L’ASVITTO dénonce un procès inique et s’inquiète de l’état de putréfaction avancée de la justice togolaise.Dans ses activités de monitoring de procès, l’Association des Victimes de Tortures au Togo (ASVITTO) a assisté à l’audience du 07 octobre 2020 relative à l’affaire pétrolegate au tribunal de Lomé. Pour rappel, c’est suite aux informations de détournement de fonds publics par les membres du Comité de Suivi de Fluctuations des Prix des Produits Pétroliers (CSFPPP) publiées par le journal L’Alternative de Ferdinand Ayité, journaliste d’investigation.
De manière succincte, les débats qui ont alimenté le procès étaient riches en éléments de preuve. Tout était réuni pour la manifestation de la vérité sauf une justice indépendante. Il manquait un juge de siège véritablement libre <<âme et conscience>> pour dire la loi et le droit dans son intime conviction. Toute conscience impartiale qui était dans la salle était suffisamment nourrie d’éléments pour savoir discerner où était la vérité, sauf que celui qui a prêté serment et qui a juré de trancher tout contentieux en toute impartialité avait d’autres objectifs que la manifestation de la vérité. Même la présence des Inspecteurs de justice dans la salle n’avait pas dissuadé le juge du siège. Ce qui a amené un observateur à dire que le <<procès était téléguidé d’ailleurs comme un drone dont le pilote était loin de l’appareil>>. Le Togo aurait certainement devancé la Chine dans le pilotage à distance, à la différence que le « 5G » chinois est concret mais celui du Togo reste virtuel, nuisible et très difficile à prouver à part les conséquences douloureuses et coûteuses pour les justiciables.
Trois éléments importants sortant de l’audience ont attiré l’attention de l’équipe de monitoring de l’ASVITTO et qui permettent de quantifier l’état de putréfaction avancée de la justice togolaise.1- D’abord, venant de la part des Conseils du plaignant, un des avocats a cité quatre éléments dont <<l’existence d’une enquête sérieuse>> pour qu’une infraction de diffamation soit consommée. C’est quand même curieux que cela vienne des avocats du plaignant alors que les mêmes personnes refusent que les résultats de l’audit soient considérés dans le dossier. Comment peut-on vouloir défendre une prétendue <<diffamation>> dans une affaire de détournement de deniers publics en rejetant l’audit?
Qu’est-ce que ces avocats entendent par <<l’existence d’une enquête sérieuse>> dans le cas d’espèce ? Bizarrement, cela n’a pas attiré l’attention du juge puisqu’il était de leur côté.
2- Ensuite les avocats de la défense du journal L’Alternative et du peuple togolais avaient fourni, séance tenante, une pièce à conviction au juge et au procureur. Dans ce document bien authentique dont l’ASVITTO a pu se procurer copie, il apparaît clairement entre les lignes que l’Assemblée nationale et le gouvernement se sont sentis interpeller par les <<allégations du journal l’Alternative dans sa parution N°879 du 9 juin 2020>>. Plus intéressant encore, l’émissaire du gouvernement reconnaît que le système de l’importation et de la distribution des produits pétroliers <<reste perfectible et nous nous inscrivons dans la logique de l’améliorer, ce qui constitue pour nous aujourd’hui un chantier ouvert.>>Aussi, dans la correspondance, le gouvernement déclare la nécessité d’aller vers <<un auditeur indépendant>> pour être situé et que <<les investigations se poursuivent>>.
Sur cet aspect, il est écoeurant de voir combien le gouvernement est manifestement conscient de la véracité du désastre relevé par le journaliste alors que le juge du siège a été indifférent et insensible à la pertinence de ce document officiel qu’il a reçu entre les mains. Encore une preuve qu’il avait d’autres intérêts à défendre que de dire le droit.3- Un troisième aspect est que les Conseils du plaignant ont reconnu lors des débats que leur client a été écouté par la commission administrative dans ce dossier. Mais le procureur dont la tendance était en faveur du plaignant de même que le juge, avait oublié qu’il représentait le ministère public et s’est trahi en disant que l’audit du gouvernement ne doit pas motiver la décision du juge. Et finalement, comme une bande de sectaires, il n’était pas possible de distinguer le juge du siège, le procureur et les Conseils du plaignant et le principe de séparation des juridictions était simplement ignoré.Pour l’ASVITTO, le juge du siège n’a orienté ses investigations qu’à charge contre le journaliste et ne s’était donné aucune peine à explorer les pistes sérieuses mises à sa disposition pour la manifestation de la vérité. Au regard de ce constat, l’ASVITTO attire l’attention des partenaires techniques et financiers de l’appareil judiciaire togolais sur le fait qu’ils doivent œuvrer plus efficacement à sauver les meubles de cette flamme qui consume l’essence même de la paix, de l’harmonie et de la stabilité entre les filles et les fils d’une même nation.
Fait à Lomé, le 12 octobre 2020
Pour l’ASVITTO
Le Président M. ATCHOLI KAO Monzolouwè