«Quand on est sûr de vaincre on ne résiste pas ». Si Tirburce Koffi et Venance Konan pouvaient le comprendre !

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Je me suis imposé de ne plus lire Tirburce Koffi et Venance Konan parce que, sans prétention aucune, j’ai dépassé, au sens freudien du terme, le stade de la beauté des lettres qui ne véhiculent pas de sens. Mais coincé dans une salle d’attente, je n’ai pas eu le choix. Le Frat-mat du 25 octobre 2012 trainait sur le guéridon et l’un des deux Frci lettrés mais analphabètes de la pensée s’essayait de descendre l’œuvre culturelle d’un confrère en l’occurrence Foua Ernest de Saint-Sauveur et d’insulter la mémoire de Zokou Gbeuli. Leur crime : la résistance. « En quoi avoir résisté à ceux qui nous ont vaincus « sans avoir raison » est-il un acte héroïque mémorable… » Faut-il avoir vaincu sans avoir raison pour être un héros ? Vous avez là toute l’idéologie Frci en vogue en Côte d’Ivoire. J’ai voulu faire une réflexion sur la mémoire de tous les résistants anonymes ou connus à qui nous devons de trouver en la liberté un droit humain inaliénable et qui n’ont jamais pu survivre à la barbarie de toutes les forces rétrogrades quand j’ai reçu deux textes d’amis : Paulin Gauthier N’GBESSO et Jean ALOBRO. J’ai décidé de leur laisser la place pour que les défenseurs de la satrapie de Ouattara comprennent que le peuple est à un autre niveau d’interprétation de l’histoire des hommes. La réaction de Paulin Gauthier N’GBESSO est la suivante:

«Tiburce Koffi se répand en une petite causette avariée. Elle ne vise qu’à disqualifier la thèse de la résistance. Porter le poids de la connivence avec la prédation coloniale, poussé à disqualifier tout résistant. Il s’agit de niveler tout l’horizon au sable de sa propre misère morale.

Nous le savons : le résistant ivoirien Zokou Gbeuly et le résistant français Jean Moulin ont, chacun pour sa part, été saisis, déportés et finalement vaincus par des forces adverses. Mais personne en France n’écrira : « Moulin a été vaincu. Et de la manière la plus misérable : arrêté par un officier allemand, déporté (à Metz) ; puis il est mort là-bas, dans la solitude et, sans doute, l’humiliation. Qui sait même, si les méchants hommes aryens ne lui avaient pas ‘‘botté le c…’’ et soumis à des vexations inacceptables et inconnues de nos historiens ? Qui sait même si ce ne sont pas Hardy et Aubrac (des français) proches de Klaus Barbie qui l’ont ainsi maltraité et ridiculisé ? Bref, Jean Moulin a été vaincu, comme bon nombre de résistants français. La question essentielle, à présent : pourquoi célébrer des vaincus ? La vocation des leaders français était/ est-elle/ de résister ? Pourquoi aimons-nous tant nous contenter du confort (faux, illusoire et niais) de la victimisation ? » Personne ne s’interrogera en ces termes, car tout homme lucide sait que ceux qui sont défaits militairement ne le sont bien souvent que provisoirement. Car tout homme lucide, sait que porter la mémoire de Moulin au Panthéon, ce n’est pas donner dans la posture de la victime, ce n’est pas larmoyer, ce n’est pas s’apitoyer. Il en est ainsi parce que toutes les défaites militaires n’ont pas la même connotation. Certains défaits survivent par les stèles de leur résistance, d’autres habitent les fosses communes de leur reptation. Nous savons tous qu’un certain Nelson Mandela a été saisi, maitrisé, capturé et incarcéré et donc apparemment vaincu. Qu’a fait son parti l’ANC ? Qu’ont fait les sympathisants de la cause défendue par Mandela ? Résister. Qui ignore à ce jour, que la présence de Mandela derrière les barreaux, associée à la résistance idéelle des siens, fut finalement la plus corrosive des offensives ? Toute incarcération, bien entendu, n’est pas acte d’héroïsme, mais il est certains prisonniers dont l’incarcération emprisonne leurs propres geôliers. Il est certains prisonniers dont la geôle est une pièce de l’histoire ; l’histoire au sens de mémoire glorieuse ; l’histoire au sens de ferment de la renaissance dans l’excellence. Ce n’est pas la mort de Zokou Gbeuly qui est célébrée. Ce n’est pas l’apitoiement qui est réclamé. Il ne s’agit point de pleurer Zokou Gbeuly. Il est question de magnifier la dignité, la grandeur, le refus de reptation. Oui, Zokou Gbeuly n’a pas été le seul résistant africain. Mais si certains peuples veulent porter la mémoire de leurs résistants comme on porte la petite vérole, tous les peuples heureusement n’ont pas fait vœu de pauvreté mémorielle. Nous savons tous que pour certains, seuls ne comptent que la verroterie, la camelote et les petits miroirs distribués à l’encan par les puissants du jour. Il n’est pas surprenant qu’ils citent pour modèles, des figures de leur parenté morale : Zerbo, Pololo, John Dellinger… Mais qu’un boutiquier évalue la notion de victoire à l’étalon du gain matériel, qu’un épicier mesure le succès à l’échelle d’une bascule parait tout à fait admissible. Mais qu’un écrivain dise être autiste à la notion de victoire symbolique est pour le moins pathétique ! »

Quant à Jean AlOBRO ? Le titre qu’il donne à sa réaction, quoique clair, a nécessité de ma part une petite précision pour m’assurer que nous pensions la même chose. Je ne me suis pas trompé : comme la grenouille de jean de la Fontaine qui voulait se faire aussi grosse qu’un bœuf, Tirburce Koffi n’est, en fait, rien.

De quoi Tiburce Koffi est-il le nom ?

« Un ami sage m’a fait parvenir via le site du très gouvernemental Frat mat info, un texte de réflexion de Tiburce Koffi sur la commémoration de la mort de Zokou Gbeuli, guerrier Bété originaire de Daloa, qui s’est opposé à la Pénétration française au début du 20ème siècle. Qui est l’auteur, qui est Tiburce Koffi ? Je ne saurai dire. Est-il écrivain, dramaturge, libre penseur, rien de tout cela ou tout ça à la fois. Le connaissant de loin, je pense qu’il ne détesterait pas tous ces qualifiants pour lui seul.

Sans risque de me tromper, je crois que Tiburce Koffi est à la littérature ce que Venance Konan est au journalisme (l’inverse est vrai aussi !), ce qui compte pour nos stars du moment, ce n’est pas d’être lus, mais d’être reconnus, adoubés par les gouvernants d’ici, et les puissants d’ailleurs. Avec une nuance de taille, une constante rare pour ne pas être soulignée : le mépris de tout ce qui n’est pas Baoulé, et/ou soumis aux Baoulés. Ce mépris, comme tous les mépris est subodoré par une primauté affirmée (sic) du peuple Baoulé sur les autres peuples de Côte d’Ivoire, au nom d’une hiérarchie édictée par les Anciens maîtres, et laissée en héritage à ce même peuple Baoulé. Maîtres d’un jour, maîtres de toujours !

Tiburce Koffi, comme Venance Konan, appartient à cette race d’écrivains ethnocentriques et ethno centrés ayant trouvés dans le disque dur de l’ivoirité qu’est l’akanité chère à l’inénarrable Niangoran Bouah aujourd’hui disparu, leur roche tarpéienne d’où ils peuvent impunément précipiter des tombereaux d’injures sur les autres peuples insoumis de Côte d’Ivoire, d’où ils peuvent impunément stigmatiser les autres peuples de Côte d’Ivoire, sans vergogne aucune. Pouvez-vous trouver un seul texte, un seul article de nos deux compères qui défendent le massacre des Bété, des Guéré ou Wè qui a cours sous nos yeux, pouvez-vous nous citer une seule indignation du très en cour Venance Konan, sur l’incarcération injustifiée et majoritaire des jeunes et moins jeunes issus de ces groupes ethniques ? Cherchez et vous ne trouverez pas!

Enivré qu’il était par ses propres textes et par autre chose ( !), notre Tiburce Koffi, que je croyais plus avisé, ne s’est pas aperçu que dans cette commémoration à laquelle furent conviées toutes les parties du pays, il ne fut pas question d’une célébration de la « défaite », pas plus qu’il s’est agi d’un repli identitaire, encore moins d’une quête, je cite le critique du jour : « d’un peuple désolé (à la) recherche de héros à célébrer » mais il s’agissait d’abord d’une fête, d’un moment de retrouvailles. Cette célébration de Zokou Gbeuli, que j’ai préparé avec d’autres et à laquelle j’ai participé, avait pour modeste vocation de créer un lieu de mémoire structurant pour notre Nation en devenir. Elle voulait dire aux autres peuples de Côte d’Ivoire, qu’à l’instar de ce qui a pu se passer chez vous, chez nous aussi, il eut un grand homme qui a cru mais qui a été vaincu. Mais et surtout, au-delà de tout ceci, ce rassemblement voulait poursuivre la réflexion sur l’héritage commun de la « Résistance » face à la France coloniale que nous avons tous en partage et qui doit être enseigné tel quel à nos enfants sans mépris ni boursouflures.

Oui cher Tiburce Koffi, les héros peuvent mourir à la fin de l’histoire ou du film, de la pièce et ne pas être du côté des vainqueurs, simplement parce que c’est la cause qui fait le héros, pas l’issu de son combat.

Ailleurs, le fameux ailleurs qui leur plaît tant, dans les sociétés ouvertes, multiples et démocratiques, un tel texte n’aurait jamais été publié sur un site gouvernemental, censé acter au quotidien, la marche vers la cohésion nationale. Ailleurs, un tel texte aurait provoqué scandale ou à tout le moins controverse, (et c’est peut-être ce que recherche notre « héro » du jour, à défaut de vrai succès littéraire !). Mais ici, il est publié, et sans doute sera cité comme référence de la « pensée en mouvement » à la Côte d’Ivoire.

Pourtant le danger de ce texte est là étalé sous nos yeux ; celui d’une publicité de l’ethno centrisme comme mesure du temps, et du rythme de la nation. Or depuis fort longtemps, nous savons, nous autres Africains contemporains du post génocide rwandais, que l’ethnocentrisme, même paré de ses oripeaux prétendument littéraires, scientistes ne saurait constituer une opinion, pas même une libre opinion. C’est un crime ! De même, toutes les régions de Côte d’Ivoire « regorgent » de héros, de même toutes les régions Côte d’Ivoire portent en elles les plaies encore béantes des atrocités, des meurtres, des assassinats provoqués, justifiés à priori et a posteriori par des miliciens de la plume, version calibre 12 de l’acabit de Tiburce Koffi et de son jumeau de la « pensée », Venance Konan. »

Joseph Marat

Infodabidjan.net

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