Non pas en Afrique où la chose est considérée comme monnaie courante, sous une forme ou une autre ( on en a découvert d’autres formes surtout depuis qu’il suffit de recouvrir les coups d’État, par la suite, du manteau des élections, du retour aux institutions démocratiques comme cela s’est pratiqué dans un certain nombre de pays ), mais bien dans son pays, en France. On connaît la nature du personnage qui est de s’en prendre à tout le monde quand rien ne semble aller, pour lui-même, comme il l’aurait souhaité. C’est pour cette raison que, personnellement, cela ne m’étonnait guère quand il s’en prenait à son principal adversaire François Hollande, l’invitant, à plusieurs reprises à descendre dans l’arène pour en découdre, un peu comme nous faisions quand nous étions petits et qu’un camarade de classe « nous embêtait » comme on dit, et que nous le menacions du verbe ou des signes : « Tu vas voir, pendant la récréation! Je vais te boxer, je vais te rouler dans la boue…!» Le comportement du président-candidat est analogue, au point que l’adversaire en question, François Hollande a dû en conclure que « Sarkozy est un chicaneur de récréation ». Je n’invente pas cela. L’adversaire choisissant de ne pas se laisser rouler dans la boue, Sarkozy, peut-être plus irrité par ce fait, en déduit qu’il pratique l’art de l’esquive. Et les injures, celles de Sarkozy lui-même et celles de son camp , ne fusent que de plus belle, presque chaque jour. On peut en établir les réseaux suivants: irresponsabilité-sottise-folie, cynisme-méchanceté, bassesse-inélégance-mensonge-dégueulasse-boule puante, sans oublier le manque de gabarit, d’étoffe présidentielle de l’adversaire, le mépris que l’on peut retrouver dans l’emploi du « ça » pour désigner l’ancien premier secrétaire du Parti Socialiste. « Et ça veut gouverner la France!», tel est le leitmotiv martelé au cours d’un de ses discours de campagne. En sorte qu’un non-Français qui suivrait la campagne présidentielle 2012 en France, pourrait penser que ceux qui arrivent à ce stade de notoriété qui leur permet d’être désignés par leurs partisans pour être candidats à l’élection présidentielle, peuvent être des irresponsables, des sots, des incompétents, des fous…capables de toutes les bassesses, tous les coups dégueulasses, toutes les contorsions, les comédies… de manipuler toutes les boules puantes. A commencer par Sarkozy lui-même? Non. Car, lui, il aime la France, lui seul! Oui, au moins tout seul parmi les dix candidats. Et c’est certainement parce qu’il est seul à aimer son pays, qu’il se bat, seul contre neuf! Vous vous rendez compte, tous les neuf lui en veulent, à lui seul. Lui seul qui a le gabarit, l’étoffe! Et pourquoi ils lui en veulent, à lui le martyr, Saint Nicolas? Eh bien, ce n’est pas à cause de son bilan et de sa manière d’exercer le pouvoir. C’est tout simplement parce qu’il s’appelle Sarkozy.
C’est cela qui justifie sa colère de ce jeudi 19 avril comme j’ai pu le lire sur le site du journal Le Monde « Nicolas Sarkozy a violemment attaqué les règles de temps de parole et les médias, jeudi 19 avril, lors d’un meeting à Saint-Maurice dans le Val de Marne. » Souvenez-vous, j’ai écrit dans un article précédent que les sondages le donnant battu, lui-même et son entourage, aux abois étaient prêts à tout, outre les provocations et les injures lancées à l’encontre de l’adversaire principal : tenter telle ou telle stratégie (« Merkel au secours!… Non, ne viens plus, Angela. Les gens vont dire que c’est la chancelière allemande qui dirige l’Europe et non pas moi… Il faut que les électeurs français croient que je suis l’homme le plus puissant d’Europe » Et, « Obama au secours! Ce n’est pas un petit bonhomme comme Hollande qui discuterait des affaires du monde avec Obama. Il n’en a pas l’étoffe ! D’ailleurs, j’ai interdit aux grands dirigeants de ce monde de le recevoir. »); emprunter tel ou tel slogan, tantôt à de Gaulle ( Aidez-moi !) tantôt au pape Jean-Paul II ( N’ayez pas peur! ). Et même à l’adversaire sous le prétexte de s’en moquer : « Le changement, c’est nous! » Remarquer l’analogie entre la phrase prononcée par Hollande quand il avait rencontré les dirigeants allemands du SPD à Berlin et celle du cinéma offert dans une visioconférence avec Obama, à laquelle il avait invité des journalistes. Hollande avait parlé allemand : « Wir gewinnen zusammen! ». Eh bien, Sarkozy le battra en parlant anglais : « We will win together, you and me, Mister Obama ».
A propos de formule, son « Aidez-moi » pourrait être le « Cachez-moi!» de Caïn en fuite avec sa famille, s’il pensait un peu à Hugo, dans le poème « La Conscience » ( je ne dis pas que sa culture littéraire est limitée comme certains le prétendent et qu’il n’a pas lu La légende de siècles). « Cachez-moi! », car, ne disait-il pas, comme le personnage biblique, qu’on ne le verrait plus s’il n’était pas réélu? Ne dites pas que Sarkozy n’a pas ses propres idées, sa propre rhétorique à lui. Même si c’était le cas, son bagage est rempli d’injures et cela suffit pour la bataille. Lorsque des intellectuels africains avaient entrepris de répliquer au discours de Dakar par un livre intitulé L’Afrique répond à Sarkozy, un journaliste français, probablement irrité par ce crime de lèse-majesté, n’avait trouvé dans cet ouvrage que des outrances. Ce journaliste-douanier, accepterait-il de fouiller aujourd’hui dans la valise de Sarkozy pour s’assurer qu’elle ne contient pas quelques petites outrances?
Le problème aussi, c’est les sondages. Non pas les sondages en eux-mêmes, mais parce qu’à trois jours du premier tour, aucun ne daigne le désigner comme le prochain président. Cela est inadmissible! Au moment où ces mêmes sondages lui faisaient gagner six points alors que l’adversaire en perdait, il avait bien déclaré que c’était une bonne chose. Même attitude sur les ralliements: que Claude Allègre, ancien ministre socialiste de Jospin le rejoigne, fasse meeting avec lui, c’est bon; mais que Martin Hirsch et Fadela Amara, le premier, Haut Commissaire, la seconde secrétaire d’État dans son gouvernement, choisissent Hollande, cela relève de la trahison! Et même de la haute trahison. Inutile d’évoquer les cas de Kouchner, Besson, Boeckel…que Sarkozy avait débauchés du Parti Socialiste, quand il se croyait investi de la mission divine d’instaurer l’ouverture. Et que dire de Manuel Valls, actuel directeur de la communication de Hollande, que Sarkozy, dans la foulée de sa victoire en 2007, avait tenté en vain d’entraîner dans son ouverture, c’est-à-dire, dans ce qui, de l’autre côté de la porte pourrait être perçu comme une trahison? L’ouverture, c’est fermer l’esprit à tout ce qui n’arrange pas nos affaires. L’esprit fermé ne comprend pas que, comme le dit si bien François Bayrou, au Togo, au Gabon…comme en France, les gnous qui ont soif se ruent vers la source d’eau.
Alors, que faire? Il faudrait peut-être une occasion comme celle fournie par l’assassin Mohamed Merah, pour que Sarkozy endosse de nouveau le costume ( de théâtre : il est bon comédien, beaucoup de Français le savent et le disent ). Sans cela, c’est un être de chair et de sang (faut-il préciser bouillonnant, agité), oubliant vite que tant qu’il remplit encore les fonctions qui sont les siennes, il est le garant du respect des règles fixées par les institutions françaises pour tous les candidats à l’élection présidentielle en France. Et lorsqu’il laisse libre cours aux injures contre ses adversaires, il oublie son propre discours que rapporte le même article du Monde : « Le peuple de France, il n’aime pas l’injure, il est courtois », a déclaré M. Sarkozy, qui a reproché à Radio France de donner la parole à des auditeurs qui insultent leur invité.
Admettons, au passage, que Sarkozy n’étant pas un Français comme les autres ( c’est ce qu’il nous laisse entendre ), il n’a pas, lui à être courtois, il a le droit, lui, d’aimer l’injure, c’est-à-dire d’en user.
Pour aller jusqu’au bout de son raisonnement (les mauvaises langues prétendent que ce n’est pas son point fort), Sarkozy, qui a eu au moins cinq années ( on ne compte donc pas celles pendant lesquelles il était ministre ) pour bien occuper les médias, les crever comme on dit, toujours en première ligne, ne supporte pas aujourd’hui, que ces mêmes médias lui réservent, au nom des règles du jeu démocratique, un traitement égal à celui de ses neuf concurrents. Je reprends l’un de mes derniers titres légèrement modifié : il n’y aurait pas une petite bombe pour Bayrou, Le Pen, Mélanchon, Hollande… Surtout pour Hollande? Il n’y en aurait pas aussi une pour le fantôme de Mitterrand, car, comme le rapporte toujours Le Monde « Si vous voulez le Parti socialiste, votez pour le Front national », a également mis en garde Nicolas Sarkozy, accusant François Mitterrand d’avoir pu prospérer pendant deux septennats grâce au FN. » Et pourquoi, lui Sarkozy n’aurait même pas ses deux quinquennats ? Il n’aurait pas son FN, à lui? Au lieu de cela, Jean-Marie Le Pen s’amuse à jouer avec ses initiales N.S. ( National-Socialisme ou pour mieux dire Nazionalsozialismus ). En avril 2007, un blagueur avait ajouté sur l’affiche de campagne de Sarkozy, à son portrait, la moustache d’Hitler au-dessus de ses lèvres. C’était pour rire, bien sûr.
Ne concluez pas tout de suite que vous savez de quel côté se situe la bassesse, l’irresponsabilité, les boules puantes etc. Dites-vous simplement, vous référant à l’adage mina : quand on perd au jeu du pouvoir, ou quand on redoute d’y perdre, on n’est capable que de comportements déraisonnables. Le FN, c’est bon, si ses électeurs votent Sarkozy, s’ils permettent à Sarkozy de gagner comme en 2007 ( les statistiques le montrent ). Le FN, c’est même bon quand on peut faire campagne en lui volant ses thèmes de prédilection, pourvu que cela marche : immigration, réduction de moitié du nombre d’étrangers, sécurité, menace de sortie de l’espace Schengen, défense des civilisations européennes ( je ne dis pas jusqu’à la manière Breivik, mais c’est sûr qu’on nous servira à nouveau du Guéant, de l’identité nationale, de bons morceaux d’anthropologie à la sauce de Guaino, le nègre de Dakar, si vous permettez de l’appeler ainsi…) Un proverbe kotokoli dit : le poulailler sent mauvais, mais les œufs sont bons. Ces thèmes que caressent les Le Pen, les Breivik… sont de bons œufs pour l’excellent cuisinier Sarkozy ( j’emprunte la métaphore à Aimé Césaire qui décrit son personnage tragicomique, le général Christophe, le Roi Christophe, comme un ancien cuisinier, dans la pièce éponyme). Christophe d’Haïti ou Christophe d’Afrique, comme dirait Césaire, « c’est tout pareil! » Je n’ose dire Christophe de France pour ne pas irriter ceux qui pensent que ce genre de personnage se retrouve seulement parmi les « primitifs » qui ne sont pas entrés dans l’Histoire. Mais, que les bons œufs du FN existent et ne profitent pas à Sarkozy est une chose inadmissible!
Le « ça » appliqué à Hollande n’est pas, bien sûr, applicable à Sarkozy, de peur que quelqu’un, en l’occurrence un Africain ne soit tenté de dire : « Et ça veut nous donner des leçons de démocratie. Et ça veut peser sur la direction des affaires du monde ». De peur encore qu’un Africain, excédé par les nombreuses interventions brutales, intempestives et désordonnées de Sarkozy dans la vie politique des pays africains, par les menaces et les chantages dont sont l’objet certains dirigeants africains de la part de Sarkozy, ne puisse dire, comme on le fait en mina « on a été mordu par un cadavre de serpent ».Comment un cadavre de serpent peut-il mordre? Interrogez un sage de nos villages. Il vous répondra : parce qu’il fait encore peur à ceux qui ne savent pas qu’il s’agit d’un cadavre. La capacité à faire peur, aussi bien dans sa brousse qu’ailleurs est l’arme principale…du cadavre. Mais, en fait, les Africains sont-ils les seuls à avoir été mordus par ce cadavre?
Sénouvo Agbota ZINSOU