
Ainsi les marches qu’il avait initiées après la présidentielle de 2010 sont devenues d’année en année toute une batterie de revendications bouchonnant les artères et horizons du parti. A ce cumul de désordre politique, faut-il encore rappeler certaines erreurs tactiques également cumulées telles que la constitution de la défense de Pascal Bodjona ancien ministre de l’administration territoriale au sujet de l’affaire d’escroquerie internationale qui est une affaire de droit commun et non politique ? Il s’agit d’une affaire sans tête ni queue dénommée [Bodjona-Agba-Le Flock-Prigent] qui n’a rien de politique. De même l’opposition a-t-elle besoin de se fourvoyer dans la défense de Kpatcha Gnassingbé victime aujourd’hui de son propre système d’hier qui l’a jeté en prison pour vingt ans de détention, même si son immunité parlementaire n’avait pas été levée ? S’il est vrai que certains indicateurs socio-politiques annoncent l’existence d’un mécontentement général intra-muros pays Kabyè qui enfle progressivement depuis la disparition du dictateur Eyadema, n’y a-t-il pas intérêt de rester en dehors de ce règlement nauséabond entre héritiers adeptes du mensonge, de la corruption, et de la fraude électorale ? Comment Fabre pourra-t-il gérer ce cumul de revendications en 2015 ? Alors que 2014 sera incontestablement l’année du procès de l’affaire des incendies criminels des marchés de Lomé et de Kara qui aura certainement des impacts politiques et judiciaires sans précédent dans le paysage politique national ? Comment gère-t-il le dossier de l’enquête publiée par le CST qui pointe du doigt accusateur certaines personnalités proches du pouvoir sans démontrer preuve à l’appui leur réelle responsabilité pénale engagée ? Notons que les plaintes déposées par ces personnalités devant les juridictions nationales feront l’objet d’un autre procès en diffamation.
L’affaire des incendies des marchés de Lomé et de Kara n’est pas une affaire pénale simple malgré son caractère criminel, elle est avant tout, une affaire politique aux conséquences économiques et financières d’envergure sous régionale ouest africaine. C’est pour cette raison qu’il faut rechercher leurs auteurs et commanditaires. Dans cette optique, beaucoup d’observateurs avisés avancent l’hypothèse non moins incongrue selon laquelle l’opposition pitre et cupide incarnée par le très populiste Jean-Pierre Fabre n’est-elle pas tombée dans un piège à l’issue de ses déclarations intempestives aux allures guerrières lors des meetings touristiques organisés tous les samedis dans sa station balnéaire sablonneuse de Lomé qui ont précédées les manifestations dites des « derniers Tours de Jéricho » suivies de la mise à feu de ces deux marchés ? Il faut reconnaitre qu’elle [l’opposition] avait créé elle-même les conditions inédites de son enfermement dans ce piège à travers la surenchère du langage démagogique du leader de l’ANC. Ainsi quand Fabre affirmait publiquement qu’il ne participerait à aucun scrutin futur au Togo tant que le fauteuil présidentiel ne lui sera pas restitué ainsi que la réhabilitation des 9 députés exclus de l’assemblée nationale dans leur droit, c’est de bonne guerre pour doper les militants, l’opinion, les médias afin de bousculer le pouvoir. Il est dans son rôle d’opposant. Par contre quand il ajoutait que si ces deux préalables ne sont pas satisfaits, « il n’y aura plus du tout d’élections au Togo », sommes-nous encore certains que ces déclarations sont de nature à amuser le pouvoir qui tient à sa survie quasi permanente ? De quels moyens dispose-t-il pour empêcher la tenue des élections au Togo, devrait s’alarmer le pouvoir ? Pensons-nous vraiment que ce pouvoir pourra-t-il rester indifférent à ces genres de menaces dès lors que ces déclarations sont de nature à inquiéter sa longévité qui demeure sa seule hantise ? En d’autres termes ces déclarations irresponsables n’ont-elles pas progressivement muté Fabre lui-même en Rambo ou Zorro possédant la force atomique susceptible d’écrabouiller le pouvoir pour ainsi arracher l’alternance ici et maintenant en dehors des élections ? Ces menaces n’étaient-elles pas entendues comme un défi à relever au point d’y répondre du berger à la bergère ? Pour autant cette hypothèse répandue à tout-va suffit-elle pour entériner l’existence d’un piège ou non dans l’affaire des incendies criminels des marchés de Lomé et de Kara ? Doit-on encore rappeler que plus de six Milliards sont partis en fumée la nuit du 12 janvier 2013. Les Togolais attendent la vérité sur ce dossier criminel d’où qu’elle vienne et quel que soit le prix hypothétique à payer.
Contradictions et incohérences se succèdent à travers les appels pressants à la tenue des élections locales en 2014 venant d’un leader psychorigide qui n’était pas du tout disposé à la tenue d’aucune sorte d’élection au Togo il y a à peine quelques mois. Doit-on attendre l’ami Ouattara le spécialiste des injonctions politiques à sens unique pour imposer les élections locales au pouvoir Togolais qui n’entend pas les organiser afin de priver l’opposition des assises municipales et régionales dans le pays ? Si vouloir est une chose, ne pas vouloir est son contraire. Mais peut-on vouloir en même temps qu’on ne veut pas ? Alors même que la politique justement est un jeu [de choix]fondé sur les convictions portées par l’engagement des différentes lignes politiques ? En claire, choisir de boycotter ou de ne pas boycotter est une chose et son contraire. Mais la mise en scène simultanée de ces deux stratégies contradictoires relève de l’intelligence factice qui caractérise l’activiste leader de l’ANC.
Jean-Pierre Fabre, c’est le paradoxe de l’âne de Buridan qui est mort de faim et de soif entre le picotin d’avoine et le sceau d’eau, faute de choisir par quoi commencer. Sa force d’inertie politique est nettement déterminée par ses sentiments insidieux obscurs d’ordre prophétique à l’opposé du rationnel tels que le libre arbitre ou la liberté existentielle fondés sur les critères de la responsabilité et de l’objectivité l’exigent en politique. Il revient aux militants de trancher en dernier ressort lors d’un futur congrès statutaire, car si les prochaines législatives sont annoncées pour 2018, la présidentielle après celle de 2015 [théoriquement perdue d’avance] n’aura lieu qu’en 2020. Est-il permis de perpétuer cette stagnation politique suicidaire jusqu’en 2020 avant de comprendre que le parti regorge de cadres talentueux ? Dès lors que nous admettons qu’un parti politique est une entreprise collective d’utilité publique, il est alors évident à la lumière d’une analyse factuelle qu’aucun leader ne dispose du monopole de notre lutte démocratique pour un Togo libre, souverain et prospère pour tous. Notre lutte démocratique n’est pas une propriété personnelle ni une SARL familiale, c’est une lutte politique nationalement togolaise pour la démocratie, la liberté, l’Etat de droit et le développement économique et social du Togo pour tous les Togolais.
Tido BRASSIER, Paris le 23 janvier 2014