Togo – 5000 tonnes d’engrais de l’Etat togolais entre magouilles et convoitises : Julie Beguèdou empoche 1 milliard 500 millions [ Par Mensah. K ]

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L’Etat togolais se retire, à partir de cette année, de la distribution des engrais pour permettre aux privés de s’en charger, dans le respect de certaines conditions fixées par ses soins. Sauf que, dans les magasins de la structure de l’Etat qui s’occupait de la distribution des engrais, la Centrale d’Approvisionnement et de Gestion des Intrants Agricoles (CAGIA), il restait encore plus de 5.232,700 tonnes de produits. La gestion de ce stock attise les convoitises. Et là encore, Elisee Cotrane de la toute-puissante Julie Béguédou est aux aguets. Elle a même commencé par jouir d’un juteux contrat concocté pour elle, par son homme de main, Ouro-Koura Agadazi. Cependant, la Primature a suspendu l’opération.

Depuis le 15 juillet, dernier trois sociétés importatrices d’intrants agricoles se sont vu attribuer le stock d’engrais disponibles dans les magasins de la CAGIA. Il s’agit des sociétés FREDO VANOS d’un certain Kokou Deguenou,STD Sarl d’Aka Amivi, une puissante dame de la République qui obtient 30% du marché,et à leur tête l’immanquable Elisée Cotrane de Julie Béguédou qui rafle à elle seule plus de 54% du stock, représentant une quantité de 2. 842, 050 tonnes. Les deux sociétés de ces deux dames proches de Faure Gnassingbé bloquent 74% de ce juteux marché d’engrais.

Sur décision du Colonel Ouro-Koura Agadazi, ministre en charge de l’Agriculture, les trois sociétés se verront céder l’engrais à 11.000 francs le sac de 50 kilos. Alors que le produit a coûté à l’Etat togolais, environ 14 000 francs. Autrement, l’engrais acquis chèrement aux frais du contribuable togolais est bradé à des commerçants qui, eux, le revendront bien plus cher au même Etat. Ces mêmes sociétés, avec à leur tête dame Julie Béguédou, sont retenues pour fournir de l’engrais à ceux que l’Etat a désignés comme paysans vulnérables. En contrepartie, l’Etat leur reverse 9.000 francs de subvention par paysan vulnérable. En définitive le tableau se présente comme suit : ils acquièrent des engrais de l’Etat, avec une subvention de 3.000 francs (ce qui est en soi un scandale, l’Etat n’ayant aucun intérêt à subventionner des produits avec lesquels des opérateurs économiques font des affaires), ensuite ils revendent les mêmes produits à des paysans recensés par l’Etat et pour lesquels ce dernier leur verse, encore, 9.000 par personne.

A elle seule par exemple, Julie Béguédou devrait livrer des engrais à 166.000 paysans, et sur chaque paysan l’Etat devrait lui reverser 9.000 francs, ce qui représente un total de près de 1 milliard 500 millions que l’Etat devrait rembourser à la dame qui jouit d’un puissant lobby au sein de l’appareil de l’Etat.

Le deal a été soigneusement préparé. Dans un premier temps, le colonel et son cabinet ont enjoint la CAGIA de suspendre ses opérations de vente d’engrais sur le territoire national,évoquant de pseudo-craintes de concurrence déloyale envers les privés. Ensuite, le ministre-militaire demande à la structure de l’Etat de confier son stock à des privés, à un prix inférieur au prix coutant. « Dans le cadre de réforme de la distribution des engrais pour renforcer le réseau de distribution par le secteur privé en vue de couvrir des besoins exprimés par les producteurs, douze opérateurs économiques privés ont obtenu leur agrément d’importation et de distribution d’engrais au Togo pour le compte de la campagne agricole 2016/2017. Compte tenu des pesanteurs constatées ces derniers jours dans la mobilisation des stocks par les privés, la Centrale d’Approvisionnement et de Gestion des Intrants Agricoles (CAGIA) cedera son reliquat de 5 232, 700 tonnes d’engrais de la campagne agricole 2015/2016, soit 252, 850 tonnes de NPK 15-15-15 et 4 979, 850 tonnes d’Urée 46% N aux trois sociétés privés retenues pour la distribution de l’engrais subventionné au prix de onze (11.000) francs CFA le sac de 50 kg », lit-on dans une note de service en date du 15 juillet 2016 et signée du Colonel Ouro-Koura AGADAZI.

Cette nième décision n’a pas manqué de susciter un tollé dans le secteur agricole. Cette fois encore, comme toujours d’ailleurs, le ministre et celle que tout le monde sait être sa protectrice ou sa protégée (c’est selon) se trouvent au centre d’une polémique. Beaucoup y voient un nouveau deal entre ces personnages qui, de par leur position et leurs complicités exercent une domination implacable sur le secteur agricole au Togo. Le sujet a été porté devant le Premier ministre qui, malgré l’influence des principaux protagonistes, n’a pas eu d’autre choix que de demander une suspension de contrat.

« J’ai l’honneur de vous rendre respectueusement compte que dans le cadre de la gestion de la campagne agricole 2016/2017 et suite à la réunion tenue ce 1er auût 2016 à votre cabinet sous votre présidence, les mesures suivantes ont été prises : la vente du reliquat des engrais de la Centrale d’approvisionnement et de gestion des intrants agricoles d’un volume de 5.323, 700 dont 252,850 tonnes de NPK 15-15-15 et 4979 tonnes d’Urée, cédé aux sociétés privées est systématiquement suspendue sur l’ensemble du territoire national à compter de ce jour ; les recettes des ventes de ce reliquat jusqu’ici réalisées par le la société Elisée Cotrane SAU doivent être intégralement reversées sur le compte de la CAGIA ; le comité de gestion de la CAGIA doit se réunir impérativement en conseil extraordinaire, ce mardi 02 août pour proposer et soumettre les modalités de gestion du stock restant au Conseil de suivi qui devra se prononcer dans les meilleurs délais au regard de l’urgence des besoins en engrais sur le terrain », a rappelé le ministre Agadazi lui-même dans un courrier compte-rendu renvoyé à la Primature le lundi dernier.

Dans ce courrier, on voit bien que, des trois sociétés retenues, dame Julie Beguedou est d’ailleurs la seule à s’être précipitée pour disposer du stock d’engrais et a commencé même la mise en vente. Elle devra, selon les conclusions de ladite réunion, reverser tout ce qu’elle a perçu dans le cadre de la commercialisation de l’engrais de l’Etat, à la CAGIA.Du ministère, des courriers sont partis en destination des différents bénéficiaires, leur signifiant la nouvelle décision.

Les puissants réseaux qui se battent pour disposer de ce marché n’ont pas mis des jours pour se remettre en branle. Depuis deux jours, ces puissants réseaux des bénéficiaires de ce juteux contrat tournent à plein régime. Une première réunion du comité de gestion de la CAGIA, qui serait infiltré par les lobbies, a sorti une résolution aux contours flous. Il n’est pas exclu que cette décision soit rapportée ou réaménagée pour continuer à garantir les intérêts des mêmes réseaux qui ont pris en otage l’agriculture togolaise.

Ainsi des autorités publiques font saigner les caisses de l’Etat, pour gonfler les comptes des puissantes dames de la minorité. Au finish, des milliards de l’Etat s’évaporent, les paysans restent sur le carreau, le secteur est toujours enroué.

[ Par Mensah K. (L’ALTERNATIVE)]

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