On peut être choqué par l’ampleur et l’atrocité des crimes perpétrés dans le camp de refugiés de Nahibly. Mais on ne doit pas en être étonné ni surpris, outre mesure. Le grand « nettoyage » annoncé par Amadou Soumahoro, secrétaire général du Rdr, conseiller politique du chef de l’Etat, monsieur Alassane Ouattara, est en marche. Cette attaque est la marque déposée du régime Ouattara, actuellement au pouvoir en Côte d’Ivoire. C’est la voie que ce nouveau régime n’a cessé de montrer à ses partisans depuis son arrivée. C’est la conséquence de la chasse aux partisans de Laurent Gbagbo diabolisés. C’est le résultat des arrestations arbitraires et systématiques de tous ceux qui sont soupçonnés d’avoir soutenu le régime de Laurent Gbagbo. C’est la conséquence de vouloir à tout prix « effacer » ou « casser » du Gbagbo.
Que s’est-il passé ? La communauté malinké du quartier kôkoma, déchaînée, mue par une soif de vengeance aveugle, s’attaque à un camp de refugiés et de déplacés qui compte près de 5.000 âmes. Femmes, enfants et hommes confondus, essentiellement des gérés, ethnie soupçonnée proche de Laurent Gbagbo. Cette communauté malinké suspecte en effet le camp de Nahibly (localité de Duékoué), d’abriter des bandits qui ont fait 4 morts, la veille, parmi les leurs. Rien n’arrête cette foule surexcitée. Le camp est incendié. Tous ceux qui tombent entre les mains des assaillants, des jeunes en particulier, sont exécutés à l’aide de fusils, de gourdins ou de machettes. Certains sont même brûlés vifs. Bilan très lourd : plus de 50 morts et plusieurs dizaines de blessés. Des familles entières jetées à la rue, errant ça et là, ne sachant plus où aller.
Même si l’on considère la version selon laquelle des individus mal intentionnés auraient pu se glisser parmi ces pauvres refugiés, avait-on besoin de se faire soi-même justice ? Ne revient-il pas à la police et à la gendarmerie de procéder à des enquêtes pour débusquer les coupables ? La réalité, dans cette Côte d’Ivoire, c’est que ces forces (police et gendarmerie), n’ont plus la confiance des nouveaux gouvernants, pour des raisons purement politiques. Elles n’existent même pratiquement plus dans certaines localités. Même si elles sont en place, elles ne le sont souvent que pour la forme, dénuées de tous moyens adéquats. C’est ce manque de confiance, cette culture de représailles, ce mot d’ordre « d’aseptisation » qui ont tout naturellement rejaillit sur cette communauté malinké.
Par ailleurs, le drame survenu à Nahibly soulève en soi, deux questions fondamentales :
Comment se fait-il que, plus d’un an après l’instauration du régime de Monsieur Alassane Ouattara en Côte d’ivoire, des ivoiriens soient encore réduits à vivre dans des camps de réfugiés, dans leur propre pays ?
La triste réalité, c’est que, ces populations qui ont tout perdu, ne peuvent plus retourner chez elles, car ceux qui les ont dépossédés de leurs terres, de leurs habitations, si elles ne les ont pas complètement détruites, représentent encore des menaces pour elles. Si ces refugiés, en majorité des wê, refusent de retourner chez elles, c’est donc que là-bas, il y a encore leurs bourreaux qui les y attendent pour en finir une bonne fois pour toutes avec eux.
Et depuis lors, les nouvelles autorités se préoccupent peu de cette situation dans laquelle, des hommes qu’elles ont contribué à armer, occupent indument des terres et jouissent d’une l’impunité certaine. C’est à ce niveau que le régime de monsieur Alassane Ouattara a encore faillit. En effet, n’est-ce pas de son devoir de protéger les populations ? De leur garantir la sécurité et le bien-être ? N’est-ce pas le rôle régalien d’un l’Etat digne de ce nom ?
Hélas, le peuple wê, depuis le déclanchement de cette crise, ne cesse d’en payer le lourd tribut. Une situation rendue pire par l’irruption d’un régime indigne et irresponsable. Le drame, que dis-je, le génocide du peuple wê est déplorable et inacceptable au plus haut point. Qu’a fait ce peuple pour mériter ce qui lui arrive ? Avoir soutenu Laurent Gbagbo ? Non, rien en effet, aucune raison quelle qu’elle soit, ne peut justifier qu’on ôte la vie à toute un peuple, comme à des moutons qu’on conduirait à l’abattoir.
Certes, le drame du peuple wê, nous affectent profondément, mais nous concerne tous. A tous nos frères wê, qu’il nous soit permis de dire qu’il ne sert à rien d’en faire une histoire personnelle, un problème qui n’intéresse seulement que les wê. Même s’ils sont concernés au premier chef. Car c’est unis, solidaires, dans des actions inclusives, avec la participation de tous les ivoiriens, quelque soit leur région, que nos actions en vue de sauver ce peuple, auront plus de poids et plus d’envergure.
Comment en est-on arrivé là ?
Inutile de tourner autour du pot. La réalité, c’est que :
Cette attaque est la conséquence de la culture de représailles que le régime de monsieur Ouattara a initiées depuis son avènement au pouvoir.
Cette attaque est la preuve éclatante de la fracture sociale que vit le peuple ivoirien et dont nous n’avons de cesse d’évoquer, mais que d’autres refusent de reconnaître en essayant de la dissimuler. C’est la preuve que la réconciliation, telle que prônée par le régime actuel, n’est qu’une simple vue de l’esprit.
Cette expédition punitive, et bien d’autres autres qui ont eu cours dans ce pays et aujourd’hui dans cette zone où monsieur Ouattara vient pourtant d’effectuer une visite d’Etat, montre en vérité, que monsieur Ouattara n’est pas l’homme de la situation. Qu’il n’est pas un rassembleur, car il n’en a tout simplement pas l’étoffe.
Cela démontre une fois de plus qu’il n’y a pas de justice, pas de sécurité et que l’impunité est reine dans ce pays. L’Onu condamne ces attaques et engage des enquêtes ? Soyez sûrs que ces enquêtes ne mèneront nulle part, comme bien d’autres, bien sûr.
Cet évènement parmi tant d’autres, est le reflet de la Côte d’Ivoire, version Alassane Ouattara avec ces « valeurs » qu’il a inculqué à ses partisans: impunité, vengeance, violence, haine et rancœurs ethniques.
Des hommes, massacrés au nez et à la barbe de l’Onuci et des autorités étatiques. Des populations qui se font elles-mêmes justice, en toute impunité. Cela signifie que l’Etat de droit n’existe tout simplement pas dans cette république. Car dans un Etat de droit, le reflexe naturel serait d’aviser immédiatement les autorités compétentes en la matière et de les laisser ensuite jouer leur rôle et non de se faire justice soi-même.
Mais dans cette Côte d’Ivoire, il y a d’une part, ceux qui font mains et pieds pour travestir les faits, en nourrissant leurs partisans d’une Côte d’Ivoire surréaliste et les drames quotidiens des populations qui errent dans la misère, la souffrance, l’injustice et l’insécurité.
De ce énième drame, nous pouvons conclure que nous sommes toujours restés à la case départ, certes. Ce régime imposé aux ivoiriens est finalement dans la logique du « vaincre sans convaincre » les ivoiriens. La fracture sociale s’aggrave nettement. La réconciliation est au point mort. Elle est même morte avant d’avoir vu le jour. Morte par le manque de volonté réelle des gouvernants. Voici donc ce qui arrive, quant on sème l’impunité, l’injustice, les représailles, les expéditions punitives, la traque à ses opposants, la vengeance, la haine. On n’en récolte que les fruits, bien évidemment. Pire, on finit par être imité en cela par ses partisans. Cela est bien la résultante, la marque déposée des régimes incompétents et indignes.
Marc Micael La Riposte