Soit. Au cours de son message, Alassane Ouattara a déclaré – entre autres – avoir : « demandé au garde des sceaux, que la justice examine à nouveau une mesure de mis en liberté provisoire de certains détenus de la crise post-électorale » ; non sans avoir au préalable reconnu que : « (…) la condition essentielle pour atteindre nos objectifs, est la préservation d’un climat de paix, préalable indispensable à tout développement ». Faut-il le croire ? Faut-il croire qu’il a finalement compris qu’il n’y a pas plus sourd que celui qui refuse d’entendre ; faut-il croire qu’il a fini par entendre les appels incessants à la libération des partisans, collaborateurs et proches de Laurent Gbagbo et pourquoi pas, participer à la libération de celui-ci ? Ou, faut-il simplement voir dans ces déclarations, les propos d’un candidat – déjà – en campagne pour la présidentielle de 2015 ?
Dans tous les cas, l’on suivra de près, tout au long de cette nouvelle année, la question des « détenus de la crise post-électorale » dont a parlé Alassane Ouattara. Car en effet, sous ce vocable trompeur de : « détenus de la crise post-électorale », se cache ceux dont le régime en place a toujours nié l’existence : les prisonniers politiques. Il s’agit bien de prisonniers politiques et non de criminels notoires. Il ne s’agit pas de ceux qui ont commis des crimes et qui méritent, pour cela, d’être jugés et condamnés, au grand bonheur de leurs victimes. En effet, ces détenus dont parle Alassane Ouattara, ne sont autres que tous ces ivoiriens que lui-même a jeté en prison, au lendemain de sa prise du pouvoir. Ces ivoiriens, proches de Laurent Gbagbo, y sont, parce qu’ils ont refusé de céder à la loi des bombes françaises. Ils ont été emprisonnés, à l’image de celui qu’ils ont toujours soutenu : Laurent Gbagbo, incarcéré à la Haye, par ses ennemis, lui aussi, pour avoir refusé le dictat de la communauté dite internationale et pour s’être soumis aux lois de son pays.
La Côte d’Ivoire ne peut plus et ne doit plus se permettre le « luxe », à l’orée 2015, d’avoir encore des prisonniers politiques dans ses prisons. Ils doivent être tous libérés. Tous, sans exception et sans autre forme de procès. Car on le sait, tout ceux qui aujourd’hui parlent de justice, ne le font que dans le but d’assouvir leur soif de vengeance. Dans leur haine, ils vont jusqu’à instrumentaliser les victimes qui se laissent facilement entrainer par ces médisants sans scrupules. Or la justice, n’est pas la vengeance. Hélas pour ces ennemis de la paix !
Il faut donc mettre fin à l’image d’une Côte d’Ivoire où sont menacés de mort, sinon emprisonnés ceux qui soutiennent la position selon laquelle les conditions d’accès au pouvoir d’Alassane Ouattara sont franchement contestables. Une position, somme toute, légitime si l’on veut croire que nous aspirons à devenir un Etat de Droit, un Etat qui aspire au développement, comme l’a affirmé Alassane Ouattara dans son discours de nouvel an. N’est-ce pas aussi cela, le droit à l’exercice des libertés fondamentales et de la démocratie ?
Dans cette perspective, nous avons eu plaisir à lire l’interview d’un homme qui n’est plus à présenter : l’ex-ministre Damalan Henri César. Dans un quotidien de la place, comme s’il eut été dans le cœur des ivoiriens, il affirme : « Aujourd’hui, les ivoiriens ne sont plus prêts à faire la guerre. C’est même impensable et inutile parce que les ivoiriens ont compris que les armes ne peuvent rien garantir de solide (…) le rêve des ivoiriens aujourd’hui, c’est de briser le mur de la méfiance et de la division pour qu’on parle de l’ivoirien où qu’il se trouve et non des chapelles politiques », avant d’encourager Alassane Ouattara, à aller au-delà de ses belles promesses qui s’avèrent très souvent utopiques : « (…) Alassane Ouattara doit aller plus loin en libérant tous les prisonniers politiques ».
L’an 2014 sera – à n’en point douter – une année charnière. 2015, sera un point de non-retour pour les ivoiriens et pour la Côte d’Ivoire. Mais 2015 sera surtout ce que nous aurons fait de 2014. Alassane Ouattara va-t-il enfin et dès maintenant se décider à mettre fin à l’impunité ; à la justice sélective ; à la corruption ; aux violations des droits de l’Homme ; à libérer le jeu démocratique ; à œuvrer réellement à l’instauration des mécanismes d’un Etat de Droit ; à libérer tous les prisonniers politiques…, bref, à aller au-delà de son message aux ivoiriens ? Même si nous avons des raisons d’exprimer nos doutes, maintenons sans relâche la pression, continuons la lutte pour que les bonnes résolutions ne se limitent plus qu’aux simples discours, mais que nous y allions au-delà.
Marc Micaèl La Riposte