Le procès Gbagbo est comme une cave à secrets. Tous les jours des faits nouveaux. Des interrogatoires et contre-interrogatoires qui révèlent des détails croustillants et significatifs. Faux certificat médical. Des témoins sans témoignages. Des témoins disparus. Des témoins migrants. Des témoins masqués ou invisibles, mais menteurs, qui font des aveux. Une procureure en villégiature. Un substitut du procureur versatile. Un juge-président colérique. Des accusateurs sans éléments probants à charge. Seulement des récits divergents et contradictoires. Une représentante des victimes « hissée au rang de second procureur. » Une défense percutante et déstabilisatrice.
Un amalgame d’actes, de faits et de rôles, qui rendent difficile le choix des mots qui conviennent pour décrire ce qui se passe à La Haye. On flippe facilement des éléments juridiques aux faits de non droit. Ce cocktail donne à ce procès à rebondissements le titre peu honorifique de Procès de la honte.
Vendredi 5: Temoin P. 547
P. 547 est un témoin à charge. Il serait selon sa fiche descriptive l’un des 54 blessés de la marche du 16 Décembre 2010 lancée par Soro Guillaume sur la Radio-télévision Ivoirienne. Une procession violente qui, à croire l’accusation aurait fait 45 morts.
Vendredi 5, P. 547 qui dépose depuis le 3 contre le président Laurent Gbagbo et son ministre de la jeunesse, Charles Blé Goudé, est sous le feu du contre-interrogatoire de l’avocat Britannique Me Andreas O’Shea. Ce dernier vise un but. Chercher les contradictions et les failles dans le récit de ce témoin sur la soirée électorale dont il aurait été l’un des acteurs ayant empêché les gendarmes à s’emparer des urnes.
Les contradictions dans le discours de P. 547 qui sont plutôt des mensonges titillent les sens des accusés. D’un sourire à un rire franc, les prévenus se lâchent en écoutant le non-sens de ce témoin-chargeur. Il n’en fallait pas plus pour faire réagir Eric Mc Donald, le substitut du procureur. Tourné vers le juge-président Cuno Tarfusser, les bras balayant l’air, comme un gosse cherchant le soutien ou la compassion d’un parent, il accuse « Les accusés sont en train de rire. » Puis s’écrie: « c’est quelque chose de grave! Il n’y a rien de marrant ici dans ce procès. C’est le début du procès, et ce sont des questions graves! » Le ‘père’ Cuno vole à son secours. Il évoque le « manque de respect envers ceux qui sont [dans la salle]et bien sûr aussi le témoin. »
Me O’Shea ne laisse pas passer. Il rappelle au juge Italien aveugle ce qu’il ne voyait pas. « Je voudrais dire que le témoin aussi rigolait. » Puis prévient. « Je ne dis pas qu’il faut le faire, mais qu’on le verse au procès-verbal. » Le juge partial Tarfusser rebondit. En même temps qu’il tente de plonger la défense, il s’exerce à sauver du naufrage les accusateurs. Il explique. « Les accusés doivent se tenir. Le témoin a des réactions, il est sous stress, il a des émotions, et ça, on peut le comprendre. » Tarfusser et la CPI énoncent là une nouvelle thèse en psychologie judiciaire. Théorie qui affirme qu’on serait plus confortable dans le box des accusés que dans celui des témoins. Qu’est-ce que la CPI n’inventera-t-elle pas pour condamner le président Gbagbo?
Gbagbo, Shlomit, et le Rire
Le rire est l’une des particularités du président Gbagbo. Comme tous les panafricains, Shlomit Abel le sait. A propos de ce caractère distinctif du Woody, elle écrivait en 2011, « Cher président, C’est votre rire qui m’a fait vous aimer et m’attacher à vous: un rire franc, net, contagieux!… Oui, cher président, votre rire c’est vous, un rire franc, naturel, pas sophistiqué ! Et je peux vous imaginer aussi intimidé, embarrassé, mais je ne vous vois pas avec un sourire gêné, de mise, forcé, mal à l’aise, un sourire confit en bonnes œuvres et bonnes intentions, comme celui que nous distillent tous les journaux, depuis que c’est Mr Docteur en Economie qu’on nous a installé sur votre siège! » Dans sa missive, Shlomit attribuait au Woody « le rire tranquille, le rire d’Isaac, le rire de Dieu » qui égaille sa face.
Tout a fait le contraire du « visage austère, crispé, » des antiGbagbo comme celui des Mc Donald et Tarfusser. « Des gens qui veulent prouver à tous l’importance de leur charge, le poids de leurs responsabilités par leur mine patibulaire; le visage de ceux qui ne prennent plus le temps de rire, ni même de sourire, sinon sous forme de rictus! » écrit Shlomit Abel.
Rire de Bon Cœur
Laurent Gbagbo n’a pas de problème pour rire tous les jours, mais c’est peut-être le problème des juges de la CPI et des avocats du bureau du procureur. Ces gens devraient oser rire. Car le rire a beaucoup de bienfaits.
D’après le Dr. William Fry, 1 minute de rire équivaut à 10 min d’aviron. C’est dire que rire c’est comme faire un exercice physique. Dr. Michael Miller de l’université du Maryland–Nord-Est–affirme « qu’une bonne dose quotidienne de rire peut avoir des effets comparables que l’exercice physique pour le système cardiovasculaire en stimulant la circulation sanguine. » Il faut donc rire de bon cœur. C’est une arme efficace dans la prévention des crises cardiaques, utilisée dans de nombreux services de cardiologie d’hôpitaux Américains. Rire permet de décompresser. C’est un anti-stress. Un Réducteur d’anxiété. Un réducteur de douleur car en riant, on sécrète des endorphines. Donc un bon moyen de dominer ses tensions.
Le rire renforce le système immunitaire. Dr. Lee S. Berk de l’Université de Loma Linda–Californie–, fait remarquer que le rire contribue à accroître le taux d’anticorps–Immunoglobuline A, augmentation des globules blancs–dans les muqueuses du nez et des voies respiratoires. Ces anticorps sont reconnus pour leur capacité protectrice contre les virus, les bactéries et autres micro-organismes. Des études en relation avec le rire, la respiration et l’insomnie, montrent que « dans tous les cas d’insuffisance respiratoire et d’emphysème, le rire amène une amélioration, » affirme Dr. Tall Schaller. « Le rire qui provoque un massage du diaphragme et qui améliore la digestion, procure le sommeil » déclare Dr. Rubinstein. Ainsi le rire facilite le passage de l’état de veille à celui de sommeil.
Au-delà, le rire contribue à la socialisation. Il développe les relations et augmente la confiance en soi et la positivité. Il équilibre loisir-travail et la vie affective. Et donc permet de vivre mieux et plus longtemps.
Le rire peut donc dans une cour comme celle de la CPI ou les tensions, la fatigue, et le stress, règnent sur tout le monde, contribuer à détendre l’atmosphère. Il est donc un facteur d’aération des esprits surchauffés dans cette cour coloniale.
Gbagbo comme/ou Queneau
Raymond Queneau a longtemps souffert de sa réputation d’humoriste qui a contribué à lui retirer le crédit et le sérieux. Pourtant, dans Les Fleurs bleues, ce romancier, poète, et dramaturge se place sous le patronage de Rabelais pour montrer qu’on peut traiter les sujets les plus importants sous la forme la plus drôle. Conclusion, a la CPI, les porteurs de robes noirs ou bleus qui ne sont que « des malhonnêtes » comme les dénonce Christian Velpri devraient rire un peu plus de temps en temps.
Cuno Tarfusser et Eric Mc Donald devraient s’évertuer à analyser les preuves des parties, à se saisir des vrais assassins internes et externes des Ivoiriens, au lieu de tremper dans le dilatoire. Car il n’y a rien de marrant dans leur singerie sous des robes. Et un rire joyeux n’est pas un crime.
Par Dr Feumba Samen
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