Boko Haram, l’a-t-on remarqué, ne compte ni ne pleure ses morts
Toute l’Afrique est désormais menacée d’invasion par les armées de l’Etat Islamique, dont le projet de création d’un califat obscurantiste mondial menace autant le caractère pacifique de l’Islam africain, la coexistence pacifique des religions africaines que la paix et la sécurité de l’ensemble des populations du continent. Devant la gravité de la menace, rien ne détonne et n’étonne pourtant autant que le vide de pensée stratégique qui augmente les pouvoirs de la peur, de l’angoisse et des fantasmes les plus échevelés au cœur des opinions africaines. Non pas que des écrits, contributions et analyses manquent vraiment, sur le phénomène Boko Haram et les ambitions de la nébuleuse fanatique qui veut soumettre le monde au diktat du littéralisme religieux, du machisme abject et du plus sommaire des monothéismes, où la drogue et les violations de droits humains les plus ostentatoires deviendraient expériences banales dans nos sociétés. Ce qu’il paraît incontestable de souligner, c’est qu’il ne se dégage pas une vue d’ensemble du phénomène Boko Haram, qui puisse permettre aux Etats et aux citoyens africains concernés de converger vers des solutions communes parce que solidaires et assurées, et qui se traduiraient par l’annihilation à court terme de la secte criminelle qui rampe par-delà leurs frontières, comme pour en montrer paradoxalement l’incongruité historique persistante.
Nous nous sentons dès lors en obligation de nous confronter sérieusement aux cinq questions suivantes : I) Comment opère la nébuleuse militaro-religieuse de Boko Haram ? II) Comment se structure la réplique des Etats africains face à Boko Haram ? III) Quelles sont les insuffisances spécifiques des Etats du Cameroun et du Nigéria face à la secte Boko Haram ? IV) Quelles sont les solutions nécessaires et possibles contre la secte Boko Haram ? V) Que faire au final de l’expérience de cette guerre asymétrique imposée notamment à l’Etat du Cameroun et à l’Etat nigérian par la secte Boko Haram ? Il nous semble que tout intellectuel s’intéressant à la crise géostratégique africaine contemporaine devrait répondre courageusement et objectivement à ces questions, afin de rendre possible une lisibilité et une visibilité de l’espérance d’une Afrique résolument capable d’envisager sereinement ses progrès sociaux, économiques, culturels et politiques présents et futurs. Ce que nous nommons donc ici « L’art de vaincre Boko Haram » se propose d’être une contribution désintéressée à la sauvegarde d’un processus démocratique africain plus que jamais vulnérable et menacé, autant par les forces contradictoires de l’intérieur que de l’extérieur de l’Afrique, notamment autour du duo camerouno-nigérian, dont la cohésion sonnera la fin du glas obscurantiste dans la sous-région d’Afrique centrale.I
Du mode opératoire de Boko Haram
Tirons les choses bien au clair pour tous. L’Afrique est confrontée à un nouvel impérialisme politico-religieux, après les impérialismes culturels, économiques et politiques venus d’Occident et du Moyen-Orient des 15èmeau 20ème siècles. Nous avons ici encore, une nouvelle modalité de la sempiternelle pulsion humaine de dominer d’autres humains, afin de s’accaparer non seulement des ressources naturelles, mais aussi des ressources humaines, psychiques et spirituelles des dominés. Observée sur cette échelle longue de l’Histoire multiséculaire de l’Afrique, la démarche bokoharamique n’est donc qu’une des conséquences de la faible intégration sociale, économique et politique du continent africain en ces débuts du 21ème siècle. Offerte par ses trop nombreux conflits internes et ses nationalismes narcissiques à la prédation des puissances non-africaines, l’Afrique contemporaine se présente comme l’exutoire idéal de tous les désirs d’expansion et d’accumulation primordiale de notre temps. Les choses se clarifient dès lors. La secte Boko Haram, qui a avoué sa connexion directe à l’Organisation de l’Etat Islamique basé en Irak, est le département africain d’un projet mondial né au cœur du sunnisme-wahhabite-salafiste d’Arabie Saoudite. Ce projet est connu : l’instauration d’un califat mondial islamique, Dar-El-Islam, qui s’imposera par la prédication, pour ceux qui s’y plient, ou par la guerre, pour ceux qui ne se laissent pas convaincre par la prédication. Le Dar-El-Harb, pays de la guerre, est le sort réservé aux peuples, Etats et individus réfractaires à la doctrine islamique du sunnisme-wahhabite-salafiste. Ils seront soumis ou écrasés. L’idéologie est binaire. Quitte ou double. Ami ou Ennemi. Mort violente ou vie soumise. On ne négocie pas avec la secte. On la vainc ou on y adhère, on la fuit ou on en périt.
Quels sont cependant les moyens de la secte Boko Haram ? Il y a des moyens matériels, des moyens intellectuels et des moyens humains. Les finances et les armes de Boko Haram sont approvisionnées par les réseaux de l’Etat Islamique, par les élites pétrolières du sunnisme-wahhabite-salafiste, par des élites obscurantistes militaro-politiques des Etats Africains qui veulent déstabiliser les démocraties, par les soutes d’armes dévalisées aux Etats dévastés, par les nébuleuses transsahariennes du commerce de la drogue et des armes qui vivent de l’entretien permanent de la guerre, et par les lobbies internationaux de l’industrie de l’armement qui vendent désormais toutes les armes possibles au plus offrant, sans considération idéologique ou morale quelconque. La formation militaire des soldats de Boko Haram est cependant fort sommaire, compte tenu des délais courts que le harcèlement imposé à la secte lui accorde entre le temps de la préparation et celui de l’action. L’argumentaire idéologique de Boko Haram est relativement simple : celui qui tue des Infidèles pour Allah aura droit à la vie éternellement heureuse au Paradis des Justes. Le but de l’existence humaine est d’instaurer le Califat Islamique mondial. Mais la secte, bien que superarmée, est contrainte de recourir aux moyens les plus extrêmes de la confrontation militaire : l’attaque-suicide et la projection incontrôlée de bombes dans les zones urbaines. Les moyens humains de Boko Haram sont obtenus enfin, par l’instrumentalisation des misérables abandonnés par les Etats africains, par l’endoctrinement sectaire et par le rapt continu des personnes isolées des dispositifs de défense nationaux. D’un bout à l’autre, la violence est la cause et la finalité de l’action bokoharamique. Boko Haram transforme une personne ordinaire en bombe. Le corps en munition. Ici, la volonté de tuer à foison se fait raison de vivre. Boko Haram fabrique méchamment et perfidement des hommes-momies, des zombies.
La prédication et la guerre sont deux aspects du même modus operandi morbide dont le but ultime est la suprématie sur un territoire transcontinental impressionnant. La tactique et la stratégie sont liées chez Boko Haram. D’un point de vue tactique, comme le signale le drapeau sombre de l’organisation sectaire, la mort gratuite et violente est à la fois l’emblème, la devise et le mot de passe de Boko Haram. Suprême détresse de l’homme, la mort signe l’impuissance absolue de la conscience. Celui qui peut la donner sans limite se donne dès lors un pouvoir absolu sur ses victimes réelles et potentielles. La psychologie de la mort colportée par Boko Haram est très archaïque, mais aussi fort subtile. Elle terrorise par la mort en banalisant la mort. Par-là, elle inverse les polarités du bon sens universel en normalité du monstrueux. Elle sacralise la déshumanisation par la mort, qui se donne comme la consécration des forces de la nuit sur celles du jour. La nuit, cœur de tous les fantasmes lugubres de l’homme, investit ainsi le jour, l’assombrit de tristesse et fait de la vie quotidienne, une succession de deuils répétés jusqu’à la disparition sans véritable deuil de l’adepte. On entre en endeuillé dans Boko Haram, on y vit en endeuillant et on sort sans deuil. Boko Haram, l’a-t-on remarqué, ne compte ni ne pleure ses morts. Contre toute attente, la secte se contente de s’en glorifier, dans un culte posthume et démoniaque ou le cynisme le plus cruel fait office de sainteté. Démoniaque sainteté ou le mal banalisé se traduit en ricanements glauques et hystériques.
La tactique consiste à donner spectaculairement et aveuglément la mort, aux musulmans, chrétiens, juifs, animistes, athées de tous pays, afin de contraindre les populations à fuir les zones de prédation envisagées par Boko Haram ou à y demeurer sous la férule totale des maîtres du lieu. La stratégie consiste, à long terme, à doter l’Etat Islamique mondial d’un Hinterland aussi immense que l’Union Européenne, la Fédération Russe, la Chine ou les Etats Unis. Avant d’autres confrontations. Ledit territoire mondial du Califat Islamique en construction sera susceptible de remplir au moins trois fonctions : a) Assurer l’autonomie de l’EI en ressources naturelles stratégiques (pétrole, uranium, manganèse, fer, bauxite, or, argent, cuivre, etc.), mais aussi en ressources agricoles et écologiques ; b) Assurer le ravitaillement de l’EI en ressources démographiques humaines suffisantes pour rentrer dans la géostratégie des grands ensembles humains mondiaux ; c) Assurer le contrepoids de l’Etat Islamique face aux USA, à l’UE, à la Fédération Russe, à la Chine, dans la négociation d’un nouvel équilibre mondial.
Ne faut-il pas dès lors comprendre une bonne fois pour toutes que Boko Haram fait bel et bien de la politique, et même de la géopolitique contre les peuples, nations, républiques et démocraties africaines en cours de construction ? Loin de souscrire à la thèse répandue d’une secte sans orientation, sans projet, sans vision, il faudrait que nous prenions conscience que l’Etat Islamique veut faire sens en Afrique à sa manière. Il veut instaurer une domination nouvelle, avec ses idéaux et ses buts propres. L’obscurantisme de Boko Haram, pour le dire autrement, n’est pas obscur pour Boko Haram. Or comment se structure donc jusqu’ici la réponse des Etats Africains à l’avancée dévastatrice de Boko Haram ?
II Les réactions structurelles des Etats Africains contre Boko Haram : un réseau de stratégies disparates et déstructurées
On l’a aisément constaté. Les Etats Africains auront procédé exactement de manière inverse à la réalité tangible de Boko Haram. Alors qu’ils avaient affaire dès le départ, à une multinationale impériale, leur réflexe premier a été de se recroqueviller dans les quatre travers géopolitiques les plus funestes de l’Afrique contemporaine : le nationalisme postcolonial, l’individualisme militaire, l’opportunisme antidémocratique et anti-républicain, l’anticolonialisme dogmatique. Ce n’est que par la suite qu’on a vu les Etats Africains, réunis hors d’Afrique à Paris, comme de juste, esquisser un début de solution régionale et continentale au projet impérial bokoharamique. Mais ici aussi, les efforts de coordination actuellement entrepris sous la tutelle franco-américaine par le Cameroun, le Nigéria, le Bénin, le Togo, le Tchad, le Niger, le Mali, le Burkina Faso, et la Côte d’Ivoire révèlent aussi un réseau de stratégies disparates et déstructurées en raison même des quatre travers ci-dessus évoqués, auxquels nous ajouterons volontiers l’appétit exacerbé des puissances non-africaines en général pour une exploitation abusive des matières premières stratégiques africaines, et le pouvoir incontrôlé des lobbies industriels d’armement qui nourrissent impitoyablement toutes les guerres du monde au nom de l’Argent-Roi. Dans les lignes qui suivent, nous analyserons donc six travers caractéristiques problématiques de la réplique africaine et mondiale contre l’engeance bokoharamique. Récapitulons-les : le nationalisme postcolonial, l’individualisme militaire, l’opportunisme anti-démocratique, l’anticolonialisme dogmatique, la cupidité des puissances mondiales envers les matières premières africaines, le cynisme des lobbies internationaux de vente d’armes essentiellement basés en Occident.
Le nationalisme postcolonial face à Boko Haram : il aura consisté, pour les Etats concernés, à considérer pendant toute la période d’incubation de l’Etat Islamique au Nord-Mali, comme au Nord-Nigéria, que la secte Boko Haram ne les concernerait que quand elle frapperait leurs territoires. A quoi peut répondre, dans une Afrique attaquée par-delà ses frontières, la revendication chauvine des frontières héritées de la colonisation occidentale, elle-même barbarie sans nom ? A la surdité des monarques républicains africains attachés à leurs fauteuils jouissifs ou à une incapacité de penser le monde en devenir ? Il faut sans doute envisager tous ces facteurs pour comprendre cette incongruité politique et historique. L’attitude camerounaise envers les prémices de Boko Haram au Nigéria aura été pendant longtemps celle de l’autisme et de l’attentisme. On voyait longtemps dans Boko Haram un problème typiquement nigérian. L’attitude des Etats Ouest-africains, au moment où le Mali était attaqué par les jihadistes, ne fut pas différente. On ne vit aucune armée africaine en première ligne avant l’armée française.Comment ne pas souligner malgré tout sur ce point, le courage exceptionnel de l’armée tchadienne, qui fut la seule armée africaine à se projeter en temps et heure sur le théâtre malien, comme elle aura finalement été décisive dans le reflux récent de la secte Boko Haram dans le contrôle des villes du Nord-Est Nigéria ?
.L’individualisme militaire face à Boko Haram : Le pendant du nationalisme postcolonial des Etats confrontés à Boko Haram, c’est l’individualisme militaire, se traduisant par la prétention de chaque Etat à en découdre tout seul face à la secte pourtant transfrontalière. Par exemple, le Nigéria, pendant longtemps, refusera au Cameroun le droit de poursuite contre les membres de la secte Boko Haram dans son territoire. Pourtant, en débandade par plusieurs fois face à l’ennemi, on verra des régiments nigérians entiers se réfugier provisoirement au Cameroun avant de rebrousser chemin. Le même Nigéria accordera toutefois ledit droit de poursuite à l’armée tchadienne, avec des succès évidents, qui montrent que la secte aurait davantage, voire définitivement reflué si un dispositif de poursuite collective était vraiment activé. Les résidus des longues périodes de méfiance entre les régimes politiques africains seront passés par là. De part et d’autres, on soupçonne le régime voisin de vouloir soutenir des opposants politiques au détour d’une lutte contre l’ennemi commun. On voit d’un mauvais œil les succès de telle armée contre Boko Haram, parce qu’ils augureraient de sa capacité à vaincre la sienne. Une stratégie militaire disparate peut-elle vaincre un ennemi asymétrique, qui joue consciemment des failles avérées de la cohésion régionale des armées africaines ? Que nenni.
L’opportunisme antidémocratique et anti-républicain : Le phénomène a deux versants. Il s’agit, d’une part, d’une propension des régimes Africains attaqués par la secte Boko Haram à profiter des circonstances pour réduire davantage le socle des libertés fondamentales de leurs concitoyens, au nom de l’état d’exception engendré par la confrontation avec le terrorisme. D’autre part, l’opportunisme antidémocratique prendra aussi les formes sibyllines du cynisme de certains opposants politiques, qui voient dans la progression criminelle de Boko Haram, un moyen inespéré d’affaiblir les autocrates africains au pouvoir, afin de précipiter l’alternance politique. Ne faut-il pas résolument faire comprendre aux hommes politiques des pouvoirs et oppositions africaines qu’on ne peut rien tirer de bon du projet bokoharamique ? En flétrissant davantage les libertés citoyennes comme l’ont par exemple fait les autorités camerounaises, à l’occasion de la nouvelle loi contre le terrorisme, on désolidarise une partie importante du peuple envers les forces armées nationales. Mais en espérant de la nébuleuse Boko Haram, qu’elle vienne par exemple faciliter l’alternance politique, au Cameroun ou au Tchad, on ne risque surtout pas de sortir du cercle vicieux de la domination autocratique. L’opportunisme antidémocratique et anti-républicain africain ne se fait-il pas dès lors l’allié objectif de Boko Haram, même à son corps défendant ?
L’anticolonialisme dogmatique africain : Cette nouvelle approche de la guerre contre Boko Haram affirme que la secte n’est qu’un instrument du projet de recolonisation occidentale de l’Afrique afin d’organiser une plus grande braderie de ses matières premières et ressources humaines. Par conséquent, la guerre contre Boko Haram est présentée comme la défense de la patrie africaine contre l’ogre franco-américain. Telle est la thèse récurrente des idéologues de la chaîne de télévision Afrique Medias, qui aboutit à une incongruité logique et idéologique effarante. Des régimes politiques établis, comme celui du Cameroun, avec l’aide active de la France coloniale et postcoloniale, et parfois au mépris des revendications souveraines des peuples, sont désormais présentés comme des victimes de la France, au grand dam de la France elle-même, qui n’en revient pas d’être l’objet d’une telle ingratitude. Ne faut-il pas amener les Africains à la reconnaissance objective de la spécificité du projet de Califat Mondial Islamique dont Boko Haram est le représentant évident en Afrique centrale ?
La cupidité des grandes puissances mondiales : Prises à la gorge par leurs impératifs socioéconomiques immédiats, les grandes puissances mondiales et les puissances émergentes que sont les USA, l’UE, La Fédération Russe, La Chine, L’Inde, le Brésil, le Japon, l’Afrique du Sud, ou même le Nigéria, sont aveuglées par les possibilités d’exploitation immédiates et fructueuses des réserves pétrolières, minières et végétales de la planète. Comme l’a bien montré Joseph Stiglitz dans Le triomphe de la cupidité (2010), le marché-roi, l’obsession du court terme, la dérèglementation et la libre circulation sont les facteurs principaux de la crise économique mondiale. Enracinée dans une perte de sens moral sans précédent, cette crise nous impose de repenser les priorités d’un monde en processus d’autodestruction incontrôlée, sous l’aveuglement des intérêts de court terme. Comment vaincre Boko Haram avec des puissances mondiales qui n’investissent que là où elles sont sûres de tirer immédiatement de gros bénéfices économiques et le renforcement de leurs positions géopolitiques particulières ?
Le cynisme des lobbies industriels de l’armement : Il consiste à vendre les pires armes au plus offrant, quelle que soit son idéologie et ses projets, quitte à vendre également des armes ultra-défensives aux adversaires. La doctrine du preventive war qui a inspiré la guerre lancée par l’administration Bush en Irak, était adossée sur les pressions et orientations militaro-industrielles, du puissant lobby américain de l’industrie militaire, dont la boulimie en débouchés d’écoulement de produits finis est sans mesure. Il faudra cependant relever qu’il existe évidemment une corrélation évidente entre la cupidité de certaines grandes puissances et le type d’armement qu’elles vendent aux différents groupes armés. Tout se passe en effet comme si, en entente avec les grandes puissances politiques, les lobbies d’armement ne vendaient aux uns et aux autres que des armes susceptibles de les maintenir à égale capacité de nuisance sur le terrain. Y aurait-il là, une manière de fragiliser les Etats Africains dans la négociation de leurs matières premières avec les grandes puissances, de telle sorte qu’ils révisent indéfiniment leurs ambitions de profits à la baisse ? Cette hypothèse est loin d’être absurde, puisque des discours officiels en témoignent. Comment comprendre autrement la complainte du Président Buhari en visite aux Etats-Unis en ce mois de juillet 2015, et qui s’est publiquement plaint des autorités américaines en arguant que le refus de vendre au Nigéria toutes les armes sophistiquées dont il a besoin pour vaincre Boko Haram est une manière de favoriser la capacité de nuisance de Boko Haram ?
Il est donc possible de conclure ce deuxième axe de notre analyse. Les réponses des Etats Africains face au phénomène bokoharamique souffrent d’incohérences internes et externes suffisamment graves. Si les Etats Africains n’y font pas urgemment face, la réalisabilité du projet de Califat Mondial Islamiste de Boko Haram ne sera qu’une question de temps. D’autant plus que la secte mondiale a décidé de déchirer les sociétés africaines du dedans, par les personnes-bombes et la peur devenue forme psychologique d’approche collective du réel.
Les parties III, IV et V de la présente étude s’appesantiront sur les faiblesses structurelles spécifiques de la défense camerounaise et niégriane, permières armées prises à l’étau de Boko Haram ; les solutions à mettre d’urgence en œuvre contre Boko Haram et enfin, le conflit de civilisation que l’islamisme sunnite-wahabbite-salafiste (formule génétique de Boko Haram) impose non seulement à l’Islam et aux autres religions africains, mais plus largement, à la civilisation politique africaine du 21ème siècle. Affaire à suivre donc.
Voir le récit de l’attaque de Maroua,http://www.jeuneafrique.com/249214/politique/terrorisme-maroua-choc-de-boko-haram/
On lira utilement Pauline Guibbaud, Boko Haram, histoire d’un islamisme sahélien, Paris, l’Harmattan, 2014 ; Loretta Napoleoni, L’Etat Islamique : multinationale de la violence, Paris, Calmann-Lévy, 2015 ; Samuel Laurent, L’Etat Islamique : Organigramme, Financements, Filières, Paris, Seuil, 2014 ; Olivier Hanne et Thomas Flichy de la Neuville, L’Etat Islamique : anatomie du nouveau Califat, Editions Bernard Giovannangeli, 2014.
http://etudesgeostrategiques.com/tag/boko-haram/
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/afrique/nigeria-les-methodes-de-boko-haram-pour-semer-la-terreur_1615923.html
http://www.jeuneafrique.com/226713/politique/boko-haram-tat-islamique-armes-fran-aises-et-mercenaires-sud-africains/
« Comment Boko Haram prospère sur les inégalités, l’analphabétisme, la corruption et l’arbitraire »
http://www.bastamag.net/Comment-Boko-Haram-prospere-sur-les-inégalités-l’analphabétisme-la-corruption-et-l’arbitraire
http://www.lefigaro.fr/international/2015/01/28/01003-20150128ARTFIG00419-l-afrique-del-ouest-veut-s-unir-contre-boko-haram.php
http://www.jeuneafrique.com/248649/politique/cameroun-plus-de-cent-refugies-nigerians-arrivent-jour-nord-pays/
http://www.jeuneafrique.com/35267/politique/cameroun-paul-biya-accus-d-instrumentaliser-une-loi-antiterroriste-des-fins-politiques/; voir aussi http://www.rfi.fr/afrique/20150722-tchad-inquietude-opposition-projet-loi-anti-terrorisme-attentats-boko-haram-saleh-k/; par opposition, voir en Tunisie, http://www.jeuneafrique.com/249219/politique/tunisie-parlement-debat-dune-nouvelle-loi-antiterroriste/
Voir Franklin Nyamsi , in Pour un anticolonialisme critique & contre l’anticolonialisme dogmatique, Abidjan, Balafons, 2012.
http://www.cercledesvolontaires.fr/2014/07/23/le-lobby-de-larmement-au-coeur-des-institutions-europeennes-entretien-avec-david-cronin/;http://probe.20minutes-blogs.fr/archive/2008/10/25/lobby-de-l-armement-a-qui-profite-la-guerre.html;http://www.planetenonviolence.org/L-Union-Europeenne-et-l-ouverture-du-marche-de-l-armement-Influence-du-lobby-militaro-industriel-sur-les-decisions_a811.html;http://www.lepoint.fr/monde/etats-unis-ces-milliardaires-qui-veulent-flinguer-le-lobby-pro-armes-27-08-2014-1856958_24.php;
Franklin Nyamsi