Le patron de l’ex-rébellion armée, par ailleurs actuel premier ministre d’Alassane Ouattara, Guillaume Kigbafory Soro, se fait de moins en moins visible et audible ces derniers temps. Son «omniprésence» sur les écrans de la Rti s’est évaporée. La ligne semble s’être brouillée entre l’«excellent premier ministre» et le chef de l’Etat, aux lendemains de la visite d’Hillary Clinton. Une situation aggravée par l’imminence d’un semblant d’équilibrisme au niveau de la Cpi, le sacrifice de la «légion Soro».
‘‘Mais où est le premier ministre ? Il n’est pas au pays ? Soro est où ? ». Sont-ce là autant de questions qui fusent de partout. En tout cas, le premier ministre Guillaume Soro n’a pas bougé d’un iota. Il est bel et bien présent dans la capitale abidjanaise. Les Ivoiriens avaient fini par s’habituer aux incessantes visites, tournées et cérémonies d’inauguration hyper médiatisées par-ci et par-là du chef du gouvernement, dénommées ironiquement dans le milieu de la presse ivoirienne «les jeudis de Soro» (puisque généralement c’est les jeudis qu’il effectuait ses visites). Qui tenait ainsi à faire passer le message selon lequel le régime Ouattara est au travail pour le bonheur des Ivoiriens. Où cette débauche d’énergie du jeune premier ministre va s’estomper, c’est après la visite de la Secrétaire d’Etat américaine Hillary Rodan Clinton. Qui selon des sources diplomatiques a demandé au chef de l’Etat d’étudier la probabilité du transfèrement des hommes de Soro, certaines langues vont jusqu’à citer le nom du premier ministre comme figurant dans la short list des éligibles à la CPI.
En tout cas la deuxième quinzaine du mois de janvier sera particulière. Le premier ministre a-t-il pris un coup, après la fuite diplomatique sur la volonté de Washington de voir des pro-Ouattara à la Cpi ? On est tenté de répondre par l’affirmative. Puisque 48 heures plus tard, Guillaume Soro a annulé à la dernière minute, une visite de terrain qu’il devrait effectuer le jeudi 19 janvier dernier. Les jours qui suivront ne seront pas différents. Guillaume Soro va jouer le mort, pour laisser place à la supputation. Sa véritable apparition «publique » date du mercredi 25 janvier dernier, où il recevait les voeux de ses collaborateurs et agents de la primature. Puis, plus rien. Le mardi 31 janvier, pour tuer une éventuelle grève des syndicats de la santé, le premier ministre a laissé la main à son conseiller chargé des associations et syndicats, Félicien Sékongo, pour désamorcer la bombe. Guillaume Soro semble avoir d’autres chats plus gros à fouetter en ce moment. C’est donc en «politologue» averti (sic !), qu’il peaufine très certainement une stratégie d’approche de ce virage inévitable, le revers de la médaille CPI. Le député de Ferké qui s’est frotté à l’animal politique qu’est Laurent Gbagbo, n’entend pas être pris au piège de la justice des vainqueurs, dont il est pourtant un acteur clé. De leurs côtés, les ex-Com’zones, même s’ils ne le crient pas à tue-tête, redoutent de faire partie du «peloton des sacrifiés». Chaque clan y allant de sa stratégie. Une chose est sure, Ouattara bénéficie du soutien et de la protection de son parrain Nicolas Sarkozy, pour aborder peut-être sereinement d’éventuels secousses liées à l’opération CPI. Mais, il est à parier que c’est Paris qui a soufflé à Ouattara de tenter de faire baisser la tension, en proposant d’éviter le transfèrement d’autres personnalités proches de Gbagbo, afin de jouer la carte de la compensation des seconds couteaux de son camp qu’il s’apprêterait à «offrir» en sacrifice à la justice internationale. Au plan national, tout n’est pas fait pour arranger la cohabitation primature-présidence.
Puisque selon toute vraisemblance et certaines indiscrétions, en l’absence du «chef» Ouattara, il apparait évident que le pays est conduit par son «premier ministre bis », le français Philippe Serrey Eifel, par ailleurs patron de ses conseillers au Palais. Une situation qui n’est pas faite pour plaire à Guillaume Soro, qui ne cache pas son mécontentement vis-à-vis de cette situation. Soro qui voit son fauteuil menacé la nuit et solidifié le jour, ne pensait pas connaitre pareille traitement avec l’homme qu’il a aidé à prendre le pouvoir. Mais il ne semble pas avoir dit son dernier mot. Aux dernières nouvelles, Guillaume Soro qui devrait se rendre à Malabo pour soutenir les Eléphants qui affrontent en ¼ de finale la sélection équato-guinéenne ce samedi, ne va vraisemblablement plus effectuer le déplacement. Selon son entourage, le premier ministre aurait décidé en définitive de n’effectuer le déplacement pour la Can qu’en cas de qualification des Pachydermes pour l’étape des demi-finales. A coup sûr, le report du voyage de Guillaume Soro, s’il se confirme, va finir par alimenter les rumeurs les plus folles.
Le Nouveau Courrier