Togo. Bienvenu dans le club fermé des impôts. La gestion de la cité selon l’économiste Faure Gnassingbé

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A croire que le Togo n’est pas du tout géré. Un pays où le président après sept bonnes années de pouvoir, reste muet comme une carpe et compile les paraphes sur sa table, est-il bien géré ? Un Etat dans lequel, l’on recense les fonctionnaires, constate des irrégularités insupportables et ne dit rien à ce propos, demeure-t-il bien gouverné ? Un pays où d’aucuns ploient sous le poids écrasant de charges au moment où la jeunesse cherche emploi et le taux de chômage reste à couper le souffle, est-il bien géré ? Un Etat dans lequel, l’on nomme à des postes de responsabilités des individus selon leur appartenance politique et clanique ressemble-t-il à un pays bien dirigé ?

Sans faux fuyant, votre animal préféré le Lynx vous apporte ses parts de réponses à toutes ces interrogations ci-dessus énumérées.

Faure peine à gérer le Togo comme il se doit. Après sept années d’exercice, en principe, il devrait être en mesure d’aller plus vite et de prendre de grandes décisions. Certes, les réalités varient d’un pays à un autre mais, le pouvoir en place ne fait pas d’efforts pour permettre au pays d’amorcer une véritable mue. Ça sent le statu quo, une lenteur indescriptible et un cafouillage sans précédent au sommet de l’Etat et dans tous les départements ministériels. D’aucuns au palais et au sein des ministères se comportant comme dans la caverne d’Ali Baba où Ali et ses 40 voleurs sont tenus de se presser pour amasser et déguerpir. De son vivant, l’aîné Atsutsè Agbobli ne cessait de dénoncer l’enrichissement ostentatoire sous le règne de Faure.

Les temps ont changé et les hommes avec mais les comportements n’ont pas du tout varié. Aujourd’hui, au pays de Sylvanus Olympio, les hommes valeureux et patriotes sont aussi rares que les larmes d’un chien. De plus en plus versés dans le mensonge, le faux et l’usage de faux, le vice, la plupart sont bons à être multipliés par zéro. Le système au Togo fini par enfanter des nains pour emprunter le mot au docteur David Ihou. Des hommes sans scrupule qui mentent comme ils respirent et qui ne savent qu’enseigner à leurs enfants, le mensonge et les autres vices comme la tricherie, le paraître ce qu’on n’est pas et ne sera jamais. Pouah, le pays est à la dérive ! Où sont les Sylvanus Olympio, Santos, De Souza, Amorin, Palanga, pour ne citer que ces grands noms ? « Eyadèma » pour dire avec nos frères kabyè, les gens sont finis. Les grands sont tous partis, il ne reste plus que des nains qui ne pèsent pas plus qu’une plume de pigeon. Fermons la petite parenthèse et revenons à la gouvernance cahin-caha du plus fort de la fratrie Gnassingbé, celui qui peine à trouver un véritable pied d’appel après sept ans d’exercice du pouvoir.

« Lorsque je me rappelle que Faure a pu nommer Komlan Mally premier ministre et fait de Mohammed Atcha Titikpina général et Chef d’Etat-major général des FAT, je me dis que ce monsieur gère mal le pays », souffle Pierrot Dansou (le pseudonyme voulu par notre interlocuteur, un homme d’affaires à Lomé). Si nous prenons aussi le cas des paraphes qui attendent sur la table du président et les cumuls de fonctions qui sont devenus très légion, nous parvenons à la même conclusion que notre jeune interlocuteur homme d’affaires. Si le pays était bien géré, l’actuelle directrice de cabinet du président de la République Victoire Tomégah-Dogbé n’allait pas cumuler son poste et celui du Développement à la Base, de l’Artisanat, de la Jeunesse et de l’Emploi des Jeunes. Dans un Etat sérieux, le titulaire du Ministère en charge du Développement à la Base qui englobe déjà un vaste domaine ne devrait pas occuper un autre poste.  Soit l’on s’amuse avec les postes soit on prend les Togolais pour des attardés mentaux. Faure ne peut pas nous dire qu’il n’a trouvé des Togolais aussi sérieux et compétents pour décharger Mme Victoire Tomégah-Dogbé de ses nombreuses charges, Fogan Adégnon et les autres cumulards de leurs bagages qu’ils ont d’ailleurs du mal à supporter malgré les apparences. Si le Togo était bien géré, un seul individu fut-il génie n’allait être à la fois Directeur Général du port, maire de la commune de Lomé et président du conseil d’administration du CHU-Tokoin aujourd’hui CHU-Sylvanus Olympio. Nous avons nommé le contre amiral Fogan Adégnon.

Nous étions là lorsque le comptable principal du système, Adji Otèth Ayassor est venu nous faire pouffer de rire avec son projet d’Office Togolais des Recettes. Une initiative prévue pour démarrer selon les termes de l’argentier Ayassor en mars de l’an 2013. « Gabitè » ou bienvenu à lui ! Que les gens cessent de baratiner les Togolais. Ayassor connaît bel et bien les causes qui font perdre des recettes à l’Etat chaque année. Pourquoi ne s’attaque-t-il pas à ces causes directement ? Il sait avec nous ce qui a provoqué le départ de l’ancien patron de la douane Dèdèriwè Ably-Bidamon et il connaît les réseaux très actifs qui empêchent l’Etat de renflouer ses caisses. Qu’il ne vienne pas nous divertir. Que ce soit Office Togolais des Recettes ou Centrale des Recettes du Togo, les mêmes causes produiront les mêmes effets.

Au Togo, le système est tel que certains individus s’enrichissent plus vite que l’Etat pour lequel ils travaillent et à qui ils devraient verser les recettes. Une triste réalité que le numéro un togolais Faure et son comptable principal Adji Otèth Ayassor connaissent comme leurs poches. Une situation malheureuse qui fait que tous ceux qui gèrent les régies financières du pays et leurs acolytes s’en mettent plein les poches au moment où ce qui reste de l’Etat togolais peine à engranger des recettes. Tout baigne donc pour une catégorie d’individus notamment les agents de la douane et leurs dirigeants, les agents du service des impôts et leurs patrons, les forces de l’ordre affectées à la surveillance des frontières, les responsables en charge de la gestion du port, de Togotelecom, Togocellulaire pour ne citer que ceux-ci.Nous ne cesserons de le marteler, les recettes du Togo prennent très souvent d’autres directions que celles auxquelles elles sont destinées. Ce n’est pas normal.

L’on parle même de 2/3 de recettes qui s’évapore comme par magie dans les poches d’individus tapis dans les maquis frais et juteux de la douane, des impôts, du port, de Togotelecom, de la LONATO, de Togocellulaire pour ne citer que ces gros morceaux. Ce n’est pas votre animal préféré le Lynx qui sort ceci de son imagination mais un spécialiste des questions économiques au ministère de l’Economie et des Finances qui a bien voulu garder l’anonymat pour « sauver son job » selon ses propres termes. Selon les statistiques nationales, le Togo engrange en moyenne une recette mensuelle de l’ordre de 25 milliards de F CFA. Tout calcul mental fait, l’on se retrouve à 300 milliards de F CFA de recettes par an et ce, exclu les dons et legs. Des chiffres qui ne représentent que la partie immergée de l’immense iceberg sur le lequel naviguent aux yeux de tout le monde, tous ceux qui au Togo, ont refusé de servir pour se servir. Les Togolais qui multiplient des villas, roulent dans des grosses cylindrées, se paient des soins à l’extérieur au moment où leurs compatriotes cherchent en vain le diable pour lui tirer la queue, tout le monde au Togo sait dans quels structures ils sont.

Bienvenu dans le club fermé des impôts

Hormis la police nationale et la douane, le service des impôts est de loin le plus corrompu des administrations publiques au Togo. L’on y entre uniquement par cooptation ou sur recommandation.

Les agents du fisc togolais ne manquent pas de bagout pour se remplir les poches. Ils rackettent tout ce qu’ils rencontrent sur leur passage. Sur ce plan, les chasseurs de fisc ont l’imagination trop fertile. Ils  approchent leurs proies et leur proposent, surtout celles qui ne sont pas en règle, de verser juste un minimum pour être tranquilles. Ce minimum varie selon la taille du commerce, de la boutique, de la société. Une fois que les agents des impôts encaissent les sous, ils ne délivrent pas de reçu et disparaissent pour ne revenir qu’après pour le même exercice. A chaque fois, le même refrain pour soi disant éviter des ennuis à leurs interlocuteurs.  Un stratagème qui fait perdre des sommes considérables à l’Etat qui finit par se retrouver avec de maigres recettes. Sans oublier l’évasion fiscale et ceux qui n’hésitent pas recourir à leurs relations haut placées pour ne pas leurs impôts. Or, l’on s’acharne sur les petits conducteurs de taxi-moto, les taximen et autres menu fretins de la faune togolaise.

Et la jet-set de la douane?

La douane, oh ce métier noble, d’aucuns ont vite fait de le transformer en leur chasse gardée au point où la mort y est devenue la chose mieux partagée. N’entre pas à la douane togolaise qui le veut ou qui le peut mais qui a des relations solides comme le cas pour les impôts. L’entrée dans ce corps de métier est trop surveillée par des parrains. Suivez nos regards. Une fois tout agent de douane recruté, il sait ce qui lui reste à faire. Déjà sur les lieux de formation, les douaniers ont leurs calculatrices en poche pour savoir les recettes exactes qu’ils doivent empocher personnellement par jour et le reste à laisser à l’Etat. « Voici le petit quelque chose que j’ai fait ». Ce bout de phrase, les agents de la douane l’ont à la bouche pour désigner leur bien immobilier à seulement quelques mois de leur recrutement. Quand les autres agents de la Fonction publique triment avant de s’acheter un bout de terre et construire, eux ils n’ont que 6 mois à 1 an pour se l’offrir. Comme le dirait l’autre, ce n’est que le début du commencement pour le douanier, la suite va venir après. Une villa pour le début et ensuite plusieurs villas à environ dix ans d’ancienneté. Le mercredi 03 octobre dernier, les habitants du quartier Amadahomé à Lomé se sont réveillés avec une triste nouvelle. Un immeuble de quatre étages appartenant à un brigadier chef en poste à Cinkassé à l’extrême nord du Togo s’est écroulé faisant deux morts et des blessés graves. Combien gagne le brigadier chef pour s’offrir un immeuble à quatre étages à Lomé où le prix d’un mètre carré de terrain tourne le vertige. Les agents de la douane veulent vite s’enrichir au point de laisser passer des déchets toxiques aux postes de contrôle des frontières. L’exemple de la contrebande des produits pétroliers illustre à quel point ces agents de la douane et les forces de sécurité ont le double langage. Ce sont eux qui encouragent le trafic de produits pétroliers à travers des pots de vin. Si le marché togolais est aujourd’hui inondé de n’importe quoi, c’est la faute à tous ceux qui officient aux postes de contrôle des frontières. Certes, les frontières d’un pays comme le Togo, sont aussi poreuses mais si les agents de la douane et les forces de sécurité en poste aux frontières n’étaient complaisants et ne privilégiaient pas leurs poches, le Togolais ne côtoierait pas la mort au quotidien.

Tout ceci est la faute au système qui régente le pays depuis des lustres et qui a fait de la mauvaise gouvernance son mode de prédilection.

Taffa Biassi Lynx.info

 

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