Dans un monde où les orgasmes de la femme n’ont longtemps été disséqués que par les hommes, il a longtemps été acquis pour tous et presque toutes, que les femmes ont deux types d’orgasmes : le clitoridien que Freud jugeait « infantile » et le « vaginal », qui conserve aujourd’hui encore tous ses titres de noblesse. De plus en plus de femmes, gynécologues ou sexologues en particulier, tentent de mieux définir les orgasmes féminins, mais le travail d’Annie Sprinkle, ancienne actrice porno, aujourd’hui sexologue et auteure de nombreux livres, semble le plus… épanouissant.
Les premiers travaux qu’elle a faits ont porté sur son propre corps. Avoir eu un grand nombre d’amants lui a permis de réaliser que les orgasmes étaient d’abord fonction des rencontres (chaque partenaire vient avec son histoire, ses goûts et ses limites) et d’expériences aussi multiples et variées que possible. Pour elle, les orgasmes sont comme les grains de sable : il n’y en a pas deux qui sont identiques.
Sa réflexion est partie des orgasmes que les femmes ont pendant leur sommeil sans aucune stimulation autre que cérébrale, et des différentes formes qu’ils peuvent y prendre (on rêve d’avoir un orgasme sans l’avoir, d’autres fois en l’ayant, quelques fois avec de fortes contractions vaginales et/ou anales, enfin, simplement en ayant une vessie très remplie). S’ils peuvent être aussi variés dans le sommeil, il doit en être de même éveillée.
Effectivement, certains orgasmes éveillés sont très subtils et peuvent arriver dans toutes sortes de conditions, notamment par la pensée, sans stimulations physiques. Pour elle, on peut, en se concentrant, obtenir des orgasmes, et au contraire ne pas les percevoir sans une attention particulière. Ces « micro-orgasmes » peuvent aussi bien intervenir pendant un massage, lors d’une caresse sans intentions érotiques, etc. Beverly Whipple et Gina Ogden, des scientifiques qui ont beaucoup publié sur le point G, ont fait des tests dans leur laboratoire pour savoir si les femmes pouvaient avoir des orgasmes simplement en y pensant, et non seulement les tests se sont révélés positifs, mais elles ont constaté que certaines femmes pouvaient avoir des orgasmes très satisfaisants, sans qu’il y ait les contractions caractéristiques de l’orgasme.
Les orgasmes vaginaux ont aussi de multiples formes, en fonction de la partie du vagin qui est sollicitée, et la façon dont il est pénétré (doigts, poings, pénis, godemichés ou sex-toys…). Ils peuvent être délicats, modérés, violents, quoique souvent moins que les orgasmes clitoridiens, que certaines féministes estiment supérieurs parce que souvent plus puissants.
D’autres orgasmes reposent sur des techniques poussées de respiration, telles qu’enseignées par le tantrisme et ils peuvent prendre de multiples formes selon les exercices et les enseignements. Enfin, il existe aussi des orgasmes qui arrivent en pratiquant certains sports, en écoutant de la musique, en contractant les muscles pubo-coccygien, en riant, en toussant… Le point commun de tous ces orgasmes étant l’accélération de la respiration, du rythme cardiaque, de la chaleur du corps, etc.
L’orgasme clitoridien est probablement celui sur lequel tout le monde s’accorde, car il est le plus facile à identifier. Quelle que soit l’intensité de cet orgasme, il y a une tension musculaire, des contractions vaginales et une expulsion d’énergie, une durée variable de quelques secondes à quelques minutes.
Non seulement les orgasmes féminins prennent un nombre pléthorique de formes, mais la femme n’est pas limitée à un seul type d’orgasme à la fois. Elle peut tout à fait en avoir plusieurs différents en même temps ou de façon très rapprochée. Certaines femmes, rares celles-là, peuvent avoir ce que Annie Sprinkle appelle les « Megagasms », une sorte d’expérience émotionnelle et physique, qui prend tout le corps, et peut durer de quelques secondes à quelques heures. Ils sont assez difficiles à obtenir à moins de savoir solliciter de nombreuses zones érogènes à la fois, d’être capable d’un abandon absolu et d’une intensité de sensations presque violente, quelquefois accompagnée de visions psychédéliques.
Le problème de nombre de femmes qui pensent ne pas avoir d’orgasmes ou ne pas avoir les « bons » orgasmes, vient avant tout de ce que la définition classique se limite à celle des orgasmes clitoridiens, plus faciles à identifier. Comprendre qu’il existe en réalité de nombreuses formes d’orgasmes féminins, à intensités variables, doit permettre d’abandonner la quête d’un Graal, pour se laisser aller aux multiples formes de cette merveilleuse jouissance qui est naturellement en soi.
Lynx.info Santé