reportage
« Qu’est-ce qu’il fait chaud ! Je ne supporte pas la chaleur… » Mais alors, que fait-elle donc dans ce pays où la température grimpe jusqu’à 45° à midi ? Elle suit à Lomé son mari, le Breton de Saint-Coulitz, Kofi Yamgnane. Il y a quarante ans, c’est lui qui s’était installé en France pour suivre son épouse, prof de maths.

« Quand on était plus jeunes, que l’on revenait du Togo, on avait la rage. On était malade de voir le délabrement du pays. C’est ce qui a décidé Kofi à se porter candidat » explique Anne-Marie. Les élections sont prévues le 28 février.

Bras droit

Installée sur la terrasse de la vaste villa que le couple loue à un ami, elle s’attelle, avec le sourire comme toujours, à une tâche capitale, mais bien fastidieuse. Réunir les 2 000 signatures qui valideront la candidature de Kofi Yamgnane. Nom, prénom, date et lieu de naissance, numéro de carte d’électeur, préfecture du bureau de vote et signature de chaque soutien. Anne-Marie vérifie tout, ligne par ligne. « Ce serait trop bête de se voir refuser la candidature à cause d’une erreur sur un nom. »

L’épouse et bras droit du candidat s’est occupée de la rénovation du QG de campagne, de l’impression des documents électoraux qui remplissent le salon. Elle transcrit aussi les entretiens tenus par son mari. Organise l’agenda de campagne depuis près d’un an. « Le calendrier change tout le temps. Par exemple, à Bruxelles, les conseillers n’étaient disponibles qu’en décembre, alors qu’on avait prévu de les voir début janvier. »

Elle tient également les comptes : « Un budget de 800 000 €, financé au quart par nous-mêmes, aux trois quarts par des dons. On compte tout, sou par sou. Nous sommes d’origine humble tous deux, on ne jette pas l’argent par la fenêtre. D’habitude, la campagne de l’opposition, c’est 6 millions. »

« Pour mon pays »

Comme son mari, Anne-Marie ne craint pas le dictateur, le président Faure Gnassingbé. « Quand on a vu la mort de près comme moi, après ma maladie en 2004, on voit les choses autrement. Plutôt que de mourir d’un cancer dans mon lit, si je dois mourir sous les balles pour donner un peu de liberté à mon pays, ça ne me dérange pas. » La peur, comme toute l’équipe de campagne, elle a appris à la dompter. En se disant qu’un titre d’ancien secrétaire d’État de François Mitterrand est un bouclier pour Kofi Yamgnane.

Entre deux visites de conseillers du candidat et d’amis, Anne-Marie Yamgnane respire : « J’ai enfin trouvé un homme de maison, pour s’occuper du ménage, des courses et des repas. » Elle ne le cache cependant pas, à 65 ans, elle fatigue. Même si elle reconnaît que « tenir encore le coup malgré ma santé, c’est une belle surprise ».

Elle a été de toutes les campagnes électorales de son mari. Mais, « C’est ma dernière bataille » avoue-t-elle.

Philippe ATTARD.

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