Abobo la guerre !

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La Côte d’Ivoire a vécu –  et vit encore – un début de semaine riche en évènements violents et sanglants. Cette semaine qui aura été marquée par une énième attaque des positions des FRCI dans la ville de Bonoua et de Samo par le «mystérieux  commando», la tentative de destruction des installations de la centrale thermique d’Azito, située dans la commune de Yopougon, par des individus non identifiés, mais aussi et surtout par l’orageuse opération de déguerpissement  des transporteurs et commerçants du rond-point d’Abobo lancée par le gouvernement Ouattara.

Une opération de déguerpissement, sinon dite de « salubrité », qui tourne court. Disons qui vire à l’affrontement direct et armé entre civils et FRCI, venus sécuriser l’opération. Rajoutant ainsi aux bruits déjà inquiétants d’armes lourdes qui ont secoués, la veille, la ville de Bonoua et de Samo.

Face à l’ampleur des évènements survenus dans cette commune d’Abobo, on pouvait lire dans les colonnes d’un quotidien ivoirien, pourtant proche du régime d’Abidjan : « On s’y attendait, mais pas à ce point-là. L’opération de déguerpissement de la commune d’Abobo a complètement dégénéré hier et pris une allure de guerre entre commerçants et forces de l’ordre ». Entendez bien ici, le mot « guerre » employé qui n’est pas fortuit et qui garde – en effet – tout son sens, tant les tirs entendus – selon des témoins de la scène – étaient  des plus nourris.

Des civils armés qui s’opposent à leur déguerpissement en faisant front à des troupes de police et de gendarmerie submergées, puis aux FRCI, appelés en renfort. Ni les gaz lacrymogènes, ni les tirs de sommation n’auront suffi à disperser cette foule de civils décidés à en découdre avec leurs « déguerpisseurs ».

Une foule qui riposte d’abord par des pluies de jets de pierres, puis ensuite qui réplique – scène stupéfiante – par des tirs d’armes de guerre, aux tirs de sommation des FRCI. La guerre venait ainsi d’être déclarée. On dénombrera, plus tard selon le même quotidien, plusieurs blessés et même un mort dans le rang des FRCI. Certaines sources avancent même le nombre de cinq morts au cours de ces affrontements.

Au-delà des apparences, les évènements survenus à d’Abobo ont cette particularité – quand on s’y penche sérieusement – de confirmer ce que certains observateurs de la crise post-électorale ivoirienne soutiennent depuis le début et ce au regard du déroulement de cette crise: le ver est dans le fruit.

Abobo, commune de la ville d’Abidjan dont le nom est intimement lié à celui du « commando invisible » du sieur (feu) Ibrahim Coulibaly. Abobo « déclarée » bastion du RDR – par ce même parti – donc hostile à l’ex-régime frontiste. Abobo où, dit-on sept femmes, militantes du RDR auraient été assassinées par les forces loyales au président Laurent Gbagbo. Ce fait à lui seul aura suffi – souvenons-nous – à provoquer l’entrée en guerre – ouverte – de la force française Licorne et de l’Onuci, contre le régime de Laurent Gbagbo, aux fins de « déloger » celui-ci et – pourquoi pas ? –  de rendre le fauteuil présidentiel à portée de main de ses adversaires.

Interrogeons-nous tout d’abord, sur l’état d’esprit de ces civils armés et très amers d’Abobo.

Refuser d’obtempérer face à une décision de l’autorité gouvernementale, n’est-ce pas un acte d’incivisme, ou tout simplement un acte de rébellion ?  Ces habitants d’Abobo, – on peut le dire – forts de leur soutien sans faille, de leur militantisme, de leur détermination, de leur engagement inconditionnel à la cause du RDR, parti de monsieur Ouattara, zélés parmi les zélés, ces « Ado boys and girls » n’étaient-ils pas en droit de croire qu’ils bénéficieraient d’un traitement de faveur de la part d’un régime qu’ils ont aidé à mettre en place ? Ils ne s’attendaient certainement pas à ce que ces « rumeurs » de déguerpissement qui visait leur commune – Abobo – ne se concrétisent aujourd’hui, vu les nombreuses hésitations et les appréhensions manifestées par Anne Ouloto, la ministre de la salubrité, commise à cette tâche. Ne voyaient-ils pas dans l’occupation permanente de ce site public, un droit, – pour eux – voire une récompense à leurs nombreux « sacrifices » pour monsieur Ouattara ? Sinon, comment comprendre toute l’amertume, toute la rage, toute la colère toute l’opposition farouche à la laquelle ils se sont livrés pour empêcher – à tout prix – leur déguerpissement ?

Ensuite, dans la forme, un tel évènement a le mérite d’éclairer sous un nouveau jour, les vraies causes du problème d’insécurité dans la nouvelle ouattarandie.

Alors que à Yopougon, une autre commune de la ville d’Abidjan, jugée pro-Gbagbo, des populations, des jeunes de ce quartier sont pris pour cibles par un régime aux allures fascistes, l’on découvre – selon les aveux même de la ministre Anne Oulotto – que de nombreux civils à Abobo disposent encore d’armes. Et de quelles armes ?

Des armes de guerre qui ont été – tout ce temps – dissimulées pour aujourd’hui, être utilisées au grand jour. Des armes qui datent – certainement – du temps où la guerre post-électorale faisait rage et lorsque des milliers de civils hostiles au régime de Laurent Gbagbo et à l’armée régulière ivoirienne, se voyaient distribuer des armes, notamment dans cette commune d’Abobo  et ce, gracieusement, par des forces occultes, afin de dresser le tapis rouge de sang humain, sur lequel leur mentor marchera, un jour du 11 avril, pour aller s’asseoir sur le fauteuil présidentiel.

On peut donc, tout naturellement dénombrer parmi ces nombreux civils, plusieurs autres ayant certainement fait partie de l’armée hétéroclite de monsieur Ouattara, dénommée FRCI, mais qui aujourd’hui se retrouvent sur « la touche », sans avoir reçu ce qui leur a été, entre temps, promis. Figurez-vous donc, tous ces nombreux de civils frustrés, pleins de rancœurs et de déceptions et même – à coup sûr – de vengeance, disposant d’armes de guerre, prêts à s’en servir pour un oui ou pour un non.

Du coup, nous voilà en plein dans l’épineux problème de l’insécurité, donc du désarmement et de la démobilisation, empirée par l’ambition démesurée d’un homme, d’un clan à vouloir coûte que coûte s’accaparer le pouvoir. En Côte d’Ivoire, à la faveur de la crise post-électorale, des milliers de civils ont donc été armés, sans pour autant, être désarmés, jusqu’à cette date.

L’incapacité pour monsieur Ouattara à juguler cet état de fait, bien sûr occasionné par lui-même et ses soutiens extérieurs, démontre qu’il n’a aucune maitrise de la situation sécuritaire, voire social  et politique en Côte d’Ivoire.

Par ailleurs, tout ce vivier que constituent ces hommes, ces civils, ces combattants armés d’Abobo, n’est en effet rien d’autre qu’une bombe à retardement qui risque de « déboulonner » le chef Adoré de la nouvelle ouattarandie.

Abobo reste ainsi donc le ver qui ronge – de l’intérieur – le fruit « mûr » de monsieur Ouattara. Car c’est à Abobo que monsieur Ouattara doit rechercher les causes de ses nombreux « malheurs ». C’est à Abobo qu’a commencé la guerre. C’est – surement – à Abobo qu’elle se terminera.

Marc Micael

Zemami1er@yahoo.fr

 

 

 

 

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