Son CV à lui seul donne une idée sur l’homme. Selon le confrère La Lettre du Continent, Yetrofei Massina aurait fait un tour en France dans les écoles militaires et termine sa course par une formation en Chine et en Corée du Nord. Inconnu des Togolais sous l’ère Eyadema, cet officier Kabyè viendra avec le fils Faure compléter l’ossature qui composera le nouveau clan. A chaque époque ses hommes. A chaque clan, sa nomenklatura. Quand Eyadema décède dans la nuit du 5 février, la panique gagne tout l’Akazu [ ndlr, le clan composé de l’ethnie kabyè] version Togolaise. Les visages sont tétanisés sous les pots de Tchouk1 comme dans les bureaux des ministères où une seule ethnie a fini par signer sa marque déposée. On tente d’abord de faire le coup d’Etat encore jamais observé dans le record du livre de Guinness. En en seul jour, Faure Gnassingbé fait trois coups d’Etat. De ministre, il est député. Deux heures de temps après il est président de l’assemblée et encore deux heures de temps il est président de la République. Tous les Gnassingbé excepté le colonel Rock Gnassingbé passent en revu dans un décor surréaliste saluer le nouvel homme « Faure ». A gauche, on voit Kpatcha Gnassingbé et à droite on a flanqué le commandant dissident François Boko et le tour est joué. Une nouvelle république vient de naître. Elle a besoin de nouveau « gros bras » mais Kabyè uniquement. Fini le temps ou Kabyè tirait sur kabyè. Fini le temps où kabyè voulait faire un coup d’Etat a Kabyè. Assih Agossoye qui est dans son exil forcé à Orléans en France, doit regagner le clan. Par l’intermédiaire de Tido Looky du côté des Etats-Unis, on retrouve les traces du colonel Kouma Bitenewé encore en exil quelque part entre le Benin et le Burkina-Faso. Bodjona Akoussoulelou laisse volontairement ses bureaux de l’ambassade du Togo à Washington et saute dans le premier avion. La république des Gnassingbé renaît de ses cendres après une petite tempête et on tient cette fois-ci à mieux faire. Il faut écarter les oiseaux qui peuvent faire mal un jour par la trahison. Le commandant Yark Dahename (Moba) qui avait entre-temps les clés des renseignements doit retourner là où il ne sera plus une taupe pour le pouvoir. Petit tour sur le l’homme de Faure, Yetrofei Massina.
Yetrofei Massina ou le legs laissé par le colonel Assih Agossoye
Dieu seul sait combien de Togolais le colonel Assih Agossoye a tué dans sa vie. Et ce même Dieu sait combien il a ruiné la vie par les tortures et l’existence rien que par jalousie. Quand Faure, lui tance de regagner la maisonnée, l’idée était double. D’une part, ne pas avoir un ennemi à l’extérieur, et d’autre part l’aider à reformer le clan avec son carnet d’adresses. Les premières expertises tombent. Yetrofei Massina est propulsé aux renseignements qu’il va rebaptiser Agence Nationale de Renseignements (ANR). Il y a une refonte complète au sein des FAT bien que Kpatcha ait pris les commandes au ministère de la défense. Une junte pour la plupart kabyè doit partir pour Israël se former dans l’espionnage. Ce sont ses « compradores » que tous les Togolais ont dans leurs rues, dans les Internet café, dans les bureaux et dans les villes et campagnes et qui font un travail de sape dans l’étouffement de la démocratie. A ces loubards, il y a Yetrofei Massina qui va faire parler de lui dans sa fascienda à l’ANR.
Massina : Gendarme Tortionnaire
Plusieurs analystes qui ont joint le Lynx l’appellent « l’Oufkir » togolais en mémoire du général Oufkir sous le roi Hassan II. De commandant, il gravit les échelons et devient colonel. Le service rendu à la mère patrie serait les tortures effectuées sur ses enfants. Ironie du sort ou calcul politique, Massina débute avec Kpatcha Gnassingbé qu’il avait pourtant fait allégeance comme tout « pur Kabyè » au profit de Faure. C’est le temps où il mange « beaucoup » chez Kpatcha et mange un « peu » chez Faure. Kpatcha est arrêté le 14 avril 2009 et Massina est chargé de lui montrer son savoir-faire à l’ANR. Aux portes des bureaux du colonel Massina, s’arrête l’Etat de droit. Plusieurs autres complices de Kpatcha connaissent les tortures. Vient le journaliste Eugene Attigan qui décrit sa première nuit à L’ANR de Massina. « Cette nuit-là, non seulement j’étais mis dans une salle les pieds et les mains menottés à une table, mais aussi pour faire pipi, j’ai dû me servir avec toutes les gymnastiques d’une bouteille d’Eau Vitale. Pendant ce temps celui qui m’a remis le sac était pieds et mains menottés dans le gazon au dehors. J’ai demandé en vain à appeler ma famille, avoir le concours d’un avocat et du moins d’un docteur, parce que je suis drépanocytaire. A ma place, je suis sûr que vous signerez sans hésiter tout papier présenté comme PV. Mais dans mon cœur je ne leur en veux pas ; peut-être c’est ainsi chez eux ». Dans le même sillage, plusieurs commerçants se plaignent des sommes en milliards saisis que l’homme fort de l’ANR n’a jamais restitué à qui de droit. Le confrère La Lettre du Continent recoupe le gendarme devenu riche : «Yotrofei Massina est l’officier le plus influent auprès du chef du l’Etat, mais aussi le plus dangereux pour le régime car il est propriétaire d’une fortune personnelle – acquise en partie grâce à ses relations avec des commerçants libanais, guinéens et nigériens ».
Amnesty Internationale et Human Right, les ONG des Droits de l’homme, Massina renie leur existence. La justice au Togo, c’est lui. Et, il le fait savoir a tout nouveau capturé. Le confrère Koaci.com a braqué aussi ses yeux et raconte : « Autre révélation effrayante, le cas d’une personne sur qui les éléments de l’ANR ont passé toute une nuit à lui verser dessus, de l’eau glacée. Menotté des deux mains, deux éléments l’ont exposé sur la cour la nuit. Ont concassé des barres de glaces dans l’eau, qu’ils lui versent dessus quasiment toute une nuit durant. D’autres détenus sont exposés aux bruits d’un groupe électrogène la nuit ou sont soumis aux supplices de menottes à vices. » Plus loin, Koaci.com martèle : « Le jour, certains sont parfois exposés au soleil et on leur demande d’écarquiller les yeux pour voir le soleil. C’est notamment le cas de l’homme d’affaire, Agba Bertin dont l’image avec la menotte au lit au Centre hospitalier universitaire de Tokoin, où il a été admis dans la salle de réanimation, a ému plus d’un à Lomé ». On n’en finirait pas avec les méthodes de Yetrofei Massina…
Yetrofei Massina : Prime pour torture
Comme il fallait s’y attendre, le travail ô combien mérité est finalement primé. Du haut de sa poitrine bardé de médailles militaires, Faure a compris qu’il lui fallait la médaille de l’ordre de mérite. Le 51e anniversaire de l’indépendance a servi de jour favorable. L’homme n’en demandait pas mieux pour ce travail de tortures. Mais Oufkir est mort un matin en se tirant la balle dans la tête. Puisse Massina se canarder lui-même le crâne un jour pour l’amour du Togo.
1-Boisson locale
Taffa Biassi Lynx.info