Côte d’Ivoire: Le bazar des houphouëtistes

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Des journées de réflexion sur la philosophie d’Houphouët-Boigny et d’hommage aux présidents Bédié et Ouattara avaient été organisées le jeudi 26 mars 2015 à la Fondation Félix Houphouët-Boigny pour la paix de Yamoussoukro.

Des expositions photos et des projections de films sur la vie familiale, le parcours scolaire, professionnel et politique des présidents Félix Houphouët-Boigny et Henri Konan Bédié avaient égayé ces journées là. Mais un grand malaise a été constaté : aucune photo du président Alassane Dramane Ouattara n’a été exposée. Aucune ! Là où cent-trente anciens compagnons de Félix Houphouët-Boigny, premier président de la Côte d’Ivoire avaient reçu le prix Abla Pokou de la paix. Cela m’a fait réfléchir beaucoup sur la vie du président Alassane Dramane Ouattara. Pourquoi ce grand silence sur la vie de celui qui, au nom d’Houphouët, s’est allié au (Pdci-Rda)[1], pour conquérir le pouvoir ? Si Houphouët ne faisait pas aujourd’hui l’objet d’un culte presque unanime, j’aurais peut-être hésité à mettre en cause certains aspects de son caractère et de son action, de peur de pécher par injustice. Sans souci de plaire ou d’exaspérer, je veux simplement apporter la contribution d’un homme amer parce que profondément déçu.

Déçu d’un système, déçu d’une doctrine, déçu de ce que tout un peuple refuse de s’interroger sur cette doctrine nommée houphouëtisme qui est à la base du chancellement de toute une nation, de toute une société, depuis des décennies et qui continue dans sa logique tyrannique d’avilir tout un peuple. Pourquoi tant d’intellectuels ivoiriens refusent d’opposer une seule contradiction à l’houphouëtisme au point que dans la conscience collective, Houphouët est le démiurge, le prédestiné, seul capable d’imaginer et de construire la Côte d’Ivoire avec une doctrine obscurantiste, antidémocratique et tyrannique. Je devine les protestations, la colère, l’indignation des nostalgiques de l’autorité, des frénétiques du prestige…

Si personne ne combat en Côte d’Ivoire pour protéger la vérité et la justice, elles risquent d’être détruites par les mensonges des houphouëtistes. Et le silence des Ivoiriens au sujet d’Houphouët n’a fait que prospérer un mensonge qui continue de gangréner la Côte d’Ivoire. Or le silence peut souvent mener à la défaite. L’houphouëtisme, cette doctrine créée par Houphouët continue d’influencer négativement le cours de l’histoire de la Côte d’Ivoire. Houphouët a été momifié, canonisé et immortalisé au nom de cette doctrine. Cette doctrine et son fondateur qui éblouissent les observateurs parce qu’ils dissimulent une tyrannie sous un maquillage de paix. Jusqu’en 1993, Houphouët a régné en maitre absolu, en tyran sur la Côte d’Ivoire. Pendant quarante-trois ans, ses militants ont violé psychiquement le peuple de Côte d’Ivoire, en imprimant dans leur structure mentale qu’Houphouët demeure un démiurge qui devrait être cité dans les récits cosmologiques et cosmogoniques des peuples de Côte d’Ivoire. Ce viol psychique collectif s’est aussi matérialisé à travers l’assassinat aussi collectif et massif de tous ceux dont les écailles tombées des yeux, avaient pu voir la laideur et la nudité d’Houphouët et sa doctrine.

Le peuple Sanwi[2] au sud de la Côte d’Ivoire par exemple, a très tôt payé cher le fait que, quelques uns de ses fils ayant découvert le coté avilissant de l’houphouëtisme lié au colonialisme français, décidèrent de s’attacher à la Gold Coast colonisée par les Anglais. La réaction d’Houphouët fut alors brutale, impitoyable et sanguinaire contre le peuple Sanwi: le Sanwi fut ravagé par l’une des plus vives répressions jamais connues en Afrique de l’Ouest avec l’aide de l’armée française sollicitée par Houphouët. Et le Sanwi se soumit contre son gré et le Sanwi s’attacha contre son gré à la Côte d’Ivoire et au système français. Aucun livre d’histoire ne parle de la répression sanglante du peuple Sanwi et du massacre de ses braves fils. Même le peuple Sanwi n’en parle pas de peur d’être la cible de la tyrannie des houphouëtistes. L’autre manifestation de la doctrine houphouëtiste contre le peuple de Côte d’Ivoire a été contre le peuple Guébié de Gagnoa (centre-ouest de la Côte d’Ivoire).

En effet, en 1970, Gnangbé Kragbé, un Guébié[3], (ethnie appartenant au sous groupe bété de Laurent Gbagbo), séduit par la révolution française, la révolution de la France de Victor Hugo, de Marat, de Danton, de Robespierre, de Napoléon, de Talleyrand, avait osé parler de multipartisme et créer son propre parti politique, le PANA. Ayant vécu en France, Gnangbé Kragbé avait été épaté par la célèbre devise de la République de France, « Liberté, Egalité, fraternité » qui est aussi proclamée dans la Déclaration des Droits de l’Homme et qui a contribué au développement de la démocratie. Pour lui, ce bel exemple démocratique et du respect des droits de l’Homme, pourrait aussi libérer son peuple et contribuer au développement de la Côte d’Ivoire. Quand Houphouët eut vent de cette révolution positive, cette initiative qui allait affranchir le peuple de Côte d’Ivoire, il préféra tuer le poussin dans l’œuf. Gnangbé Kragbé a été assassiné, tout le peuple Guébié massacré. Et depuis 1970 aucun historien sérieux n’a jamais dit ce qui s’est réellement passé. Certains historiens ont été chèrement payés pour falsifier la mémoire de Gnangbé Kragbé comme cela se fait encore en Côte d’Ivoire. La falsification de l’histoire au profit des vainqueurs de la crise de 2000 en Côte d’Ivoire en est une preuve palpable. Les houphouëtistes, les doigts dans le nez, continuent de noircir l’histoire de la Côte d’Ivoire sous les yeux des intellectuels. Depuis 1960, la Côte d’Ivoire est gouverné sur du faux…

Depuis 1970, on ne parla plus de multipartisme que dans la clandestinité alors qu’au Sénégal le multipartisme battait son plein. Tous ceux qui tentaient de faire manger ce totem appelé multipartisme, au « Vieux », étaient jetés en prison et pour les moins chanceux, assassinés. C’était cela la démocratie à l’ivoirienne prônée par Félix Houphouët Boigny avec la complicité de la classe politique française. La démocratie selon l’houphouëtisme c’est une dictature, une oligarchie, une tyrannie. C’est ça ! Sous un régime houphouëtiste, les prisons se multiplient, les libertés sont confisquées et les exilés politiques se multiplient. Aujourd’hui, sous le président Alassane Dramane Ouattara, les prisons ivoiriennes sont pleines des opposants politiques et des milliers d’exilés politiques continuent de courir à travers le monde. Un vrai bazar politique !

Houphouëtisme, en voilà du flafla ! On continue d’étouffer les Ivoiriens avec une doctrine aussi obscurantiste, avilissante, liberticide, oligarchique. Doctrine contre l’intérêt des Ivoiriens…Voici donc ce que sont en réalité les houphouëtistes qui gouvernent aujourd’hui la Côte d’Ivoire à travers le Rassemblement des houphouëtistes pour la paix et la démocratie (RHDP[4]). Si le peuple de Côte d’Ivoire savait par quels petits hommes il est gouverné ! Observons ensemble ce qui se passe depuis le début de cette année 2017 et nous serons convaincus la maladresse des houphouëtistes, le manque de culture démocratique des houphouëtistes. Nous comprendrons que l’houphouëtisme n’a aucun égard pour son peuple. Il ne comprend que le langage de la violence, le langage des armes. Il faut savoir qu’à certains moments, le silence peut mener à la défaite. Il est alors temps que les intellectuels ivoiriens se mobilisent pour apporter la lumière sur l’houphouëtisme, cette doctrine tyrannique qui est à la base des malheurs du peuple silencieux.

Ce qui se passe en ce début d’année 2017 en Côte d’Ivoire, témoigne bien des maladresses de cette doctrine avilissante parce que basée sur le mensonge et la dictature. Le président Dramane Ouattara va-t-il sacrifier les fonctionnaires ivoiriens contre 8500 soldats qu’il avait armés en 2010 contre Laurent Gbagbo ? C’est la question que tout le monde se pose. En tout cas, pour 2017, c’est un véritable pavé dans la marre aux grenouilles en Côte d’Ivoire. La revendication de 8500 soldats. L’ardoise est longue ! 12 millions de fcfa pour chaque soldat !

Le gouvernement a plié l’échine en ouvrant le dialogue avec ces mutins parce que, eux, ils ont des armes qui peuvent renverser un régime. Quant aux fonctionnaires qui revendiquent les mains vides, ils peuvent battre le pavé aussi longtemps qu’ils peuvent. Les houphouëtistes ont l’habitude de narguer leur peuple là où un régime démocratique vénère son peuple. Les planteurs ivoiriens de cacao pleurent depuis le début du mois de décembre 2016. Le cacao ne s’achète plus. Plusieurs familles ont mal passé les fêtes de fin d’année. On se demande alors où est cette embellie économique dont parlent les médias occidentaux ? Gouverner par le mensonge c’est l’une des techniques de l’houphouëtisme. Or on ne peut pas toujours mentir au peuple. C’est de la tyrannie. A-t-on besoin d’astrologue pour prédire l’avenir de la Côte d’Ivoire pour l’année 2017 ? Le bazar des houphouëtistes continue avec la mauvaise gouvernance en Côte d’Ivoire. Une tyrannie qui ruine l’espoir des Ivoiriens.

Colbert Kouadjo
Journaliste-écrivain

[1] Parti démocratique de Côte d’Ivoire créé par Félix Houphouët Boigny, parti unique en Côte d’Ivoire jusqu’en 1990.
[2] Peuple de l’est de la Côte d’Ivoire, du groupe Kwa parlée au Ghana et en Côte d’Ivoire appartenant au groupe Agni. Aboisso est la principale ville du Sanwi.

[3] Ethnie du groupe Bété au centre-ouest de la Côte d’Ivoire, dont est membre de Laurent Gbagbo détenu à la Haye.
[4] Rassemblement des Houphouëtistes pour le développement et la paix , regroupement politique composé des partis politiques partageant la doctrine de l’houphouétisme.

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