Le 16 septembre 2015, un an après la fuite de Blaise Compaoré et après l´installation d´un gouvernement de transition devant conduire aux élections démocratiques, des éléments du RSP (Régiment de Sécurité Présidentielle), l’ancienne garde rapprochée du président déchu, avait tenté de renverser les autorités de la transition. Et cette tentative de coup d´état était pilotée par le Général Gilbert Diendéré qui est aujourd´hui devant ses juges.
Et ce procès au Burkina-Faso commence à avoir des répercussions sur le plan régional ouest-africain et plus particulièrement au Togo. D´après les révélations du bi-hebdomadaire togolais « L’Alternative », le chef de l´éphémère Conseil National pour la transition (CND), Diendéré aurait lâché la vérité selon laquelle les autorités militaires togolaises lui auraient livré du matériel de répression pour contenir les nombreux citoyens burkinabè qui manifestaient contre le putsch.
Est-on vraiment surpris au Togo que le nom de notre pays soit cité dans une affaire politique interne à cette nation soeur?
En septembre 2015, mois de la tentative de coup d´état contre le gouvernement de transition à Ouagadougou, spéculant sur les commanditaires et les soutiens éventuels dont aurait pu bénéficier la troupe à Diendéré, la presse burkinabè lorgnait déjà vers la Côte d´Ivoire et le Togo. Beaucoup de comportements suspects à l´époque de la part des autortités de Lomé, avec à leur tête Faure Gnassingbé, avaient laissé planer l´éventualité d´une implication du Togo pour destabiliser la démocrtaie naissante chez notre voisin du nord.
Aujourd´hui, les révélations faites par le Général Gilbert Diendéré viennent confirmer les lourds soupçons qui pesaient sur notre pays au moment des faits il y a presque trois ans.
Pour raffraîchir la mémoire à ceux qui ont peut-être déjà oublié, voici les grands temps d´un article que j´avais publié le 06 décembre 2015 par rapport au comportement trouble de Faure Gnassingbé pendant et après la crise burkinabè.
Ce que j´écrivais le 06 décembre 2015
C´est connu que des gens sans coeur et de mauvaise foi comme les membres du clan tribal qui prétendent diriger le Togo, se sentent bien à l´aise et en sécurité en compagnie de personnes avec qui ils partagent les mêmes défauts.
On n´a pas besoin de brandir des diplômes de Sciences Po avant de savoir que le changement heureux, que dis-je?, l´alternance qui vient de se produire chez nos voisins du Nord ne peut pas être du goût du régime de Lomé.
Et si aujourd´hui l´implication de la Côte d´Ivoire dans cette malencontreuse aventure de Diendéré semble plus ou moins avérée, de terribles soupçons pèsent sur Gnassingbé II quant à son soutien ou sympathie pour la troupe à Diendéré. Le gouvernement de transition du pays des hommes intègres avait à l´époque, dans un communiqué, accusé les comploteurs d´avoir fait appel à des forces étrangères. Lisons ensemble un extrait publié à ce sujet par « Les Echos du Faso »:
«…Le 24 septembre 2015, M’ba Michel venait de faire sa déclaration au ministère des Affaires étrangères pour annoncer la remise en place des institutions de la Transition et la reprise du travail gouvernemental. Pendant ce temps, le général putschiste se trouvait à l’aéroport pour accueillir les chefs d’Etat de la CEDEAO qui venaient continuer les négociations pour une sortie de crise. Ces chefs d’Etat s’étaient réunis la veille à Abuja, au cours d’un sommet extraordinaire sur la situation au Burkina Faso. Huit d’entre eux étaient annoncés mais Ouagadougou n’en accueillera que trois, à savoir ceux du Niger, du Ghana et du Bénin. Le président sénégalais, médiateur en chef de la CEDEAO, n’a pas daigné quitter Dakar pour Ouagadougou. Son homologue togolais, Faure Gnassingbé, a quitté Lomé pour Ouaga mais n’atterrira pas.
A l’approche de Ouagadougou, son pilote aurait annoncé que l’avion présidentiel, qui transporterait 18 personnes, est suivi par un second avion de transport avec 23 personnes à son bord. La tour de contrôle aurait répondu au pilote qu’elle n’a pas reçu de consignes pour laisser atterrir le second avion.
Faure aurait piqué une colère noire et se serait saisi de la radio pour menacer l’agent de la tour de contrôle. Ce dernier, en bon «burkin bila» est resté stoïque, opposant un NON catégorique à l’atterrissage. Les deux avions togolais auraient donc rebroussé chemin. Voilà pourquoi notre beauf’ Faure, attendu pour partager la Beaufort de la bonne nouvelle, nous a posé un lapin.
Si l’avion de Faure a continué à Lomé, le second avion aurait atterri à l’aéroport de Niamtougou, localité située au centre du Togo et proche du Burkina Faso. Alors, que cherchait le second avion togolais au-dessus de Ouagadougou?
Selon nos informations, cet avion transportait des troupes venant du Togo pour aider le RSP en position de faiblesse dans le combat contre l’armée nationale qui l’encerclait. Aussi, il devait permettre l’exfiltration de Fatou Diendéré, épouse du général, vers le Togo. »
De Chirac à Hollande, en passant par Sarkozy, Blaise Compaoré était devenu l´avocat discret de Faure Gnassingbé auprès de l´Élysée afin que le locataire de la présidence française ferme les yeux devant les effets dévastateurs de la mauvaise gouvernance au Togo.
Désormais orphelin et boudé par son peuple, la tentative de coup d´état du Général Gilbert Diendéré contre la transition burkinabè parut à Faure Gnassingbé comme une occasion rêvée de renvoyer l´ascenseur à son ex-protecteur Blaise Compaoré, proche des conjurés…
C´était il y a plus de deux ans que j´écrivais ces lignes dont le contenu fait aujourd´hui, ironie du sort, l´actualité avec l´accusation d´implication du patron de la gendarmerie togolaise, Yotroféï Massina dans cette tentative de coup d´état du Général Diendéré.
Sans doute que des armes de guerre et de maintien d´ordre fournies par le Togo étaient parmi celles qui avaient causé la mort de 15 personnes et blessé 114 autres. Faure Gnassingbé, étant le Ministre de la Défense et Chef-Suprême des armées, le feu vert de livrer des armes aux conjurés burkinabès ne pouvait que venir de lui, c´est pourquoi il pourrait être en premier lieu responsable de cette ingérence grave dans les affaires politiques d´un pays voisin et frère.
La duplicité du régime Gnassingbé ne date pas d´aujourd´hui. Qui ne se rappelle pas des soupçons d´implication d´Éyadéma dans la guerre du Liberia, des soupçons d´aide à la rébellion ivoirienne? Et surtout il y a le dossier de l´assassinat de Thomas Sankara qui finira un jour par livrer tous ses secrets.
Faure Gnassingbé n´a fait qu´hériter de la dangerosité et du pouvoir de nuisance du système politique incarné par son père. Très dangereux et inhumain pour les togolais, le système militaro-politique RPT/UNIR ne se contente pas de faire voir de toutes les couleurs à ses concitoyens. Le crime et le mal absolu étant le soubassement de ce régime, il lui faut traverser les frontières afin d´exporter ce qu´il sait faire de mieux: la destruction de la liberté et de la vie humaine.
« A Ouagadougou, des voix s’élèvent déjà pour demander à la justice de lancer un mandat d’arrêt international contre le Directeur de la Gendarmerie togolaise d’une part, et d’autre part il est demandé au président Marc Christian Roch Kaboré de demander des explications au régime de Faure Gnassingbé. «
Écrit le bi-hebdomadaire togolais « L´Alternative »
Aujourd´hui avec les révélations du Général Gilbert Diendéré les togolais veulent savoir la vérité et comptent sur la justice burkinabè. Le tortionnaire en chef Yotroféï Massina est un criminel qui est l´une des têtes pensantes dans la stratégie de la terreur mise en place par le régime togolais. C´est pourquoi les togolais ne verraient pas d´un mauvais oeil la mise à l´écart d´un des officiers à problèmes de l´armée togolaise.
Quant à Faure Gnassingbé, nous espérons qu´il puisse être mis en demeure de s´expliquer sur son implication dans les affaires d´un pays voisin. L´exemplarité qui devrait être celle d´un président en exercice de la CEDEAO ne risque-t-elle pas d´être mise à rude épreuve?
En dehors de la justice burkinabè qui joue sa crédibilité dans cette affaire, la CEDEAO devrait prouver qu´elle a définitivement divorcé d´avec les vieilles méthodes mues par l´hipocrisie et les relations incestueuses en engageant la procédure qui s´impose contre son actuel président en exercice, s´il est vraiment avéré que ce dernier a tenté d´aider à la destabilisation d´un pays de la sous-région ouest-africaine.
Depuis des décennies les togolais dans leur ensemble tentent de s´émanciper d´un système politique décrié et incarné aujourd´hui par Faure Gnassingbé. La lutte contre le régime de dictaturte s´est accentuée depuis au moins huit mois.
Avec cette affaire burkinabè qui tombe comme une aubaine pour les démocrates togolais, le coup de grâce viendra-t-il de la CEDEAO?
Samari Tchadjobo
Allemagne
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