Introduction
Le vent de la démocratisation a soufflé sur le Togo depuis le 05 octobre 1990. Le compteur de l’histoire nationale affichera vingt (20) ans en 2010.
Bientôt, deux décennies de turbulences et d’intempéries politiques marquées par des violences de tous genres.
Bientôt, deux décennies d’apprentissage dans la « carrière d’opposants » pour les Togolaises et les Togolais qui ont accepté d’animer l’échiquier politique national. La tâche n’est pas aisée, c’est certain.
Bientôt, deux décennies d’espoir et de désespoir d’un peuple qui veut se libérer d’un système politique qui l’a opprimé et qui continue de l’asservir.
Vingt ans dans la vie d’un être humain, c’est très important par rapport à l’espérance de vie qui est de quarante cinq (45) ans, car tout comme le fleuve érode les berges ou y dépose les alluvions, le temps a fait son œuvre, soit destructive soit constructive sur les Togolais.
Le Togo étonne dans tous les domaines. Très riche en images insolites il est devenu une zone territoriale de curiosités angoissantes et d’intrigues hallucinantes. Il surprend tout bon sens le plus élémentaire car une situation claire peut devenir subitement nébuleuse et les détails insignifiants peuvent prendre une importance insoupçonnée. Le Togo s’est spécialisé dans une recette politique faite de scrutins présidentiels suivis d’accords avec la caution de toute la classe politique.
Le pouvoir et l’opposition, contraignent les Togolais par une navigation à vue vers une destination inconnue.
La communauté internationale et les partenaires en développement, gagnés par la lassitude, commencent par perdre patience.
Le peuple, observateur impuissant et fatigué par les élucubrations de la classe politique, et ne sachant plus à quel saint se vouer, prie le Créateur de venir à son aide pour l’accompagner dans le processus.
Ainsi depuis les années 90, la crise togolaise, confortablement installée dans la cité, est souverainement bien entretenue. Les réponses à lui apportées n’ont été que partielles. On s’est plus préoccupé de traiter les effets que de s’attaquer aux causes profondes et réelles.
Dans la mêlée, le peuple togolais, grâce à sa détermination, a conquis un certain nombre de libertés au rang desquelles, la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de la presse, la liberté de constituer de partis politiques.
Si ces avancées sont incontestables, il n’en demeure pas moins que le chemin à parcourir, pour arriver à la démocratie et à l’Etat de droit, lesquels garantissent l’élan indispensable au progrès économique et social, reste long et semé d’embûches.
Par ailleurs, il est indiqué de rappeler qu’une dictature s’accommode difficilement de principes démocratiques. Dans l’histoire de l’humanité, les dictateurs s’accrochent toujours au pouvoir jusqu’à leur mort.
Par rapport à cette réalité, les scrutins organisés dans le cadre du processus de démocratisation se sont déroulés selon la volonté du prince. Les résultats proclamés sont loin de refléter la réalité, ce qui a malheureusement causé des dégâts moraux, humains et matériels immenses. Comme l’alternance ne peut pas être au rendez-vous, la vie politique a été alors aiguillonnée par des dialogues qui se sont soldés par des accords.
I- LES DIFFERENTS SCRUTINS PRESIDENTIELS ET LEURS ACCORDS POLITIQUES
De 1998 à nos jours, trois (03) scrutins présidentiels ont été organisés dans des conditions qui bafouent toutes les règles d’équité et de transparence. Ainsi donc, le scrutin de 1998 a mis sur orbite l’Accord Cadre de Lomé, celui de 2003 a téléguidé vingt deux (22) engagements et l’élection de 2005 a commandé l’Accord Politique Global.
Le scrutin présidentiel du 21 juin 1998
Cette élection dont les résultats proclamés à la suite d’un hold-up allait compliquer une situation déjà rendue difficile par la suspension de la coopération. Pour sortir le Togo de la crise née de la contestation par l’opposition de la victoire volée par le président EYADEMA, l’Union Européenne, avait conditionné la levée de la suspension de sa coopération par la reprise des discussions entre le pouvoir et l’opposition. A cet effet, des facilitateurs représentant la France, l’Allemagne, l’Union Européenne, et la Francophonie se sont impliqués dans le processus qui a abouti à la signature, le 29 Juillet 1999 de l’Accord-cadre de Lomé (ACL).
Entre temps, le président Jacques CHIRAC, compte tenu de l’actualité politique au Togo, débarqua à Lomé le 22 juillet 1999. C’est au cours de cette visite et en sa présence que le président EYADEMA annonça sur RFI qu’il respectera la constitution et qu’il ne se présentera pas à l’élection présidentielle de 2003.
Au cours de sa conférence de presse, le président de la République française a, aux questions des journalistes, répondu ce qui suit: « … Je suis partisan de la République, de la démocratie qui semblent les meilleurs vecteurs de la paix et du développement. »
« … Sur le second point, ma réponse sera brève, je n’ai jamais dit que la démocratie était un luxe pour les pays africains Jamais ».
« Je connais bien le président EYADEMA… Je ne suis pas naturellement habilité à parler en son nom … mais, j’ai la conviction oui la conviction que le président du Togo respectera la constitution. C’est bien ce que tout le monde souhaite, n’est-ce pas? » Pour garantir le respect de l’Accord-cadre de Lomé, il a été mis sur pied un comité paritaire de suivi et un collège de facilitateurs. Il sied de rappeler que les négociations ayant abouti à l’ACL ont été fortement influencées par les déclarations du président EYADEMA. De plus, l’improvisation par lui faite, n’a fait que confirmer ce qu’il avait annoncé sur RFI. A cet effet, certains passages de cette improvisation faite lors de la clôture du dialogue inter togolais sont assez éloquents.
« Je me suis engagé à respecter la constitution »
« S’agissant de la déclaration que j’ai faite, personne ne m’a poussé à la faire. Je l’ai dite conformément à la constitution »
« Je me suis dit: je m’engage à respecter notre texte fondamental sinon demain vous serez les premiers à descendre dans les rues pour dire que le président a violé la constitution. »
« Nous nous connaissons au Togo… C’est pourquoi je n’ai jamais déplacé une seule virgule de la constitution. «
Compte tenu des actes posés par la suite, l’ACL qui devrait mettre fin à la crise née de l’élection du 21 juin 1998 par l’optimisme et l’espoir qu’il a suscités auprès de la population, a été malheureusement neutralisé par l’auteur de la déclaration ci-dessus rappelée. L’application acrobatique de l’ACL et le non respect de la parole donnée furent le levain de l’inquiétude, du doute et de la déception qui s’étaient emparés du peuple. Cette situation ne peut que créer un climat de méfiance entre les acteurs politiques eux-mêmes d’une part, et entre les acteurs politiques et le peuple d’autre part.
Le scrutin de 2003
Lorsque l’amnésie est volontairement introduite dans le débat politique il faut avouer qu’il est très dangereux de faire œuvre utile avec ses auteurs car il est très difficile voire impossible de leur faire entendre raison. Dans nos sociétés traditionnelles, la parole donnée est sacrée.
Ainsi donc, le président CHIRAC, au cours de sa conférence de presse donnée lors de sa visite au Togo les 22 et 23 juillet 1999, ne se rappelait plus curieusement la déclaration par lui faite, à l’époque maire de Paris, à RFI et dans laquelle il estimait que le multipartisme est un luxe que les pays en développement n’ont pas les moyens de s’offrir.
De son côté, le président EYADEMA avait bizarrement perdu la mémoire en 2003, par rapport à sa parole qu’il avait librement donnée en 1999. Ni le président CHIRAC ni les facilitateurs parmi lesquels M.STASI n’avaient levé le petit doigt pour rappeler au président EYADEMA l’engagement par lui pris, lorsqu’il a commencé à montrer des signes annonçant sa farouche intention de briguer un troisième mandat. Certaines tentatives, semble t- il, discrètement conduites pour le ramener à la raison n’ont pas abouti. Il était devenu intraitable. Pour ce faire, il fit modifier la constitution1992.
Il est très intéressant par rapport aux élections, de faire remarquer qu’il existe deux classes diamétralement opposées sur l’échiquier politique africain.
• La première classe rentre dans la logique de comment gagner « démocratiquement » les élections. Dans cette catégorie il est hors de question de perdre des élections qu’on organise. Il faut tout faire pour l’emporter. Il suffit pour cela de pointer les canons sur le ou les candidats potentiels, de museler la presse, d’assommer la population, bref de pratiquer l’électoralisme. Les deniers publics sont massivement détournés et distribués à tour de bras pour acheter des leaders et déstabiliser l’opposition. Donc, on y est et on y reste et ce, jusqu’à la mort. Cette doctrine n’est ni plus ni moins que l’exercice personnel du pouvoir.
• La deuxième classe s’inscrit dans la stratégie de comment organiser des élections démocratiques. Ceux qui les organisent peuvent soit perdre soit gagner. Ce sont ceux-là dont l’Afrique a besoin et qui, une fois hors du pouvoir, animent aujourd’hui le forum des anciens chefs d’Etat crée par Nelson MANDELA. Ils respectent avant tout le principe constitutionnel de la limitation du mandat présidentiel. Ce sont ceux-là qui contribuent à l’établissement d’un ordre constitutionnel pérenne qui apporte aux peuples la stabilité dont ils ont besoin pour s’épanouir, faire reculer la pauvreté et s’intégrer plus étroitement à l’économie mondiale.
L’élection de 2003 a répondu aux exigences de la première classe, ce qui a aggravé la crise et renforcé la misère dans laquelle vit le peuple togolais. Comme il fallait s’y attendre, le pouvoir tend une main fraternelle à l’opposition en faisant ramener de Bruxelles par son gouvernement vingt deux (22) engagements souscrits auprès de l’Union Européenne le 14 avril 2004.
Le Scrutin de 2005
Au lendemain du décès du chef de l’Etat survenu le 05 février 2005, il faut avouer que la gestion de la vacance et de la succession va coûter très cher à la population, qui aura droit, pendant cet intermède, à trois (03) coups d’Etat successifs pour installer au pouvoir l’un des fils du défunt. Il y eut :
• un coup d’Etat militaire au cours duquel un groupe d’officiers a fait allégeance à Monsieur Faure GNASSINGBE au soir du 05 février 2005,
• un coup d’Etat constitutionnel qui permet au RPT de tripatouiller la constitution déjà modifiée avant 2003,
• un coup d’Etat électoral opéré le 26 avril 2005 et qui s’est soldé par des violations massives des droits humains (des morts, des blessés, des refugiés et des destructions de biens).
Après ces événements malheureux, il y a eu des commissions d’enquête nationale et internationale. Parmi leurs recommandations, il est encore fait référence au dialogue sur lequel avait déjà insisté l’un des vingt deux (22) engagements. C’est ainsi que la classe politique va, à nouveau, se mobiliser dans un dialogue qui a abouti, le 20 août 2006, à la signature de l’Accord Politique Global (APG).
On prend ainsi les mêmes pour refaire la même chose. Cette façon d’agir s’appelle la routine. Il est aisément utile de souligner que cet exercice routinier anéantit toujours tout réflexe d’anticipation et paralyse du coup toute analyse. Il aurait été politiquement indiqué pour l’opposition de faire le bilan des accords conclus par le passé et ce, par rapport à leur mise en œuvre aux fins d’en tirer les leçons avant de s’engager dans le processus ayant abouti à la signature de l’Accord Politique Global
L’Accord Politique Global
Dans le préambule de l’APG, il est écrit: »Au terme des discussions empreintes de franchise et de fraternité, les parties au Dialogue National Togolais ont affirmé leur volonté politique d’œuvrer à une sortie de crise définitive ».
Au lieu de chercher à faire garantir par l’ONU, l’UE et la CEDEAO la mise en œuvre de l’APG, on s’est satisfait de la présence des représentants de l’UE et de la CEDEAO comme observateurs. La manière dont l’APG a été mis en œuvre depuis le 20 août 2006 jusqu’à nos jours soit plus de 3 ans après sa signature, n’invite pas à l’espoir. Les tâches à exécuter par le gouvernement d’Union Nationale ont fait l’objet d’une feuille de route très claire et sans équivoque. (Point 4.2 APG) Contre toute attente le gouvernement est allé présenter un programme devant l’Assemblée Nationale. Etant sur un terrain purement politique, le GRAD estime que la feuille de route tient lieu de programme.
Le gouvernement d’Union Nationale et le gouvernement formé après les législatives de 2007 ont distrait, pendant un bon moment, le peuple avec des décrets sur le point 5.1 de l’APG relatif au Cadre Permanent de Dialogue et de Concertation. (CPDC) C’était une perte de temps avec toutes ces empoignades et bousculades inutiles observées à la porte d’entée du CPDC.
Le gouvernement d’Union nationale et l’actuel gouvernement n’ont attaché aucun intérêt aux dispositions du point 5.2 relatives au comité de suivi dont la mission est de veiller à l’application de l’APG.
Les parties prenantes au dialogue national engagent le gouvernement à étudier les propositions de révision constitutionnelle (point 3.2). C’est vrai que les réformes préconisées par l’APG doivent s’inscrire dans la durée, c’est aussi vrai que celles relatives au régime politique, à la nomination et aux prérogatives du premier ministre, aux conditions d’éligibilité du président de la République, à la durée et à la limitation du mandat présidentiel doivent être faites avant le scrutin de 2010. Le peuple n’est au courant de rien et pourtant c’est en son nom que les acteurs politiques prennent des engagements. Les médias officiels sont durs à la détente pour ce qui concerne le droit du peuple à l’information. Ce sont les médias étrangers (BBC; RFI; DW; Radio Vatican etc.) qui le surprennent par des informations qu’ils donnent sur l’actualité du Togo. C’est au cours de certaines émissions que le peuple ou une partie de la population apprend accidentellement ce que font les militants de tel parti ou le ou les leaders de tel autre en direction du facilitateur dans le cadre de la mise en œuvre de l’APG.
Mais ce qui est curieux, c’est la mobilisation faite par les militants des partis politiques de l’opposition sur les médias privés et parfois même sur les médias étrangers pour étaler au grand jour, non pas, les difficultés et les problèmes rencontrés dans le processus de démocratisation en général et dans la mise en œuvre de l’APG en particulier mais tout simplement leurs querelles et rivalités de clocher. On sue sang et eau sur les détails au détriment des vrais problèmes.
II- Scénarios pour le scrutin présidentiel de 2010
Dans la perspective de cette élection, l’actualité récente fait état :
• de nomination de préfets au rang desquels certains officiers de l’armée, alors que les dispositions pertinentes du point 2.1-1 de l’APG précisent entre autres… « que les dispositions soient prises en vue de la réaffirmation solennelle et du respect effectif de la vocation apolitique et du caractère national et républicain de l’armée et des Forces de sécurité…….. ».
• de nomination de chefs traditionnels parfois en violation flagrante de la tradition et au mépris des rites régissant la chefferie traditionnelle.
• de création tous azimuts d’associations régies par la loi du 1er juillet 1901 dont certaines sont déjà en pré campagne.
Il est à la fois inquiétant et surprenant que le pouvoir veuille œuvrer à la réconciliation du peuple alors que les actes par lui posés ne sont pas en phase avec l’objectif poursuivi. Il faut rappeler que la réconciliation impose une obligation de comportement et de responsabilité. Malheureusement ce mot est devenu aujourd’hui un « cure-dent » politique.
D’août 2006 à fin décembre 2009 soit plus de trois ans après la signature, le pouvoir et l’opposition avaient le temps nécessaire pour réaliser les réformes prévues par l’APG. Les actes posés par l’opposition et le pouvoir dans sa mise en œuvre ne sont pas de nature à sortir définitivement le Togo de la crise.
L’expérience vécue depuis le début du processus de démocratisation permet d’affirmer que le RPT n’a jamais eu le souci d’organiser des élections transparentes, et ce n’est pas sûr que celle de 2010 puisse l’être. Le non respect de la parole donnée et le non respect des différents accords qu’il signe s’inscrivent dans ses habitudes de faire la politique. Par ailleurs il ne faut pas oublier la déclaration faite par le chef de l’Etat M. Faure GNASSINGBE, dans laquelle il avait laissé clairement entendre que son père lui a dit « qu’il est difficile de reprendre un pouvoir qu’on a perdu ».
Il est désolant de constater que l’opposition ne fait rien pour provoquer les réformes prévues par l’APG. Elle ne se soucie pas du tout des conditions de vie et des attentes du peuple. Elle a volontairement ou involontairement négligé ce peuple qui constitue pour elle un atout majeur. Elle ne se gêne même pas pour l’informer des problèmes et des difficultés rencontrés par elle dans la mise en œuvre de l’APG. Tout ce à quoi le peuple a droit, ce sont des échos sur les navettes entre Lomé et Ouagadougou et sur des détails de l’APG. On se déplace pour régler de petits détails personnels au détriment des vrais problèmes.
L’opposition doit se remettre en cause et tout faire pour éviter de donner raison à Marx GROUCHO qui a écrit : » La politique est l’art de chercher les problèmes, de les trouver, de les minimiser et de leur administrer les mauvais remèdes à mauvais escient. «
L’opposition doit comprendre que le droit à l’information fait partie des droits de l’homme. C’est pour cette raison qu’elle doit organiser périodiquement des meetings pour informer la population sur la situation politique et recueillir des opinions ou avis à l’issue de ces rencontres pour pouvoir élaborer des stratégies.
Il est indiqué de rappeler que le GRAD, avant le scrutin présidentiel de 2005, avait, compte tenu de la tension qui régnait dans le pays, fait des appels et entrepris des démarches auprès des différents acteurs politiques, des responsables des institutions de l’Etat, des représentants des organisations internationales et missions diplomatiques accréditées au Togo pour qu’un système soit mis en place aux fins de ramener le calme et la sérénité avant l’organisation de l’élection présidentielle. Le ministre de l’intérieur de l’époque en charge de ladite l’élection, Monsieur François BOKO, avait demandé qu’elle soit purement et simplement reportée en raison du climat délétère dans lequel s’est déroulée la campagne électorale. Tout le monde connaît bien la suite.
Toujours fidèle à ses objectifs, le GRAD continue de porter un regard critique sur la délicate situation socio politique du pays, à l’approche du scrutin présidentiel de 2010. Pour assurer la transparence de l’élection présidentielle de 2010, le GRAD tient pour fondamentales les conditions suivantes.
• La réforme relative au mode de scrutin, à la durée du mandat présidentiel et aux attributions du premier ministre doit être faite avant la fin de l’année 2009. Aucun argument, quel qu’il soit, ne saurait militer en sa défaveur car l’assemblée nationale, grâce à la procédure d’urgence, a récemment adopté la modification de la loi organique relative à la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC). Il est également possible, comme elle l’a fait pour le code électoral, de ramener la constitution de 1992 non modifiée et non toilettée.
• La date prévue pour l’élection est trop serrée par rapport aux diverses tâches à exécuter. Elle oblige à la précipitation, à la confusion et à la fraude qui sont souvent sources de contestations et de violence. La crise togolaise est une crise politique qui comme telle doit être réglée politiquement. Il est indispensable de prendre le temps raisonnable qu’il faut pour pouvoir faire œuvre utile, autrement dit, la date du 28 Février 2010 fixée pour le scrutin n’est pas réaliste. Le GRAD demande un report.
• La sécurité est un facteur très important. Des mesures doivent être prises pour mettre fin aux intimidations, aux harcèlements et à l’intoxication qui sont organisés pour créer un climat de peur au sein de la population.
L’actualité récente montre en vedette dans les journaux, le major KOULOUM. Pourtant, tous ceux qui ont encore en mémoire les événements malheureux de 2005, ne peuvent pas oublier cet ancien « combattant », qui a été mis en cause, dans le rapport d’établissement des faits de l’ONU, pour avoir organisé la boucherie héroïque dans la préfecture de l’Ogou (voir pp 32-34 dudit rapport et annexe 8 p. 47 du rapport de FIDH). Par ailleurs une force de sécurité élection présidentielle 2010 (FOSEP) est mise en place et dirigée par le commandant de la gendarmerie nationale, le lieutenant colonel YARK DAMEHANE. Il est à souhaiter que le FOSEP joue effectivement son rôle en assurant la sécurité du processus électoral avant, pendant, et après afin d’éviter les exactions commises et la répression par les forces armées et de sécurité et les miliciens lors de l’élection présidentielle d’avril 2005 (voir les rapports de l’ONU et de la FIDH).
Lorsque le major KOULOUM se met en vedette, il est à craindre qu’il ne reconstitue automatiquement son réseau et se préparer à reprendre du service. Il faut alors comprendre, en le laissant faire, que le pouvoir est en train de donner un signal fort en direction de la population pour lui signifier clairement qu’il n’a cure de la lutte contre l’impunité et il l’exprime au contraire par un mépris souverain.
Pourtant parmi les vingt deux (22) engagements, celui relatif au N° 2. 6 précise sans équivoque:
« Engagement de faire poursuivre, par des mesures juridiques ou disciplinaires, les auteurs avérés des exécutions extrajudiciaires, des actes de torture et de traitements dégradants et inhumains…… »
Compte tenu de tout ce qui précède, le GRAD invite toutes les forces progressistes qui aspirent à un véritable changement à se mobiliser dès maintenant pour exiger et obtenir les conditions qui garantissent une élection transparente et crédible notamment, le mode de scrutin à deux tours qui permet d’avoir un président élu par la majorité car, en considérant la multiplicité des candidatures déjà annoncées, le mode de scrutin à un tour fera sortir des urnes un candidat élu par une minorité. Le scrutin à deux tours peut contribuer à la réconciliation en persuadant les Togolaises et les Togolais de la justesse du vote de la majorité des électeurs à l’échelle nationale.
Le GRAD rappelle au pouvoir et à l’opposition qu’ils doivent bien comprendre:
– que le pourrissement de la situation ne saurait les avantager,
– que les Togolais sont à bout de souffle et ne vont plus accepter d’être assujettis à la misère et à la souffrance,
– qu’il n’est pas souhaitable que l’indifférence et la lassitude s’emparent de la population, car ce sont des sentiments qui engendrent souvent des comportements dangereux,
– que la communauté internationale ne pourra plus s’investir dans cette démocratisation à la togolaise.
Quant aux structures en charge du scrutin (CENI avec ses démembrements) et aux organisations de la société civile (OSC) qui seront sollicitées pour participer au processus, le GRAD estime que ces deux entités sont des partenaires car elles œuvrent ensemble pour le même objectif c’est – à – dire la transparence du processus électoral. C’est une mission qui exige:
• une forte discipline de l’esprit,
• un climat de confiance basé sur la crédibilité, l’impartialité et le professionnalisme des OSC ainsi que sur le professionnalisme et la transparence de la CENI avec ses démembrements,
• la mise en place d’un système de gestion de l’information qui impose que toute communication et échange d’informations se fassent par écrit,
• l’établissement de contact permanent empreint de courtoisie entre les OSC et la CENI avec ses démembrements pour permettre de maintenir des relations de bonnes collaborations,
• l’organisation périodique des points de presse à l’endroit de la population par rapport à l’évolution du processus électoral. Cela est très important car le droit à l’information fait partie des droits de l’homme.
Enfin pour bâtir la cité, le GRAD reste convaincu que ce sera une entreprise collective. Si nous sommes conscients qu’elle est notre seule patrie, alors faisons tout pour que le scrutin de 2010 soit une élection transparente et crédible qui ouvre la voie à une nouvelle ère pour les Togolaises et les Togolais qui n’auront plus besoin d’un autre accord politique. Ainsi le Togo, un seul pays avec un seul peuple, restera l’Or de l’humanité.
Lomé le 15 décembre 2009
Victor Alipui, Président du GRAD