L’Afrique, ce nouvel eldorado économique

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Chine et Inde en tête — marque le pas, le continent africain prend à son tour son envol


Le train de Bolloré à la conquête de l’Afrique von leparisien

Le continent africain affiche depuis une décennie une très forte croissance. Mais les entreprises françaises ne sont pas bien positionnées sur ce marché en pleine expansion.

Et si l’Afrique était la prochaine planche de salut de la France ? L’idée a de quoi surprendre. Et pourtant… Après plusieurs décennies de stagnation, et alors que la croissance des autres pays émergents — Chine et Inde en tête — marque le pas, le continent africain prend à son tour son envol.

Et offre ainsi aux entreprises françaises des opportunités de développement inespérées. Avec un sous-sol regorgeant de ressources naturelles, une croissance qui a su résister au séisme de la crise mondiale, et une population qui doublera d’ici à 2050 (un habitant sur quatre de la planète sera alors africain), le potentiel économique de ce continent semble sans limite. A condition toutefois de posséder un certain goût de l’aventure, car l’instabilité politique reste toujours, dans de nombreux Etats, une réalité.

Une poignée de grandes entreprises françaises — Total, Bouygues, Vinci, Canal + ou encore Orange — l’ont bien compris. Tout comme le groupe Bolloré, présent sur les terres africaines depuis plus de trente ans, et qui gère aujourd’hui 14 concessions portuaires et deux fluviales. Le géant français du transport et de la logistique s’est lancé l’année dernière dans un projet pharaonique : la construction d’une immense boucle ferroviaire de 3 000 km qui traversera une grande partie de l’Afrique de l’Ouest.

L’énorme appétit de la Chine

Dans un classement établi par l’institut Choiseul et Havas Worldwide et présenté à Paris au mois de mars, le Nigeria, le Kenya, la Côte d’Ivoire, l’Ethiopie et le Mozambique forment le top 5 des pays africains les plus prometteurs. Au point qu’ils pourraient bientôt ne plus rien avoir à envier aux deux champions de la région que sont le Maroc et l’Afrique du Sud. « Depuis 2001, l’économie africaine est en pleine croissance, détaillent les experts de l’institut Choiseul dans les conclusions de leur étude. Sur cette période, le PIB continental a connu une augmentation annuelle moyenne de 5 % et devrait s’établir autour de 2 400 Mds$ en 2014 (NDLR : 2 180 Mds€). Ce qui fait de l’Afrique l’une des zones les plus dynamiques au monde. »

De quoi aiguiser les appétits d’autres puissances économiques. Et en premier lieu la Chine, qui investit massivement dans cette région du globe. « Face à cette nouvelle concurrence, les moyens que nous mettons en œuvre ne sont pas à la hauteur, déplore le député (PS) de Saône-et-Loire Philippe Baumel, rapporteur d’une étude sur la politique africaine de la France qui vient d’être remise au Parlement. Nos quelques grands groupes, actuellement présents là-bas, sont autant d’arbres qui cachent la forêt. Car derrière, les PME ne suivent pas leurs traces et c’est bien dommage. » La faute à un manque d’accompagnement, selon ce parlementaire. Il préconise donc la création d’un ministère du Développement, à l’instar de ce qui existe déjà en Allemagne ou encore en Grande-Bretagne.

Des entreprises tricolores trop frileuses

« Il est loin le temps de la Françafrique, et c’est tant mieux. Mais les mauvaises habitudes, les réseaux d’influences et les manœuvres politiques ou militaires, établis lors de la décolonisation, ont laissé des traces. Et cela participe à la frilosité actuelle des entreprises françaises à partir à la conquête du marché africain. » Le constat est dressé par un entrepreneur français qui connaît bien le continent pour y faire commerce depuis près de vingt ans. « Sauf qu’il y a urgence ! » s’alarme de son côté le député (PS) de Saône-et-Loire Philippe Baumel. Il vient de remettre au Parlement une étude sur la politique africaine de la France, dont il est le rapporteur. « Avec une croissance économique qui a résisté au séisme de la crise de 2008, l’Afrique a attiré de nouveaux investisseurs, analyse-t-il. Inde et Chine en tête, très présentes dans les secteurs des infrastructures et des ressources naturelles. En n’étant pas assez offensives, nos entreprises françaises vont se retrouver à la traîne. »

Instabilité politique oblige, mais aussi épidémies, corruption, absence de cadre juridique ou administratif, l’Afrique fait peur. Et les PME françaises d’aujourd’hui non pas l’accompagnement suffisant, ni les réseaux, pour se lancer dans une aventure qu’elles jugent trop risquée. Et comme souvent en France, seuls quelques grands groupes ont les épaules suffisamment larges pour y nouer des liens commerciaux. Le rapport préconise donc la création d’un ministère du Développement, tourné vers l’Afrique, mais pas seulement, à l’instar de ce qui existe en Allemagne ou en Grande-Bretagne. «Le développement économique est encore le meilleur moyen d’installer une stabilité politique et sociale, reprend Philippe Baumel. La France va dépenser cette année plus de 1 Md€ dans ses opérations extérieures, notamment en Afrique. Alors qu’une partie de cet argent pourrait être utilisée dans l’aide au développement. Cela profiterait à l’Afrique, et à nos entreprises.» 

Erwan Benezet | 25 Mai 2015

Le Parisien

 

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