Court-circuit en Françafrique : Ouattara refuse de “recycler” en Côte d’Ivoire les militaires français chassés du Burkina [ Par Ndam Njoya Nzoméné]

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Chassés bruyamment du Mali et décidément entité non grata dans bien de pays francophones d’Afrique de l’Ouest où les opinions publiques –certes chauffées à blanc par  des activistes russophiles et résolument poutinophiles- n’ont plus de cesse de leur indiquer la porte de sortie,  les militaires français déployés dans la région du Sahel surfent dernièrement sur les eaux houleuses de la malchance.

La dernière en date, c’est le point de chute ivoirien que la France aurait cru acquis pour les forces françaises récemment renvoyées du “Pays des hommes intègres”, qui se dérobe très visiblement sous les pieds du contingent français SABRE.

Ainsi, malgré  l’important don de matériels militaires (33 véhicules, 27 jumelles de vision nocturne et 22 radios de transmission) fait par les ” Les Forces armées Françaises en Côte d’Ivoire (FAFCI] ” à l’Etat-Major général des forces armées ivoiriennes, et en dépit des bons sentiments français déclamés par le ministre hexagonal des Armées, Sébastien Lecornu, lors des entretiens qu’il a eus le 20 février dernier à Abidjan, respectivement avec son homologue ivoirien Téné Ibrahima Ouattara et le président ivoirien, Alassane Dramane Ouattara, les dirigeants éburnéens ne se sont pas montrés particulièrement enthousiastes quant à l’accueil du contingent militaire français  chassé du pays de Thomas Sankara par le capitaine Ibrahim Traoré.

En effet, si l’objet de la visite de monsieur Lecornu en Côte d’Ivoire il y a cinq jours a tourné officiellement autour des besoins sécuritaires exprimés de ce pays d’Afrique de l’Ouest (formation d’unités constituées,  modernisation des moyens et techniques de défense,  entretien du matériel,  facilitation des relations entre la défense ivoirienne et les entreprises françaises spécialisées dans l’armement, création d’un centre de mise en condition du combattant et de gestion des blessés), la véritable raison serait  la poursuite des pourparlers entre Abidjan et Paris au sujet de ce que des analystes un peu sarcastiques sur les bords qualifient de “recyclage de la task force Sabre décrétée indésirable par Ouagadougou qui l’a mise à la porte mi-janvier 2023”.
Le président français Emmanuel Macron en avait fait la proposition à son homologue ivoirien fin janvier dernier, lors d’un déjeuner entre les deux hommes d’Etat à Paris, mais l’Ivoirien s’était montré d’une tiédeur… quoiqu’ayant négligemment alludé d’un possible fléchissement pouvant se traduire par l’accueil des 2/3 des forces françaises chassées. Sans promesse ferme pour autant.

Sans doute instruit par les précédents malheureux qui ont emporté quelques-uns de ses anciens homologues ouest-africains (feu Ibrahim Boubakar Keita du Mali,   Roch Christian Kaboré du Burkina, suivi quelques mois plus tard par son tombeur, le Lieutenant-Colonel Paul Henri Damiba Sandaogo-, ont payé cher leur résistance à l’exigence exprimée par leurs populations de rompre la coopération militaire avec la France), le président Ouattara qui redoute donc les syndromes malien et burkinabé ne déborde pas d’exhaltation pour cette option au sujet de laquelle le présidentMacron, via Lecornu tente de le relancer, lui dont le régime -originellement issu d’un regrettable hold-up orchestré par la France avec la bénédiction de l’ONU- n’est pas si apprécié.

Eviter les erreurs des IBK, Kaboré, sandaogo et autres

Il ne fait l’ombre d’aucun doute que dans le cadre de sa croisade pour éjecter la France de ce théâtre d’influence et d’influences qu’est l’Afrique, les stratèges poutiniens de la Russie ont mis sur pied un plan d’action consistant à chasser les dirigeants qui, en plus d’être pro-France, ont également le désavantage d’être impopulaires. Cela passe par l’instrumentalisation des populations envoyées en éclaireurs pour demander à cors et à cris le départ de la France, avant de céder la place à l’armée -au sein de laquelle Moscou a déjà établi une cinquième colonne prête à agir dès que possible-, qui intervient alors en (pseudo) “libérateur du peuple oprimé par ses dirigeants sous influence française” .

Ouattara le sait donc, et préfère ne pas prendre le risque de donner du grain à moudre aux activistes encore silencieux de son pays, qui n’attendent que le prétexte, pour se soulever à leur tour contre cette présence française à l’origine du renversement effroyable de Laurent Gbagbo en 2011, subséquemment au plus long et plus sanglant coup d’Etat jamais vu au monde (19 septembre 2002-11 avril 2011).

Selon notre confrère Jeune Afrique,  les discussions à propos de cet accueil du contingent Sabre pourraient trouver une issue d’ici le mois d’août prochain. En attendant, ses soldats vont devoir regagner la France.

A se demander alors pourquoi les discussions devraient se prolonger au sujet de l’hébergement en Côte d’Ivoire des soldats français en plus de ceux qui s’y trouvent déjà dans le cadre des FAFCI. A moins que dans le cadre d’un agenda caché, la France se soit enfin résolue à se déployer militairement à partir de la Côte d’Ivoire contre la Russie qui lui ravit le terrain en Afrique au jour le jour par l’installation progressive sur le continent de régimes « messianiques », sinon plus, du moins aussi totalitaires que ceux exerçant sous le tutorat de l’Hexagone.

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