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S’il vivait, le « Vieux » aurait eu ce 15 août 2012, 71 ans. Les sicaires à la solde du pouvoir de Lomé en ont voulu autrement. Ceux qui ont depuis la licence de tuer et en toute impunité, en ont décidé : Le « Vieux » devrait mourir. Et pour n’avoir jamais blessé une mouche dans sa vie !
Dans leurs errements après la mort du Vieux, c’est son ami et frère Vouley Frititi cadre du RPT qui ; avait voulu mettre dans les tympans des journalistes à Lomé que, le vieux était endetté au point de se suicider. La mayonnaise ne prenant pas ; d’autant plus qu’un endetté ne pouvait se payer des vacances en Europe, ils ont trouvé d’autres histoires à faire dormir debout- qui se sont aussi révélées être des contes de fées. Mes propres investigations sur la mort du Vieux ont buté sur un rideau de fer. Du côté de la famille où, nous avions nos entrées avec sa femme d’origine angolaise, rien de neuf aussi. Autant dire que ; l’investigation pour laquelle il voulait que, je quitte l’Europe pour m’établir au Togo a aussi ses limites. Mon premier test comme journaliste d’investigation s’avère alors être un échec. L’âme amère, je le concède mon vieux. Si tu peux me le pardonner du fond de ton caveau où tu me lis. Au Togo, la mort d’un génie n’est rien ! Celle de brutes est anoblie et magnifiée. Koromsa, frère d’Eyadema a fini par être immortalisé. Un pavillon de l’aéroport de Lomé, devenu aéroport du petit frère Eyadema Gnassingbé porte son nom. Quand le Dr Amah Gnassingbé aussi est mort, c’est l’opposition et le pouvoir qui lui avaient de concert tourné le dos. Et pourtant, pour ses recherches, c’est toute l’Afrique qui était à ses pieds de son vivant.
Historien, journaliste écrivain, homme politique, je fus le dernier à avoir côtoyé feu Joachim Atsutsé Kokouvi Agbobli. Parcours de circonstance ou bénédiction d’avoir rencontré un grand homme quelques jours avant sa mort ? Je ne saurais le dire. La chimie avait été parfaite entre nous et le vieux m’a laissé un testament avant sa mort. Avant même qu’il le fasse par écrit, au téléphone il fut clair : « Je me méfie de mes petits frères journalistes du sud ». En effet, il cherchait que je l’aide à trouver deux enseignants amoureux de la plume pour qu’il en fasse des journalistes chevronnés. Mais il voulait qu’ils soient de Kara, de Guérin-Kouka ou Losso. Il disait vouloir les former sur le tas. A la question de savoir pourquoi absolument des Togolais de ces villes ? En bon historien, il me répondit que, ces peuples avaient un passé et une histoire qui font d’eux des gens sur lesquelles il pouvait compter. Je lui citai plutôt des noms de confrères de la place qu’il pouvait former. « Ce sont de petits corrompus » s’écrie t-il. « Mes petits frères du sud peuvent trahir mille fois pour un billet de mille franc ». L’histoire semble lui avoir donné raison quand on voit ce qui ce passe dans le tout Lomé. Pour moi, je garde comme une relique cette phrase : « Méfies-toi d’eux ! ». Et depuis, je vis avec cette méfiance.
Pour la petite histoire comme tu aimais que je te raconte comme je sais le faire, voici quelques lignes que j’ai pour ta lecture
Tu sais Vieux, depuis ta mort, rien n’a aussi changé. Lomé connait toujours des inondations faute de caniveaux. La misère frappe vieux comme jeunes, vielles comme jeunes filles. La prostitution est devenue un métier et le pouvoir de Faure en a donné un quitus. Le délinquant de la république Ferdinand Tchamsi que tu disais qu’il faille le mettre en prison avant qu’il ne commette d’autres actes est promu. Il est aux Etats-Unis et parle au nom des Togolais. Sur le plan politique, Faure a cassé le RPT. Ce qui veut dire que ce parti n’existe plus. On a aussi vécu des scènes surréalistes entre enfants d’Eyadema mon Vieux. Kpatcha, le gros, tu te rappelles ? Le plus cynique de la fratrie Gnassingbé lors du cloutage en 2005 des Togolais est depuis lui aussi en prison. De là, il a même pu enceinter sa femme Mimi. Ils ont un petit qu’ils appellent Djafet Madjèlesso. Tu sais Vieux, tu dois en rire comme je te connais. Tu sais que, les Togolais ont vu le général Assani Tidjani pleuré ? Il pleurait menottes liées au bras dans l’affaire du coup d’Etat de Pâques qui avait mis beaucoup d’officiers et de civils en prison. Il pleurait tellement fort qu’il a dit qu’il voulait tout raconter et séance tenante alors que le juge venait de reporter la séance. Vieux, c’est là que, nous avions compris que les galonnés togolais n’étaient point des courageux pour rester dans les geôles qu’ils souhaitaient pour les opposants. Tu sais, pour avoir aidé la rébellion ivoirienne à avoir raison de Laurent Gbagbo, la France a trouvé tous les alibis afin de l’extirper de la prison de Lomé. Il vit à Paris et on a laissé sa femme le rejoindre. Pour te dire que rien n’a changé sur le plan judiciaire. Quand tu es parti, on a nommé Gilbert Houngbo, un économiste venu du PNUD. Il s’est révélé être le plus nul de tous les premiers ministres que Togo a connu. Un bon sous-fifre en somme ! Après, Faure a encore « capté » pour la seconde fois en 2010 le pouvoir. Et depuis, ce sont les marches de protestation. Jean-Pierre Fabre a fini par se désolidariser de Gilchrist Olympio et Kofi Yamgnane que tu contestais déjà le vœu de vouloir diriger un jour le Togo, s’est vu refuser la course à la présidentielle pour cause d’une histoire farfelue d’acte de naissance. J’oubliais. Lèves toi et rit un peu mon Vieux. Gilchrist Olympio, je dis le fils de Sylvanus pas un autre. Tu te rappelles bien celui-là qui a eu ses testicules mis en pièces détachées lors de l’attentat de Soudou par les balles du papa de Faure, cire désormais les chaussures du gamin. Ils mangent ensemble et se sont pratiquement partagés le Togo avec des ministres. Son parti « l’UFC » est devenu l’ami de Faure et de son parti Unir. Aurais-tu cru ? Mais comme c’est ton fils qui te le dit, je sais que tu y crois. Je voudrais que tu me lises beaucoup parce que j’ai beaucoup à parler, à te raconter. Mais moi-même je suis convalescent.
Dis, Vieux, sais tu qu’ils ont tué le panafricaniste Mouammar Kadhafi avec la complicité des nègres qui n’ont daigné lever le petit doigt ? Sais-tu que Laurent Gbagbo est à la Haye et que les seigneurs de guerre des Forces Nouvelles dirigent désormais la Côte d’Ivoire ? De ton vivant, je sais que tes coups de gueule allaient donner du courage aux panafricanistes. Tu n’es plus là. Nous en avons tellement souffert. Il fut un moment où, nous n’étions pas plus de trois à croire en la lutte de Laurent Gbagbo. Tous les journalistes togolais étaient du coté des blancs, de la France et des américains. Aujourd’hui, ils en ont honte et ne parlent même plus de ce drame. Pour le drame de la Côte d’Ivoire, d’autres ont même pris sur eux de devenir journaliste d’investigation depuis leur tanière américaine. A la fin, eux aussi ont cessé de parler du pays pour lequel toutes les hyènes occidentales avaient braqué leurs yeux. Tu haïssais les traîtres. Ton Afrique semble enfanter chaque jour que Dieu fait davantage.
Et comme par hasard, mes enquêtes sur ta mort se dirigeaient vers Pascal Bodjona, ce ministre que tu trouvais ridicule pour occuper une place aussi importante au Togo. Sais-tu que tes amis m’ont dit de converger mes investigations vers lui sur ta mort parce qu’il te haïssait beaucoup ? Vieux, je n’en ai même plus besoin. Il est sur le fil et bourré de problèmes. Dans le viseur de Faure, il est entre le marteau et l’enclume de la dictature. Il ne reste qu’un juge comme Faure les a éduqués tape sur le fer. Je peux te parier que Faure le mettra au gnouf ! Tu sais reposes-toi et donnes moi la force de continuer sur ce que tu as voulu que je devienne : Journaliste d’investigation !
Camus Ali Lynx.info