CDPA-BT                                                                                PA.DE.T

Convention Démocratique des Peuples Africains                            Parti démocratique des Travailleurs

                 Branche Togolaise                                                                      des villes et des campagnes

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 Déclaration conjointe

5 octobre 1990 – 5 octobre 2022

A la veille du 32e anniversaire du 5 Octobre 1990, la Convention Démocratique des Peuples Africains-Branche Togolaise (CDPA-BT) et le Parti démocratique des Travailleurs des villes et des campagnes (PA.DE.T) qui ont signé conjointement, le 23 juillet 2022, à Lomé, une plateforme d’engagement et d’action intitulée Une Alliance politique pour la démocratie, les 2 partis ont résolu de faire la Déclaration qui suit.

L’insurrection populaire déclenchée par la jeunesse, le 5 octobre 1990, qui marque le début de la lutte ouverte d’opposition au régime, fondée sur l’exigence du peuple togolais pour le rétablissement des libertés fondamentales, l’instauration de l’Etat de droit et l’avènement de la démocratie, le 5 Octobre n’est guère l’objet de commémoration officielle, et pour cause. En effet, c’est la 1è fois que la lutte d’opposition fait irruption dans la rue, ouvrant la voie au processus qui devait conduire à la libéralisation des partis politiques et à la conférence nationale censée inaugurer la transition démocratique. Mais, au contraire, les assises (8 juillet-28 août 1991) avaient été suivies d’une restauration brutale du pouvoir militaire autocratique, à travers l’assaut meurtrier du 2 décembre1991 par des éléments de l’armée, contre la Primature, institution issue de ces assises nationales.

Depuis, une crise sociopolitique ouverte, émaillée de violences multiformes à répétition (socioéconomiques comprises), n’a fait que dégrader la situation du pays, en mettant en évidence la racine politique des maux qui la minent : à savoir, les troubles et la répression exercée sur les populations qui ont caractérisé toutes les périodes d’élections présidentielles, toutes frauduleuses et contestées, de 2003 à 2020, dont la sanglante élection d’avril 2005 pour la succession d’Eyadema décédé en février, et remplacé, au prix de 800 à 1.000 morts, par son fils Faure Gnassingbé… C’est ainsi qu’on peut affirmer que les scrutins présidentiels constituent le « nœud gordien » de la crise dans laquelle le Togo est englué depuis 30 ans, parce que le souci « existentiel » du régime militaire de fait, installé et soutenu par l’impérialisme français depuis le coup d’Etat du 13 janvier 1963, est de se maintenir au pouvoir  par la fraude électorale « institutionnalisée » et la répression, contre la volonté populaire et son exigence de changement de régime politique par la voie démocratique. Ce qui est la preuve irréfutable de cette contradiction fondamentale qui a conduit au divorce, aujourd’hui consommé, entre le peuple et les institutions qui prétendent encore le régenter, c’est la modification en 2002, par un parlement aux ordres, de la Constitution de 1992 adoptée par référendum, à une écrasante majorité (97,7%). Il n’est donc pas étonnant que l’une des contestations les plus déterminées du régime ait été, en 2017, à travers tout le pays, la puissante mobilisation populaire, accompagnée par une coalition de 14 partis politiques d’opposition, la C14, réclamant des réformes institutionnelles fondées sur le retour à la Constitution originelle de 1992 qui avait fixé impérativement le mandat présidentiel à deux (02), réclamation assortie du mot d’ordre impérieux : pas de réformes, pas d’élections ! Appliqué aux législatives de 2018 recommandées par les chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO réunis à Lomé en juillet 2018 après la mobilisation populaire de 2017, le respect du mot d’ordre avait conduit au boycott de la consultation, appelé aussi par la C14, consultation dont la participation réelle, estimée par des sources indépendantes, s’était élevée à moins de 20%, faisant des législatives 2018, de ses tenants et aboutissants, une véritable mascarade électorale… Mais, alors que la logique de la non-participation semblait, dès lors, faire enfin entrer la lutte d’opposition dans une nouvelle phase tactique, quelle ne fut la stupéfaction générale, de voir l’année suivante, ces mêmes partis qui avaient appelé au boycott conformément au mot d’ordre populaire : pas de réformes, pas d’élections ! se mettre sur les rangs pour la présidentielle de février 2020 !.. Trois années bientôt après cette présidentielle qui s’est avérée l‘une des plus calamiteuses, les « opposants » qui ont cru devoir une fois de plus participer à une élection perdue d’avance ont-ils, cette fois-ci, « arraché l’alternance pour le peuple » comme ils s’y engagent à chaque fois ? La crise post-électorale qui dure, n’a-t-elle pas plutôt disloqué, au Togo, l’idée même d’opposition et désorienté plus que jamais les partis politiques qui prétendent, dans la situation antidémocratique de verrouillage par le régime, de toutes les institutions de l’Etat, « arracher l’alternance » pour un peuple qui, d’ailleurs, a plutôt besoin d’une réelle « alternative » pour satisfaire ses aspirations les plus profondes ?..

A quelle situation le peuple togolais est-il aujourd’hui confronté, à 2 ans de la présidentielle de 2025, sous le gouvernement d’un régime cinquantenaire à bout de souffle, et comment commencer à construire l’ « alternative » ?                                                                                                                                                                      Sur le plan politique, nous l’avons dit, la crise est sans issue, et ne peut que conduire le pays au chaos, si le régime continue à prétendre gouverner avec des institutions qu’il a fini de complètement verrouiller, dans le seul but de se maintenir au pouvoir, contre la volonté populaire. La nécessité est absolue de procéder en profondeur à des réformes constitutionnelles, institutionnelles, électorales : c’est la signification réelle de l’exigence du retour à la Constitution originelle de 1992, drapeau de la mobilisation populaire de 2017.

Sur le plan économique et social, l’application, depuis 40 ans, des politiques d’austérité préconisées essentiellement par les institutions financières internationales de l’impérialisme, en vue du paiement d’une dette qui n’est pas celle du peuple, à grand renfort notamment de privatisations des entreprises d’Etat, ces politiques aux noms divers, autrefois nommées programmes d’ajustement structurel (PAS) ont eu des effets économiques et sociaux catastrophiques Aujourd’hui, les systèmes de santé sont en ruine ou inexistants : la pandémie du Covid 19 l’a encore mis en évidence ; les systèmes d’éducation sont délabrés et la jeunesse, qui constitue l’immense majorité de la population, est, quoi qu’on en dise, sacrifiée ; l’insécurité alimentaire et même la faim, la pauvreté sont endémiques, surtout en milieu rural (78% de la population) ; l’accès à l’électricité, à l’eau, à l’éducation de base, à l’emploi, à la satisfaction des besoins de base, est bouché pour la majorité de la population et les dépenses de consommation des 25 % les plus riches sont 2 fois 1/2 plus élevées que celles des 25 % les plus pauvres, dont les jeunes ; à un récent classement de l’indice de développement humain (Idh) du PNUD, le Togo est classé 167e sur 189… Instrumentalisant l’état d’urgence sanitaire contre le Covid, le pouvoir a non seulement restreint les libertés de manifestation publique, réformé le Code du travail en s’attaquant aux libertés syndicales, manœuvré pour faire signer aux fédérations d’enseignants, un Mémorandum d’entente relatif au secteur de l’Education, contenant l’acceptation d’une « trêve sociale » de 5 ans (2021-2025) ; mais il a aussi aggravé les conditions de vie des populations par des mesures d’augmentation de taxes (les péages), du prix du carburant, mesures qui, avec l’augmentation des prix des produits et services de première nécessité, ont laminé encore plus le maigre pouvoir d’achat des ménages… Et aujourd’hui, la situation socioéconomique s’est considérablement détériorée avec les conséquences mondiales de la guerre en Ukraine (tensions sur les marchés énergétiques, pénuries alimentaires, déficits d’intrants agricoles, inflation…) ; alertées, comme l’ensemble des gouvernements, les autorités viennent de prendre une dizaine de mesures pour soutenir le pouvoir d’achat, mesures aux effets automatiquement limités par un mouvement de hausse des prix sur les marchés… C’est le lieu d’évoquer, ici, par ces temps de vaches maigres, le véritable calvaire vécu depuis avril 2022, par 112 enseignants du public révoqués ou licenciés abusivement, certains emprisonnés (des élèves également), précipités avec leurs familles dans l’indigence, du fait, particulièrement indigne, du blocage de leurs comptes bancaires !..

Accentuant la profonde dépression générale (politique et socioéconomique) des conditions de vie des populations et l’insécurité sociale persistante, l’insécurité physique grandissante générée par les attaques djihadistes meurtrières, limitées aujourd’hui à nos frontières septentrionales, menace l’intégrité des pays côtiers du Golfe du Bénin. C’est la conséquence des appétits et rivalités que la crise générale du système impérialiste ne peut qu’aiguiser… La France aux côtés des USA et de la Grande-Bretagne a détruit la Libye, par ses bombardements et le soutien à des groupes armés : elle a mis le feu au Sahel, et l’intervention Barkhane n’a fait qu’amplifier l’incendie qui menace jusqu’à la Côte d’Ivoire, le Togo, le Bénin… Le peuple malien a eu raison de manifester pour le retrait des troupes françaises : c’est aux Maliens, aux Africains d’instaurer la paix chez eux, et eux seuls peuvent le faire… Au total, les gouvernements de nos pays, soutenus par l’impérialisme dont ils protègent les intérêts, déniant aux peuples leurs droits légitimes à jouir dans la paix et la sécurité des fruits de leur travail, les mènent au chaos depuis des décennies, en se maintenant, comme il a été dit du Togo, contre la volonté populaire, par la corruption, l’oppression et la fraude électorale, en bafouant leurs aspirations à la démocratie… Il est ainsi patent que notre pays ne vit pas dans une bulle, en vase clos : sa situation aujourd’hui, se développe sur fond d’une crise économique, sociale et politique mondiale sans précédent, la crise du système capitaliste, qui ne peut qu’aller en s’approfondissant ; et les grands bouleversements en cours aujourd’hui à travers le monde et pas seulement en Afrique, montrent que, se détournant de ceux qui se sont compromis et se compromettent dans des combinaisons avec des pouvoirs soumis à l’impérialisme, c’est la mobilisation des masses qui a la capacité de maintenir et faire aboutir les exigences des peuples, pour chasser les régimes d’oppression et en finir avec le « système »…

C’est pourquoi, face à une situation qui s’annonce, au Togo comme en Afrique et dans le monde, encore plus catastrophique, nos combats d’hier restent d’actualité : combat pour le retour à la constitution de 1992 en vue des réformes constitutionnelles en profondeur, combat pour les revendications de survie des travailleurs et des populations. C’est dans cette perspective que veulent agir la CDPA-BT et le PA.DE.T qui, avec l’Alliance politique pour la démocratie comme noyau dur d’un mouvement regroupant toutes les forces d’opposition, et instruits par l’implosion « programmée » des coalitions improvisées du type de la C14, victimes des contradictions internes découlant de la disparité idéologique de leurs membres et de l’absence de cohérence stratégique initiale, sont prêts à discuter,  et à se regrouper avec toutes les forces qui s’inscrivent dans une logique de rupture, en vue du combat authentique pour la souveraineté, la paix, la démocratie, l’éradication de la misère et de la faim.

C’est à l’origine de cette lutte longue et difficile du peuple togolais pour l’émancipation et la prospérité collective, que se situe l’insurrection du 5 octobre 1990, dont il convient de saluer la mémoire.

Lomé, le 4 octobre 2022

Pour le PA.DE.T                                                                         Pour la CDPA-BT

Le Secrétaire national                                                                Le Premier Secrétaire                                           

N. GBIKPI-BENISSAN                                                              E. GU-KONU

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