Dr Agbeyomé Messan Kodjo : «Le logiciel de Faure Gnassingbé est programmé exclusivement vers la conservation du pouvoir quoiqu’il en coûte»

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«L’homme n’a rien perdu de sa verve et de se moquer de la condition humaine. Dans sa cachette au milieu d’un champ de maïs, il s’est une fois investi à nous accorder cette interview fleuve. Depuis 2020 qu’il vit dans un décor surréaliste, son mental n’a pas pris de rides. Il se veut combattif et dit à qui veut l’entendre qu’il récupèrera ce que la machine françafricaine dirigée par Emanuel Macron au sommet, Jean -Yves Le Drian et Faure Gnassingbé lui ont arraché par la force : « Sa victoire aux élections de 2020 ». Pêle-mêle, il égrène les différentes étapes de cette lutte. Parle du rôle des ambassadeurs européens et de l’UE : « Ils étaient aussi présents quand la junte de Lomé embastille illégalement ceux qui à bon droit réclament la victoire du Souverain Peuple togolais » lance-t-il. De Faure Gnassingbé il dit qu’il a «il a détruit son pays et brisé sa destinée… » Pour finir, il titille l’élite politique togolaise : « Une partie de l’élite politique du Togo malgré le discours souverainiste n’a pas encore intégrer l’alternance au sommet de l’État » Lecture !

Lynxtogo.info : « Que Dieu bénisse notre cher et beau pays !» C’est le dernier bout de phrase qui a sanctionné le discours de fin d’année de Faure Gnassingbé. Avez-vous une idée de la beauté dont il parle ?

Agbeyomé Messan Kodjo : Peut-être que Monsieur Faure Gnassingbé évoque le Dieu de la Création qui est par essence Amour, Lumière, Vérité, Justice, Paix, Beauté, Bonté, Compassion et Empathie.

Son parcours de vie privée et publique laisse transparaître le contraire mais retourner à la Lumière, à l’Amour et à Dieu demeure la raison d’être fondamentale de toute vie.

Ce qui a compté jusqu’à présent pour le régent de la terre de nos aïeux, c’est sa personne. Une seule phrase résume sa philosophie de vie, alors qu’il parlait de son père « lui c’est lui, moi c’est moi ».

Le Dieu créateur que nous vénérons s’exprime à travers les attributs ci haut déclinés, et rime  avec harmonie et expansion de la vie contrairement à la crise de confiance, la division, la haine, la prédation et la destruction de la nation dont est comptable le régent Faure Gnassingbé.

Les Togolais ont l’impression que le discours de La Baule [prononcé en 1990 par François Mitterrand] sur la nécessité pour les partenaires africains de se démocratiser, ne s’adressait pas à leur pays. C’est aussi votre avis ?

François Mitterrand fut un acteur majeur de la politique française puisqu’il a été ministre de la France d’Outre-Mer pendant la colonisation avant d’accéder à l’Elysée le 10 mai 1981, et avait une bonne connaissance de la politique française en Afrique.

En subordonnant en 1990 l’aide publique au développement à la démocratisions de la vie politique en Afrique, notamment le pluralisme politique et la liberté de la presse, il voulait mettre fin à la dictature des partis uniques en  Afrique. Il n’a cependant pas agi à démanteler la Françafrique cette diplomatie parallèle au service du complexe militaro industriel français, dont les activités ne sont pas compatibles avec la démocratie et la transparence, si bien que trois décennies après ce discours historique à la Baule inspiré par Eric Orsenna, la démocratie patine sur le continent où fleurissent des coups d’État militaires après bien d’alternances politiques à l’exception du Togo. Notre classe politique engluée dans la guerre des ego et la corruption, a brillé par un jeu à somme nulle qui a fait le lit des forces du statu quo liguées contre la Libération nationale du Togo.

Dr Agbeyomé Kodjo, Faure Gnassingbé semble s’être assis définitivement sur les élections de 2020 en dépit des cris des Togolais comme de certains hommes politiques en Occident. Qu’est ce qui fait la force de votre concurrent au lendemain de chaque élection au Togo ?

Le logiciel de Monsieur Faure Gnassingbé est programmé exclusivement vers la conservation du pouvoir quoiqu’il en coûte, une posture dont il tire la substance selon lui de  son père “si vous laissez le pouvoir vous allez le chercher en courant”. Pour ce faire, la violence d’État et la corruption généralisée sont ses principaux leviers d’action.

Pour 2020, nous avons refusé la subornation et résisté à la mise sous éteignoir avec la mise en place du Gouvernement légitime du Togo en exil secondé par l’écosystème Dynamique Monseigneur Kpodzro (DMK). Le jeu est donc loin d’être clos car le Gouvernement légitime du Togo que je préside n’a pas encore dit son dernier mot.

Faure et son gouvernement reconnaissent avoir volé la victoire de l’Alternance, le corps diplomatique accrédité au Togo le confirme. Les partis politiques et la société civile l’attestent même si certains ont opéré un revirement spectaculaire dont nul n’ignore les motifs. Une reconnaissance internationale contestée en France où Emmanuel Macron a été sommé par la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée Nationale française de procéder à un démenti de sa lettre de félicitation qui est un faux grossier. Jean-Yves Ledrian confirmera une année plus tard que son patron a effectivement envoyé un courrier de courtoisie classé secret défense, apportant ainsi la preuve que le courrier lu sur RFI une radio de service public est un faux. Le silence de la France jusqu’à ce jour la ramène au rang des républiques bananières, et son silence par  rapport aux graves violations des droits de l’homme consécutives au scrutin du 22 février 2020 démontre sa complicité active avec la dictature violente du Togo. On note une constante dans la posture de Chirac et d’Emmanuel Macron par rapport à ce régime né dans une rivière de sang qui n’en finit pas. Le peuple togolais sait désormais que l’ennemi de sa liberté est la France et s’en remet à Dieu, l’architecte de l’éclatante victoire du 22 février 2020 du souverain peuple togolais. Je peux affirmer que la révolution électorale et pacifique du 22 février 2020 connaîtra un heureux dénouement et qu’il n’y aura aucune consultation populaire au Togo avant la transmission du pouvoir au président légitime du Togo. Pour mémoire la DMK a remporté le scrutin avec un score historique pour reprendre les termes des barons d’un parti politique important de l’échiquier politique togolais et ceux de l’ambassadeur d’Allemagne au Togo.

La politique de la France au Togo, et plus largement sur le continent, vous semble-t-elle aujourd’hui prisonnière de sa peur de perdre ses zones d’influence ? Êtes-vous prêt à tendre la main à d’autres puissances autre que, la France une fois au pouvoir ?

Le malaise dans les relations France-Afrique était bien installé avant la crise géopolitique consécutive à la guerre Russo-Ukrainienne. Emmanuel Macron a commis l’erreur de nommer Jean-Yves Ledrian, un homme des services secrets, spécialiste des coups tordus aux affaires africaines contribuant ainsi à déconstruire méthodiquement sa vision exprimée dans son discours à l’université de Ouagadougou.

Aujourd’hui, la situation de la France est compliquée dans bon nombre de pays africains,  il lui appartient de réparer ce qui doit l’être avant qu’il ne soit trop  tard.

Pour le Togo, il doit faire un démenti formel pour dénoncer l’usage frauduleux de la signature du président de la République française car il serait indigne de sa fonction s’il ne se démarque pas de cette méthode de voyou. Nous travaillerons une fois aux affaires avec tous les partenaires sur la base de l’équilibre des intérêts et du respect mutuel. À l’heure où tous les peuples aspirent à davantage de souveraineté, nos partenaires doivent impérativement intégrer l’urgence d’une géostratégie de coopération à somme positive sous peine d’être rejetés par nos populations notamment la jeunesse africaine actuellement très éveillée.

Avez-vous une idée du rôle des ambassadeurs européens et de l’UE dans le pourrissement de la crise actuelle au Togo ?

Ces ambassadeurs du G5 devront s’expliquer un jour sur leur complicité dans la survenue du quintuple coup d’État électoral, militaire, judiciaire, diplomatique et médiatique dont est comptable le pouvoir prédateur multi putschiste. Ils ont été présentés comme garants du bon déroulement du scrutin. Ils étaient tous présents à Lomé quand le soir du scrutin mon domicile fut encerclé tout comme celui du prélat sans élever la moindre protestation. Ils étaient là quand 24 heures après le scrutin en violation du code électoral et du chronogramme officiel de la CENI, des résultats inversés furent proclamés avec la complicité des chefs de mission d’observation électorale (MOE)  de l’Union Africaine, et de la CEDEAO, stipendiés. Ils étaient présents quand après avoir refusé le marché du régent Faure Gnassingbé qui voulait acheter mon silence, je fus l’objet d’une procédure judiciaire illégale et irrégulière lancée contre ma personne. Ils étaient aussi présents quand la junte de Lomé embastille illégalement ceux qui à bon droit réclament la victoire du Souverain Peuple togolais.

Ils admettent la grave crise que traverse le Togo au lendemain de la présidentielle, et ont demandé la mise à leur disposition d’un mémorandum de sortie de crise. Depuis ils l’on rangé au placard et préparent honteusement de concert avec la régence mafieuse de nouvelles élections sans aucune énucléation des problèmes soulevés par les précédentes élections tripatouillées.

La mise en œuvre de l’arrêt n° ECW/CCJ/JUD/11/2022 du 24 mars 2022 de la Cour de Justice de la CEDEAO est le cadet de leur souci, les masques sont tombés, et leur double langage mis à nu. Ils ont une responsabilité morale et politique dans le pourrissement de la situation. De toutes les façons, le souverain peuple togolais va se libérer indépendamment d’eux, et recouvrer sa souveraineté confisquée.

Gilbert Bawara dit que l’exil de Mgr Fanoko Kpodzro est volontaire. Avez-vous une idée des souhaits du prélat pour son retour définitif  au Togo ?

Je ne commente pas les propos d’un personnage qui est prêt à tout pour rester au pouvoir y compris planifier vainement l’assassinat du réel Vainqueur du scrutin. Je  sais une chose, Mgr KPODZRO a quitté le Togo quand sa vie et celle de son assistant personnel furent menacées. Ils reviendront sous peu au Togo quand les usurpateurs auront rendu au Souverain Peuple togolais sa souveraineté.

Vous avez été l’objet d’une procédure judiciaire par le pouvoir Togolais et blanchi par la Cour de Justice de la CEDEAO. Ni les présidents de cette institution encore moins de l’UA comme les ambassadeurs en poste à Lomé ne semblent s’intéresser au dossier. Comment l’expliquez-vous ?

Un véritable scandale judiciaire. Poursuivre en plein processus électoral un candidat pour des propos de campagne pour l’empêcher d’être en capacité de réclamer sa victoire alors que le procureur avait les moyens de vérifier les faits auprès de ses collègues magistrats qui ont assumé les présidences des Celis et qui pouvaient lui confirmer le véritable gagnant. Au surplus, les procès-verbaux du décompte des résultats étaient encore dans les préfectures quand Monsieur Faure Gnassingbé se faisait autoproclamer vainqueur de la présidentielle.

Le Procureur devrait poursuivre Monsieur Faure Gnassingbé pour  l’introduction dans le processus électoral des bulletins prévôtés que tous les acteurs politiques ont constaté et dénoncé. C’est le même procureur qui m’a abusivement fait incarcérer pour des faits que j’ignore dans l’histoire des incendies des marchés de Lomé et de Kara  sans la levée de mon immunité. La justice doit être rendue au nom du peuple et non au profit des intérêts partisans.

Peut-on parler la théâtralisation de la vie démocratique au Togo quand de père en fils on dirige le pays avec une suite d’élections truquées et du soutien des forces endogènes comme exogènes ?

Une partie de l’élite politique du Togo malgré le discours souverainiste n’a pas encore intégrer l’alternance au sommet de l’État, si bien que même si l’évidence apparait, elle n’hésite pas à servir de béquille pour le statu quo.

Tenez, j’en connais un qui fut le premier à me féliciter le 23 février 2020 alors que je me reposais. Il a rédigé un communiqué pour saluer la victoire de la DMK et a affirmé que c’est une victoire collective de l’opposition. Rappelons qu’avant le scrutin il a affirmé sur les réseaux sociaux que sur les 3 précédents scrutins Monsieur Faure Gnassingbé n’a jamais dépassé la barre de  20%.

Curieusement c’est lui qui se répandait après que c’est la faute d’Agbéyomé que l’opposition est réduite à moins de 30% et noircir le candidat de la DMK oubliant de dire qu’il avait supplié le Prélat de le choisir arguant que selon Kpatcha Gnassingbé, il était le seul à faire l’unanimité du nord au sud. Nous oublions vite que Seul le Dieu créateur a le pouvoir et l’attribue au travers du peuple à qui Il veut. Personne ne peut changer le Plan de Dieu pour des intérêts partisans.

2020, c’est 76% de taux de participation, et il faut être chambré de croire que pour le bilan de monsieur Faure Gnassingbé et pour un quatrième mandat les Togolais lui ont accordé un suffrage qu’il n’a jamais eu auparavant au cours des trois précédents scrutins présidentiels.

Pourquoi Faure Gnassingbé ne réussit-il pas là, où Patrice Talon où Paul Kagamé réussissent sur les plans économiques ?

Je peux avoir la prétention de connaitre Monsieur Faure Gnassingbé, c’est un véritable imposteur. Il affirme avoir obtenu dans la prestigieuse Georgetown University, un diplôme de MBA en gestion mais est incapable de s’exprimer en anglais, et pourtant dans cette université les cours sont dispensés en anglais. Il manque d’Amour pour lui-même et son prochain, évolue dans une grande pénurie mentale avec un déficit de vision stratégique et prospective pour le Togo. Enfin il est incapable de s’assumer en prenant le lead, mais adore le luxe et la vie de prince. Le service de l’État est incompatible avec ce style de vie. Raison pour laquelle il a détruit son pays et brisé sa destinée car il n’a pas la vocation de faire émanciper son peuple. Le rapport avec les chefs d’État que vous évoquez se situe dans cette différence de taille.

Merci de nous avoir accordé cette interview

C’est plutôt à moi de vous remercier avec mes meilleurs vœux pour l’année 2023 à toutes les filles et à tous les fils du Togo tout entier, à vous-même, vos proches et vos collaborateurs.

Interview réalisée par Camus Ali

 

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