Les Togolais exigent le retour à la constitution de 1992 dans laquelle tous se retrouvent. Une belle œuvre commune, même si elle n’est pas statique. C’est, pour eux, le plus court chemin vers l’aboutissement du processus de réconciliation nationale. Elle n’a pas été conçue en visant un individu ou un parti politique. Et puis, ce qu’on ne dit pas assez, cette loi s’est fondamentalement inspirée de notre histoire et ses dispositions motivées par le soucis d’éviter la concentration du pouvoir politique d’état entre les mains d’une seule personne. Les Togolais réclament simplement cette constitution qui ne fait pas la part belle à un groupe de privilegiés omnipotents, intouchables. Une loi juste, tournée vers l’avenir, qui garantit des chances équitables à tous les citoyens désireux de briguer des postes électifs.
Il y a des signes qui ne trompent pas. Faure est la cible de son peuple, dans le collimateur du monde. Le cartel dont il est devenu au fil des ans le chef suprême, au lieu d’être le président de tous les Togolais doit s’y résoudre. Toute tentative de dilatoire sera vue par le peuple souverain comme une déclaration de guerre que Faure ne peut pas gagner. N’en déplaise à Gilbert Bawara et à quelques troubadours encenseurs, Faure est mis à nu et ne peut plus privilégier ses agendas obscurantistes. Ses soutiens étrangers ont pris leur distance. C’est, pour les Togolais, le temps de résister. Avec fermeté, génie et intégrité. Dans une union sans faille.
Le RPT, en 2002, avait cru enterrer définitivement la constitution de 1992, oubliant que la resurrection est écrite dans l’histoire. Aujourd’hui c’est le retour après la mort, la renaissance du texte fondateur de la démocratie telle que voulue par les Togolais. De quoi s’agit-il? La constitution de 1992 aurait pu faire partie du patrimoine politique du général Eyadéma. Exactement comme son voisin de l’est d’alors, Mathieu Kerekou. Qu’on rende à César ce qui est à César: le président Eyadéma avait posé un acte majeur lorsqu’il demanda à ses partisans de voter en faveur du texte soumis au référendum par le gouvernement Koffigoh issu de la Conférence Nationale. La loi fut plébiscitée avec un OUI record: 98%. C’était une belle œuvre, porteuse d’espoirs pour tous les Togolais, sans exclusive. Le consensus y était. Mais, dix ans plus tard, le chef de l’Etat ne s’était trouvé personne, dans son entourage pour lui demander de tenir à sa « parole de militaire » en laissant en l’état cette constitution dont la paternité lui revenait.
Ceux qui avaient aidé le général à faire son brutal volte face l’avaient trompé. Par intêret. Et, du coup lui ont fermé les portes de l’histoire. On avait cru, à sa mort en 2005, que son successeur, le fils, allait prendre une belle revanche sur les affabulateurs et courtisans qui avaient induit son père en erreur, en faisant revenir la loi de 1992. L’intérêt, pour lui, était pourtant multiple et noble: redonner au président défunt vastement décrié le mérite d’avoir été, à tout le moins, le garant constitutionnel du texte de 1992, lequel texte donnait le coup d’envoi de l’ère démocratique au Togo. Ensuite, par cette mesure, il (Faure) se serait aménagé lui-même une place de choix dans l’histoire. Enfin, il aurait apaisé les cœurs, rapproché les Togolais de tous les bords, de tous les chemins de la vie, permettant ainsi à la nation de se regénérer, de retrouver un souffle nouveau et d’envisager l’avenir avec sérénité et confiance. Malheureusement, Faure choisit la voie de la discorde nationale. Pour avoir mené les Togolais en bateau sur cette question des réformes, il s’est mis à dos le peuple, jusque dans ses propres bastions. L’effet boomerang de sa ruse choquante est là.
Notre peuple veut reprendre sa souveraineté. Massivement, Il en a instruit ses représentants et dit au monde entier une chose: le départ de ce président, la fin de la dynastie. Cela suppose que si négociation doit y avoir, cela ne peut s’organiser qu’à partir de cette barre. Autrement, Tikpi Atchadam, le déclencheur du mouvement en cours, Jean-Pierre Fabre, le chef de file de l’opposition, les leaders des associations de la diaspora et tous les chefs de partis n’ont plus droit à l’erreur. Au moindre tâtônnment des députés de UNIR, le débat doit, sans tergiversation aucune, quitter l’assemblée pour la rue. Le moment ne peut pas être plus propice. A bon chat, bon rat! A défaut, notre si longue et difficile marche vers la démocratie durera encore 107 ans.
Kodjo Epou
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