Servir les « Gnassingbé » et mourir dans l’humiliation. Les derniers mots du gal Assani Tidjani.

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Il s’en est allé comme ses parents «Yorouba» étaient arrivés dans l’anonymat il y a des dizaines d’années au Togo et en ont fait leur terre de prédilection. Lui, c’est bien le gal Assani Tidjani. Et oui ! Sans bruits ni fanfares, le général s’est éteint loin de son Togo natal. Loin de ses amis, loin de ses parents et surtout loin de la troupe, de sa troupe, avec laquelle il s’identifiait au sein de la famille des Forces Armées Togolaises (FAT). Et pourtant, dans la direction du  système qui tient le Togo comme une pieuvre depuis cinquante bonnes années, il était une pièce maîtresse du dispositif. Avant lui, le gal Seyi Memène le plus mercantile, sinon le plus affairiste du quarteron de généraux que possède le Togo avait connu, les mêmes humiliations, la même peur au ventre dans sa geôle large de trois mètres carrés et appelé à se nourrir de haricots ( la révélation est de lui-même). A la différence du général Tem, qui avait bataillé  pour survivre dans les pires conditions carcérales, Tidjani qu’on savait gravement malade et a qui on prédisait une durée de vie maximale de trois mois eut de justesse la chance de quitter le Togo. Mais la suite montrera que ce départ n’aura aussi servi à rien. D’autant plus que, le général ne mourra pas avec les armes en mains. L’enfer carcéral et la brutalité inouïe qu’il fit connaître aux Togolais le rattrapèrent. Aussi surprenant que bizarre, le tortionnaire d’hier n’avait ni la force morale moins physique pour faire face à son destin. Si le général De gaulle dans ses mémoires de guerre reconnaissait que lors de sa traversée du désert, la solitude  était devenue son amie, le général Tidjani, lui, n’a pas eu cette force mentale requise pour se projeter dans l’avenir et espérer un jour vivre et enfin raconter son odyssée aux générations futures. Selon les proches du général  que votre journal préféré a contactés avant de mettre ces lignes pour lecture, si sa maladie l’écrasait, le chagrin, le regret, la solitude et l’ingratitude des Gnassingbé sont au dernier ressort tous les ingrédients qui sont venus s’ajouter à la fatigue corporelle qui ont eu finalement raison de lui. Histoire.

 

Faure a roulé dans la farine le juge Abalo Péchélibia et les protégés du général  tant en Côte d’Ivoire qu’au Burkina-Faso.

Si les rejetons du général Eyadema n’ont pas eu l’intelligence de lire Le Prince de Machiavel, il se raconte que Faure a tellement appris aux côtés de son père dictateur qu’il n’avait plus besoin de lire le livre, véritable bréviaire pour tout dictateur en herbe. Selon l’auteur italien, il y a trois règles que tout dictateur pratiquant devrait connaître :

Règle numéro un. Quand on capte le pouvoir, le premier devoir est d’écarter d’abord ceux qui vous ont fait Roi. Ceci permet d’avoir les coudées libres. On ne se sent plus redevable d’un nombre qui peut  toujours revenir et faire une révolution de palais bis.

Règle numéro deux. Prendre soins d’exposer devant le peuple les nouveaux prisonniers  comme des bandits, des hors la loi… Ceci permet de ne plus avoir à utiliser la force même quand on est absent de son pays.

Règle numéro trois. Imposer aux nouveaux prisonniers une mort lente, douce. Ceci n’attire pas les curieux regards que sont les journalistes et les organisations des droits de l’homme.

De son vivant, Eyadema avait eu à utiliser la méthode avec succès sur Antoine Meatchi et bien plus tard sur le  commandant  Narcisse Djoua Yoma sans compter beaucoup d’autres  qui ont laissé leurs peaux dans l’anonymat dans ce cynisme propre aux despotes nègres.

Faure aussi va très rapidement faire de cette pratique le bréviaire de son pouvoir. Quand le « fameux » coup d’Etat de Pâques rattrape son demi-frère, il procède à la tactique de la guerre des nerfs.

Kpatcha, le Cmdt Attih comme le capitaine Esso Gnassingbé et bien d’autres sont remis au tortionnaire maison, le lieutenant-colonel Massina Yetrofei aujourd’hui en formation du côté du Maroc. Quant au général Tidjani, il  sera laissé en jachère le temps d’observer ses gestes et déplacements avant d’envoyer un matin les sicaires de la cité le cueillir. La suite,on la connait. C’est un général, en larmes et menottes aux poings qui arrive, amaigri, pour s’expliquer devant le « juge » de Faure.

Si devant les Togolais et le monde entier, Faure cherchait à faire passer le message selon lequel Kpatcha voulait le rectifier par un coup d’Etat, lui aussi montrera qu’il n’est ni démocrate moins un partisan du respect des textes qui régissent la nation Togolaise. La preuve, il mettra au cachot son demi-frère ennemi sans avoir pu utiliser les voies juridiques pour le dépoussiérer de son immunité de député. Emprisonné sans la visite de ses avocats, Faure trouvera même la formule de rouler tout le monde dans la farine pour se laver encore les mains comme Ponce Pilate devant les Romains dans l’affaire Jésus Christ et Barrabas.

Abalo Pechelibia : Faure nous a Tous roulés dans la farine !

Si les textes qui régissent la constitution de république togolaise sont clairs sur la  séparation des pouvoirs, il est  notoirement connu de tous que le pouvoir exécutif au Togo a toujours avalé le pouvoir judiciaire. Depuis cinquante ans, c’est comme si une malédiction s’était abattue sur le Togo. Le père Gnassingbé était au dessus des lois. Le fils Gnassingbé ne va pas aussi se faire prier. Les cas de ses violations brutales de la loi, chers Lynxionautes, on vous les épargne faute de sortir avec des cheveux dressés après lecture de cet article.

C’est dans ce méli-mélo que finalement le juge Abalo Péchelibia convoque la partie civile et la défense pour le début du procès « Gnassingbé contre Gnassingbé » entendez Faure contre Kpatcha. Mais avant d’y arriver, il eut bien des deals, des conciliabules. Le juge s’est entendu dire qu’il pouvait condamner Kpatcha pour dix, vingt, trente ans s’il veut. Une grâce présidentielle devrait arriver pour délivrer le plus gros des rejetons d’Eyadema et plusieurs de ses co-accusés. Sans savoir que Faure venait de jouer sa carte politique pour effacer définitivement son demi-frère, la sentence comme convenue tombe : « La Cour condamne à vingt ans de prison Kpatcha Gnassingbé et prononce contre lui la déchéance civique ». Faure souffle. Il suffit de scruter la bande du procès attentivement et d’avoir un flair de journaliste sur les agitations du colonel Félix Kadangah et du général Atcha Titikpina une fois à la barre devant leur « juge » pour convenir avec Lynx.info que les carottes étaient bien cuites. Quand des semaines plus tard Abalo Péchélibia finit par comprendre que Faure venait d’utiliser sa « conscience de juge » pour « cogner » son petit frère, et qu’aucune grâce ne tomberait à court terme, il finit par lâcher : « Faure nous a tous roulés dans la farine ! » Trop tard. De l’autre côté, quand le prince  apprend que son « juge » commence par « ronronner », il profite rapidement pour le gommer afin que, le remake du procès, s’il y avait de nouvelles preuves un jour ne soit à son désavantage. Pour Blaise Compaoré, qui avait fait du général Tidjani son doublon dans la zone rebelle en Côte d’Ivoire, une humiliation de taille. Mais qui connait l’ « ami » Blaise sait que ce dernier sait aussi tuer tout en ne laissant pas de traces. Il est connu que tous les seigneurs de guerre burkinabè que Blaise avait envoyés en soutien à Charles Taylor, et à Fode Sankoh tuer des centaines de milliers de Libériens et de Sierra Léonais pour le diamant, l’or et le caoutchouc, de retour à Ouagadougou, ont été rectifiés un a un. Le vrai témoin, c’est celui qui est mort nous dit-on du côté du palais de Kossym [palais présidentiel, ndlr]où trône celui qui a rectifié Thomas Sankara. Le livre, «Noir Silence» de François-Xavier Verschave nous décrit comment Blaise pour se cacher derrière ses atrocités doit renifler quelques grammes de  cocaïne avant d’aller au lit. Faut-il ajouter cette description du journaliste Bernard Doza qui fut pour un petit temps un de ses conseillers : « Blaise Compaoré c’est d’abord un visage angélique au regard mélancolique de l’enfant très tôt orphelin qu’il a été. Mais derrière ce masque se cache l’homme d’Etat aux yeux rougis par l’abus de tranquillisants. Naviguant aisément entre la naïveté feinte […] et le masque froid et calculateur du militaire prompt à l’exécution […] c’est la machine à tuer, imperturbable derrière un sourire « innocent ». À l’affût, son bras droit Gilbert Dienderé débusque les ennemis du maître ».

Le mossi président du nord aurait-il sciemment laissé Faure faire à sa guise pour empêcher le général « bavard » sinon très bavard, zélé à gogo et un peu trop mercantile,de parler un jour de ce qui s’était passé en zone rebelle ? Rien n’est moins sûr. Ce qui est certain, est qu’il a emporté le secret dans sa tombe. Quand aux rebelles autour de Guillaume Soro, ils auraient aidé le conseiller militaire par des sommes à hauteur de son travail. Fin de partie.

Les derniers mots du général Assani Tidjani.

Ereinté par la dure réalité de l’exil, c’est un général affaibli qui croyait encore que la médecine des Blancs allait le sauver. Kangaram ! L’ « homme blanc » sauve ce qu’on peut sauver. L’homme blanc n’a pas un médicament contre le regret, l’amertume, la solitude, le spleen, l’infidélité des amis et la traitrise de ceux qu’on a aimés au point de tuer pour eux. Alors que le général souffrait terriblement de l’ingratitude des Gnassingbé, ses proches nous ont raconté que Kpatcha qui savait qu’il allait être condamné par Faure n’a pas eu le réflexe et la sagesse de l’innocenter dans son témoignage devant le juge Abalo Péchélibia. Faure, pour qui il a rasé des quartiers entiers dans la ville côtière d’Aného, ne s’est pas rappelé des efforts du général pour qu’il soit aujourd’hui président du Togo. Ses proches ont décrit au Lynx comment ils ont été atterrés de savoir que, même mort, Faure n’a même pas eu la magnanimité de le gracier pour que son âme repose en paix dans le pays pour lequel il a tout donné et toute sa vie durant. Dans la même lancée, les proches du général ajoutent comment Faure a pu le « feinter » toutes les fois qu’il voulait le parler au téléphone. Tout ceci contribuera  à affaiblir son mental et son petit corps émacié qui ne tenait plus qu’à un fil. Il finira dans sa tanière française par laisser le testament qu’il ne voudrait  pas être enterré dans ce pays de footeux, de merdeux, de méchants, d’ingrats, de maudits….

Quand on sait qu’après l’attaque de la primature, le colonel Assih Agossoye avait su malignement  fuir et de loin regarder la dictature du général Eyadema avant de revenir après la mort de ce dernier se coucher à même le sol pour que Faure dépose ses deux pieds, on peut dire que Tidjani a eu moins de chance. Quand on sait aussi que le colonel Kouma Bitenewe est depuis, le vrai patron du ministère de la défense en dépit de ce qu’il avait connu comme chasse à l’homme au point d’envisager un coup d’Etat contre le dictateur Eyadema, on peut dire sans nous tromper qu’il est beau au Togo de naître kabyè !

Quant au général Assani Tidjani, il repose désormais dans le village de ses aïeux. La leçon ici a tiré est que, les « Gnassingbé », on les sert pas le contraire ! C’est toute la rédaction Lynx.info qui présente aux parents et amis du défunt ses condoléances les plus sincères.

Camus Ali Lynx.info

 

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